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Tameghra (la fête) en Kabylie

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  • Tameghra (la fête) en Kabylie

    Djamel et Ferroudja se connaissent depuis près de sept ans. Au tout début, et même si dans leur entourage, on soupçonnait chez eux de l’amour, leur relation était plutôt amicale. C’est du moins ce que nous affirme le couple. De toute façon, quelle que soit la nature de leur relation, elle ne tardera pas à se transformer en thayri. Mais, contrairement à ce que déclament les poètes, l’amour à lui tout seul ne suffit pas pour fonder un foyer.

    A l’instar d’autres jeunes qui envisagent ad bnun axxam (fonder un foyer), il leur fallait attendre quelque temps, le temps de faire des économies. Cela n’a pas été facile, mais ils y sont arrivés. Ils retiennent, en janvier dernier, une date pour leur nuit de noces. Le mariage est prévu pour juillet. Et nous sommes conviés. En plus, nous avons la chance d’assister, pour ainsi dire, aux deux revers de la fête : le mercredi, chez Ferroudja et jeudi chez Djamel.

    L’audace de Ferroudja

    Le village de tislit (la mariée) ressemble à tout les tuddar de la Kabylie. Il n’a pas été difficile pour nous de retrouver axxam n tmeghra. En fait, là où il y a foule, il y a fête. Nous sommes accueillis par Dda Slimane, le père. Notre hôte nous invitera à prendre place dans une salle où il n’y a pas grand monde. Arrive en même temps que les rafraîchissements – nous en avions tellement besoin – Ferroudja. Quel honneur pour nous d’être accueillis par la mariée ! Il y a lieu de souligner qu’on nous accueillant, Ferroudja avait dérogé à la règle kabylo-kabyle qui veut qu’on ne voit tislit que pendant la cérémonie du henné. “L’audace” de Ferroudja n’est pas passée inaperçue. Quelques vieilles dames ne cachent pas leur effarement. A celles-là, la mariée affiche un sourire grand comme ça, avant d’expliquer, donc de justifier, aux timgharin n lbaraka que nous étions ces meilleurs amis. Pas trop convaincus les vieilles ! Elles inondent cependant, Ferroudja de ddawat n lxir (bénédictions) qu’elles seules savent formuler. Nous insistons auprès de notre hôte pour qu’elle rejoigne “ses quartiers”. Et voilà que Dda Slimane revient avec des plats de grillades et autres couscous. Nous ne pouvons rien avaler, à cette heure de la journée et sous ce soleil de plomb. Mais il faut faire honneur à l’invitation. Il est 15 heures lorsque nous sortons de la salle. Dehors, les invités se partagent les espaces ombrés. Grand et beau, est le jardin de Da Slimane. Il est tellement grand qu’une dizaine de véhicules trouvent refuge à l’ombre de figuiers et autres pommiers. Quelques invités, des citadins sans doute, sont époustouflés par la Kabylie et ils n’arrêtent pas de poser des questions. Et fatalement, ils n’omettent jamais d’interroger à propos du terrorisme. Des femmes continuent d’arriver d’autres villages avoisinants. Il faut dire que tameghra dans un village de Kabylie est la fête de tous les villages voisins. En attendant l’arrivée de Djamel et de sa famille prévue pour 17 heures pour le cérémonial de la fatiha, nous découvrons taddart de notre amie Ferroudja. Comme toutes tuddar de la région, le village monte et descend. C’est peut-être cette caractéristique des villages kabyles qui a inspiré la fameuse formule “d akessar, d asawen… !”. Taddart est traversée par une voie goudronnée. De part et d’autre, le béton dispute l’espace aux bâtisses traditionnelles. L’euro étant investi dans le béton.

    Construire est aussi une autre caractéristique des villages kabyles. La pelle et la brouette y ont, depuis longtemps, intégré les mœurs. Investir dans le béton est la priorité des priorités. Même ceux qui n’ont pas les moyens financiers de bâtir trouvent d’une façon ou d’une autre celui de rafistoler leurs demeures. Beaucoup d’habitations modernes sont fermées. Leurs propriétaires n’y viennent que pour les vacances.

    Quelques enfants ont les yeux fixés en bas : ils guettent l’arrivée du cortège de Djamel. C’est d’ailleurs eux qui donneront l’alerte : “Atniya (ils arrivent) ! )” 17 heures passées, le cortège est là. Nous allons à la rencontre de Djamel. Nous lui souhaitons la bienvenue au club. Dda Slimane vient à sa rencontre. Ils s’embrassent. L’un présente à l’autre les membres de sa famille qu’il ne connaît pas encore, avant de passer prendre les rafraîchissements. Une bonne demi-heure plus tard, on est invité à assister à la fatiha. A tout seigneur tout honneur, le père de Ferroudja et l’oncle de Djamel prennent place de part et d’autre de ccix n ljamaâ (l’imam). Ce dernier revient brièvement sur ce que suppose le mariage en islam, avant de demander les noms des heureux élus. Tout de suite après, il demande à l’oncle de demander par trois fois la main de Ferroudja. L’oncle butera légèrement sur la formule en arabe, mais il y arrivera quand même. Quand arrive le tour de Da Slimane de répondre, religieusement aussi, à la demande, on n’a pas pu s’empêcher de sourire. L’arabe de Da Slimane est une catastrophe. Mais ce qui importe ce sont les formes. Les youyous annoncent la fin du rituel de la fatiha. Du point de vue religieux, Djamel et Ferroudja sont unis pour le meilleur et pour… le moins pire.

