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Histoire de l’Algérie depuis l’indépendance

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  • Histoire de l’Algérie depuis l’indépendance

    Benjamin STORA, Histoire de l’Algérie depuis l’indépendance, Repères, La Découverte, Paris, 1995, 125 p.

    Fiche de lecture du blog de Stéphane Mantoux stephanemantoux. un blog .fr/tag/livres-dhistoire


    I) L'été 1962 :

    Au moment de l'indépendance, la guerre civile est évitée de justesse. Ahmed Ben Bella, appuyé par le colonel Houari Boumediene et “l'armée des frontières” stationnée en Tunisie et au Maroc, emporte la décision. Le 3 juillet, le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA), créé à Tunis par le FLN en 1958, fait son entrée à Alger. Mais les divisions sont visibles : si son président Ben Youssef Ben Khedda est présent, Mohammed Khidder et Ben Bella ne sont pas là. Le GPRA est appuyé par les wilayas (régions) II, III et IV et par la Fédération française du FLN. En face, Boumediene compte sur les wilayas I, V et VI, sur l'armée des frontières, rejoint par Ferhat Abbas et Ben Bella. Le pays est dans un état de délabrement avancé : 8 années de guerre et la politique de terre brûlée de l'OAS dans les derniers mois du conflit ont achevé de le désorganiser. L'Algérie a été de toute façon pensée comme complémentaire de la métropole : c'est l'exportation de produits agricoles qui est la base de l'économie, et l'industrialisation n'a été mise en œuvre par la France que pendant la guerre d'indépendance, en 1958-1960, pour marquer des points auprès de la population. Le départ des Européens après l'indépendance prive le pays de ses cadres économiques. Le Conseil National de la Révolution Algérienne, réuni à Tripoli en mai-juin 1962, dénonce les pratiques de régionalisme et de clientélisme qui se mettent en place. Il plaide pour une démocratie marxiste, incorporant les valeurs de l'islam et acceptant la présence des Européens. Sur le plan économique, on prévoit une révolution agraire, une industrialisation qui lui est subordonnée et des nationalisations. Socialement, le congrès veut lutter en priorité contre l'analphabétisme ; le non-alignement est la règle en politique étrangère. Mais la révocation de Boumediene à la fin du congrès précipite le conflit. Le GPRA, installé à Alger, fait face aux opposants basés à Tlemcen. Le 22 juillet, Ben Bella annonce la création d'un Bureau Politique, tandis que l'armée des frontières passe à l'offensive et occupe Constantine le 25 juillet. Le “groupe de Tlemcen“, c'est d'abord la force militaire brute. Il pousse le GPRA au compromis : le 2 août, le Bureau Politique s'installe à Alger. La résistance continue pourtant dans les wilayas III et IV. Le 29 août, les commandos de Yacef Saadi, partisan du GPRA, attaquant les unités de la wilaya IV. Le Bureau Politique ordonne alors à toutes les unités des wilayas qui lui sont fidèles de marcher sur Alger. Les troubles donnent lieu à de nombreux règlements de compte : massacres de harkis, de musulmans pro-français, enlèvements d'Européens. On parle de 10 à 25 000 harkis exécutés. C'est alors que reprend l'émigration algérienne vers la France, freinée depuis les années 30. Théoriquement, les Algériens ont les mêmes droits que les citoyens français d'après les accords d'Evian, mais le contexte va bouleverser les choses : près de 100 000 Algériens débarquent en effet en France, surtout dans la région parisienne, en 1962. Pendant ce temps, le 9 septembre, Boumediene a fait entrer ses bataillons dans Alger. Seule la wilaya III (la Kabylie) échappe à l'autorité centrale. Le 30 septembre, la liste des candidats uniques à l'Assemblée est plébiscitée à 99 %. Ben Bella devient chef du gouvernement, Khider responsable du Bureau Politique, Abas dirige l'Assemblée. Le 27 septembre cependant, Mohamed Boudiaf crée le Parti de la Révolution Socialiste qui s'oppose au Bureau Politique. On trouve donc au pouvoir des fonctionnaires formés sous la domination française, et non pas les premiers combattants du FLN ; un pouvoir d'ailleurs qui cherche à composer avec les traditionnalistes religieux. Mais comment va-t-il répondre aux immenses aspirations du peuple algérien ?

    II) L'Algérie de Ben Bella (1962-1965) :

