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Les Libanais d'Egypte, précurseurs de la "Nahda" arabe aux XIXe et XXe siècles

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  • Les Libanais d'Egypte, précurseurs de la "Nahda" arabe aux XIXe et XXe siècles

    La grande émigration libanaise vers l’Egypte, commencée au XVIIe siècle, a pris son essor entre la seconde moitié du XIXe siècle et le début du XXe siècle, particulièrement après les massacres commis en 1860 dans la montagne libanaise ainsi qu’à Damas, ce qui entraîna également une émigration syrienne.

    Au XIXe siècle, l’Egypte devenait plus attirante économiquement, vu les réformes sociales et culturelles effectuées par Mohammad Ali puis Ismaïl Pacha, ainsi que d’autres khédives ou vice-rois, qui voulaient faire de l’Egypte un « coin » d’Europe en Afrique. Alexandrie est devenue à la seconde moitié du XIXe siècle une ville méditerranéenne, européenne, arabe et islamo-judéo-chrétienne, concurrente de Marseille et Istanbul, et son port recevait des navires de toutes les parties du monde, garantissant 60 % de l’activité économique égyptienne.

    Des centaines de paysans montagnards et de propriétaires terriens libanais, venus à pied, à dos d’âne ou à bord de petites embarcations, suivis de grandes familles bourgeoises, à majorité chrétienne melkite, puis orthodoxe et maronite, de Saïda, Tyr et Zahlé, s’installèrent à Alexandrie, à Damiette, à Mansourah, à Tanta et au Caire, travaillant dans l’agriculture et le commerce. Les Libanais connaissant d’autres langues que l’arabe furent embauchés dans les grandes sociétés et banques étrangères et développèrent, avec les Egyptiens, les secteurs économiques privés. Ils réussirent dans les professions libérales, comme comptables, magistrats, avocats, médecins, ingénieurs, entrepreneurs, etc, et certains occupèrent d’importants postes au gouvernement, allant même jusqu’à influencer la politique locale. Le nombre de Libanais d’Egypte, à la fin du XIXe siècle, dépassait les cent mille personnes.

    Les Libanais émigrant en Egypte avec des capitaux se sont bien établis et ont investi dans les petites industries de l’huile, de la savonnerie, du tabac, des pâtisseries… D’autres ont fondé de grandes sociétés et industries de sel, de sodium, de textile, de parfum, de bois, de la soie… En 1905, les Libanais furent les pionniers des industries chimiques et du coton en Egypte. Ils travaillèrent aussi dans le secteur du transport (train et autobus) dans le Delta du Nil, établissant des liaisons régulières pour les gens et les marchandises à partir des ports jusqu’aux villages les plus éloignés du désert.

    Dans les villes, ils ouvrirent de grands magasins de nouveautés (prêt-à-porter, produits de beauté…). Certains firent rapidement fortune et construisirent des palais qu’ils habitèrent. Ce succès rapide entraîna, à son apogée, l’ouverture d’églises, d’écoles, de clubs et d’associations de bienfaisance, appuyant les nouveaux émigrants libanais et envoyant des aides au Liban, tout en contribuant au développement de l’Egypte. Citons parmi ces familles les Assouad, Athié, Bakhos, Boulad, Boulos, Cassir, Chalhoub, Chaoul, Chahine, Chedid, Corm, Daher, Debbané, Eddé, Farah, Farès, Gemayel, Habachi, Hachem, Haïmari, Hakim, Khlat, Khoury, Nasser, Nouh, Rohayem, Saab, Sarrouf, Sayegh, Chéhadé, Tadros, Younès, Zeidane, Zein…

    La « Nahda »

    A la même époque, le Liban connaissait une activité intellectuelle intense qui fut à l’origine de la Renaissance arabe, la « Nahda », basée sur la liberté, la patrie et la langue arabe, dans une perspective de conception de l’arabité suivant des objectifs nationalistes, laïcs et non religieux. Les écrits des Libanais dans les domaines littéraire, culturel, scientifique, pédagogique et philosophique ont été à l’origine de la « Nahda » et un des « maîtres » libanais de toutes ces disciplines a été sans doute Boutros Al-Boustani, né à Debbiyeh dans le Chouf (1819-1883), qui ne quitta jamais le Liban.

    La censure ottomane tentant d’étouffer ce nouvel essor, de nombreux intellectuels libanais prirent le chemin de l’Egypte, où la Renaissance arabe a effectivement vu le jour, avec de grands esprits comme les Egyptiens Taha Hussein (1889-1973), Saad Zaghloul (1859-1927) et son frère Fathi Zaghloul, qui, à travers ses traductions en langue arabe, a introduit la pensée politique et la sociologie occidentales en Orient.