    Isli et tislit


    Le isli rentre chez lui dans la région de Maâtka. Le henni l’attend chez lui. Il reviendra demain avec un cortège plus important pour “récupérer’’, et pour de vrai, sa douce moitié. 19 heures, la chaleur baisse d’un cran. Nous allons voir Ferroudja. La cérémonie du henni l’a, nous semble-t-il, un peu secoué. Elle n’a pas échappé à la charge d’émotion en sachant que d sseh elle est mariée. En fait, et c’est le cas de toutes les nouvelles mariées, c’est cette rupture subite avec l’environnement qui nous a vu naître et grandir qui est difficilement gérable. Mais cela passera. Aux commandes, Da Slimane s’atelle à préparer le imensi n tmeghra. Décidément, le goût de seksu n tmeghriwin est exceptionnel ! Vers 22 heures, tous les convives lèvent les mains en l’air pour la grande ddawa lxir. Dans un kabyle made in Djurdjura, un sage du village remercie les invités et bénit les mariés et leurs familles. Son kabyle est tellement beau à entendre qu’on n’a pas envie qu’il s’arrête. Ce n’est que tard dans la nuit que la cérémonie du henni sera entamée sur fond d’un urar sorti droit des entrailles de la Kabylie. La cérémonie est aussi un prétexte pour des jeunes filles en âge de se marier de se faire connaître et une opportunité pour les mères à trouver femmes pour leurs fils. Le fabuleux urar sera de temps en temps interrompu par le non-stop électronique. Et c’est à ce moment là que les jeunes occupent la piste qui quelques fois devient mixte. Mais la mixité ne va pas au-delà du cercle familial. Le lendemain, fatigués mais heureux, nous attendons le retour du cortège prévu pour l’après-midi. Vers 13 heures, les enfants qui, hier, guettaient l’arrivée du cortège, sont déjà à leur poste. 14 heures passées, nous entendons une véritable partition de klaxons. Dix minutes plus tard, le premier véhicule paré pour embarquer la mariée s’engouffre dans le jardin de Da Slimane. Le temps de prendre des cafés et des rafraîchissements, Djamel organise son cortège. Tout est fin prêt. On n’attend que la mariée. Moment difficile pour Ferroudja. Elle prendra tout son temps. Djamel presse tout le monde sans se départir du sourire. Et apparaît la mariée dans sa robe blanche. C’est la métamorphose. Une véritable princesse de la Kabylie ! Sa maman écrase une larme. Son père aussi. Elle prend place dans le beau véhicule à côté de Djamel. Moment fort. Moteur en marche. Petite manœuvre et direction… la région de Maâtka.

    Le village de Djamel n’est pas loin. Cependant, il nous a fallu deux bonnes heures pour y arriver. Un cortège n’est jamais facile à gérer. Le décor chez Djamel est tout autre. Son village s’est urbanisé. Il habite un quartier comme on en voit dans les villes.

    N’est le paysage que nous surplombons, nous ne nous croirons pas en Haute Kabylie. On ouvre la portière du véhicule à la mariée. Des flashs crépitent. La demeure de Djamel est toujours en chantier. Là aussi, ça construit. Ferroudja est toujours devant le seuil de la porte. Elle rentrera dans son nouveau chez elle, une fois le cérémonial “lait, datte, eau” terminé. Chez Djamel, c’est exclusivement le non-stop qui est adopté.

    19 heures le imensi est prêt. La mariée se repose dans sa chambre. Nos hôtes reçoivent leurs invités. C’est un peu le même ménage que chez Da Slimane, la veille. Vers 22 heures, nous allons voir Ferroudja. Nous lisons la même stupéfaction sur les visages de vieilles que nous trouvons sur place que celles que nous avons relevée chez les vieilles lorsque Ferroudja est venue nous accueillir chez ses parents. Nous répondons par des sourires à leur étonnement. La situation amuse Ferroudja et nous met mal à l’aise. Et comme elle est un peu et sans méchanceté portée sur la provoc, la mariée nous invitera à prendre des photos avec elle sur son siège de princesse. La situation amuse aussi Djamel qui refoule difficilement un fou rire. “Ces jeunes n lqern rbatac !”, doivent se dire ces bonnes vieilles dames. De peur de créer un “incident diplomatique’’, nous laissons Ferroudja sourire en catimini et quittons la salle. Dehors, à la faveur d’une brise fraîche, les invités discutent de choses et d’autres. Nous, nous ne pouvons plus tenir debout. C’est à croire que Djamel lisait dans nos pensées : il nous invitera à aller dormir. Volontiers ! Vendredi matin, nous allons embrasser Ferroudja, avant de prendre la route. Le “au revoir’’ est déchirant. Mais Ferroudja et Djamel sont heureux et c’est le plus important.

    Par la Dépêche de kabylie

  • #2
    thayri s temghra s tammara....
    wada mou tella tayri g tassa, ar yalla !!

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    • #3
      Merci de l'avoir posté. De beaux souvenirs en tête.

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