    L'autogestion, la voie socialiste de développement, est choisie par l'Algérie pour remédier aux maux issus du colonialisme français. Le 25 septembre 1962, l'Assemblée proclame la naissance de la République d'Algérie démocratique et populaire. Dans le gouvernement, on ne trouve aucun membre du GPRA mais 5 militaires, dont Boumedienne ; échappent au gouvernement l'armée, le FLN et l'Union Générale des Travailleurs Algériens. La notion de parti unique s'impose progressivement : interdiction du parti communiste le 29 novembre, mise hors-la-loi du PRS en août 1963. La légitimité du FLN, c'est la guerre d'indépendance, point barre. La mise au pas de l'UGTA est plus difficile ; après son premier congrès en janvier 1963, elle doit se retirer de la Confédération Internationale des Syndicats Libres. Le 16 avril 1963, Ben Bella remplace Khider à la tête du Bureau Politique et cumule ainsi deux fonctions clés. Une constitution présidentielle et révolutionnaire est imposée à l'Assemblée le 28 août. Elle est approuvée par référendum le 5 septembre et le 13, Ben Bella est élu premier Président de la République. Ben Bella met en place la révolution agraire dès 1963 ; fils de paysans, il se méfie des classes citadines. En 1965, le secteur agricole autogéré couvre plus de 2 millions d'ha. Le secteur industriel et commercial, le commerce extérieur deviennent également autogéré. Le système d'autogestion repose normalement sur la démocratie directe, mais en fait, l'Etat impose sa tutelle au nom du développement économique, laissant de côté la transformation des rapports de production. Les fellahs, eux, aspiraient plutôt à un partage pur et simple des terres ou à une amélioration de leur condition de salariés au sein de fermes d'Etat. L'Algérie a été admise le 8 octobre 1962 à l'ONU. Elle s'affirme par le soutien aux peuples africains colonisés et elle participe au premier sommet panafricain à Addis-Abeba en 1963. Le nationalisme arabe de Bella rejoint celui de Nasser. Par contre, l'Algérie se brouille vite avec la Tunisie : le président Bourguiba reproche à Alger d'abriter les auteurs d'attentats en Tunisie. Le Maroc espère une correction de sa frontière saharienne. Le 8 octobre 1963, en pleine négociation, l'Armée Nationale Populaire algérienne accroche des unités des Forces Armées Royales marocaines. Les combats s'intensifient alors jusqu' au cessez-le-feu du 30 octobre. C'est seulement le 5 novembre cependant que prend fin “la guerre des sables“. L'Algérie tente aussi de se dégager de l'emprise française dans les relations économiques, mais l'URSS commerce peu avec le pays ; les échanges se font avec la CEE, et la France à hauteur de la moitié de ce total. En 1963, la misère reste grande : 2 millions d'Algériens sont au chômage et 2,6 millions sans ressources. Le manque de main-d'oeuvre qualifié, la vétusté des installations et le resserrement du marché en sont les principales causes. L'agriculture d'exportation est en crise et le secteur agricole ne parvient pas à fournir les quantités suffisantes pour les besoins du pays. La situation n'est guère meilleure dans l'industrie et l'artisanat : 1 400 entreprises de travaux publics sur 2 000 disparaissent. Les services publics et l'armée, en revanche, enflent considérablement : 180 000 personnes pour les premiers en 1963, 120 000 soldats pour la seconde. L'émigration continue : on dépasse le seuil de 450 000 Algériens en France en 1965. Le régime de Ben Bella reconnaît d'ailleurs à demi-mot l'émigration comme un “mal nécessaire“, une soupape de sécurité pour un pays qui ne s'est pas encore relevé. L'urbanisation s'accélère également en raison du départ des Européens : 800 000 ruraux partent pour la ville entre 1960 et 1963 (la moitié pour Alger). On compte 4 millions d'urbains sur 10 millions d'habitants en 1966. Ben Bella, de son côté, se coupe des autres leaders du pays : Boudiaf est arrêté le 25 juin 1963, et le 29 septembre Hocine Aït Ahmed fonde le Front des Forces Socialistes qui passe dans l'opposition. Le 10 octobre 1963, l'armée commence à investir la Kabylie, fief de Ahmed. Au premier congrès du FLN en avril 1964, Ben Bella réaffirme la priorité de l'action révolutionnaire et de l'autogestion, se dressant contre le clan Boumediene accusé de bureaucratie étatique. Mais Ben Bella n'a pas réussi à s'imposer et l'autogestion ne correspond pas à l'attente des forces sociales. Cette même année, une révolte militaire éclate, dirigée par Mohammed Chaabani, soutenu par Khider. Ahmed est arrêté le 17 octobre, condamné à mort puis grâcié en 1965. Ben Bella démet les partisans de Boumediene de leurs fonctions gouvernementales. Le pas de trop est franchi avec la révocation d'Abdelaziz Bouteflika le 28 mai 1965 de son poste de ministre des Affaires Etrangères. Celui-ci prévient Boumediene, alors au Caire, et le coup d'Etat se prépare. Le 19 juin 1965, Ben Bella est arrêté et les chars prennent possession d'Alger. Les badauds croient qu'il s'agit du tournage du film La bataille d'Alger, qui sera primé l'année suivante à Venise ! Un message de Radio-Alger vers midi annonce la formation d'un Conseil de la Révolution qui assume désormais le pouvoir.
    Dernière modification par Alain, 26 juin 2009, 17h42.

  • #2
    III) Boumediene, l'Etat et les institutions :

    Sous Boumediene, c'est bien l'armée-Etat qui tire le parti, le FLN. La Charte nationale de 1976 déclare le socialisme “irréversible” et définit toutes les grandes orientations du pays. La constitution de novembre 1976 organise le fonctionnement de l'appareil d'Etat et fait de l'islam la religion officielle. Boumedienne rallie presque tous les membres du Bureau Politique et forme rapidement un nouveau gouvernement en juillet 1965. En septembre, un réseau clandestin, l'Organisation de la Résistance Populaire, formés d'anciens communistes et de marxistes indépendants proches de Ben Bella, est démantelé. Boumediene, austère, centralisateur, passé par le moule de l'armée, va marquer de son empreinte l'Algérie contemporaine. Il s'appuie sur la redoutable sécurité militaire pour éliminer l'opposition : Khider est assassiné à Madrid en 1967, Krim Belkacem est retrouvé étranglé dans une chambre d'hôtel de Francfort le 20 octobre 1970. Boudiaf et Ahmed sont contraints à l'exil. Le 15 décembre 1967, après une tentative de putsch du colonel Tahar Zbiri, Boumediene prend le commandement de l'Armée Nationale Populaire. Le clan de Boumediene se dissout lui-même dans les années 1970, par révocation, démission ou accident suspect : seul Bouteflika demeure inamovible aux Affaires Etrangères. L'Etat devient plus autoritaire par l'intermédiaire du contrôle de l'armée. La charte communale du 18 janvier 1967 confère plus de pouvoirs aux assemblées populaires communales. La charte de la wilaya du 25 mai 1969 crée une assemblée populaire de la wilaya. L'ordonnance du 8 novembre 1971 approfondit la révolution agraire. Celle du 16 novembre organise la Gestion Socialiste des Entreprises. Boumediene cherche en fait à redéfinir ses alliances, s'ouvrant par exemple à l'intelligentsia progressiste. La Charte Nationale de 1976 est un document fondamental, sur lequel prête serment le Président. Elle divise le peuple algérien en classes, groupes, mais jamais en ethnies : pas question d'évoquer les Berbères. L'Etat est valorisé, contrairement à la constitution de 1964 ; il est l'expression de la société et c'est lui qui définit les orientations politiques de l'islam, par exemple, devenue religion d'Etat. Les candidats aux élections locales sont en fait des fonctionnaires du parti. Le but de la constitution est donc bien d'intégrer la société au système mis en place depuis 1965 et non pas de mettre en oeuvre un quelconque pluralisme.

