La jeunesse en Algérie
Crainte et négligée
La majorité des jeunes ne fait pas confiance aux institutions publiques ni aux discours politiques. Les mauvaises relations entre les jeunes, les institutions et la tranche du troisième âge, le manque de confiance et de dialogue entre les deux générations sont à l’origine d’un sentiment d’injustice qui met ce potentiel humain dans un tunnel de désespoir et d’insécurité sociale.
Harga, chômage, problème de logement, désespoir, corruption, anarchisme, bureaucratie, malvie, marginalisation, sont des réalités à ne pas cacher ni à camoufler pour la population juvénile qui a du mal a construire son avenir.
C’est inquiétant, stressant et blessant, mais cela ne cachera pas cette force et son désir d’assumer, comme les autres générations, son rôle au sein de la société et dans le développement de son pays. Les relations entres institutions publiques, le troisième âge et les jeunes ne sont pas bonnes. Le manque de confiance est réciproque (qu’il soit justifié ou non) entres les trois parties. Les associations de jeunes qui activent à travers le territoire national, et qui sont censées défendre les intérêts de la classe juvénile auprès des décideurs du pays, ne jouent pas leur rôle. Aussi, les jeunes attendent encore la mise en place d’une politique qui prendra en charge leur souffrance.
Les jeunes n’ont pas les mêmes chances en matière d’emploi. Les compétences ne sont pas toujours prises en considération dans le recrutement, ce sont les relations personnelles et familiales qui procurent du travail. Les statistiques de l’Office national des statistiques (ONS) sur le mode d’accès au travail en Algérie montrent que 40,6% des travailleurs ont eu recours à leurs relations pour trouver un poste de travail.
La cœxistence entre les deux générations est indispensable sur tous les plans, qu’ils soient politique, économique ou social, du moment que l’ancienne génération possède la sagesse et l’expérience, et que la deuxième dispose de la santé et de la jeunesse et un désir plus fort de prendre les choses en main. Dans la société comme dans les institutions publiques, entre la force de la jeunesse et celle de la génération précédente naissent des oppositions qui ne servent en aucun cas les jeunes qui souhaitent réunir les conditions d’un climat social équilibré. Par ailleurs, la présence des jeunes est très faible dans les institutions publiques et totalement absente sur la scène politique. On peut comprendre, donc, que les dossiers qui concernent la jeunesse sont traités en l’absence de cette tranche qui est la plus habilitée et qualifiée à exposer ses propres problèmes. Arous Zoubir, sociologue et chercheur au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement, estime que le jeune Algérien est marginalisé politiquement et culturellement.
«La jeunesse est une question socioéconomique et culturelle. Il faut cesser de regarder cette tranche comme un pourcentage. Les jeunes ont leur langue et leur code social spécial que ne peut comprendre la génération du troisième âge. Le conflit des générations est la conséquence d’un regard des choses en analogie, alors que les valeurs et les besoins de chaque génération sont différents».
Un groupe d’étudiants rencontrés à l’université de Bouzaréah va jusqu’à dire qu’ils souffrent du sadisme de leurs professeurs. «Ils trouvent du plaisir à nous faire souffrir. Sur une centaine d’étudiants, seulement une dizaine aura sa moyenne ; ils nous donnent de mauvaises notes pour montrer que ce sont de bons enseignants, alors que nous avons des bonne notes quand il s’agit d’enseignants compétents», déplore Nabil. Son camarade Hocine, qui vient de terminer son mémoire de fin d’étude, ajoute que son encadreur ne se fiche pas mal de son travail «copier-coller» : «On est mal encadré à l’université. De plus, je n’ai pas cherché moi-même à me casser la tête en préparant mon mémoire. Le bon travail n’est pas encouragé ni récompensé par l’administration. Ils ne méritent pas que je leur laisse un travail original pour le garder dans leur bibliothèque». Hocine, qui semble impatient de quitter l’université, nous raconte encore que le site Google est le résultat d’une thèse établie par un groupe d’étudiants auc Etat-Unis. Un autre étudiant du même groupe ajoute que «notre politique fait confiance aux Chinois et aux investisseurs étrangers et n’encourage pas la recherche scientifique dans le pays. Ont fait confiance aux étrangers en les invitant à investir en Algérie. Aussi, nous les jeunes, nous ne pourrons pas faire confiance à leur politique».
