L’alcool, la douleur et le remède
Qu’elle obéisse à une directive prise en haut lieu ou qu’elle soit l’œuvre de walis zélés, la campagne antibars, en cours actuellement à l’échelle nationale, n’a aucune chance d’annihiler ou de réduire drastiquement la consommation d’alcool dans le pays, si tant est l’objectif recherché. Un chiffre livré à la revue Partenaires par le directeur général de Algerian All Drinks l’atteste : la consommation de bière a connu une croissance de 6% en 2008 et le chiffre d’affaires de certaines brasseries a connu cette année-là une hausse de 40%. Le harcèlement des bars accompagné de la traque des consommateurs dans les wilayas prohibitrices a pris de l’ampleur ces dernières années, évoluant au gré des concessions politiques faites à l’islamisme. Mais l’instrumentalisation de ce problème n’a pas réglé la question de la consommation d’alcool dans le pays qui répond, elle, à d’autres logiques. Tout le monde sait que les endroits de forte consommation ne sont pas les bars ou les restaurants mais les bords des oueds, les forêts, les caves d’immeubles, les jardins publics et tout autre lieu se distinguant par l’isolement, notamment la nuit. S’il est assuré par quelques revendeurs légalement installés et ayant échappé à la fermeture par l’administration ou par la pression sociale, l’approvisionnement est davantage le fait de circuits informels qui prospèrent, notamment à l’intérieur du pays.
Si pour certains consommateurs – en nombre réduit du fait de l’interdit religieux – l’alcool est synonyme de convivialité, pour d’autres en revanche – et ils sont légion – il est vécu comme un remède à leur douleur, éphémère il est vrai, mais suffisant à leurs yeux pour que le temps d’une soirée s’installe de l’apaisement. L’alcool est une clinique, pour eux, dans un pays où la plupart des horizons sont bouchés : chômage ravageur, mal vie, frustrations de toutes sortes générées par le déploiement de richesses inaccessibles. C’est donc là que se situe le vrai problème et où doivent intervenir les bonnes volontés, en premier celles de la sphère politique. Blâmer, diaboliser, réprimer comme le fait la société de manière générale et le font diverses autorités officielles est contreproductif, voire dangereux, car cela ne fait qu’aggraver le mal ou le déplacer vers la consommation des drogues dures que sont le kif, la cocaïne, l’héroïne. Comme dans plusieurs autres pays, la question de la prévention de l’alcoolisme doit relever d’une politique spécifique de santé publique privilégiant en premier lieu la pédagogie.
Par Ali Bahmane
Source /El Watan .
Qu’elle obéisse à une directive prise en haut lieu ou qu’elle soit l’œuvre de walis zélés, la campagne antibars, en cours actuellement à l’échelle nationale, n’a aucune chance d’annihiler ou de réduire drastiquement la consommation d’alcool dans le pays, si tant est l’objectif recherché. Un chiffre livré à la revue Partenaires par le directeur général de Algerian All Drinks l’atteste : la consommation de bière a connu une croissance de 6% en 2008 et le chiffre d’affaires de certaines brasseries a connu cette année-là une hausse de 40%. Le harcèlement des bars accompagné de la traque des consommateurs dans les wilayas prohibitrices a pris de l’ampleur ces dernières années, évoluant au gré des concessions politiques faites à l’islamisme. Mais l’instrumentalisation de ce problème n’a pas réglé la question de la consommation d’alcool dans le pays qui répond, elle, à d’autres logiques. Tout le monde sait que les endroits de forte consommation ne sont pas les bars ou les restaurants mais les bords des oueds, les forêts, les caves d’immeubles, les jardins publics et tout autre lieu se distinguant par l’isolement, notamment la nuit. S’il est assuré par quelques revendeurs légalement installés et ayant échappé à la fermeture par l’administration ou par la pression sociale, l’approvisionnement est davantage le fait de circuits informels qui prospèrent, notamment à l’intérieur du pays.
Si pour certains consommateurs – en nombre réduit du fait de l’interdit religieux – l’alcool est synonyme de convivialité, pour d’autres en revanche – et ils sont légion – il est vécu comme un remède à leur douleur, éphémère il est vrai, mais suffisant à leurs yeux pour que le temps d’une soirée s’installe de l’apaisement. L’alcool est une clinique, pour eux, dans un pays où la plupart des horizons sont bouchés : chômage ravageur, mal vie, frustrations de toutes sortes générées par le déploiement de richesses inaccessibles. C’est donc là que se situe le vrai problème et où doivent intervenir les bonnes volontés, en premier celles de la sphère politique. Blâmer, diaboliser, réprimer comme le fait la société de manière générale et le font diverses autorités officielles est contreproductif, voire dangereux, car cela ne fait qu’aggraver le mal ou le déplacer vers la consommation des drogues dures que sont le kif, la cocaïne, l’héroïne. Comme dans plusieurs autres pays, la question de la prévention de l’alcoolisme doit relever d’une politique spécifique de santé publique privilégiant en premier lieu la pédagogie.
Par Ali Bahmane
Source /El Watan .
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