    IV) Choix économiques et politique étrangère (1965-1978) :

    Le tournant économique de l'Algérie se situe en 1971, lorsque Boumediene nationalise les hydrocarbures et tente d'asseoir le développement sur la rente énergétique. Boumediene souhaite l'industrialisation de l'Algérie sur le modèle des théories d'économistes français comme François Perroux et Gérard Destanne de Bernis. Pour ces derniers, les industries de base doivent entraîner l'économie sur la voie du développement. C'est aussi un moyen d'affirmation de l'Etat, dans une perspective quasi nationaliste. Une brèche avait été ouverte dans les intérêts français des hydrocarbures en 1963 avec la création de la Société nationale pour la recherche, la transformation et la commercialisation des hydrocarbures. Le 24 février 1971, la décision de Boumedienne de nationaliser les ressources naturelles entraîne le boycott du pétrole algérien par la France ; seule Total reste sur place. Le choc pétrolier de 1973 triple les revenus issus du pétrole. Si l'Etat augmente ainsi ses ressources, une grande partie des rentrées est consacrée… à améliorer le secteur industriel pétrolier. On extrait environ 40 millions de tonnes par an dans les années 80. En ce qui concerne le gaz, 14 à 16 milliards de mètres cubes sont produits en 1992. Dans le même temps, trois banques sont constituées : Banque nationale d'Algérie, Crédit populaire d'Algérie et Banque extérieure d'Algérie. Mais la croissance n'est pas suffisante, et l'accent mis sur l'industrie, le contrôle de l'Etat, empêchent une articulation correcte entre les différents secteurs de l'économie. La non maîtrise des technologies récentes oblige à recourir aux firmes étrangères, accroissant l'endettement. L'agriculture, enfin, est le parent pauvre de l'économie. La révolution agraire touche plus d'un million d'ha, mais cela représente seulement 10 % des propriétés privées. 5 000 coopératives sont formées. Mais le secteur agricole n'est qu'au service de l'industrie. Résultat : l'autosuffisance alimentaire de l'Algérie dégringole, et en 1984 le pays importe 60 % de sa consommation alimentaire. L'émigration se poursuit, et un accord franco-algérien signé le 27 décembre 1968 commence à poser des barrières. Néanmoins une population algérienne s'enracine en France et conserve des relations étroites avec sa société d'origine. Boumediene obtient ses plus grands succès en politique étrangère. Le quatrième sommet des pays non-alignés se tient à Alger en 1973. L'Algérie signe des accords de bon voisinage avec le Maroc et la Tunisie en 1969 et 1970. La tension avec la France est très vive en 1971, au moment des nationalisations. Pourtant Boumediene teste l'arme du pétrole en 1973 au moment de la guerre du Kippour et veille à maintenir la cohésion de l'OPEP, justifiant son action devant l'ONU. Reste la question du Sahara occidental anciennement espagnol. Le recensement espagnol de 1974 dénombre 70 à 80 000 habitants répartis en quatre grands groupes de tribus. Depuis 1963, l'Espagne exploite les gisements de phosphate de Seguiet el Hamra, avec des réserves évaluées à 10 milliards de tonnes. On trouve aussi du fer, de l'uranium, du cuivre et du gaz. La côte est très poissonneuse. L'Espagne veut un référendum sur l'autodétermination sauvegardant ses intérêts dans la région. Mais le Front Polisario d'El Ouali Mustapha Sayed commence à attaquer les Espagnols le 10 mai 1973. L'Algérie veut un territoire indépendant et non-aligné. Le Maroc, qui ambitionne de récupérer le territoire, s'oppose à toute autodétermination. C'est pourtant la demande d'une commission d'enquête de l'ONU envoyée sur place en 1975. Hassan II est débouté par la Cour de la Haye. Il organise alors une immense manifestation de 350 000 personnes qui marchent vers le Sahara. Le 14 novembre 1975, l'accord de Madrid divise le Sahara occidentale entre la Mauritanie et le Maroc. L'Algérie réplique par une intense activité diplomatique : le Front Polisario est reconnu par l'Organisation de l'Unité Africaine en 1976 et s'organise en Etat alternatif, soutenu militairement par l'Algérie et financièrement par la Lybie. Le 1er mai 1977, le Front Polisario investit le champ médiatique en abattant deux Français et en enlevant 6 autres à Zerouate. Le 25 novembre, un corps militaire français intervient. Le Maroc expédie 12 000 soldats. Le Polisario attaque les centres miniers assurant les exportations de fer, principaux revenus de la Mauritanie. Le 10 juillet 1978, le Polisario signe un accord avec la Mauritanie et se retourne contre le Maroc. La question du Sahara occidental n'est pas réglée à la mort de Boumediene.

