Je ne connaissais pas Moussa Saci mais peut etre parmi vous certains le connaissait, il s'en est allé sur la pointe des pieds alors qu'Allah l'accueille dans son vaste Paradis.
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Il était entré à la télévision sur la pointe des pieds. Il en était ressorti sans bruit. Il vient de mourir sans tapage. Je me souviens du jour où, pour la première fois, il est apparu dans la salle de rédaction de la Télévision algérienne.
C’était, je crois, en 1968 ou 1969. Grand, mince, un peu mal à l’aise dans un costume gris qui lui allait grand. Timide et, dans un visage poupon, son petit sourire en coin. Cet enfant d’Alger avait les qualités et les défauts des gars de la cité, une éducation et une morale forgées au fer. Une modestie qui n’était pas fausse : une modestie naturelle qui signifie tout ce que l’on veut sauf l’insignifiance. Et cette soif enragée d’apprendre qui est le lot des gens d’intelligence. Le contact avait été immédiat et, en l’accueillant, moi qui débutais aussi, j’avais d’emblée compris le gars et sa fragilité. Il apprenait, il apprenait... Il amassait goulûment ce qui pouvait le servir, et il le faisait toujours comme on chipe une friandise.
Sa première apparition à l’écran fut probante. Quarante ans après, le nom de Moussa Saci résonne encore : ce n’était pas l’époque des journalistes qui pouvaient faire souche sur le petit écran sans que personne n’en retînt jamais le nom ni la figure. Pas encore. A l’époque, comme on alternait au journal télévisé et que nos traits physiques se rapprochaient, les gens, dans la rue, vous confondaient, on me prêtait son nom et on lui infligeait le mien. Son passage au journal fut bref, et c’est peut-être là que se situe la brisure qui décida de son destin.
Il fut muté au reportage, où il se dépensa jusqu’à l’épuisement. Il ne lui fut pas facile de quitter les lumières des plateaux pour l’obscurité des salles de montage. Il prit ce revers de fortune pour une marque de mépris et il en conçut une blessure qui devait, me semble-t-il, s’ajouter à d’autres plus anciennes. Ce garçons appliqué, je garde de lui le souvenir d’une écriture soignées, calligraphiée d’artiste qui tranchait avec le trait cursif et broussailleux que l’on observe d’ordinaire dans les rédactions. Cette écriture manifestait, je crois, le caractère d’un homme sensible , de parfaite éducation, d’une grande rectitude et dont la vie fut exemplaire.
Source: La Nouvelle République
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Il était entré à la télévision sur la pointe des pieds. Il en était ressorti sans bruit. Il vient de mourir sans tapage. Je me souviens du jour où, pour la première fois, il est apparu dans la salle de rédaction de la Télévision algérienne.
C’était, je crois, en 1968 ou 1969. Grand, mince, un peu mal à l’aise dans un costume gris qui lui allait grand. Timide et, dans un visage poupon, son petit sourire en coin. Cet enfant d’Alger avait les qualités et les défauts des gars de la cité, une éducation et une morale forgées au fer. Une modestie qui n’était pas fausse : une modestie naturelle qui signifie tout ce que l’on veut sauf l’insignifiance. Et cette soif enragée d’apprendre qui est le lot des gens d’intelligence. Le contact avait été immédiat et, en l’accueillant, moi qui débutais aussi, j’avais d’emblée compris le gars et sa fragilité. Il apprenait, il apprenait... Il amassait goulûment ce qui pouvait le servir, et il le faisait toujours comme on chipe une friandise.
Sa première apparition à l’écran fut probante. Quarante ans après, le nom de Moussa Saci résonne encore : ce n’était pas l’époque des journalistes qui pouvaient faire souche sur le petit écran sans que personne n’en retînt jamais le nom ni la figure. Pas encore. A l’époque, comme on alternait au journal télévisé et que nos traits physiques se rapprochaient, les gens, dans la rue, vous confondaient, on me prêtait son nom et on lui infligeait le mien. Son passage au journal fut bref, et c’est peut-être là que se situe la brisure qui décida de son destin.
Il fut muté au reportage, où il se dépensa jusqu’à l’épuisement. Il ne lui fut pas facile de quitter les lumières des plateaux pour l’obscurité des salles de montage. Il prit ce revers de fortune pour une marque de mépris et il en conçut une blessure qui devait, me semble-t-il, s’ajouter à d’autres plus anciennes. Ce garçons appliqué, je garde de lui le souvenir d’une écriture soignées, calligraphiée d’artiste qui tranchait avec le trait cursif et broussailleux que l’on observe d’ordinaire dans les rédactions. Cette écriture manifestait, je crois, le caractère d’un homme sensible , de parfaite éducation, d’une grande rectitude et dont la vie fut exemplaire.
Source: La Nouvelle République
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