Sans dévoiler l’identité de sa source pour des raisons de sécurité, un général français atteste avoir recueilli les confidences d’un «Monsieur X» qui attribue l’assassinat des moines à l’armée algérienne.
Quel sens faut-il donner aux «révélations» tardives du général français, François Buchwalter, sur les moines de Tibhirine? L’interrogation est d’autant plus opportune que d’aucuns ne s’expliquent pas le timing de cette intervention. En attribuant l’assassinat des moines à l’armée algérienne, plusieurs années après les faits, cet ancien attaché militaire à l’ambassade de France à Alger ajoute (à dessein?) des complications à des relations algéro-françaises déjà suffisamment controversées.
Dans sa déposition citée hier par le journal français, Le Figaro, proche du président Nicolas Sarkozy, le général Buchwalter avait «confié», le 25 juin dernier, au juge d’instruction Marc Trévidic que l’assassinat des sept moines était une «bavure» commise par l’armée algérienne. Un tel témoignage peut-il être crédible, ou pris pour argent comptant? Le général ne cite aucune source militaire qui lui aurait dévoilé ce «secret» classé défense, ni aucun témoin oculaire présent sur les lieux qui aurait confirmé une telle affirmation.
Dans son témoignage sous serment, ce général indique avoir recueilli - lors de son passage à Alger, comme attaché militaire à l’ambassade de France, entre 1995 et 1998 - les confidences d’un ancien officier de l’armée algérienne, dont le frère était chef d’une escadrille d’hélicoptères affectée à la première région militaire, dont dépendait la région de Tibhirine.
Sans dévoiler l’identité de sa source, ni celle de son frère, le général Buchwalter raconte qu’un «Monsieur X» lui a confié, après l’enterrement des moines en 1996, que son frère qui patrouillait en hélicoptère entre Blida et Médéa dans le cadre d’opérations antiterroristes, lui aurait révélé que l’armée a tiré sur un bivouac qui ressemblait à un groupe djihadiste armé. «Ils ont donc tiré sur le bivouac. Ils se sont ensuite posés (...). Une fois posés, ils ont découvert qu’ils avaient tiré notamment sur les moines. Les corps des moines étaient criblés de balles», a expliqué le général français au juge, dont les propos ont été rapportés par la presse française dont Le Figaro. Il y a cependant comme un défaut, le témoignage de l’ancien militaire français n’est au final qu’un témoignage de seconde main, M.Buchwalter rapporte un oui-dire que rien ne vient confirmer.
Ce nouveau témoignage ne précise en aucun cas les conditions de l’enlèvement et encore moins les auteurs du rapt, curieusement passés sous silence par le témoin. D’ailleurs, la thèse d’une «bavure» de l’armée algérienne a été qualifiée par le même quotidien «d’une possible mise en scène sordide, décidée au plus haut niveau du pouvoir» français. Or, l’enlèvement des moines de Tibhirine a été revendiqué le 26 avril 1996 à l’époque par le chef du Groupe islamique armé (GIA), «Abou Abderrahmane Amine», alias Djamel Zitouni. En 2004, une commission rogatoire internationale n’a retenu et validé que la thèse selon laquelle les moines ont été liquidés par les groupes islamistes.
Mieux encore, la République française a envoyé des émissaires, mandatés à l’époque par Alain Juppé, Premier ministre, et Charles Pasqua ministre de l’Intérieur, à son ambassade à Alger pour mener des «négociations» avec les éléments du GIA afin de procéder à la libération des moines. Le GIA avait proposé d’échanger les moines contre ses militants islamistes détenus. Quelques jours plus tard, cette organisation terroriste annonce avoir décapité les captifs - assassinés le 21 mai - les terroristes accusant le gouvernement français d’avoir «trahi» les négociations-. Annonce faite le 23 mai par le GIA, soit deux jours après le crime commis. Interrogé à l’issue d’un sommet franco-britannique sur ces déclarations, Nicolas Sarkozy a répondu qu’il faut laisser la Justice faire son travail.
«Il y a un juge d’instruction qui est en charge de ce dossier, la justice est saisie. Les déclarations de ce témoin ont été faites devant un juge. Laissons la justice faire son travail», a dit le président français dans une déclaration rapportée par l’AFP. Et d‘ajouter: «Que puis-je dire maintenant, si ce n’est compliquer le travail de la justice? Et on verra à l’issue de cette instruction ce qu’il en sera. Que la justice fasse son travail, aille jusqu’au bout de son travail, je n’ai pas d’autres commentaires à faire», a conclu M.Sarkozy. A la lumière de ces données, il y a lieu de s’interroger sur le pourquoi du rebondissement de ce dossier à ce moment, plus précisément. Autrement dit, pourquoi le général François Buchwalter a attendu 13 ans pour révéler «ses secrets d’Etat»? Cette déclaration intervient au moment où les deux chefs d’Etat, Abdelaziz Bouteflika et Nicolas Sarkozy, affichent leur volonté de promouvoir et tisser de meilleures relations politico-économiques entre Alger et Paris. Comme en témoignent les deux visites effectuées par le chef de l’Etat français en Algérie et celle qu’effectuerait Abdelaziz Bouteflika à Paris dans le dernier semestre de cette année.Ainsi, pourquoi et surtout à quelles fins, le général Buchwalter a-t-il apporté de tels témoignages? Pourquoi n’a-t-il pas parlé plus tôt au moment de l’ouverture de l’enquête qui remonte déjà à quelques années? Beaucoup d’ombre entoure un témoignage qui vient, trop à propos. L’avenir apportera, sans doute, une réponse.