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    • #3
      V) Société et culture en Algérie (1962-1982) :

      L'autonomie économique recherchée par l'Algérie nécessite des cadres bien formés. En 1961, moins de 15 % des enfants algériens sont scolarisés ; ils sont près de deux millions en 1970. Il ne reste que 700 instituteurs en juillet 1962 ; vingt ans plus tard, avec l'aide française, ils sont 19 000. La disparité par sexe s'estompe dans le primaire et le secondaire avec 40 % de filles ; en revanche, à l'université, le chiffre stagne à 25 % dès 1978. Le projet d'école fondamentale de 1980 repose sur trois cycles ternaires. Un Institut Pédagogique National est établi. L'université s'aligne sur le modèle américain alors que l'école fondamentale ressemble plus à celle appliquée dans le bloc soviétique. Le but est de s'émanciper de l'influence française. Mais les résultats sont décevants : 25 % de réussite au BAC en 1982, un recours massif aux enseignants étrangers (égyptiens dans le primaire), un faible rendement de l'université, une insistance sur les fonctions de gestion et non sur celles de maîtrise des techniques pourtant nécessaires. Deux problèmes graves se rajoutent au tableau. Avec la révolution sanitaire, l'espérance de vie bondit et la natalité reste très forte : en 1975, l'Algérie détient presque le record mondial de fécondité avec 8,1 enfants par femme. L'urbanisation galopante affirme la domination du monde ouvrier et un redéploiement géographique des richesses vers l'est algérien. Un décalage s'instaure entre le secteur public et le secteur privé ; les grèves se multiplient. La modernité qui s'accélère à la fin des années 70 entraîne une redéfinition identitaire. L'Algérie doit être rearabisée : c'est le credo du ministre de l'Information et de la Culture, Ahmed Taleb-Ibrahimi. Il faut renouer avec le passé ancestral perdu et rompre avec l'héritage français. Cela doit passer évidemment par la langue. Mais la promotion de l'arabe est difficile. Les principaux quotidiens demeurent écrits en français : El Moudjahid ou Algérie-Actualité, face à l'arabe Ech Chaab (Le Peuple). L'arabisation totale s'oppose d'ailleurs aux tenants d'une culture populaire, arabe ou kabyle. A l'université, le clivage s'installe avec les sciences dures enseignées en français. L'arabisation entraîne par contre une plus grande réception des thèses panarabes et des courants de l'islamisme politique (Frères musulmans égyptiens par exemple). L'islamité est aussi défendue par le pouvoir à travers une série de décrets pris à partir de 1976 : instauration du jour de repos le vendredi, interdiction des paris et de la vente de boissons alcoolisées, de l'élevage du porc. Les écoles privées sont nationalisées et l'école unique est confessionnelle. On compte plus de 5 000 mosquées en 1980. Bruno Etienne parle d'un islam moniste, c'est à dire contrôlé par l'Etat qui réprime toute déviance face au discours officiel. Henri Sanson ajoute une “pluriconfessionnalité du dedans” puisque l'islam algérien, de rite sunnite malékite, tolère les rites hanifite et ibadite. Les pratiques populaires comme le culte des saints s'articulent avec l'islam étatique. L'islamisme survit de façon souterraine. Le cheikh Abdelatif Sotani publie au Maroc en 1974 un violent pamphlet contre Boumediene. L'association Al Qiyam (Les Valeurs) née en 1964 autour d'Hachemi Tidjani veut restaurer les valeurs authentiques de l'islam. Les étudiants des filières arabisées, frustrés du manque de débouchés et de l'insuffisance de leur formation, prêtent une oreille attentive aux discours islamistes. Le pouvoir, la bureaucratie militaire, reconstruisent par ailleurs l'histoire pour s'autoperpétuer. On élimine donc du récit de la guerre de l'indépendance les maquis de l'intérieur. La frénésie commémorative du moment sabre les masses paysannes, urbaines et les exilés français du FLN ainsi que l'appui étranger. Les bibliothèques et librairies sont censurées. Le système est renforcé en 1974 avec la création du Centre National d'Etudes Historiques. On écarte les travaux sur la guerre d'Algérie (Mohammed Harbi, Ferhat Abbas, le commandant Azzedine) comme prématurés pour être objectifs (!) mais on encourage les récits d'une guerre élevée au rang de mythe manichéen, avec ses bons et ses méchants. Pas de noms, pas de mentions des règlements de comptes ou du pluralisme politique : seuls les morts ont le droit de cité. Il n'est donc pas étonnant que les jeunes Algériens aient des “trous de mémoire” et ne soient guère politisés. Nasreddine Saïdouni plaide encore en 1984 pour une histoire de la longue résistance algérienne depuis 1830, qui serait continue jusqu'à l'indépendance. La Société Nationale d'Edition et de Diffusion est créée en 1967 et l'Office des Publications Universitaires en 1973. En 1975, un grand complexe d'impression et d'arts graphiques s'installe à côté d'Alger. Pourtant les auteurs algériens publient à l'étranger majoritairement, surtout en France. La vie littéraire est quasi inexistante. A côté des anciens auteurs comme Kateb Yacine ou Mohamed Dib, d'autres émergent : Assia Djebar, Mourad Bourboune par exemple. L'intérêt pour cinéma est précoce : l'Office national pour le commerce et l'industrie cinématographique est créé en 1967 et a le monopole. Trois grandes phases se distinguent : jusqu'en 1971 domine la guerre d'indépendance : La Bataille d'Alger de Gino Pontecorvo, Le Vent des Aurès de Mohamed Lakhdar-Amina. A partir de 1972, c'est la révolution agraire qui occupe le devant de la scène : Le Charbonnier de Mohamed Bouamari, La Corde de El Hachémi Chérif et Noua d'Abdelaziz Tolbi. Après 1976, c'est la vie quotidienne qui est présentée : Omar Gatlato de Merzak Allouache (1976) entre autres. Mais cette classification est trop simpliste puisque les cinéastes algériens arrivent à mélanger les genres. A la mort de Boumediene, le 27 septembre 1980, près de 60 % de la population n'ont pas connu la colonisation : les bahis (jeunes exclus du système scolaire sans travail), les tchi-tchi (jeunesse dorée des beaux quartiers) et les hittistes (porteurs de murs, jeunes désoeuvrés adossés aux murs) ne se reconnaissent pas dans le régime. La jeunesse s'affirme alors comme une force explosive et elle exprime ses attentes dans la musique. La chanson kabyle a ses idoles comme Aït Menguellet. Le raï, né à Sidi-bel-Abbes, qui utilise l'arabe dialectal, dit le mal de vivre de la jeunesse citadine. Des chanteurs comme Cheb Khaled représente à l'étranger la musique algérienne en plein renouveau.

