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Un ancien de l’ANP irradié demande réparation à la France

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  • Un ancien de l’ANP irradié demande réparation à la France

    La victime n’a pas les moyens d’entamer une procédure judiciaire. Il s'agit d'une grande première en Algérie, qui permettra de déterminer si la dernière loi 1696 présenté par le ministre français de la Défense, Hervé Morin, et votée par le Parlement français le 30 juin dernier, sur le principe d'une réparation intégrale du préjudice subi par les victimes des essais nucléaires effectués par la France entre 1960 et 1996, va mettre fin à l’hypocrisie gouvernementale alimentée par le fameux secret défense qui étouffe la vérité.

    Cet loi précise que toute personne ayant été exposée à des rayons ionisants au cours des essais nucléaires français souffrant d’une maladie radioactive résultant directement de cette exposition peut obtenir réparation intégrale du préjudice subi dans les conditions prévues par la présente loi.

    Le journal a été approché, quelques jours après le vote de cette loi, par Ammar Boudjellal Belgacem, pour lancer une demande d’indemnisation une irradiation sur les lieux où la France a fait des essais nucléaires.
    Mais la mesure «n'indemnisera que les vétérans ayant participé à des essais et ayant séjourné ou résidé au Sahara entre le 13 février 1960 et le 31 décembre 1961 au Centre saharien des expérimentations militaires ou entre le 7 novembre 1961 et le 31 décembre 1967 au Centre des expérimentations des Oasis». Le texte ne va hélas guère plus loin ! Il maintient le flou et l’ambiguïté sur l’application concrète des principes énoncés.

    La liste des maladies ouvrant droit à une indemnisation est renvoyée à un décret ultérieur.

    Le droit à l’indemnisation des victimes civiles parmi les populations locales touchées par les essais est éludé. Loin de lever les ambiguïtés, les discussions conduites par les associations de victimes avec le ministre français ont confirmé la portée minimaliste du projet de loi. L'article premier refuse de noter la présomption d'imputabilité au service, et c'est regrettable même si le ministre français de la Défense affirme que cette disposition est implicite. Pourquoi alors refuser de l'écrire noir sur blanc, les mots ont un sens dans ce genre de situation.

    C'est une donnée importante car aujourd'hui, la justice est mal rendue, elle est inéquitable et défavorable pour ceux qui ont le mieux servi la France. C'est tout simplement injuste.

    La victime y avait été appelée dans le cadre de son service national, durant 24 mois, travailler à la réalisation de la route de l’Unité africaine.

    Mais ce qu’il ne savait pas est que le site est contaminé et qu’il allait revenir porteur de plusieurs maladies incurables causées par les essais nucléaires français en Algérie. «Ce n’étaient pas des essais, mais de véritables explosions nucléaires militaires à spectre large», a relevé, Bruno Barrillot dans son livre Les Irradiés de la République. L'article 2 procède à un découpage chirurgical des zones dites contaminées comme si les particules nocives se rangeaient docilement le long d'une direction.

    «Je demande aux brillants scientifiques qui ont tout nié depuis 49 ans de m'apporter la preuve que Gerboise bleue, première bombe qui a explosé le 13 février 1960, était quatre fois supérieure en puissance à celle d’Hiroshima au Japon, fut inoffensifve», dira Belgacem.

    Comment croire des scientifiques qui ont utilisé des prisonniers algériens comme cobayes durant ces essais ? Comment faire confiance aux médecins militaires qui ont tout nié en exécutant les ordres et d’avoir exposé des vies humaines aux malades et à la mort ? Il a, par ailleurs, été démontré que de février 1960 au mois de février 1966, Reggane, In- Ekker, Tamanrasset, Hamoudia et Tan Afella sont les sites algériens qui ont été irradiés par les bombes atomiques.

    Les effets dévastateurs de ces essais consistent en la radioactivité et la pollution qui a ravagé tout l’écosystème de la région. Il est reconnu que les essais atmosphériques en particulier se sont avérés très polluants en irradiant le sol algérien tout en causant un grave préjudice écologique dont témoignent encore les roches noires et les terres brûlées où aucune végétation ne pousse.

    La population des régions touchées n’a aucune idée du danger encouru par la manipulation des objets infectés.

    La France est soupçonnée de n’avoir pas respecté les mesures de protection lors des quatre essais atmosphériques, les treize autres souterrains et les 39 expériences faites à froid (complémentaires).

    M. Ammar Boudjellal Belgacem, père de 3 enfants, né en 1964, avait 23 ans quand il est parti sur ces lieux qui font partie de son vaste pays. «Nous étions fiers de contribuer à la réalisation d’une route qui traverse le pays du Nord au Sud», dira-t-il. «C’était de mon devoir de servir mon pays. Et puis j'ai appris que l'endroit avait servi à des essais nucléaires», a-t-il ajouté.
    «C'était très beau, je n'avais pas encore eu le temps de m'habituer. La poussière, les pierres, l’eau tout n’était pas sain. Aucun poste de décontamination n’a été monté», raconte notre interlocuteur.

