Les examens de fin d’année, tout en tenant en haleine élèves, parents et responsables pédagogiques, ne renseignent malheureusement que très peu sur le vrai niveau scolaire et, partant, sur les performances de l’école algérienne. Les constats allant dans ce sens ont été établis par des analystes indépendants, par des entrepreneurs de la nouvelle génération qui ont du mal à mettre la main sur l’encadrement idoine et même par certains responsables de l’administration.
Cependant, dans maints dossiers d’évaluation sociale et économique du pays, comme le dernier rapport du Conseil économique et social relatif au développement humain présenté à Oran dimanche dernier, l’hypothèque pesant sur les débouchés des élèves et étudiants actuels en matière d’emploi n’a pas fait l’objet d’une analyse critique. La Coordination des lycées d’Alger (CLA), syndicat qui a pour ambition de s’étendre à l’échelle de toutes les wilayas, a décoché, au début de la semaine en cours des flèches aux responsables gestionnaires de l’examen du baccalauréat pour les circonstances peu régulières dans lesquelles cet examen s’est déroulé. Pour les matières soumises à l’évaluation, des milliers d’élèves ont fait les frais d’une gestion approximative qui a fait qu’ils ont été exemptés de la matière langue française pour la raison qu’ils n’ont pas eu d’enseignants dans cette matière au cours de l’année scolaire. Ce phénomène est surtout perceptible dans les Hauts Plateaux et dans les wilayas du Sud. À elle seule, la wilaya de Laghouat enregistre un déficit de 120 postes d’enseignants en langue française.
Après que la politique éducative du pays eut malmené l’enseignement du français dans notre pays- pour des raisons idéologiques et politiciennes dictées par une soumission/connivence au baâthisme et à l’islamisme-, le résultat des courses a été que des établissements scolaires dans certaines wilayas n’ont pas pu assurer cette matière importante. La solution de facilité adoptée par les autorités de tutelle a été d’exempter les élèves ‘’victimes’’ de ce traitement des épreuves de français dans les examens. L’ ‘’ingéniosité’’ des gestionnaires a franchi un autre pas l’année dernière: le ministère de tutelle décida que les wilayas concernées devaient recruter les enseignants retraités et les étudiants de 4e d’université pour assurer les cours de français. En matière d’inconséquence, on ne peut sans doute pas faire mieux. Outre que le recrutement des retraités constitue une entorse aux lois du travail, l’affectation dans le secteur de l’enseignement des universitaires qui n’ont pas terminé leur cycle ne dénote pas un grand souci de pédagogie et du respect des règles didactiques. Pourquoi avoir démantelé de précieuses traditions, un capital humain presque unique sur le continent africain et un système qui a donné ses preuves sur le terrain pour leur venir au secours avec des ersatz de solutions, des parodies de réformes et des décisions sans lendemain ?
Sur le plan des grands projets de modernisation et de ‘’mise à niveau’’ de l’école algérienne, hormis certaines mesures présentées comme étant des ‘’réformes’’, le secteur de l’éducation s’est surtout gargarisé de chiffres de réalisations d’infrastructures et de populations scolaires prises en charges par le système éducatif.
Dimensions et limites des statistiques
L’on sait qu’en matière de chiffres, l’Algérie ne peut que s’enorgueillir de posséder une population scolaire qui représente le quart de la population du pays. Ce sont plus de huit millions et demi d’élèves qui ont accompli l’année scolaire qui vient de s’achever. De même, les infrastructures éducatives ont suivi d’une façon presque régulière et proportionnelle la croissance de la population scolaire à tel point que, suite au dépeuplement de certaines bourgades et autres villages, des salles de classes ont été contraintes à la fermeture. C’est un cas fort répandu dans certaines régions de Kabylie et dans quelques zones des Hauts Plateaux. L’effort de la collectivité a pourtant fait atteindre au secteur de l’Éducation le premier budget des dépenses de la nation.