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      • #4
        VI) Le blocage du système (1979-1988) :

        Dans les années 80, l'Algérie est confrontée à la poussée de l'islamisme et au repli sur soi initié par la confrontation avec l'Europe, notamment la France qui instaure la politique des visas en 1986. La crise de l'Etat-nation algérien se définit ainsi : doit-on imposer un Etat moderne sur le modèle d'état importé ? Que choisir entre nationalisme arabe et islamisme ? L'irruption de la société de consommation bouleverse les cadres traditionnels. L'islamisme a pu apparaître comme une réponse, d'autant plus que le système de parti unique bloque les aspirations de la société. Boumediene mort, c'est le colonel Chadli Bendjedid qui prend le pouvoir jusqu'en 1992. Il triomphe grâce à l'appui du chef de la sécurité militaire, Kasdi Merbah. Bendjedid veut enclencher la libéralisation économique et détendre le jeu politique. Mais éclate alors le “printemps berbère” : le gouvernement interdit le 19 mars 1980 une conférence de l'écrivain Mouloud Mammeri à l'université de Tizi-Ouzou sur l'usage de la langue berbère. Une grève générale frappe alors la Kabylie en avril. Les émeutes sont sévèrement réprimées en avril-mai. Le FLN est ravagé par la corruption et l'affairisme et plusieurs scandales éclatent dans les années 80. Le Bureau Politique est contrôlé par Mohamed Chérif Messaadia. Pour redresser la situation économique, Bendjedid lance un nouveau plan quinquennal (1980-1984), reconnaissant l'importance du secteur privé : 700 00 ha de terres sont privatisées ; la propriété agricole privée représente 62 % de la SAU en 1985 et fournit 50 % de la production. En revanche, le chômage augmente du fait de la démographie et de la faible création d'emplois et l'économie reste dépendante des hydrocarbures, dont les prix chutent dans les années 80. L'endettement est inquiétant ; plus de 35 % du PNB en 1981. Longtemps cachée, la dette publique algérienne met pourtant le pays au bord de la cessation de paiement en 1994. En politique étrangère, le président algérien conserve une importance reconnue en jouant les médiateurs dans la crise des otages de Téhéran et pendant la guerre Iran-Irak. Mais avec les premiers soubresauts de l'empire soviétique, il hésite de plus en plus entre une politique réaliste et le maintien de la ligne tiers-mondiste. Avec la France, trois problèmes sont criants : l'immigration d'abord puisque 820 000 Algériens vivent en France, avec normalement un statut identique aux Français, ce que l'Algérie conteste ; ensuite, quelle est la place des immigrés de deuxième génération, sont-ils Français ou algériens ? Enfin, l'Algérie réclame des arriérés d'un milliard à la Sécurité Sociale. L'arrivée au pouvoir de François Mitterrand détend les relations : un accord sur le gaz est signé en 1982. La France ferme les yeux sur l'assassinat d'Ali Mecili, leader du Front des Forces Socialistes, le 7 avril 1987, et extrade le tueur en Algérie. Bendjedid met aussi en œuvre une autre réécriture de l'histoire par l'intermédiaire de biographies des glorieux combattants disparus. Le 8 juillet 1985, un numéro spécial d'Algérie-Actualité est saisi et détruit pour avoir mentionné les noms des Boudiaf, Ben Bella et Ahmed. L'histoire officielle veille à fabriquer l'oubli. L'Etat a nationalisé l'Islam et l'islamisme va surgir en réaction à cette mainmise, d'autant que l'Algérie, à la différence du Maroc par exemple, ne peut se targuer d'une légitimité religieuse. Le 2 novembre 1982 à la cité universitaire de Ben Aknoun à Alger, un étudiant progressiste est tué à coups de sabres. En avril 1985, 135 partisans d'une organisation clandestine, le Mouvement Islamique d'Algérie, sont jugés. Leur chef Mustapha Bouyali est condamné à la perpétuité. L'Etat inaugure cependant en septembre 1984 une grande université des sciences islamiques à Constantine. Mais le nombre de mosquées exige plus de fonctionnaires du culte que les capacités de l'Etat n'en fournissent : les imams libres, vecteurs de l'islamisme, en profitent. A côté des oulémas traditionnels, Soltani et Sahnoun, on trouve des courants influencés par les Frères musulmans. Les islamistes jouent un rôle certain dans l'adoption par l'Assemblée du code du statut personnel et de la famille, en 1984, qui sanctionne la polygamie restreinte, l'interdiction pour les femmes d'épouser un non-musulman et la minorité féminine sur le plan de la loi. L'Algérie est donc devenue un monde urbain, industrialisé avec une population très mobile. Mais la fin de la rentre pétrolière avec les baisses de prix exacerbent les tensions sociales, avec le chômage et le manque d'équipements. Des émeutes éclatent à Constantine en 1986. Le système économique et politique est en crise.

