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2 000 ans d'histoire sous la terre à Alger

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  • 2 000 ans d'histoire sous la terre à Alger

    Délicatement tamponnée avec une éponge humide, la mosaïque polychrome révèle, après quinze siècles d'oubli, l'éclat de ses rouges, de ses jaunes, de ses noirs et la délicatesse de ses motifs. La chaleur de l'été algérois a tôt fait d'évaporer l'eau. Les tesselles perdent immédiatement leur éclat, s'affadissent en couleurs passées, brûlées par la lumière trop crue, comme s'évanouit un rêve.

    En Algérie, les archéologues viennent de mettre au jour le sol décoré d'une basilique paléochrétienne, datant à première vue du Ve ou du VIe siècle. Ils ne peuvent s'attarder dans cette contemplation, affiner la datation ou vérifier leurs hypothèses. Ils ont déjà repéré, en dessous, des vestiges plus anciens, un mur datant du Ier ou du IIe siècle de notre ère, qu'il faut vite excaver.

    Tout autour du chantier, gronde la rumeur impatiente d'Alger.

    Place des Martyrs, au pied de la Casbah et de la grande mosquée Djamâa el-Jdid, là où bat le coeur de la capitale, deux larges trous ont été ouverts de chaque côté d'un monument érigé en l'honneur des héros de la guerre d'indépendance. A la pelleteuse et au pinceau, les fouilles exhument, palier après palier, le riche passé de la ville.

    Vingt mètres sous terre passera bientôt la première ligne de métro, qui devrait être achevée à la fin de 2009. Une station doit être percée, place des Martyrs. Or le pays s'est doté d'une loi qui protège les monuments historiques. Le périmètre est en outre classé par l'Unesco au Patrimoine mondial de l'humanité depuis 1992. Les autorités ont donc commandé des sondages du sol, sous la responsabilité conjointe du Centre national de la recherche archéologique, de l'Office national de gestion et d'exploitation des biens culturels et de la Direction de la culture de la wilaya d'Alger.

    L'Algérie a demandé l'appui technique de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) français, rodé à ce type de fouilles express, sous la pression des aménageurs. "Nous ne faisons pas à la place des Algériens, précise François Souq, 53 ans, directeur de l'Inrap Méditerranée. Nous transmettons un savoir-faire."

    Quatre archéologues français et une douzaine de confrères algériens creusent ainsi depuis un mois, six jours par semaine, neuf heures par jour, par plus de 40 ºC.

    Sous la croûte de bitume, les traces de la première colonisation française ont été relevées. Puis l'étage ottoman a été excavé, laissant apparaître ce qui pourrait être une mosquée, quelques rues au pavement de galets et les traces d'un souk. La strate médiévale a été plus décevante, signalant un déclin de la cité à cette époque que relatent d'ailleurs la plupart des textes. Puis, il y eut la découverte de la basilique, large d'une vingtaine de mètres, flanquée de sépultures dont les ossements ont - hélas ! - mal résisté au temps. Des bases de colonnes subsistent également. Affleure juste en dessous le Bas-Empire.

    Il reste encore trois bons mètres à excaver avant de heurter le tablier de roche schisteuse. Avec l'espoir d'atteindre l'époque de l'apogée romaine et, qui sait, l'ancien comptoir phénico-punique, connu dans les livres sous le nom d'Ikosim, dès le IIIe siècle avant notre ère. "Des sites comme celui-ci, on en a une ou deux fois dans sa vie, assure François Souq. Nous faisons remonter deux mille ans d'histoire sur 7,50 mètres de stratigraphie. Et c'est à Alger, une ville emblématique." Le temps presse. Les archéologues ont huit semaines pour achever leur diagnostic et rédiger un rapport sur leurs découvertes. "Nous ne devons pas être considérés comme ceux qui bloquent les projets de développement", disait Kamel Stiti, 44 ans, l'archéologue algérien qui codirige le chantier avec François Souq. Les ministères de la culture et des transports ferrailleront pour décider de l'ampleur des fouilles qu'il conviendra d'accomplir ensuite, débat classique entre défenseurs du passé et promoteurs de l'avenir.

    Dans la jeune République algérienne, née des affres de la guerre d'indépendance, se greffe une autre considération, plus politique. Jamais des recherches préventives d'une telle ampleur n'avaient été entreprises. Tout juste avait-on trouvé, au hasard des coups de pioche, quelques pièces puniques ou les restes d'une domus romaine.

