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Que fallait-il pour etre savant

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  • Que fallait-il pour etre savant

    Allez, un peu de lecture pour qui la question intéresse : Que fallait-il avoir dans la cervelle pour prétendre au titre de savant en Islam ? En guise de réponse, voici un petit extrait des mémoires d'un homme de savoir sunnite standard, un bagdadien du 13e s. pour l'occasion, 'Abd al-Latif al-Baghdadi (1162 - 1231) :

    Je fus élevé sous la protection du cheikh Abu al-Nadjib, sans connaitre le jeu et la distraction. La plus grande partie de mon temps se passait à écouter du hadith. Des ijazate (ijaza = autorisation d’enseigner accordée par un maitre a un étudiant juge apte) de professeurs de Bagdad, du Khorasan, de Syrie et d’Égypte me furent données. Un jour, mon père me dit : « Je t’ai fait entendre tous les hommes célèbres de Bagdad et je t’ai fait suivre, en matière de transmission du hadith, les cheikhs les plus illustres ». En même temps, j’étudiais l’écriture, et j’apprenais par cœur le Coran, le Fasih (célèbre ouvrage de lexicographie), Les Maqamat, Diwan al-Mutanabbi et d’autres ouvrages du même genre, ainsi qu’un abrégé de droit et un abrégé de grammaire.

    Quand j’eus atteint une dizaine d’années, mon père me conduisit auprès de Kamal al-Din al-Anbari, qui était alors un cheikh de Bagdad. Il y avait entre lui et mon père une ancienne amitié, du temps où ils étudiaient le droit a la Madrasa Nizamiya. Je lus sous sa direction Khutbat al-Fasih (ouvrage d’Abu al-‘Alaa al-Ma’ari) ; il débita alors des propos nombreux et continuels auxquels je ne compris rien, mais qui suscitaient l’admiration des élèves autour de lui. Puis il dit à mon père : « Il m’est insupportable d’instruire les enfants. Conduis-le à mon élève al-Wajih al-Wasiti, puis quand son niveau sera moyen, il étudiera avec moi ». Al-Wajih, homme aveugle, riche et vertueux, me prit complètement en charge, et commença à m’instruire du matin jusqu’au soir, assistant a son cercle a la mosquée al-Zafariyya. Il faisait pour moi tous les commentaires nécessaires et me les exposait ; a la fin je lisais ma leçon et il m’en faisait un commentaire particulier. De retour a la maison, je sortais les livres sur lesquels mon professeur travaillait lui-même. Je les lui faisais apprendre par cœur et je les apprenais par cœur en même temps que lui. Puis il se rendait auprès du cheikh Kamal al-Din, lisait sa leçon, et lui la lui commentait, tandis que moi j’écoutais. Je consacrais la plus grande partie de mes nuits à apprendre et a répéter, et au fur et a mesure, ma mémoire augmentait et s’améliorait, ma compréhension se renforçait et s’éclairait et mon intelligence s’aiguisait et se perfectionnait. J’étais assidu auprès de mon professeur, et du professeur de mon professeur.


    Le premier ouvrage que j’ai appris par cœur fut al-Luma’ (livre de philologie arabe d’Ibn Djinni) et je l’appris en huit mois. J’écoutais chaque jour le commentaire de ce que d’autres lisaient ; lorsque j’étais de retour chez moi je lisais le commentaire d’al-Thamanini, celui d’Omar ibn Hamza, et celui d’Ibn Burhan, ainsi que tous les autres commentaires que je trouvai. Je l’expliquais aux élèves qui m’ont êtes confies, et j’en vins à dire au sujet de chaque chapitre l’équivalent de plusieurs cahiers. Ensuite, j’appris par cœur et parfaitement Adab al-Katib (ouvrage d’orthographe et de morphologie pour les secrétaires) d’ibn Qutayba dont la première moitié me prit plusieurs mois. Après cela, j’appris par cœur Mushkil al-Quran (traite de rhétorique coranique) et Dharib al-Quran (ouvrage sur les passages difficiles du Coran) du même auteur. Puis je passai à al-Idhah (livre de grammaire) d’Abu Ali al-Farisi sur plusieurs mois. Je lus avec assiduité les commentaires, et je l’étudias avec un soin particulier, cherchant a l’approfondir et rassemblant ce qu’en ont dit les commentateurs ; quant à sa Takmila (appendice de l’ouvrage précédent), je l’apprit par cœur en quelques jours. Je lus les livres complets et les abrégés. Je m’appliquais à l’étude d’al-Muqtadab d’al-Mubarrad et du Kitab d’Ibn Durustawayh (deux ouvrages de grammaire). Au milieu de cela je ne négligeai pas d’écouter du hadith et des leçons de droit auprès de notre cheikh Ibn Fadlan a la Madrasa al-Mu’allaqa de Dar al-Dhahab.