        VII) Le choc d'octobre 1988 et ses suites :

        En octobre 1988 disparaît le parti unique jusque là tenu par l'armée. Reste à savoir qui de l'islamisme ou de la démocratie prendra la suite. Après une brève période d'euphorie démocratique, l'Algérie va s'enfoncer dans la violence. Le 4 octobre, des émeutiers investissent les rues d'Alger. Le mouvement s'étend vite à tout le pays et bientôt, les islamistes s'y joignent. Une semaine après le début des émeutes, on compte déjà 500 morts et des milliers d'arrestations. Une modification de la Constitution est votée, mais Bendjedid est réélu président en décembre 1988. Le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie fondé le 9 février 1989 marque l'entrée de l'Algérie dans le multipartisme. Le Front Islamique du Salut, lui, regroupe les islamistes. Le Front des Forces Socialistes est reconnu et Ahmed rentre en Algérie fin 1989. Le 27 septembre 1990, Ahmed Ben Bella, leader du Mouvement pour la Démocratie en Algérie, pose à nouveau le pied sur le sol natal. Les partis politiques et les nouveaux journaux se multiplient. Le FLN et l'armée demeurent les bras du pouvoir, mais la pratique oscille entre ouverture démocratique et répression sous les gouvernements de Kasdi Merbah (novembre 1988-septembre 1989) et Mouloud Hamrouche (septembre 1989-juin 1991). En revanche le problème de la dette n'est pas résolu, et le coût de la vie augmente ; les grèves de l'UGTA sont suivies à 90 % en mars 1991. Devant le vide du nationalisme arabe, abattu face à Israël notamment, les regards se tournent vers les monarchies du Golfe, l'Arabie Saoudite en particulier, florissantes avec leur manne pétrolière. L'islamisme remplit le vide créé par la faillite du parti unique et rafle les places aux élections municipales et régionales du 12 juin 1990 qui voient le triomphe du FIS. Abassi Madani et Ali Benhadj, chefs du parti islamique, sont au pinacle. Toutes les évolutions de la société algérienne peuvent explique la montée du FIS : désarroi idéologique, rôle nouveau du spirituel dans le politique, place de l'Arabie Saoudite, faillite du parti unique, faiblesse des partis démocratiques, passage à l'économie de marché assez brutal. Les islamistes rejettent absolument toute influence française et se réfèrent notamment à l'entre-deux-guerres et au Parti du Peuple Algérien. L'islamisme se base donc sur le triptyque nation-identité religieuse-peuple et se présente comme une rupture : contre l'Etat impie, contre l'islam officiel dénaturé. Il se présente en héritier d'un FLN épuré de ses influences extérieures. Pendant la guerre du Golfe, les islamistes ne prennent position ni pour Saddam, ni pour les Occidentaux, dénoncés tous ensemble. Le sentiment populaire lui est plutôt pro-irakien. Les premières élections pluralistes sont prévues pour le 27 juin 1991 mais le FIS déclenche une grève brisée par l'armée. Les élections ont lieu le 26 décembre et consacrent à nouveau la force du FIS. L'armée met à bas le président Bendjedid qui s'apprêtait à composer avec le FIS le 11 janvier 1992. Un Haut Comité d'Etat est créé le lendemain et Mohamed Boudiaf en prend la tête, faisant interdire le FIS le 4 mars. Il est cependant assassiné le 29 juin à Annaba. Le 8 juillet 1992, Belaïd Abdessalam forme le nouveau gouvernement. Le 26 août, un attentat à la bombe dans l'aérogare d'Alger fait 10 morts et des dizaines de blessés. La violence s'installe : 400 policiers, gendarmes ou militaires sont tués entre février et septembre. Un couvre-feu est instauré dans les secteurs chauds le 5 décembre entre 22h et 6h du matin. Le 14 décembre, près de la mosquée Apreval à Kouba, fief de l'intégrisme, une patrouille de police tombe dans une embuscade : 5 policiers sont tués et un sixième grièvement blessé.

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        • #5
          VIII) L'Algérie dans la guerre :

          Le conflit plonge l'Algérie dans la guerre entre 1992 et 1995, avec des répercussions en France et ailleurs. Le 13 février 1993, le général-major Khaled Nezzar échappe de justesse à un attentat à la voiture piégée. En mars 1993, Amnesty International accuse le gouvernement algérien de recourir à la torture. Plusieurs intellectuels célèbres sont assassinés cette même année, comme le sociologue Djilali Liabès. A la fin du mois de juin, près de Blida, un convoi militaire est attaqué : 49 soldats sont tués et 19 blessés. 30 000 ha de forêts brûlent en Kabylie tandis que des journalistes particulièrement appréciés sont tués. Rehda Malek prend la tête du gouvernement le 21 août : l'Algérie compte alors 1,5 millions de chômeurs sur 6,5 millions d'actifs. La guerre fait au total 30 000 victimes entre février 1992 et décembre 1994. 64 étrangers ont été pris pour cibles dont 19 Français. Politiquement, les responsables se séparent entre ceux qui souhaitent réintégrer les islamistes dans le jeu politique interrompu début 1992 et ceux partisans de la manière forte. Le 30 janvier 1994, le Haut Conseil de Sécurité confie la présidence au général Liamine Zeroual qui lance des ouvertures aux islamistes. Mais les négociations échouent dans l'année et la violence reprend. Le 3 août 1994, trois gendarmes et deux agents consulaires français sont assassinés à Alger. Charles Pasqua, ministre de l'Intérieur, assigne aussitôt à résidence 17 Algériens suspectés d'islamisme qui seront expulsés. Plus de 6 000 Français vivant en Algérie reviennent en France et Alain Juppé ferme la frontière aux Algériens, tout comme le Maroc un peu plus tard.