    Le pays ancre son nationalisme dans la lutte contre le colonialisme. Mais l'histoire de cette terre est celle de l'assimilation successive par les populations berbères des apports extérieurs, qu'ils soient envahisseurs ou protecteurs encombrants. La ville aura été Ikosim, Icosium, El-Djezaïr puis Alger. Phéniciens, Romains, Vandales, chrétiens, pirates, conquérants arabes, janissaires de l'Empire ottoman ont ainsi laissé leurs empreintes successives dans le sol, pris et donné, pillé et enrichi.

    Les Français sont venus à leur tour. Ils ont remanié la basse Casbah, au milieu du XIXe siècle, ont construit des immeubles haussmanniens avec les matériaux trouvés sur place. Mais chaque nouvel arrivant semble avoir fait de même, comme l'atteste le réemploi des pierres. "Nous découlons d'un brassage des civilisations", en conclut Kamel Stiti. Très suivi par les médias algériens, le chantier archéologique est ainsi devenu une quête identitaire.

    L'Algérie en six dates

    IIIe siècle avant notre ère Fondation d'Ikosim, un comptoir phénico-punique, sur une côte où vivaient les Amazighs, devenus les Berbères. La cité dépend bientôt du royaume de Maurétanie, sous Juba II (environ - 25 à 23 de notre ère).

    40 de notre ère Rome accentue sa domination. Icosium est un municipe jusqu'en 372, où les Berbères se révoltent. La ville passe sous domination vandale.

    VIIe siècle Arrivée de l'islam et implantation de la tribu des Beni Mezrenna.

    960 Le Berbère Bologhine Ibn Ziri refonde la cité, qui tombe bientôt aux mains des Almoravides et des Almohades.

    1516 Les frères Barberousse prennent possession de la ville.

    1830-1962 Colonisation française.

    Par le Monde

  • #2
    Très intéressant , ça avance bien !

    débat classique entre défenseurs du passé et promoteurs de l'avenir.
    Moi je défends le passé

    Et bravo au archéologues



    ( Ouep passer du temps à faire des fouilles ( avec la canicule ) pendant que les autres bronze , pas trop facile en effet )

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    • #3
      "Des sites comme celui-ci, on en a une ou deux fois dans sa vie, assure François Souq. Nous faisons remonter deux mille ans d'histoire sur 7,50 mètres de stratigraphie.
      J'espère que les nôtres prendront aussi conscience de l'exceptionnelle richesse (du point de vu archéologique) de ce site !


      Sinon, même pas une p'tite trace de l'époque berbère dans tous ça ?!

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      • #4
        je viens de lire l'article,trés intéréssant

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        • #5
          waw ça fait vraiment plaisir ,j'éspére qu'ils ne détruiront rien, ben je passerai cette semaine pour voir commnt c'est.
          Dernière modification par medalg.82, 15 août 2009, 22h29.

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          • #6
            J'espère qu'ils vont tout faire pour préserver le site, au diable le métro.

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            • #7
              @Galaad

              Les vivants priment sur les morts, et c'est helas l'inconveniant d'une ville ancienne qui vit encore ... elle continue a vivre.

              Ce qui a ete decouvert, c'est le coeur meme d'une ville punique, puis d'une ville romano-africaine, et ainsi de suite et il se trouve que, aujourd'hui encore, la place des martyrs est veritablement le coeur d'Alger-Centre.

              Il est deja bien que le site ait ete decouvert par hasard, et que les archeologues aient eu le temps de faire l'inventaire, de recuprer ce qui pourrait l'etre, de faire les schemas, les datations ... etc. Ca servira enormement a mieux connaitre l'histoire de la cite.

              Ce n'est pas pour autant que les projets actuels doivent cesser, et il n'est pas question d'arreter un chantier d'utilite publique comem celui du metro pour garder les traces d'une basilique !
              "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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              • #8
                Dans Roma, le film de Fellini, il y a une scène où le percement du métro met à jour des salles étrusques, richement décorées, immaculées. Puis peu à peu l'air entrant, les couleurs des céramiques s'estompent ...

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                • #9
                  Un musée souterrain donc un peu plus de place au tourisme !
                  Tu ne peux empêcher les oiseaux de la tristesse de voler au-dessus de ta tête, mais tu peux les empêcher de faire leurs nids dans tes cheveux.