    Le cheikh Kamal al-Din à rédigé 130 ouvrages, la plus part sur la grammaire, les autres sur le droit, usul al-fiqh, la mystique et l’ascèse. J’ai écouté, lu et appris par cœur la plupart de ses livres. Il avait commence la rédaction de deux grands ouvrages, l’un sur la langue, l’autre sur le droit, mais il n’a pas pu les terminer. J’avais appris sous sa direction une partie du Kitab de Sibawayh (un des plus anciens grammairiens de la langue arabe). Après la mort du cheikh, je me consacrais encore au Kitab et a son principal commentaire, celui d’al-Sirafi. Ensuite, je lus sous la direction d’Ibn ‘Ubayda al-Karkhi un grand nombre de livres, notamment Kitab al-Usouls (important ouvrage de grammaire) d’Ibn al-Sarraj. Je lus aussi sous sa direction un traite de farai’d (= calcul de parts successorales) et Kitab al-‘Arudh (ouvrage de prose) d’al-Khatib al-Tabrizi, un eleve particulier d’Ibn al-Shadjari. Quant a Ibn al-Khachaab, je l’ai entendu lire les Ma’ani (ouvrage sur le sens du Coran) d’al-Zadjadj, sous la direction de la secrétaire Shuhda bint al-Ibari.

    ... / ...
    Dernière modification par Harrachi78, 30 juin 2009, 06h52.
    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

  • #2
    ... suite

    ... / ...

    Il arriva a Bagdad un homme du Maghreb, connu sous le nom d’Ibn al-Na’ili […]. J’étais l’un de ceux qui sont allés vers lui, et il me fit lire une introduction sur le calcul et la Muqddima (ouvrage de grammaire) d’Ibn Babashad. Il avait une manière étrange d’enseigner. Ceux qui étaient auprès de lui pensaient qu’il était d’une grande profondeur alors qu’il était superficiel. Mais il connaissait les traites d’alchimie, et il avait lu entièrement les traites de Djabir et d’Ibn Wahchiyya […]. Il emplit mon cœur d’un vif désir pour toutes les sciences. Après son départ de Bagdad, je m’appliquais à lire les traites d’al-Ghazali : al-Maqasid, al-Mi’yar, al-Mizan et Mihakk al-nazar. Puis je passais aux ouvrages d’Ibn Sina, les grands comme les petits, et dont j’appris par cœur Kitab al-Najat et je recopiais Kitab al-Shifaa (le plus grand livre de médecine de son temps) et l’approfondissais. J’étudiais Kitab al-Tahsil de son élève Bahminyar, tout comme je recopiais et étudiais de nombreux traites de Djabir Ibn Hayyan al-Sufi et d’Ibn Wahchiyya.[…]

    En 585 de l’hégire (1189 – 1190), comme il ne restait personne a Bagdad qui puisse attirer mon cœur ou remplir me syeux, ni resoudre les difficultes que ej rencontrais, je me rendis a Mossoul, mais je n’y trouvais pas ce que ej desirais, si ce n’est al-Kamal ibn Yunus, verse dans les mathematiques et le droit, et n’ayant qu’une connaissance limitee dans les autres sciences de la sagesse […]. Beaucoup d egens se joignirent a moi et plusieurs postes me furent proposes. Je choisis al-Madrasa al-Mu’alaqa d’Ibn Muhajir et Dar al-Hadith qui est au-dessous.

    Extraits des Mémoires de ‘Abd al-Latif al-Baghdadi,
    Cite dans « Uyun al-anbaa fi tabaqat al-atibaa » d’Ibn Abi Usaybi’a


    Un peu long hein ? Ce n'est pourtant que la liste !

