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Pourquoi les Français veulent interdire la burqa ? Entretien avec John Bowen

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  • Pourquoi les Français veulent interdire la burqa ? Entretien avec John Bowen


    John Bowen est anthropologue, professeur à l’université Washington de Saint Louis, aux États-Unis. Il est spécialiste de l’Islam et ses récents travaux ont porté en particulier sur les musulmans de France. Tombé en plein débat sur le voile, il a déplacé un temps sa problématique pour s’intéresser à la perception de l’Islam par les Français : son livre Why the French Don’t like Headscarves, paru en 2007, interroge les ressorts de la mobilisations des valeurs républicaines et laïques contre la menace que représenterait le foulard.

    Alors que la "mission d’information parlementaire" sur le voile intégral a commencé ses auditions, et les poursuivra jusqu’en décembre 2009, John Bowen propose d’interroger le sens de cette nouvelle préoccupation du politique. S’agit-il de légiférer davantage sur l’espace public ? ou bien de s’ingérer jusque dans la sphère privée ?


    Question : Comment expliquez-vous la résurgence actuelle de la question de la burqa ?

    John Bowen : Il est difficile d’expliquer pourquoi cette question ressurgit maintenant, car ce n’est pas lié à un événement particulier. Dans mon livre sur le foulard (2007) j’ai cherché des liens entre les résurgences des déclarations sur le foulard et les événements qui se passaient dans le monde musulman, en Algérie ou en Afghanistan par exemple. Avec la burqa, c’est plutôt une longue histoire. On voit depuis quelques années en Italie du Nord, en Belgique, aux Pays-Bas, des tentatives des pouvoirs locaux pour interdire la burqa. Ces mouvements européens contre l’Islam rencontrent un fort écho en France, et pas seulement dans les milieux d’extrême-droite, car les Français sont imprégnés de l’idée qu’on ne doit pas tolérer ce qui divise, or la burqa divise un individu. Le débat traverse le continuum politique droite-gauche, en se focalisant sur l’idée des valeurs communes : même si on fait appel aux questions techniques des contrôles d’identité par exemple, c’est plutôt le fait d’avoir des cloisonnements, des communautés qui gêne.


    Question : Pourquoi ce déplacement de l’école à la rue ?

    John Bowen : Pendant les débats en 2002-2003 quelques voix disaient que si le voile était symbole d’oppression de la femme, alors il fallait l’abolir de l’espace public, que ce soit à l’école ou dans la rue. Ces propositions, très cohérentes dans leur raisonnement, n’ont pas été suivies car à ce moment la loi sur le voile devait répondre à un ensemble de problèmes propres à l’école, et qui préoccupaient les enseignants comme les directeurs d’établissements : la contestation des cours d’histoire sur la Shoah par exemple, ou l’adaptation des rythmes scolaires aux obligations religieuses. Dans ce contexte, l’affaire du voile a fourni une opportunité pour légiférer, et donner l’impression de résoudre par la loi des problèmes face auxquels les acteurs se trouvaient démunis. Cette manie française de faire des lois, on la retrouve encore récemment avec la loi sur les bandes et sur le port des cagoules…


    Question : C’est une coïncidence amusante, ce parallèle entre la cagoule et la burqa !

    John Bowen : Oui, ce n’était pas forcément intentionnel mais les deux participent d’une même question : comment on légifère sur l’espace public ? De manière générale, la France a une conception positive de l’espace public, comme le lieu des valeurs communes et du vivre ensemble, d’où tout signe porteur de division doit être évacué ; c’est le sens de la laïcité à la française. Cependant les limites de cet espace restent floues. Dans le concret, l’espace public c’est quoi : la rue ? l’école ? la mairie ?

    Revenons sur le cas de la femme à qui on a refusé la nationalité française parce qu’elle portait la burqa – le raisonnement du gouvernement ce n’était pas de dire que les conditions n’étaient pas remplies pour l’obtention de la nationalité, mais de dire que, du fait qu’elle était ainsi vêtue, qu’elle restait chez elle, elle présentait un défaut d’assimilation. Voilà le point intéressant : le problème ne vient pas d’un trouble à l’ordre public, mais du fait de rester dans la sphère privée. C’est là que se trouve le changement : maintenant on va jusque dans la chambre, on l’a vu encore dans le débat sur l’annulation du mariage pour cause de non-virginité de l’épouse, une annulation qui n’était ni contestée par la femme, ni par les juges, mais par les voix politiques qui ont estimé que ces distinctions n’avaient pas lieu d’être dans la sphère privée. Dans l’affaire de la burqa, on considère que la vie privée peut être source de défauts dans la sphère publique – défaut de laïcité, d’assimilation etc. Ce qui m’intéresse beaucoup c’est l’évolution de la notion d’ordre public ; il y a d’une part l’espace public en ce qu’il s’oppose à l’espace intime, familial, et d’autre part il y a l’ordre public, cette idée très durkheimienne d’un ordre social, moral, qui peut être bafoué même en privé. Et c’est cette idée d’un ordre moral qui pourrait nous amener à une interprétation en faveur de l’interdiction de la burqa ; mais dans notre période post-Vichy on a du mal à parler d’ordre moral.



    Question : Donc vous voulez dire qu’on sort du politique si on s’intéresse à la sphère privée ?