          En conclusion, Benjamin Stora rappelle l'importance des concepts de modernité et de crise concernant l'Algérie. Le rapport à la guerre d'indépendance est fondamental pour comprendre l'histoire du pays entre 1962 et 1994. L'Algérie doit “sortir d'une culture de guerre” : il est frappant que l'affrontement armé des années 1990 reprenne des thématiques de la guerre d'indépendance, dans les deux camps d'ailleurs. La mémoire fabriquée par le régime, l'école et ses manuels scolaires, a fait de l'arabo-islamisme le seul facteur de constitution du nationalisme algérien. Le socialisme plébéien, la république, la sécularisation du religieux sont évacués. Tout comme le pluralisme du nationalisme pendant la guerre, la question berbère, alors qu'au contraire la lutte armée a été mise en valeur face à l'affrontement politique. La culture de l'oubli construite par le FLN génère des réflexes automatiques dans la jeunesse des années 90. La réappropriation du passé, qui fait défaut, entrave toute appréhension du futur. Le ressourcement identitaire prend le pas sur la modernisation de la nation. Pour s'en sortir, l'Algérie devrait ne plus rejouer le scénario d'une certaine guerre d'Algérie.

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          • #6
            L'Algérie doit “sortir d'une culture de guerre”
            Nos bourreaux viennent à peine de reconnaitre que c'etait une vraie guerre et non pas une affaire interne à la France donc toutes les exécutions des combattants de l'ALN/FLN sont des crimes de guerre selon les Conventions de Geneve et là , ce n'est qu'un petit exemple !
            Il est donc difficile de s'en sortir de cette culture de guerre tant qu'on n'a pas mis les bons mots pour décrire les 132 ans de la colonisation !

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            • #7
              Ca n'a strictement aucun rapport.

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              • #8
                Salut Alain,

                Je ne comprends pas la conclusion de Stora. Je ne saisis pas ce qu'il veut réellement dire.
                Ni ceci
                .
                Le rapport à la guerre d'indépendance est fondamental pour comprendre l'histoire du pays entre 1962 et 1994
                .

                Ni cela
                L'Algérie doit “sortir d'une culture de guerre”
                Quelle culture de guerre ?

                Ni cela

                :. La mémoire fabriquée par le régime, l'école et ses manuels scolaires, a fait de l'arabo-islamisme le seul facteur de constitution du nationalisme algérien. Le socialisme plébéien, la république, la sécularisation du religieux sont évacués
                Et qu'est-ce qui n'est pas évacué? Qu'est-ce qui est retenu?

                La culture de l'oubli construite par le FLN génère des réflexes automatiques dans la jeunesse des années 90
                L'oubli de quoi ?


                .
                La réappropriation du passé, qui fait défaut, entrave toute appréhension du futur.
                Qu'est-ce qui doit être réapproprié du passé?


                l'Algérie devrait ne plus rejouer le scénario d'une certaine guerre d'Algérie.
                De quoi parle-t-il ?

                Comme tu vois, je ne comprends rien de ses conclusions.

                Pourtant, j'ai lu les pages précédentes et je trouve qu'il relate avec précision l'histoire.

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                • #9
                  Salut Bachi !

                  Déjà je précise que j'ai trouvé cette note de lecture très bien faite, c'est pourquoi je l'ai postée. C'est un gros travail faite par une personne compétente, historien de formation. La conclusion est de lui.

                  Livre écrit en 94 :

                  J'ai dû prêter le bouquin de Stora a qq ... . Donc avec mes mots et idées :

                  La "culture de la guerre" est une attitude délibérée visant à maintenir au centre de l'agora algérienne les conditions psychologiques et politiques de la guerre d'indépendance. La guerre est la légitimité unique des pouvoirs successifs, elle permet de justifier l'absence de pluralité

                  La "confiscation de la mémoire" est très simple et courante, beaucoup d'intervanants dans ce forum en ont parlé sous une forme ou une autre. Je quote le résumé qu'en a fait l'historien :

                  Le pouvoir, la bureaucratie militaire, reconstruisent par ailleurs l'histoire pour s'autoperpétuer.

                  On élimine donc du récit de la guerre de l'indépendance les maquis de l'intérieur. La frénésie commémorative du moment sabre les masses paysannes, urbaines et les exilés français du FLN ainsi que l'appui étranger. Les bibliothèques et librairies sont censurées.

                  Le système est renforcé en 1974 avec la création du Centre National d'Etudes Historiques. On écarte les travaux sur la guerre d'Algérie (Mohammed Harbi, Ferhat Abbas, le commandant Azzedine) comme prématurés pour être objectifs (!) mais on encourage les récits d'une guerre élevée au rang de mythe manichéen, avec ses bons et ses méchants.

                  Pas de noms, pas de mentions des règlements de comptes ou du pluralisme politique : seuls les morts ont le droit de cité.

                  Il n'est donc pas étonnant que les jeunes Algériens aient des “trous de mémoire” et ne soient guère politisés. Nasreddine Saïdouni plaide encore en 1984 pour une histoire de la longue résistance algérienne depuis 1830, qui serait continue jusqu'à l'indépendance.
                  La politisation du peuple algérien a donc été rendu impossible par une impossibilité a concevoir des bases stables et réalistes d'un passé fondateur confisqué (équivalent en teneur à la Révolution Française). Sans politisation pas de projection dans le futur non plus. Ce même passé édulcoré est par contre utilisé en permanence pour légitimer les équipes au pouvoir.