    Pour info, le gars est l'auteur de
    quelques 150 titres dans les domaines les plus divers : philosophie, histoire, tradition prophétique, médecine, grammaire, mathématiques, physique, alchimie … etc. Et encore, il ne s'agit pas la du plus illustre des ulemas de l'histoire de l'Islam.

    Que chaque "musulman" fasse donc le point sur ce qu'il en est, et qu'il pese a la tonne la difference qui separe le savoir que peuvent accumuler de tels hommes dans exactement le meme volume de cervelle que peut remplir un beau neant d'anti-matiere dans d'autres cervelles.

    Dernière modification par Harrachi78, 30 juin 2009, 06h52.
    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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    • #3
      Salam,

      Interéssant !

      Merci de partager grand-père !! BarakALlâh fik.

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      • #4
        Merci Harrachi ( grand père? je te croyais dans la trentaine) pour le texte. C'est sur que quand on compare maintenant à nos propres connaissances, bah on se dit qu'on est loin de tout ça... Ils méritaient bien leur titre de savant à l'époque puisque c'est tous les savoirs qui étaient recherchés.
        Au fait juste une précision, peut être que certains auront remarqué que l'auteur cite Al Ghazali dans son texte, à ne pa confondre avec Mohamed Al Ghazali du 20éme siècle
        Dernière modification par charaf, 30 juin 2009, 13h19.

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        • #5
          Salut Harrachi,

          Même si il peut y avoir de la complaisance dans l'autobiographie, n'en reste pas moins que la formation est effectivement éloquente, ça nous met en face de notre propre inculture et replace beaucoup de nos propos dans la section "bavardage".

          Ce qui m'interpelle le plus, c'est le nombre de livres de grammaire qu'il a ingurgités. Cela prouve que l'étude du Coran, s'appuyaient fondamentalement sur l'étude du texte.

          Outre la dynamique culturel dans le monde musulman (une chaîne de transmission à l'échelle de l'empire), notons par ailleurs le rôle central des livres, cahiers et de la chose écrite dans la civilisation musulmane de l'époque. Si on compare la situation de l'époque à celle d'aujourd'hui, je crois que parler de décadence dans la connaissance des livres et de la réflexion religieuse, ce n'est pas faire preuve de passéisme: c'est tragiquement exact (je ne parle pas des savants mais de la diffusion des savoirs à tous les échelles de la société musulmane). Que Dieu nous pardonne notre peu de culture et qu'il nous donne les moyens de la combler.
          Dernière modification par Dandy, 30 juin 2009, 11h24.

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          • #6
            Beaucoup, beaucoup de par coeur, presque à chaque paragraphe, il parle de par mémorisation et de lecture. Nulle part, il ne parle d'étude, d'analyse, d'évaluation, de recherche.
            C'est peut-être la façon d'étudier à cette époque. De notre temps, de cette manière, il peut développer une expertise en lettres mais je ne vois pas comment il le pourrait en mathématiques, médecine, physique
            Je ne le connais pas, vu mes lacunes en langue arabe, je ne connais pas trop non plus les savants arabo musulmans non traduits.

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            • #7
              A la lecture de l'extrait, je n'ai pas eu l'impression qu'il n'y avait que de la mémorisation. Il parle aussi de commentaires. Je suppose qu'il veut dire par là analyse.

              Justement, à l'époque, il y avait un réel travail de recherche, ce qui a fait avancer les sciences dans bien des domaines.

              Outre la dynamique culturel dans le monde musulman (une chaîne de transmission à l'échelle de l'empire), notons par ailleurs le rôle central des livres, cahiers et de la chose écrite dans la civilisation musulmane de l'époque. Si on compare la situation de l'époque à celle d'aujourd'hui, je crois que parler de décadence dans la connaissance des livres et de la réflexion religieuse, ce n'est pas faire preuve de passéisme: c'est tragiquement exact (je ne parle pas des savants mais de la diffusion des savoirs à tous les échelles de la société musulmane).