    Les Libanais d’Egypte ont contribué au développement des courants de la pensée libérale et scientifique avec, notamment : Farah Antoun (1874-1922), intellectuel originaire de Tripoli, fondateur de la revue al-Jamiah (L’université) et auteur de plusieurs livres ; Yacoub Sarrouf (1852-1927), directeur de la revue scientifique al-Muqtataf (Sélection), fondée à Beyrouth en 1876 et transférée au Caire en 1883 ; Gergi Zeidane (1861-1914), écrivain réformiste de nouvelles et de romans historiques sous forme de feuilletons, fondateur de la revue al-Hilal (Le croissant) en 1892, qui a contribué à l’éducation de plusieurs générations, non seulement en Egypte, mais dans tout l’Orient arabe.

    La presse et l’art

    Le XIXe siècle fut celui du développement de la presse en Orient, qui avait eu sa première imprimerie en 1697 au Liban, suivi par l’Egypte en 1820. Avec l’imprimerie, la presse révolutionna la société arabe dont l’éveil culturel permit aux élites de débattre de nouvelles idées en approfondissant leur connaissance de l’Europe. Le premier journal officiel en arabe et turc fut el-Waqa’i el-Masria (Les événements égyptiens), apparu en 1828 en Egypte. Au Liban, Khalil El-Khoury fonda le premier périodique indépendant arabe, Hadiqat el-Akhbar (Le jardin des nouvelles) en 1858, et Abdel Kader Kabbani, Samarat al-Founoun (La production artistique) en 1875, qui seront suivis de plus de cent autres journaux.

    A la même période, les frères Béchara et Salim Taqla fondèrent (1875) à Alexandrie le célèbre journal al-Ahram (Les Pyramides), transféré au Caire en 1899. Ce journal, conçu de façon moderne, se développa rapidement au niveau régional et international, devenant aujourd’hui l’un des plus grands du monde arabe, avec des versions hebdomadaires française (al-Ahram Hebdo) et anglaise (al Ahram Weekly).

    Dans le domaine de l’art, les Libanais ont également été prolixes, notamment au théâtre. La première pièce écrite et jouée en Orient fut al-Bakhil (l’Avare), adaptée de Molière et présentée en 1848, près de la place des Canons à Beyrouth, par le Libanais Maroun Al-Naccache, qui devint ainsi le père du théâtre arabe. Vu les difficultés rencontrées au Liban en raison de l’occupation ottomane, les Libanais développèrent le théâtre en Egypte, où Georges Abyad, fondateur du théâtre égyptien moderne, créa en 1912 la première troupe arabe professionnelle.


    La révolution de 1952 en Egypte fit tomber la monarchie, ce qui entraîna un choc au sein de la colonie libanaise, très affectée par ce changement brusque, principalement après 1956. En effet, à cette date-là, la nationalisation nassérienne toucha la classe bourgeoise dans son ensemble, musulmans comme chrétiens. Des centaines de familles perdirent du jour au lendemain leurs biens personnels, industries, magasins et autres propriétés, saisis par le nouveau gouvernement. Cela provoqua une nouvelle grande vague d’émigration vers le Nouveau Monde et l’Australie.
    Beaucoup sont cependant restés en Egypte, préservant jusqu’à ce jour les relations égypto-libanaises, plusieurs fois millénaires. Ces personnes sont très engagées dans la société égyptienne, comme il existe un grand nombre d’Egyptiens et de Libano-Egyptiens au Liban, qui font le pont entre les deux pays dans les domaines culturels, économiques et politiques.

    Roberto KHATLAB
    L'Orient le Jour
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

  • #2
    Portraits d'illustres Libanais d'Egypte

    De Georges Shéhadé à Youssef Chahine, à Omar Sharif : portraits d'illustres Libanais d'Egypte

    Les Libanais ont formé en Egypte, dès le XIXe siècle, une communauté cultivée, non seulement arabophone mais aussi francophone. Beaucoup d’entre eux ont marqué notre époque, qu’ils soient nés en Egypte ou se soient installés récemment dans ce pays, tout en continuant d’entretenir des relations avec le Liban.

    Parmi ceux-là, Hector Klat, diplomate et poète libanais, né en Alexandrie en 1888 et décédé à Beyrouth en 1976. Il occupe en 1932 le poste diplomatique de secrétaire chargé de la correspondance française au cabinet du président de la République au Liban, puis celui de consul général du Liban à São Paulo (1946-1951). Il y a aussi Georges Schéhadé, une des grandes figures libanaises de la littérature francophone. Né en Alexandrie en 1910, il est décédé à Paris en 1989. Il a vécu et fait ses études à Beyrouth et dans la capitale française. Auteur de plusieurs pièces de théâtre présentées au Liban et en Europe, et ayant connu un grand succès il a été lauréat du prix de la francophonie de l’Académie française.