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                  • #10
                    @Zeste

                    Dans ce cas je ne pense pas non, plutot quelques pieces supplementaires pour le musee des antiquites d'Alger, et une meilleure connaissance de l'histoire d ela ville, le reste, ca sera un tunnel de metro ...

                    Petite visite en image du site des fouilles ; comme vous voyez, ce n'est pas quelque chose de spectaculaire, et l'interet de la trouvaille est donc presque purement scientifique :

                    http://www.inrap.fr/archeologie-prev...-Martyrs-a.htm
                    Dernière modification par Harrachi78, 23 août 2009, 23h25.
                    "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                    • #11
                      Hors de question d'annuler le métro mais le musée peut être transféré

                      Sahite Harrachi pour la visite virtuel
                      Tu ne peux empêcher les oiseaux de la tristesse de voler au-dessus de ta tête, mais tu peux les empêcher de faire leurs nids dans tes cheveux.

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                      • #12
                        Disons qu'il n'y a pas vraiment de quoi creer un musee a part ZEST, le site n'est pas d'une richesse particuliere en terme d'oeuvres ou de batiments

                        En fait, toute sa valeur reside dans le fait qu'il soit decouvert sous une ville qui existe encore, chose assez rare d'habitude. Ca permets par connaitre d'en savoir un peu plus sur l'ancienne ville.
                        "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                        • #13
                          C'est quand même domage puisque c'est une chose assez rare donc y a de quoi créer quelque chose d'originale !
                          Tu ne peux empêcher les oiseaux de la tristesse de voler au-dessus de ta tête, mais tu peux les empêcher de faire leurs nids dans tes cheveux.

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                          • #14
                            @Zeste

                            Pas necessairement non,

                            Vois-tu, le probleme avec les veilles villes qui ne sont pas mortes (ou qui n'ont pas change de site) c'est justement qu'elles "vivent" encore, c'est-a-dire que chaque epoque s'empile sur une autre, sans qu'on puisse faire des fouilles methodiques, car il n'est pas possible de deloger les vivants en surface pour chercher en bas des fondations ou des murs anciens.

                            La connaissance de l'histoire de ce genre de villes se limite donc aux sources litteraires (pas toujours locaces et pas forcement precises), sans que l'on puisse jamais confronter cela aux donnees archeologiques. C'est le cas par exemple d'Alexandrie d'Egypte par exemple, une des plus grandes metropoles du monde de son temps (un peu New York ou Tokyo a notre epoque) mais qui n'est pratiquement pas connue du point de vue archeologique car la vile moderne la recouvre toujours.

                            La rarete de notre cas tient donc dans le fait que, par le hasard d'un accident ou d'un chantier x, on tombe sur une necropole, un palais, une maison, un temple ou une eglise, qui permettent -pour un moment- de regarder ce qu'il y'a en dessous du tissu urbain vivant, et ainsi de mieux connaitre l'histoire de la cite en question, de confirmer une these, d'infirmer une theorie, de verifier les donnees d'une source ancienne, comparer les dates ... etc.

                            Mais cela ne signifie pas forcement que la trouvaille debouche sur un truc spectaculaire (genre riche tresor, batiment trop bien conserve, quelque chose d'inattendu ... etc.) qui attire generalement le grand publique, ni qui necessiterais l'inverstissement dans de superstructures comme des parcs archeologiques ou des musees thematiques.

                            Le plus souvent, l'interet est d'ordre strictement scientifique, et il suffit alors de faire des releves detailles, des inventaires et cartographies du lieu, puis de recuprere ce qui peut l'etre (mosaiques, objets, ornements, inscriptions ... etc.) et les mettre dans les musees existants ... et la vie continue lol
                            Dernière modification par Harrachi78, 24 août 2009, 00h05.
                            "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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                            • #15
                              Moi je suis pour la preservation de ce site pour en faire un musee de l'histoire de la ville d'Alger. Pour le metro, l'etat peut faire coexister les 2 a la fois si l'argent y est mis. Comme dit la pub: certaines choses n'ont pas de prix.. pour tout le reste il y a mastercard..

                              Imaginez un musee ou on peut visiter 2000 d'histoire en se rendant a la Place des Martyrs et en descendant etage par etage... ca me parait tres interessant! On doit preserver le site pour les generations futures, sans parler du fait que ca pourrait encourager le developement de la culture vu que c'est situe en plein coeur d'Alger et que c'est un condense d'histoire.

                              ∑ (1/i²) = π²/6
                              i=1

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