  • #2
    Selon les premiers résultats d'une enquête menée par des experts de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) en 1999, les régions ayant abrité ces essais «sont toujours dangereuses», y compris là où des essais souterrains ont eu lieu. Les résultats de l’étude de l’AIEA n’ont été publiés qu’en 2005. Il n’existe pas encore de délimitation précise des espaces contaminés par les différents essais.

    En effet, selon Amar Mansouri, chercheur algérien, «les retombées néfastes sur les êtres humains, les animaux et l'environnement des essais nucléaires français dans le sud de l'Algérie vont apparaître avec le temps, et ce en dépit de l'obstination de l'ancienne puissance coloniale à maintenir les archives fermées». Il a souligné, dans ce cadre, que contrairement aux affirmations françaises qui «prétendent que les déchets nucléaires ont été enterrés dans des fouilles en béton armé», ils ont été dissimulés sans aucune mesure de sécurité, constituant ainsi un «danger permanent» pour la faune, la flore et les humains, a-t-il expliqué. Pour Bruno Barrillot, expert français au Centre de documentation et de recherche sur la paix et les conflits, un secret défense est toujours imposé sur les négligences constatées lors de ces essais.

    Six mois après son arrivée sur les lieux, Belgacem raconte que son corps se mit à réagir en se transformant petit à petit et commence à souffrir de coliques et de maux de tête. En plus d’une faiblesse générale, son poids a doublé en un temps record et atteint les 120 kg. «J'avais doublé de volume. Je pesais 60 kg à mon entrée à la caserne», a-t-il affirmait, photos à l'appui.
    Dans la routine du camp, tout prête à l'insouciance, à la bravade de jeunes gens. «Nous avions 20 ans», résume Belgacem.
    Pour les spécialistes du droit, la gestion globale des anciens sites d’essais reste à établir en s’appuyant sur le principe «pollueur- payeur» et par la création d’un fonds international pour la réhabilitation et la surveillance des anciens sites d’essais nucléaires. La France est invitée à aider au nom de ce principe à prêter main-forte pour décontaminer les sites, préciser l’endroit où sont enterrés les déchets radioactifs et former le personnel devant prendre part à des opérations de nettoyage. Mais c’est le black-out depuis des années.

    Ammar Boudjellal Belgacem revient à Bordj Bou Arréridj en 1989. Il vient d’être démobilisé après 24 mois de service national. Après la quille, il exerce un métier, se marie, fond une famille, oublie ses maux, mais les ennuis de santé se multiplient. Il devient énorme, vieillit prématurément. Il se plaint de douleurs aux articulations. Il passe quelques années moins souffrant, sous anti-inflammatoires, mais les crises reprennent. La paralysie de la main droite et des deux pieds ne le laisse pas optimiste. Il est allé voir les médecins qui lui ont demandé de passer des examens approfondis.

    Le rapport médical fait état de «séquelles d'intoxication spécifique par radiations». Ces séquelles sont résumées par l’atteinte de plusieurs maladies telles que la glande hypophysaire, accros mégalos, goitre, sueurs, maladie cardiaque, cholestérol, triglycéride, perturbation de la vue, perte de mémoire, mal-formation de croissances, etc.

    En 1993, il a subi une opération chirurgicale, ensuite il a suivi la radiothérapie pendant deux mois sans interruption. En 1997, des injections, une fois tous les 10 jours, et un traitement à vie délivré par le centre Pierre et Marie Curie (CPMC) d’Alger. La question que se pose est : qui va l’indemniser, lui qui a subi les conséquences de ces essais en 1989, vingt-neuf ans après le premier essai ? Il se sent d’autant plus démunies au moment d’engager des procédures d’indemnisation dont l’aboutissement lui semble lointain mais pourtant vital.

    Les larmes aux yeux mais beaucoup de fierté, il demande réparation à l’Etat français pour ses crimes contre l’humanité. « En plus des douleurs et aucune vie conjugale, je vis l’enfer dans la rue. Les petits et les femmes me prennent pour un monstre. Ils ont peur de moi. Ils changent de trottoir ou me fuient carrément», a-t-il ajouté amèrement.

    «Il est temps maintenant de prendre le problème des essais nucléaires français en Algérie au sérieux. Le traitement de ce dossier ne doit pas uniquement concerner les indemnisations, mais devrait prendre en charge la décontamination des espaces sur lesquels ont eu lieu ces essais», pense Belgacem. «C’est pour cela que je lutte, pour que personne ne subisse ce que j’ai vécu», conclue-t-il.

    Par la Nouvelle République

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