              On peut remercier le
              s ottomans pour cet état de fait. Ils ont réussi à figer le développement et la diversification de la civilisation arabo-musulmane à partir du 16ème siècle. Du coup, ils provoqueront sa décadence et sa disparition. Llle traité de Sèvres parachèvera le désastre en livrant pieds et poings liés le monde arabo-musulman aux puissances colonialistes au lieu de permettre son renouveau.
              « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

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              • #8
                Zakia
                A la lecture de l'extrait, je n'ai pas eu l'impression qu'il n'y avait que de la mémorisation

                Rien que dix fois...
                J'ai l'impression à le lire que pour lui, les études c'est du par coeurisme, c'est le summum des prouesses que d'apprendre par coeur. Sans même le connaitre, j'avoue que ça m'a suffit pour ne pas le trouver fort fort.

                En même temps, j’étudiais l’écriture, et j’apprenais par cœur le Coran, le Fasih (célèbre ouvrage de lexicographie), Les Maqamat, Diwan al-Mutanabbi et d’autres ouvrages du même genre, ainsi qu’un abrégé de droit et un abrégé de grammaire.

                Quand j’eus atteint une dizaine d’années, mon père me conduisit auprès de Kamal al-Din al-Anbari, qui était alors un cheikh de Bagdad. Il y avait entre lui et mon père une ancienne amitié, du temps où ils étudiaient le droit a la Madrasa Nizamiya. Je lus sous sa direction Khutbat al-Fasih (ouvrage d’Abu al-‘Alaa al-Ma’ari) ; il débita alors des propos nombreux et continuels auxquels je ne compris rien, mais qui suscitaient l’admiration des élèves autour de lui. Puis il dit à mon père : « Il m’est insupportable d’instruire les enfants. Conduis-le à mon élève al-Wajih al-Wasiti, puis quand son niveau sera moyen, il étudiera avec moi ». Al-Wajih, homme aveugle, riche et vertueux, me prit complètement en charge, et commença à m’instruire du matin jusqu’au soir, assistant a son cercle a la mosquée al-Zafariyya. Il faisait pour moi tous les commentaires nécessaires et me les exposait ; a la fin je lisais ma leçon et il m’en faisait un commentaire particulier. De retour a la maison, je sortais les livres sur lesquels mon professeur travaillait lui-même. Je les lui faisais apprendre par cœur et je les apprenais par cœur en même temps que lui. Puis il se rendait auprès du cheikh Kamal al-Din, lisait sa leçon, et lui la lui commentait, tandis que moi j’écoutais. Je consacrais la plus grande partie de mes nuits à apprendre et a répéter, et au fur et a mesure, ma mémoire augmentait et s’améliorait, ma compréhension se renforçait et s’éclairait et mon intelligence s’aiguisait et se perfectionnait. J’étais assidu auprès de mon professeur, et du professeur de mon professeur.

                Le premier ouvrage que j’ai appris par cœur fut al-Luma’ (livre de philologie arabe d’Ibn Djinni) et je l’appris en huit mois. J’écoutais chaque jour le commentaire de ce que d’autres lisaient ; lorsque j’étais de retour chez moi je lisais le commentaire d’al-Thamanini, celui d’Omar ibn Hamza, et celui d’Ibn Burhan, ainsi que tous les autres commentaires que je trouvai. Je l’expliquais aux élèves qui m’ont êtes confies, et j’en vins à dire au sujet de chaque chapitre l’équivalent de plusieurs cahiers. Ensuite, j’appris par cœur et parfaitement Adab al-Katib (ouvrage d’orthographe et de morphologie pour les secrétaires) d’ibn Qutayba dont la première moitié me prit plusieurs mois. Après cela, j’appris par cœur Mushkil al-Quran (traite de rhétorique coranique) et Dharib al-Quran (ouvrage sur les passages difficiles du Coran) du même auteur. Puis je passai à al-Idhah (livre de grammaire) d’Abu Ali al-Farisi sur plusieurs mois. Je lus avec assiduité les commentaires, et je l’étudias avec un soin particulier, cherchant a l’approfondir et rassemblant ce qu’en ont dit les commentateurs ; quant à sa Takmila (appendice de l’ouvrage précédent), je l’apprit par cœur en quelques jours. Je lus les livres complets et les abrégés. Je m’appliquais à l’étude d’al-Muqtadab d’al-Mubarrad et du Kitab d’Ibn Durustawayh (deux ouvrages de grammaire). Au milieu de cela je ne négligeai pas d’écouter du hadith et des leçons de droit auprès de notre cheikh Ibn Fadlan a la Madrasa al-Mu’allaqa de Dar al-Dhahab.

