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Le prétexte perse et la twitter zone

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    La crise postélectorale iranienne est, cela a été dit dans ces colonnes, l'expression d'un conflit de pouvoir entre groupes antagonistes au sommet des appareils d'Etat.

    L'un des deux groupes principaux est dirigé par le Guide suprême de la Révolution islamique, l'Ayatollah Khamenei, l'autre est piloté par l'Ayatollah Rafsandjani, ancien président de la république et actuellement président du « Conseil de Discernement », une structure d'arbitrage entre les institutions du pays.

    La presse occidentale qui « pense pour nous », nous a donné les étiquettes : la faction dirigée par le guide suprême est ultraconservatrice et le clan opposé est le pôle modéré. C'est pourtant une construction théorique qui ne repose sur aucune réalité programmatique ou idéologique. Les uns et les autres n'ont en réalité aucune divergence sur la nature théocratique du régime et sur la primauté absolue de la hiérarchie religieuse sur tous les aspects de la vie sociale du pays.

    Ce qui divise les protagonistes de la crise, le président-élu Ahmadinedjad et son rival malheureux Moussavi, est ce qui sépare les couches populaires défavorisées et la bourgeoisie, moyenne et haute. Les uns ont été les bénéficiaires d'une politique sociale, souvent teintée de populisme et les autres souhaitent l'instauration d'un modèle économique plus conforme à leurs intérêts. Le bilan politique de Mir Hossein Moussavi lorsqu'il était premier ministre n'indique pas le degré d'ouverture qu'on lui prête aujourd'hui : plus de 8000 peines capitales ont été exécutées sous son autorité.

    De la même manière, l'Ayotallah Rafsandjani, que les médias occidentaux dépeignent à l'heure actuelle comme un « modéré », avait été accusé de terrorisme international, il a même été inculpé par la justice argentine pour un attentat commis à Buenos-Aires en octobre 2006.

    Un traitement singulier

    La singularité du traitement de l'affaire iranienne par les médias occidentaux réside dans l'extrême mobilisation des européens par rapport au profil relativement bas adopté par les américains. Le président Obama, même s'il a fini par hausser le ton sous la pression, a fait montre d'une grande prudence en déclarant en substance que l'hostilité iranienne à l'endroit des Etats-Unis prévaudrait quel que soit le candidat élu.

    La presse asiatique, bien plus au fait des réalités iraniennes qu'une expertise européenne dont le militantisme discrédite bien des analyses, est infiniment plus nuancée. La fraude, très probable comme dans tous les pays du tiers-monde, a-t-elle modifiée le résultat des élections ? Pour les asiatiques et certains américains et canadiens, cette hypothèse est purement théorique, tant la base d'Ahmadinedjad est numériquement supérieure.

    La grille de lecture extrêmement réductrice et d'un manichéisme primaire proposée par les médias européens n'est pas valide. Les affrontements internes au régime n'opposent pas de bons «modérés» ou «réformateurs» à de mauvais «ultraconservateurs». Les modérés n'entendent pas changer la nature du régime ; il s'agit pour eux, essentiellement, de réorienter l'allocation de la rente pétrolière vers les couches «entrepreneuriales» susceptibles d'en faire un usage plus efficace au service du développement du pays. Les libertés démocratiques ne sont pas à l'ordre du jour et il n'est pas sur que l'extraordinaire pression médiatique contribue à en faire une priorité.

    Une défaite opportune

    En réalité, pour Israël et ses alliés, la défaite du camp dirigé par Rafsandjani et Moussavi est parfaitement opportune. En termes de propagande et de stratégie de diversion, les troubles à Téhéran contribuent à relancer l'entreprise de diabolisation de ce pays et à conditionner les opinions publiques occidentales à un durcissement des sanctions. Les premiers résultats de cette campagne de grand style apparaissent déjà. De nombreux mouvements de « gauche », y compris ceux qui se réclament de la solidarité avec le tiers-monde et l'altermondialisme, rejoignent les positions des establishments politiques.

    Le conditionnement de l'opinion occidentale favorisera t-il l'évolution « démocratique » d'un régime autoritaire certes, mais disposant d'une légitimité populaire indiscutable ? A cette aune, aucun pays de la région ne tient la comparaison avec l'Iran. Les monarchies obscurantistes n'organisent pas d'élections et n'autorisent pas le moindre débat. Ce qui apparaît clairement est que l'indignation sélective orchestrée permet - essentiellement - à masquer les réalités moyen-orientales. Au premier chef, la politique agressive de la seule puissance nucléaire de la région. Il est bien plus simple de sanctionner l'Iran que de tenter de contraindre Israël à respecter le droit international. Dans la cacophonie savamment entretenue, la politique de colonisation et de purification ethnique se poursuit à l'ombre bienveillante du silence médiatique. Tel semble être l'enjeu d'une bataille médiatique où la solidarité avec les forces démocratiques iraniennes n'est qu'un confortable prétexte.

    Le Quotidien d'Oran
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