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Nasser: En Iran, les indics sont partout

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  • Nasser: En Iran, les indics sont partout

    Nasser a 30 ans. Il est comédien et pro-Moussavi.

    «C'est devenu un rituel. Tous les soirs, à la nuit tombée, je monte sur le toit et je crie “Allaho Akbar !” et “Mort au dictateur !” Dans la pénombre, je reconnais mes voisins. Leurs cris font écho aux miens. Au loin, nous entendons les klaxons des voitures. La protestation contre les résultats du scrutin a créé une solidarité inédite entre les Iraniens. Ouvriers, chefs d'entreprise, féministes, femmes au foyer… Chaque jour, nous sommes de plus en plus nombreux à descendre dans les rues en respectant le silence, et en faisant le V de la victoire avec nos mains. Nous continuons à être convaincus qu'il y a eu fraude et que Mir Hossein Moussavi aurait dû remporter l'élection. Je me couvre le visage d'un tissu vert et je mets des lunettes de soleil, pour ne pas être repéré par les indics. Ils sont partout. Il faut se méfier.

    C'est étrange comme ces événements ont changé ma vie. Je suis de nature plutôt calme. Pas du genre tête brûlée. Ma famille est originaire de Mashad. Je suis célibataire et je vis seul à Téhéran. Habituellement, pendant mes heures libres, je lis beaucoup et je regarde des DVD piratés de films français et américains. Je n'ai jamais aimé la politique. D'ailleurs, le 12 juin, j'ai hésité à voter. Mais il y avait urgence. Les gens ont trop souffert des années Ahmadinejad, surtout les jeunes, les intellectuels et les artistes. Au théâtre, la censure s'est renforcée. Ça fait plus de dix mois que je suis au chômage. Toutes les pièces dans lesquelles je devais jouer ont été interdites. Aujourd'hui, le budget alloué à la culture donne la priorité aux fêtes religieuses. J'étouffe. Pour les filles, c'est encore pire. Sous Ahmadinejad, de nombreuses copines ont été arrêtées par la police des mœurs, à cause de leurs foulards trop colorés. C'est ce ras-le-bol qui s'est exprimé lors des élections. Je n'ai jamais vu autant de monde devant les bureaux de vote. Il y avait de l'espoir dans l'air. Et puis, dès le lendemain, ça a été le choc total…

    «Nous ne cherchons pas à renverser le régime »

    Franchement, j'ai du mal à savoir où toutes ces manifestations peuvent mener. L'étau se resserre de plus en plus. Des centaines de personnes ont été arrêtées, des innocents ont été tués. Chaque jour, on se demande : à qui le tour ? La répression est pire que pendant les émeutes étudiantes de 1999. Des journaux ont dû fermer. Impossible d'envoyer des textos. Mes chaînes favorites, que j'avais l'habitude de regarder grâce à une parabole camouflée sur ma terrasse, sont désormais cryptées : BBC farsi, Voice of America… Sur Internet, mes sites préférés - comme Facebook et YouTube - sont filtrés. Les rumeurs circulent selon lesquelles les autorités veulent même bloquer l'accès à Google. Il me sera alors difficile d'envoyer par e-mail à mes amis de l'étranger les photos que je prends dans les rassemblements, chaque jour, avec mon téléphone portable. On raconte que, la nuit, les miliciens font la chasse aux protestataires qui brûlent des pneus. On assiste à un véritable coup d'État. Mais je refuse d'avoir peur car j'estime que notre combat est légal. Nous ne cherchons pas à renverser le régime. Nous n'avons pas l'ambition de faire une seconde révolution. Nous voulons juste avoir le droit de récupérer nos votes, qui nous ont été volés. C'est tout.»

    Par le Figaro
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