En agissant sur le quantitatif, les pouvoirs publics avaient, au lendemain de l’Indépendance, pour objectif de relever le défi par rapport à la nouvelle situation créée par le départ massif des cadres européens et de soustraire une grande partie de la population à l’état d’analphabétisme dans laquelle elle était enfermée. Nobles objectifs qui auraient pu, au moins dans leurs grands axes, être réalisés si l’idéologie, la politique politicienne et une économie rentière n’étaient pas venues remettre en cause les simples et limpides lois de la pédagogie et de la didactique. Il s’ensuivit une véritable prise d’otage de l’école algérienne par une caste qui a fait prévaloir beaucoup plus les enjeux idéologiques et politicards que les objectifs pédagogiques et de formation. Dès le début de l’Indépendance, de médiocres maîtres ont été ramenés d’Orient pour officier en Algérie, maîtres qui n’ont de mérite que celui de pouvoir déchiffrer quelques phrases en arabe. L’ordonnance d’avril 1976 instituant l’École fondamentale ayant ouvert la voie à la chute aux enfers de l’école algérienne, cette dernière donne l’image quasi parfaite de la décrépitude de toute la société dans ses valeurs fondamentales les plus déterminantes.
Avec la nouvelle loi d’orientation scolaire, l’ordonnance ayant fondé l’École fondamentale est abrogée de facto.
La baisse vertigineuse du niveau scolaire est un secret de Polichinelle ; elle a pu même avoir des retentissements peu flatteurs dans certaines institutions internationales chargées de l’éducation et de la culture. Les statistiques officielles nous apprennent qu’il y a plus de sept millions d’analphabètes dans le pays, soit l’équivalent de la population scolaire. Ce sont, que l’on se détrompe, des chiffres trop cléments par rapport à la situation d‘illettrisme sévissant même dans le milieu scolaire ou chez les personnes ayant quitté l’école trop tôt. Le ‘’souffle’’ qui se libère au cours de ces dernières années- venant des parents d’élèves, des syndicats, des associations, de la mouvance démocratique et des médias- porte sur la nécessité d’une refondation complète de l’école algérienne de façon à donner à la société les moyens d’évoluer au rythme de la mondialisation, des innovations technologiques et des défis du développement. Le nouveau concept de l’Économie du savoir diffusé par les chercheurs en ressources humaines n’est pas un vain mot. La société tout entière tirera la réponse à la vieille question ‘’Être ou ne pas être’’, du statut, du contenu pédagogique et des moyens qu’elle aura mobilisés pour l’école.
La fin non annoncée de l’École fondamentale
Implicitement, la loi d’orientation scolaire n°08/04 du 23 janvier 2008 consacre la fin de l’École fondamentale datant du 16 avril 1976. Selon M.Abdelmadjid Hadous, cadre supérieur au ministère de l’Éducation, les nouveautés induites par la nouvelle loi «ont trait à l’encadrement juridique, notamment en termes de finalités et de missions de l’École. Elles concernent aussi l’organisation des cycles d’enseignement et les dimensions éducatives que doivent contenir les programmes scolaires tout au long du cursus de l’élève. Ces nouveaux textes maintiennent et consolident les acquis antérieurs, notamment les principes d’égalité, du droit à l’éducation et à gratuité de l’éducation de base» ( Le Cap du 1er au 15 janvier 2009).
Pour faire l’inventaire des outils réglementaires nécessaires à la mise en application de la nouvelle loi, des ateliers ont été organisés lors de la Conférence nationale en novembre 2008 à Alger. Les syndicats agrées et les fédérations des parents d’élèves ont eu voix au chapitre par une représentation qui leur a permis de faire les propositions dans le sens d’un meilleur parti à tirer de la nouvelle législation.
De même, un Conseil national des programmes est envisagé pour prendre le relais de l’ancienne commission des programmes mise en place en 1999. Ce Conseil aura pour mission d’«assurer la crédibilité scientifique des contenus d’enseignement et de veiller à la cohérence des programmes».
Le ministre de l’Éducation nationale, Boubekeur Benbouzid, avait déjà annoncé que l’année 2008 était la dernière année des réformes de l’École. Quant à M.Hadous, il soutient que «la réforme du système éducatif est un processus continu et permanent et dont le souci premier demeure la recherche pédagogique pour améliorer la qualité de l’enseignement. C’est pourquoi les chantiers de la réforme ne sont jamais achevés».