A chacun sa part de responsabilité
La plupart des jeunes regardent que le mauvais sens et ne discute que sur le plan négatif des choses. Le phénomène de l’émigration clandestine est certainement un signe de désespoir mais aussi d’une fuite en avant qui laisse à discuter sur la personnalité de ceux qui courent derrière un rêve fou et fugitif. Parmi ces harraga, des jeunes qui n’ont pas fait des efforts pour retrouver leur équilibre en Algérie, alors qu’ils le cherchent en vain ailleurs. Beaucoup de jeunes trouvent toujours à qui coller leur faiblesse et incompétence. Leurs critiques et accusations vont droit au pouvoir, sinon aux autres institutions. Ils dramatisent encore la situation en se complaisant dans leurs problèmes. En quelque sorte, ils ne veulent pas sortir de la crise. Beaucoup de jeunes sans activité refusent certains métiers et préfèrent chômer que de s’engager dans des métiers durs. Une autre catégorie de jeunes veut imiter un mode de vie occidentale sans passer par les étapes qui y conduisent. Personne ne se sent coupable dans la crise. Tout le monde parle des droits en négligeant ses devoirs, on se plaint des problèmes sans proposer de solutions. C’est ainsi que chacun veut fuir sa responsabilité en culpabilisant les autres, la crise étant l’affaire de tous et chacun a sa part de responsabilité
La jeunesse est un autre projet de réconciliation auquel il faudrait dès maintenant penser pour stopper sa dérive, et ce, par le dialogue, la confiance et la reconnaissance de ses droits. Ces jeunes ont dans les mains les clés de la réussite, mais le passage ne leur a pas encore été cédé. Leur cri de rage est aussi un cri de changement et de prospérité qui se dessine à l’horizon.
Un cri qui sollicite l’écoute d’une volonté politique qui devrait introduire sérieusement cette tranche dans ses projets. Les richesses naturelles rentables ne pourront pas servir le développement national comme le ferait cette richesse humaine. Il s’agit juste d’une volonté collective sincère et courageuse, voilà tout.
Par Yasmine Ayadi
La jeunesse en chiffres
75% de la population algérienne est jeune. Selon les dernières statistiques de l’Office national des statistiques (ONS), le chômage touche particulièrement les jeunes ayant moins de 35 ans, ils constituent la majeure partie des sans-emploi avec un taux de 87,8%. Les données de la LADDH montrent que plus de 36 000 Algériens ont tenté l’aventure de la harga dont 3 000 ont trouvé la mort. Jusqu’à aujourd’hui, l’année 2008 reste la pire de toutes pour la jeunesse algérienne, vu l’augmentation des tentatives d’émigration clandestine. 4 000 clandestins sont détenus en Espagne et des milliers d’autres dans des prisons européennes. 6 mois de prison ferme, une amende de 20 000 DA, est l’une parmi les nombreuses peines requises, avant-hier, par le tribunal de Annaba, à l’encontre de 18 harraga dont 3 mineurs. Ce groupe avait été sauvé le 10 mai 2009. Le bilan provisoire des services de sécurité a fait état de près de 500 harraga interceptés durant ces cinq premiers mois de l’année 2009.
à suivre...
Crainte et négligée
La majorité des jeunes ne fait pas confiance aux institutions publiques ni aux discours politiques. Les mauvaises relations entre les jeunes, les institutions et la tranche du troisième âge, le manque de confiance et de dialogue entre les deux générations sont à l’origine d’un sentiment d’injustice qui met ce potentiel humain dans un tunnel de désespoir et d’insécurité sociale.
Harga, chômage, problème de logement, désespoir, corruption, anarchisme, bureaucratie, malvie, marginalisation, sont des réalités à ne pas cacher ni à camoufler pour la population juvénile qui a du mal a construire son avenir.
C’est inquiétant, stressant et blessant, mais cela ne cachera pas cette force et son désir d’assumer, comme les autres générations, son rôle au sein de la société et dans le développement de son pays. Les relations entres institutions publiques, le troisième âge et les jeunes ne sont pas bonnes. Le manque de confiance est réciproque (qu’il soit justifié ou non) entres les trois parties. Les associations de jeunes qui activent à travers le territoire national, et qui sont censées défendre les intérêts de la classe juvénile auprès des décideurs du pays, ne jouent pas leur rôle. Aussi, les jeunes attendent encore la mise en place d’une politique qui prendra en charge leur souffrance.
Les jeunes n’ont pas les mêmes chances en matière d’emploi. Les compétences ne sont pas toujours prises en considération dans le recrutement, ce sont les relations personnelles et familiales qui procurent du travail. Les statistiques de l’Office national des statistiques (ONS) sur le mode d’accès au travail en Algérie montrent que 40,6% des travailleurs ont eu recours à leurs relations pour trouver un poste de travail.
La cœxistence entre les deux générations est indispensable sur tous les plans, qu’ils soient politique, économique ou social, du moment que l’ancienne génération possède la sagesse et l’expérience, et que la deuxième dispose de la santé et de la jeunesse et un désir plus fort de prendre les choses en main. Dans la société comme dans les institutions publiques, entre la force de la jeunesse et celle de la génération précédente naissent des oppositions qui ne servent en aucun cas les jeunes qui souhaitent réunir les conditions d’un climat social équilibré. Par ailleurs, la présence des jeunes est très faible dans les institutions publiques et totalement absente sur la scène politique. On peut comprendre, donc, que les dossiers qui concernent la jeunesse sont traités en l’absence de cette tranche qui est la plus habilitée et qualifiée à exposer ses propres problèmes. Arous Zoubir, sociologue et chercheur au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement, estime que le jeune Algérien est marginalisé politiquement et culturellement.