                Le cheikh Kamal al-Din à rédigé 130 ouvrages, la plus part sur la grammaire, les autres sur le droit, usul al-fiqh, la mystique et l’ascèse. J’ai écouté, lu et appris par cœur la plupart de ses livres. Il avait commence la rédaction de deux grands ouvrages, l’un sur la langue, l’autre sur le droit, mais il n’a pas pu les terminer. J’avais appris sous sa direction une partie du Kitab de Sibawayh (un des plus anciens grammairiens de la langue arabe). Après la mort du cheikh, je me consacrais encore au Kitab et a son principal commentaire, celui d’al-Sirafi. Ensuite, je lus sous la direction d’Ibn ‘Ubayda al-Karkhi un grand nombre de livres, notamment Kitab al-Usouls (important ouvrage de grammaire) d’Ibn al-Sarraj. Je lus aussi sous sa direction un traite de farai’d (= calcul de parts successorales) et Kitab al-‘Arudh (ouvrage de prose) d’al-Khatib al-Tabrizi, un eleve particulier d’Ibn al-Shadjari. Quant a Ibn al-Khachaab, je l’ai entendu lire les Ma’ani (ouvrage sur le sens du Coran) d’al-Zadjadj, sous la direction de la secrétaire Shuhda bint al-Ibari.

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                Pardonnez une seule offense, et c'est la porte ouverte a toutes. Publius Syrus


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                Dernière modification par Harrachi78 Hier à 23h52.


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                Hier, 17h35 #2
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                Il arriva a Bagdad un homme du Maghreb, connu sous le nom d’Ibn al-Na’ili […]. J’étais l’un de ceux qui sont allés vers lui, et il me fit lire une introduction sur le calcul et la Muqddima (ouvrage de grammaire) d’Ibn Babashad. Il avait une manière étrange d’enseigner. Ceux qui étaient auprès de lui pensaient qu’il était d’une grande profondeur alors qu’il était superficiel. Mais il connaissait les traites d’alchimie, et il avait lu entièrement les traites de Djabir et d’Ibn Wahchiyya […]. Il emplit mon cœur d’un vif désir pour toutes les sciences. Après son départ de Bagdad, je m’appliquais à lire les traites d’al-Ghazali : al-Maqasid, al-Mi’yar, al-Mizan et Mihakk al-nazar. Puis je passais aux ouvrages d’Ibn Sina, les grands comme les petits, et dont j’appris par cœur Kitab al-Najat et je recopiais Kitab al-Shifaa (le plus grand livre de médecine de son temps) et l’approfondissais. J’étudiais Kitab al-Tahsil de son élève Bahminyar, tout comme je recopiais et étudiais de nombreux traites de Djabir Ibn Hayyan al-Sufi et d’Ibn Wahchiyya.[…]

                En 585 de l’hégire (1189 – 1190), comme il ne restait personne a Bagdad qui puisse attirer mon cœur ou remplir me syeux, ni resoudre les difficultes que ej rencontrais, je me rendis a Mossoul, mais je n’y trouvais pas ce que ej desirais, si ce n’est al-Kamal ibn Yunus, verse dans les mathematiques et le droit, et n’ayant qu’une connaissance limitee dans les autres sciences de la sagesse […]. Beaucoup d egens se joignirent a moi et plusieurs postes me furent proposes. Je choisis al-Madrasa al-Mu’alaqa d’Ibn Muhajir et Dar al-Hadith qui est au-dessous.

                Extraits des Mémoires de ‘Abd al-Latif al-Baghdadi,
                Cite dans « Uyun al-anbaa fi tabaqat al-atibaa » d’Ibn Abi Usaybi’a
                Dernière modification par Bachi, 30 juin 2009, 15h14.