Cependant, dans maints dossiers d’évaluation sociale et économique du pays, comme le dernier rapport du Conseil économique et social relatif au développement humain présenté à Oran dimanche dernier, l’hypothèque pesant sur les débouchés des élèves et étudiants actuels en matière d’emploi n’a pas fait l’objet d’une analyse critique. La Coordination des lycées d’Alger (CLA), syndicat qui a pour ambition de s’étendre à l’échelle de toutes les wilayas, a décoché, au début de la semaine en cours des flèches aux responsables gestionnaires de l’examen du baccalauréat pour les circonstances peu régulières dans lesquelles cet examen s’est déroulé. Pour les matières soumises à l’évaluation, des milliers d’élèves ont fait les frais d’une gestion approximative qui a fait qu’ils ont été exemptés de la matière langue française pour la raison qu’ils n’ont pas eu d’enseignants dans cette matière au cours de l’année scolaire. Ce phénomène est surtout perceptible dans les Hauts Plateaux et dans les wilayas du Sud. À elle seule, la wilaya de Laghouat enregistre un déficit de 120 postes d’enseignants en langue française.
Après que la politique éducative du pays eut malmené l’enseignement du français dans notre pays- pour des raisons idéologiques et politiciennes dictées par une soumission/connivence au baâthisme et à l’islamisme-, le résultat des courses a été que des établissements scolaires dans certaines wilayas n’ont pas pu assurer cette matière importante. La solution de facilité adoptée par les autorités de tutelle a été d’exempter les élèves ‘’victimes’’ de ce traitement des épreuves de français dans les examens. L’ ‘’ingéniosité’’ des gestionnaires a franchi un autre pas l’année dernière: le ministère de tutelle décida que les wilayas concernées devaient recruter les enseignants retraités et les étudiants de 4e d’université pour assurer les cours de français. En matière d’inconséquence, on ne peut sans doute pas faire mieux. Outre que le recrutement des retraités constitue une entorse aux lois du travail, l’affectation dans le secteur de l’enseignement des universitaires qui n’ont pas terminé leur cycle ne dénote pas un grand souci de pédagogie et du respect des règles didactiques. Pourquoi avoir démantelé de précieuses traditions, un capital humain presque unique sur le continent africain et un système qui a donné ses preuves sur le terrain pour leur venir au secours avec des ersatz de solutions, des parodies de réformes et des décisions sans lendemain ?
Sur le plan des grands projets de modernisation et de ‘’mise à niveau’’ de l’école algérienne, hormis certaines mesures présentées comme étant des ‘’réformes’’, le secteur de l’éducation s’est surtout gargarisé de chiffres de réalisations d’infrastructures et de populations scolaires prises en charges par le système éducatif.
Dimensions et limites des statistiques
L’on sait qu’en matière de chiffres, l’Algérie ne peut que s’enorgueillir de posséder une population scolaire qui représente le quart de la population du pays. Ce sont plus de huit millions et demi d’élèves qui ont accompli l’année scolaire qui vient de s’achever. De même, les infrastructures éducatives ont suivi d’une façon presque régulière et proportionnelle la croissance de la population scolaire à tel point que, suite au dépeuplement de certaines bourgades et autres villages, des salles de classes ont été contraintes à la fermeture. C’est un cas fort répandu dans certaines régions de Kabylie et dans quelques zones des Hauts Plateaux. L’effort de la collectivité a pourtant fait atteindre au secteur de l’Éducation le premier budget des dépenses de la nation.