«La jeunesse est une question socioéconomique et culturelle. Il faut cesser de regarder cette tranche comme un pourcentage. Les jeunes ont leur langue et leur code social spécial que ne peut comprendre la génération du troisième âge. Le conflit des générations est la conséquence d’un regard des choses en analogie, alors que les valeurs et les besoins de chaque génération sont différents».
Un groupe d’étudiants rencontrés à l’université de Bouzaréah va jusqu’à dire qu’ils souffrent du sadisme de leurs professeurs. «Ils trouvent du plaisir à nous faire souffrir. Sur une centaine d’étudiants, seulement une dizaine aura sa moyenne ; ils nous donnent de mauvaises notes pour montrer que ce sont de bons enseignants, alors que nous avons des bonne notes quand il s’agit d’enseignants compétents», déplore Nabil. Son camarade Hocine, qui vient de terminer son mémoire de fin d’étude, ajoute que son encadreur ne se fiche pas mal de son travail «copier-coller» : «On est mal encadré à l’université. De plus, je n’ai pas cherché moi-même à me casser la tête en préparant mon mémoire. Le bon travail n’est pas encouragé ni récompensé par l’administration. Ils ne méritent pas que je leur laisse un travail original pour le garder dans leur bibliothèque». Hocine, qui semble impatient de quitter l’université, nous raconte encore que le site Google est le résultat d’une thèse établie par un groupe d’étudiants auc Etat-Unis. Un autre étudiant du même groupe ajoute que «notre politique fait confiance aux Chinois et aux investisseurs étrangers et n’encourage pas la recherche scientifique dans le pays. Ont fait confiance aux étrangers en les invitant à investir en Algérie. Aussi, nous les jeunes, nous ne pourrons pas faire confiance à leur politique».
A chacun sa part de responsabilité
La plupart des jeunes regardent que le mauvais sens et ne discute que sur le plan négatif des choses. Le phénomène de l’émigration clandestine est certainement un signe de désespoir mais aussi d’une fuite en avant qui laisse à discuter sur la personnalité de ceux qui courent derrière un rêve fou et fugitif. Parmi ces harraga, des jeunes qui n’ont pas fait des efforts pour retrouver leur équilibre en Algérie, alors qu’ils le cherchent en vain ailleurs. Beaucoup de jeunes trouvent toujours à qui coller leur faiblesse et incompétence. Leurs critiques et accusations vont droit au pouvoir, sinon aux autres institutions. Ils dramatisent encore la situation en se complaisant dans leurs problèmes. En quelque sorte, ils ne veulent pas sortir de la crise. Beaucoup de jeunes sans activité refusent certains métiers et préfèrent chômer que de s’engager dans des métiers durs. Une autre catégorie de jeunes veut imiter un mode de vie occidentale sans passer par les étapes qui y conduisent. Personne ne se sent coupable dans la crise. Tout le monde parle des droits en négligeant ses devoirs, on se plaint des problèmes sans proposer de solutions. C’est ainsi que chacun veut fuir sa responsabilité en culpabilisant les autres, la crise étant l’affaire de tous et chacun a sa part de responsabilité
La jeunesse est un autre projet de réconciliation auquel il faudrait dès maintenant penser pour stopper sa dérive, et ce, par le dialogue, la confiance et la reconnaissance de ses droits. Ces jeunes ont dans les mains les clés de la réussite, mais le passage ne leur a pas encore été cédé. Leur cri de rage est aussi un cri de changement et de prospérité qui se dessine à l’horizon.
Un cri qui sollicite l’écoute d’une volonté politique qui devrait introduire sérieusement cette tranche dans ses projets. Les richesses naturelles rentables ne pourront pas servir le développement national comme le ferait cette richesse humaine. Il s’agit juste d’une volonté collective sincère et courageuse, voilà tout.
Par Yasmine Ayadi
La jeunesse en chiffres
75% de la population algérienne est jeune. Selon les dernières statistiques de l’Office national des statistiques (ONS), le chômage touche particulièrement les jeunes ayant moins de 35 ans, ils constituent la majeure partie des sans-emploi avec un taux de 87,8%. Les données de la LADDH montrent que plus de 36 000 Algériens ont tenté l’aventure de la harga dont 3 000 ont trouvé la mort. Jusqu’à aujourd’hui, l’année 2008 reste la pire de toutes pour la jeunesse algérienne, vu l’augmentation des tentatives d’émigration clandestine. 4 000 clandestins sont détenus en Espagne et des milliers d’autres dans des prisons européennes. 6 mois de prison ferme, une amende de 20 000 DA, est l’une parmi les nombreuses peines requises, avant-hier, par le tribunal de Annaba, à l’encontre de 18 harraga dont 3 mineurs. Ce groupe avait été sauvé le 10 mai 2009. Le bilan provisoire des services de sécurité a fait état de près de 500 harraga interceptés durant ces cinq premiers mois de l’année 2009.
à suivre...
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