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                • #9
                  Outre la dynamique culturel dans le monde musulman (une chaîne de transmission à l'échelle de l'empire), notons par ailleurs le rôle central des livres, cahiers et de la chose écrite dans la civilisation musulmane de l'époque. Si on compare la situation de l'époque à celle d'aujourd'hui, je crois que parler de décadence dans la connaissance des livres et de la réflexion religieuse, ce n'est pas faire preuve de passéisme: c'est tragiquement exact (je ne parle pas des savants mais de la diffusion des savoirs à tous les échelles de la société musulmane). Que Dieu nous pardonne notre peu de culture et qu'il nous donne les moyens de la combler.
                  Peut-être bien dans le religieux et peut-être bien dans le monde arabo musulman...

                  Commentaire


                  • #10
                    Beaucoup, beaucoup de par coeur, presque à chaque paragraphe, il parle de par mémorisation et de lecture. Nulle part, il ne parle d'étude, d'analyse, d'évaluation, de recherche.
                    C'est ce que j'ai remarqué pour ma part aussi... nEst ce pas à ce déchirer les cheveux Bachi que de voir le monde arabo-musulams dans une telle crise du savoir et de la pensée ?

                    Je ne comprend pas pourquoi on glorifie les anciens à ce point ! le savoir humain avance et évolue sans cesse vers une meilleur compréhension des choses et nous musulmans restons figé dans le passé. L'argument qui consiste à dire que les anciens sont plus enclins à comprendre l'histoire et la religion parce qu'ils sont plus proche de la source est foireux au plus haut degré. Je répond de façon globale et pas seulement sur la religion.

                    - D'abord ces gens nétaitent pas si proches que cela, des siecles les séparaient de la source, donc cette distance est très relative et dépend seulement de la quantité d'information qu'une personne possède. Or tout un chacun sais très bien que, au minimum, toutes les infos que possédaient ces gens nous les possédons aujourdhui... Et nous possèdons même plus que eux puisque l'on a une gigantesque compilation d'autres source et études qui aurai pu être réalisées au fil du temps. Le temps affine le savoir, et c'est à l'avantage des récents et pas des anciens.

                    - Puis les moyens d'acquérir le savoir était vraiment très très limités... il fallait se déplacer des milliers de km pour lire un livre, et très rares sont ceux qui possédaient des copies des sources. D'autre part il était très difficile d'obtenir les ouvrages qui racontent l'histoire de l'autre point de vue.

                    - Ensuite parce que la compréhension du monde était très rudimentaire à l'époque et on avait une vision très naïve des origines.

                    - Le plus important dans tout cela, c'est l'absence (pas totale) de méthodologie scientifique critique. Cela est sans surprise s'agissant de la religion... on abordait la chose non pas d'un point de vue critique, mais d'abord en croyant convaincu et sous le prisme de la loyauté et de l'appartenance en ingurgitant tout ce que l'on nous raconte. je dis pas totale, parce qu'il y a eu aussi des critiques de la religion tel que Omar Khayam, al-Maari et Ibn Arawandi et il y a eu aussi le mouvement très regretté des motazilites qui a été étouffé dans le berceau... la décadence de la science "musulmane" a réellement commencé avec Abou Hamed Alghazali et pas avec les Ottomans ma chère Zakia.


                    Je suis conscient que le topic parle plutôt du savoir religieux, et que on va me dire que je suis hors sujet... mais j'estime que la méthodologie d'acquérir le savoir et la vérité est générale et indépendante du domaine, c'est simplement la méthodologie scientifique initiée par les philosophes grecques. S'enfermer dans la prison des dogmes religieux, la répétition sans questionnement et sans étude critique est le plus pire qui puisse arriver à une science.
                    Dernière modification par KFgauss, 30 juin 2009, 16h33.

                    Commentaire


                    • #11
                      e fus élevé sous la protection du cheikh Abu al-Nadjib, sans connaitre le jeu et la distraction. La plus grande partie de mon temps se passait à écouter du hadith
                      franchement quand je lis ca ...j'ai pas envie de continuer ...je ne peut franchement lire quelqun qui ne connait rien a la vie ...et qui quand meme va pourir la vie des autre ...
                      ni les jeux ni la distraction ..je vois le genre que ca donne ...freud !!!!!!!!!! au secours !!!!!!!!!!!