En agissant sur le quantitatif, les pouvoirs publics avaient, au lendemain de l’Indépendance, pour objectif de relever le défi par rapport à la nouvelle situation créée par le départ massif des cadres européens et de soustraire une grande partie de la population à l’état d’analphabétisme dans laquelle elle était enfermée. Nobles objectifs qui auraient pu, au moins dans leurs grands axes, être réalisés si l’idéologie, la politique politicienne et une économie rentière n’étaient pas venues remettre en cause les simples et limpides lois de la pédagogie et de la didactique. Il s’ensuivit une véritable prise d’otage de l’école algérienne par une caste qui a fait prévaloir beaucoup plus les enjeux idéologiques et politicards que les objectifs pédagogiques et de formation. Dès le début de l’Indépendance, de médiocres maîtres ont été ramenés d’Orient pour officier en Algérie, maîtres qui n’ont de mérite que celui de pouvoir déchiffrer quelques phrases en arabe. L’ordonnance d’avril 1976 instituant l’École fondamentale ayant ouvert la voie à la chute aux enfers de l’école algérienne, cette dernière donne l’image quasi parfaite de la décrépitude de toute la société dans ses valeurs fondamentales les plus déterminantes.
Avec la nouvelle loi d’orientation scolaire, l’ordonnance ayant fondé l’École fondamentale est abrogée de facto.
La baisse vertigineuse du niveau scolaire est un secret de Polichinelle ; elle a pu même avoir des retentissements peu flatteurs dans certaines institutions internationales chargées de l’éducation et de la culture. Les statistiques officielles nous apprennent qu’il y a plus de sept millions d’analphabètes dans le pays, soit l’équivalent de la population scolaire. Ce sont, que l’on se détrompe, des chiffres trop cléments par rapport à la situation d‘illettrisme sévissant même dans le milieu scolaire ou chez les personnes ayant quitté l’école trop tôt. Le ‘’souffle’’ qui se libère au cours de ces dernières années- venant des parents d’élèves, des syndicats, des associations, de la mouvance démocratique et des médias- porte sur la nécessité d’une refondation complète de l’école algérienne de façon à donner à la société les moyens d’évoluer au rythme de la mondialisation, des innovations technologiques et des défis du développement. Le nouveau concept de l’Économie du savoir diffusé par les chercheurs en ressources humaines n’est pas un vain mot. La société tout entière tirera la réponse à la vieille question ‘’Être ou ne pas être’’, du statut, du contenu pédagogique et des moyens qu’elle aura mobilisés pour l’école.
La fin non annoncée de l’École fondamentale
Implicitement, la loi d’orientation scolaire n°08/04 du 23 janvier 2008 consacre la fin de l’École fondamentale datant du 16 avril 1976. Selon M.Abdelmadjid Hadous, cadre supérieur au ministère de l’Éducation, les nouveautés induites par la nouvelle loi «ont trait à l’encadrement juridique, notamment en termes de finalités et de missions de l’École. Elles concernent aussi l’organisation des cycles d’enseignement et les dimensions éducatives que doivent contenir les programmes scolaires tout au long du cursus de l’élève. Ces nouveaux textes maintiennent et consolident les acquis antérieurs, notamment les principes d’égalité, du droit à l’éducation et à gratuité de l’éducation de base» ( Le Cap du 1er au 15 janvier 2009).
Pour faire l’inventaire des outils réglementaires nécessaires à la mise en application de la nouvelle loi, des ateliers ont été organisés lors de la Conférence nationale en novembre 2008 à Alger. Les syndicats agrées et les fédérations des parents d’élèves ont eu voix au chapitre par une représentation qui leur a permis de faire les propositions dans le sens d’un meilleur parti à tirer de la nouvelle législation.
De même, un Conseil national des programmes est envisagé pour prendre le relais de l’ancienne commission des programmes mise en place en 1999. Ce Conseil aura pour mission d’«assurer la crédibilité scientifique des contenus d’enseignement et de veiller à la cohérence des programmes».
Le ministre de l’Éducation nationale, Boubekeur Benbouzid, avait déjà annoncé que l’année 2008 était la dernière année des réformes de l’École. Quant à M.Hadous, il soutient que «la réforme du système éducatif est un processus continu et permanent et dont le souci premier demeure la recherche pédagogique pour améliorer la qualité de l’enseignement. C’est pourquoi les chantiers de la réforme ne sont jamais achevés».
Commentaire