    René Habachi, philosophe libano-égyptien de renommée internationale, est né en Egypte en 1914 et décédé à Paris en 2003. Arrivé en 1953 à Beyrouth, il enseigna dans plusieurs institutions académiques au Liban et fonda en 1960 l’Institut des sciences sociales à l’Université libanaise. Il occupa par la suite plusieurs postes académiques dans le monde arabe et à l’Unesco à Paris (de 1969 à 1977). Auteur de plusieurs œuvres de référence, qui représentent la nature humaine et son dépassement vers l’autre, il a développé la philosophie de la relation : « Au commencement est la relation », évoquant déjà les défis se posant aux trois religions monothéistes, le judaïsme, le christianisme et l’islam, pour une coexistence pacifique en Egypte, Liban, Palestine, Irak, Jordanie et Israël.

    Il ne faut pas oublier Youssef Gabriel Chahine, célèbre réalisateur, acteur, scénariste et producteur égyptien de réputation internationale, né en Alexandrie en 1926, de père catholique d’origine libanaise et de mère orthodoxe d’origine grecque. Il fit ses études de cinéma aux Etats-Unis et réalisa son premier film, "Papa Amin", en 1950. Chahine, cinéaste engagé, dénonce souvent l’intégrisme, provoquant des débats dans la société égyptienne. En 1994, son film "L’Emigré" a été censuré.

    Egalement dans le domaine du cinéma, on ne peut oublier de parler de celui qui devait devenir une star internationale, Omar Sharif. Egyptien d’origine libanaise, de son vrai nom Michel Chalhoub, il est né en Alexandrie en 1932. Son père, parti de Zahlé dans la Békaa, devint un grand marchand de boiserie précieuse en Egypte. Michel entra à l’université au Caire puis étudia le cinéma à Londres. En 1954, il débuta en Egypte dans le film "Le démon du désert", prenant pour nom Omar Sharif (nom pseudo-professionnel), sous la direction de Youssef Chahine. Il joua ensuite dans le grand film "Lawrence d’Arabie", puis participa à plusieurs films américains et français, jouant entre autres avec Anthony Quinn et Catherine Deneuve… Lauréat de plusieurs prix et ayant signé un contrat à Hollywood, Omar Sharif est devenu une grande star du cinéma égyptien et international. Sa philosophie dans la vie : « Quand vous sortez de chez vous, il faut être prêt à aimer tout le monde. »

    Dans un autre registre, il y a Hassan El-Zein, libraire libanais, petit-fils du savant et éditeur cheikh Ahmad Aref El-Zein, né à Beyrouth en 1927. Formé en pédagogie à l’Université américaine de Beyrouth et amoureux du livre, il publia dès 1946 son premier titre, "Le guide général des étudiants". Dans les années 50, il fonda plusieurs librairies dans la capitale libanaise, dont la principale "Dar al-kitab al-Lubnani" (La maison d’édition libanaise). En 1974, El-Zein quitta Beyrouth pour Le Caire et ouvrit en parallèle "Dar al-kitab al-Masri al-Lubnani" (La maison d’édition égypto-libanaise), développant considérablement ses publications et son domaine d’action culturelle. En 1983, il fonda à Kuala Lumpur "Dar al-kitab al-Malysi" (La maison d’édition malaisienne).

    Naturalisé égyptien en 1998, il obtint en 2000 le certificat international de "Who is Who in the World International Millenium", délivré par les éditions de l’Université de Philadelphie aux Etats-Unis, puis le certificat de l’écrivain international de l’année 2005, délivré par l’Université de Cambridge en Angleterre. Aujourd’hui, il a à son actif la publication de plus de 400 écrivains arabes – dont 390 écrivains égyptiens – et la diffusion de plusieurs programmes pédagogiques en français et en anglais, comprenant plus de 2 800 livres de la maternelle jusqu’au baccalauréat, dans plus de 80 établissements publics et privés. Sa devise : « II faut cultiver l’esprit critique des enfants, au lieu de leur apprendre le tout par cœur. »

    Enfin, il ne faut pas oublier Georges Joseph Nammour, homme d’affaires libano-égyptien, né à Alexandrie en 1898 et décédé à Beyrouth en 1961. Son père Joseph, originaire de Saïda, Liban-Sud, marié avec Régina Chiha, avait émigré en Egypte vers la seconde moitié du XIXe siècle et avait travaillé dans le domaine maritime. En 1949, Georges vient au Liban où il épouse Evelyne Saba.

    Il y fixe sa résidence et commence le travail dans la Société d’acconage du port de Beyrouth. Il fonde ensuite la compagnie d’assurances ach-Chark avec son frère Antoun. Ses fils et fille vivent aujourd’hui entre le Liban, Abou Dhabi, la France et les Etats-Unis (Miami), et travaillent dans les domaines littéraire, pédagogique et de la finance. Le dynamisme et le génie des affaires des Libanais confirment le proverbe qui dit : « Lorsqu’un Libanais tombe à la mer, il en ressort avec un poisson dans la bouche… ».

    Roberto KHATLAB
    L'Orient le Jour
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin

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    • #3
      en egypt la nahda a commencé apartir de l'invasion de napoleon.
      tu ne parle trop des libanais et si tu nous raconte un peu sur les libanaises???

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