                      Commentaire


                      • #12
                        @Bachi

                        Attention, nous parlons de gens qui ne disposaient ni d'ordinateurs, ni même de systèmes de classement ou de moyens d'annotation assez efficaces qui leur permettent d'avoir sous la main et a volonté toutes les références dont ils ont besoin pour leur propres travaux. Connaitre les sources légales (surtout le Coran et les corpus de hadith) par cœur permet d'avoir toutes ses références a portée de mémoire, donc une argumentation instantanée sur chaque question traitée, que ça soit en groupe ou en solo.

                        D'autre part, tu notera que l'essentiel des ouvrages profanes qu'il a pris la peine d'enregistrer par cœur dans sa mémoire, ce sont les manuels de grammaire (la parfaite maitrise de la langue étant un outil indispensable a tout exégète du Coran ou du Hadith), et les grands ouvrages de médecine de son époque.

                        Et comme l'a note ZAKIA, pour chaque ouvrage (certains étaient les références de leur domaines autant que le serait n'importe quel manuel fameux de telle ou telle discipline) il décortiquait tous les commentaires et les traites relatif qui lui étaient accessibles. Que ferait de plus un jeune étudiant universitaire de notre age que lire des livres et des commentaires ?

                        Pour le reste, cet extrait (deja abrégé) décrit ce qu'il a pu apprendre, ce qu'il a pu lire et étudier, et non pas ce qu'il a lui même compose ni la teneur de ses propres travaux : lui-même auteur de 130 livres en diverses matières, y compris les scientifiques d'entre elles (selon les connaissance de l'époque bien entendu), penses-tu donc qu'il les rédigea pour réciter ses mémorisations ?
                        Dernière modification par Harrachi78, 30 juin 2009, 17h57.
                        "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                        • #13
                          Harrachi

                          J'ai déjà écrit que ça devait être la pratique à cette époque. Epoque pauvre en moyens.
                          Et c'est beaucoup pour cela que les résultats des scientifiques de ces époques ne m'impressionnent guère. Je ne nie pas les efforts ni les compétences de cette personne que je ne connais pas mais il m'est toujours difficile de reconnaitre une autorité à ces gens d'une autre époque.

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                          • #14
                            le savoir c'est aussi quelque chose qui s'accumule ...un esprit a partir du moment qu'il s'interesse a un sujet ...peut en savoir plus qu'un ancien ...ce plus est aprendre au sens mathematique ....il sait ce que sait l'ancien plus les nouveautés mois ancienne celles d'autres epoques ..d'autres esprit.....
                            c'est vrai que ces connaissances sont larges diverses ....parfois fausses

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                            • #15
                              @Bachi

                              Non non, le but du poste n'était pas vraiment destine a exalter une quelconque prouesse scientifique, et il faut bien se dire qu'il s'agit la d'un érudit plutôt standard, qui n'a pas spécialement excelle dans un domaine.

                              Non, c'est plutôt pour donner une illustration sur le chemin que pouvait suivre un étudiant de son temps pour parvenir au rang d'enseignant dans une école de son époque, et le genre d'efforts qu'il devait fournir des un très jeune age pour maitriser suffisamment les outils nécessaires, et acquérir assez de savoir a même de lui permettre d'émettre des avis juridiques, faire de l'exegese coranique, composer des traites théologiques ... etc.

                              ... il m'est toujours difficile de reconnaitre une autorité à ces gens d'une autre époque.

                              Pas plus qu'il ne t'es concevable de reconnaitre une autorité a Avicenne (Ibn Sina) en matière de médecine de nos jours, pourtant il n'en est pas moins l'un des plus grand fondateurs, et alors que son domaine est profane (donc évolutif dans ses sources comme dans ses résultats), alors que le droit est fixe dans ses sources et constant dans ses normes.

                              D'autre part, l'exemple porte plus sur la quantité de savoir d'un théologie aux normes musulmanes par rapport a ce que présentent certains ici-même en la matière, et il va de soit que les mêmes minimas sont applicables aux exégètes de notre époque.

                              C'est autour de cela que le point est circonscrit.
                              Dernière modification par Harrachi78, 30 juin 2009, 18h18.
                              "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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