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                  • #10
                    Bachi

                    j'ai l'impression que tu vis dans une autre dimension.

                    en tout cas tu es vraiment loin de la réalité algérienne, c'est trop apparent !!!
                    Rebbi yerrahmek ya djamel.
                    "Tu es, donc je suis"
                    Satish Kumar; "Tout est lié, c'est le don qui est le lien naturel entre tout".

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                    • #11
                      Elle s'affirme par le soutien aux peuples africains colonisés et elle participe au premier sommet panafricain à Addis-Abeba en 1963. Le nationalisme arabe de Bella rejoint celui de Nasser.
                      c'était le mauvais choix qui a alimente des tensions avec les voisins et l'occident jusqu'a aujourd huit

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                      • #12
                        La conclusion est de lui.

                        Oui, je savais très bien...



                        La "culture de la guerre" est une attitude délibérée visant à maintenir au centre de l'agora algérienne les conditions psychologiques et politiques de la guerre d'indépendance. La guerre est la légitimité unique des pouvoirs successifs, elle permet de justifier l'absence de pluralité

                        Si c'est de cette culture que parle Stora, il a raison à 100%...

                        La "confiscation de la mémoire"
                        Peux-tu me dire de quoi il s'agit ?...
                        Perso, je pense que la mémoire est au contraire excessivement servie, instrumentalisée...




                        Pas de noms, pas de mentions des règlements de comptes ou du pluralisme politique : seuls les morts ont le droit de cité.
                        Ok, je pense de que je sais maintenant de quelle mémoire il s'agit...
                        Et c'est vrai, ce que tu dis ici...

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                        • #13
                          Bachi

                          j'ai l'impression que tu vis dans une autre dimension.

                          en tout cas tu es vraiment loin de la réalité algérienne, c'est trop apparent !!!
                          Tu es tellement constructif !
                          Le sujet est l'histoire de l'Algérie de Stora et non Bachi...

                          Si tu savais lire, tu aurais lu que je posais des questions de clarification pour mieux saisir Stora.

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                          • #14
                            L'Etat a nationalisé l'Islam et l'islamisme va surgir en réaction à cette mainmise, d'autant que l'Algérie, à la différence du Maroc par exemple, ne peut se targuer d'une légitimité religieuse
                            pourquoi faut t-il que ce soit des etrangers qui pensent et ecrivent l'histoire du pays. comme tout auteur, stora a une ou des theses, qu'il defend, parfois en gonflant certains phenomenes parfois en eclipsant des choses insignifiantes pour lui mais fondamentales par ailleurs !

                            l'état a nationalisé l'islam, d'accord on comprend ce qu'il veut dire (islam religion d'etat)...

                            mais je ne suis pas d'accord quand il dit que "l'islamisme va surgir en réaction à cette mainmise".

                            l'islam ne peut être entravée par l'état, c'est un logiciel autogire et independant. la dynamique revolutionnaire islamique a commencée depuis le moyen-âge mais elle a connu ses statuts politiques par la pensée des frères musulmans. l'algerie état socialiste (pour ne pas dire communiste) ne pouvait qu'entrainer la replique islamiste. on asistera à la même chose en iran et en afghanistan. face à la sovietisation de l'état afghan, la base populaire va enfanter des anticorps sensés proteger l'authenticité locale, le nationalisme se combine et passe par l'islamisme. en iran c'est la marche forcée vers l'americanisme qui va pousser à la fronde le clergé chiite, qui a peur de ce nationalisme forcené de l'etat perse allié à un progressisme sauvage importé des etats-unis, etat et monde completement etranger à la base sociale, rurale et conservatrice par essence même. il est evident que l'islamisme en algerie est née de la "sovietisation" de l'état et de la societe. quand les islamistes vont avoir sous les yeux la lutte des moudjahidins afghans qui luttent et meurent face à l'armée rouge, ils vont se reconnaître en ce combat, partirons à la guerre (djihad) et certains ideologues feront le rapprochement avec l'etat socialiste algerien (socialisme, communisme = impie) ! l'arabie, fief du wahabisme, en guerre ideologique contre la sovietisation de l'afghanistan, s'allie aux americains et exporte le djihadisme contre l'avancée rouge, cette ideologie se retrouvera en algerie, travaillée par l'islamisme politique et revolutionnaire. l'algerie est un receptacle des crises des années 70 et 1980 !

                            quelle legitimité religieuse a le maroc ? ça ne veut rien dire...

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                            • #15
                              Faut-il lui rappeler que ce qu'ils appellent intégrisme religieux est une création de la CIA ( avec Bush père à la tête) qui avait servit leur intérêts en Afghanistan et depuis ils ne sont pas occupés de cette nébuleuse comme l'avait suggéré la feue premier ministre Mme Buttho; c'était plus pratique pour se débarrasser d'elle pour enfin reconnaître qu'elle avait raison plus tard et on connait la suite. A little too late. Pour ceux qui disent que l'arabe est la cause de l'intégrisme, un raccourcis ridicule; la preuve les premiers réformistes arabes était les premiers opposants de ce mouvement, la président Nasser en était la preuve en exécutant leur leader Cheïekh Kotb; y'a qu'a écouter son discours, alors que les tirs de feu été lancés vers lui, il continua en calmant l'audience disant qu'il y aurait des milliers de Jamal après lui.
                              Dernière modification par djamal 2008, 28 juin 2009, 07h45.
                              Ask not what your country can do for you, but ask what you can do for your country.

                              J.F.Kennedy, inspired by Gibran K. Gibran.

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