L'Expression.
Quel sens faut-il donner aux «révélations» tardives du général français, François Buchwalter, sur les moines de Tibhirine? L’interrogation est d’autant plus opportune que d’aucuns ne s’expliquent pas le timing de cette intervention. En attribuant l’assassinat des moines à l’armée algérienne, plusieurs années après les faits, cet ancien attaché militaire à l’ambassade de France à Alger ajoute (à dessein?) des complications à des relations algéro-françaises déjà suffisamment controversées.
Dans sa déposition citée hier par le journal français, Le Figaro, proche du président Nicolas Sarkozy, le général Buchwalter avait «confié», le 25 juin dernier, au juge d’instruction Marc Trévidic que l’assassinat des sept moines était une «bavure» commise par l’armée algérienne. Un tel témoignage peut-il être crédible, ou pris pour argent comptant? Le général ne cite aucune source militaire qui lui aurait dévoilé ce «secret» classé défense, ni aucun témoin oculaire présent sur les lieux qui aurait confirmé une telle affirmation.
Dans son témoignage sous serment, ce général indique avoir recueilli - lors de son passage à Alger, comme attaché militaire à l’ambassade de France, entre 1995 et 1998 - les confidences d’un ancien officier de l’armée algérienne, dont le frère était chef d’une escadrille d’hélicoptères affectée à la première région militaire, dont dépendait la région de Tibhirine.
Sans dévoiler l’identité de sa source, ni celle de son frère, le général Buchwalter raconte qu’un «Monsieur X» lui a confié, après l’enterrement des moines en 1996, que son frère qui patrouillait en hélicoptère entre Blida et Médéa dans le cadre d’opérations antiterroristes, lui aurait révélé que l’armée a tiré sur un bivouac qui ressemblait à un groupe djihadiste armé. «Ils ont donc tiré sur le bivouac. Ils se sont ensuite posés (...). Une fois posés, ils ont découvert qu’ils avaient tiré notamment sur les moines. Les corps des moines étaient criblés de balles», a expliqué le général français au juge, dont les propos ont été rapportés par la presse française dont Le Figaro. Il y a cependant comme un défaut, le témoignage de l’ancien militaire français n’est au final qu’un témoignage de seconde main, M.Buchwalter rapporte un oui-dire que rien ne vient confirmer.
Ce nouveau témoignage ne précise en aucun cas les conditions de l’enlèvement et encore moins les auteurs du rapt, curieusement passés sous silence par le témoin. D’ailleurs, la thèse d’une «bavure» de l’armée algérienne a été qualifiée par le même quotidien «d’une possible mise en scène sordide, décidée au plus haut niveau du pouvoir» français. Or, l’enlèvement des moines de Tibhirine a été revendiqué le 26 avril 1996 à l’époque par le chef du Groupe islamique armé (GIA), «Abou Abderrahmane Amine», alias Djamel Zitouni. En 2004, une commission rogatoire internationale n’a retenu et validé que la thèse selon laquelle les moines ont été liquidés par les groupes islamistes.
Mieux encore, la République française a envoyé des émissaires, mandatés à l’époque par Alain Juppé, Premier ministre, et Charles Pasqua ministre de l’Intérieur, à son ambassade à Alger pour mener des «négociations» avec les éléments du GIA afin de procéder à la libération des moines. Le GIA avait proposé d’échanger les moines contre ses militants islamistes détenus. Quelques jours plus tard, cette organisation terroriste annonce avoir décapité les captifs - assassinés le 21 mai - les terroristes accusant le gouvernement français d’avoir «trahi» les négociations-. Annonce faite le 23 mai par le GIA, soit deux jours après le crime commis. Interrogé à l’issue d’un sommet franco-britannique sur ces déclarations, Nicolas Sarkozy a répondu qu’il faut laisser la Justice faire son travail.
«Il y a un juge d’instruction qui est en charge de ce dossier, la justice est saisie. Les déclarations de ce témoin ont été faites devant un juge. Laissons la justice faire son travail», a dit le président français dans une déclaration rapportée par l’AFP. Et d‘ajouter: «Que puis-je dire maintenant, si ce n’est compliquer le travail de la justice? Et on verra à l’issue de cette instruction ce qu’il en sera. Que la justice fasse son travail, aille jusqu’au bout de son travail, je n’ai pas d’autres commentaires à faire», a conclu M.Sarkozy. A la lumière de ces données, il y a lieu de s’interroger sur le pourquoi du rebondissement de ce dossier à ce moment, plus précisément. Autrement dit, pourquoi le général François Buchwalter a attendu 13 ans pour révéler «ses secrets d’Etat»? Cette déclaration intervient au moment où les deux chefs d’Etat, Abdelaziz Bouteflika et Nicolas Sarkozy, affichent leur volonté de promouvoir et tisser de meilleures relations politico-économiques entre Alger et Paris. Comme en témoignent les deux visites effectuées par le chef de l’Etat français en Algérie et celle qu’effectuerait Abdelaziz Bouteflika à Paris dans le dernier semestre de cette année.Ainsi, pourquoi et surtout à quelles fins, le général Buchwalter a-t-il apporté de tels témoignages? Pourquoi n’a-t-il pas parlé plus tôt au moment de l’ouverture de l’enquête qui remonte déjà à quelques années? Beaucoup d’ombre entoure un témoignage qui vient, trop à propos. L’avenir apportera, sans doute, une réponse.
L'Expression.
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