    John Bowen : Je vois là une atteinte potentielle à la vie privée des gens, à la liberté dans la sphère privée. Avec la burqa, la question du communautarisme est maintenant portée sur le corps de la femme. Ce déplacement, qui paraît récent, s’inscrit pourtant dans le temps long, car la tension entre libertés individuelles et valeurs communes est une constante depuis la révolution française : il ne faut pas oublier qu’après 1789 il y a eu 1792. La France demeure traversée par cette tension entre l’État - expression de la volonté générale, et la liberté de l’individu. Cette tension qui apparaît clairement dans la pensée de Rousseau…


    Question : Vous montrez d’ailleurs dans votre livre sur le foulard que la pensée rousseauiste imprègne fortement la mentalité française : est-ce que vous pensez que les petits Français devraient lire plus de philosophes anglo-saxons à l’école ?

    John Bowen : C’est une question qui porte sur la pédagogie à l’école… depuis des années des efforts sont faits pour introduire la pensée des libéraux en France. Cependant, on peut trouver une défense de la liberté individuelle chez Rousseau, sans avoir recours à d’autres systèmes philosophiques qui seraient moins ancrés dans la pédagogie, l’histoire de la France.

    D’autre part, ces questions ne posent pas seulement, de manière générale, le problème des libertés publiques, mais de manière plus particulière le problème de l’Islam en France. C’est ce que je cherche à montrer dans mon nouveau livre Can Islam Be French (L’Islam peut-il être français, à paraître, Princeton University Press). Il reste encore à inventer des formes de dialogue, à trouver des interlocuteurs privilégiés qui puissent, en quelque sorte, normaliser la présence de l’Islam en France

  • #2
    j ai bien peur que l etat francais legifera dans le sens a deposseder de la nationalite francaise les gens a signes ostentatoires islamistes
    par referendum
    une majorite de francais diront oui
    et je ne vois pas quels arguments peut les persuades du contraire
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill

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    • #3
      Merci Dandy pour cet article intéressant.

      C’est là que se trouve le changement : maintenant on va jusque dans la chambre, on l’a vu encore dans le débat sur l’annulation du mariage pour cause de non-virginité de l’épouse, une annulation qui n’était ni contestée par la femme, ni par les juges, mais par les voix politiques qui ont estimé que ces distinctions n’avaient pas lieu d’être dans la sphère privée. Dans l’affaire de la burqa, on considère que la vie privée peut être source de défauts dans la sphère publique – défaut de laïcité, d’assimilation etc. Ce qui m’intéresse beaucoup c’est l’évolution de la notion d’ordre public ; il y a d’une part l’espace public en ce qu’il s’oppose à l’espace intime, familial, et d’autre part il y a l’ordre public, cette idée très durkheimienne d’un ordre social, moral, qui peut être bafoué même en privé. Et c’est cette idée d’un ordre moral qui pourrait nous amener à une interprétation en faveur de l’interdiction de la burqa ; mais dans notre période post-Vichy on a du mal à parler d’ordre moral.
      Ce passage m'interpelle particulièrement. En ce sens que ça fait un bout de temps que je pressens la chose. Chaque fois que j'ai parlé d'atteinte à la démocratie en Occident, on m'a ri au nez...et pourtant...

      Le problème, c'est que les gens voient rarement plus loin que le bout de leur nez. Interdire le port de la burqa aujourd'hui c'est vraiment ouvrir la porte au pire demain.

      Pour l'instant, on ne se sent pas concerné : la burqa? bof, oui ce n'est pas plus mal d'interdire ce bout de tissu avilissant au nom des droits de l'homme, patati patata...la question est de savoir ce qu'on interdira demain à partir du moment où on a accepté de voir nos libertés grignotées. Qu'est-ce qui demain pourra être considéré comme ayant bafoué l'ordre public alors même que ça ne relève que du privé?
      Aura-t-on seulement encore le droit de penser selon un schéma qui ne sera pas dicté au nom de l'ordre public?

      Quant à la mission d'information parlementaire, ça me fait doucement rigoler...jaune. Comme l'issue de cette mascarade n'était pas déjà connue ! Comme si les conclusions n'étaient pas rédigées sinon par écrit du moins mentalement...

      Dieu que sait que je ne porte vraiment pas cet accoutrement dans mon coeur. Mais l'interdire au nom de motifs inavouables et sous couvert d'une démocratie de façade alors que tous les dés sont déjà pipés, me hérisse littéralement le poil !
      « N’attribuez jamais à la malveillance ce qui s’explique très bien par l’incompétence. » - Napoléon Bonaparte

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      • #4
        @Dandy

        Je trouve qu'il a fait une tres pertinente analyse de la chose ce gars, et ce qu'on pourrais noter de plus burelesque c'est que la conception francaise en la matiere, basee a l'origine sur une attitude foncierement "anti-religieuse" fini par adopter les memes usages qu'un systeme "religieux" afin d'imposer un minimum d'uniformite dans la societe !
        "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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        • #5
          les français sont des gens un peu raciste d'aprés ce que je vois
          la seule chose qui permet au mal de triompher est l'inaction des hommes de bien edmund burk

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          • #6
            @Jukov

            Pas plus que d'autres je crois. Chaque societe a ses reperes, ces conceptions, ses valeurs, ses prejuges ... etc.

            Le seul probleme ici, c'est que le cas francais se presente (ou se concois) comme un modele a la fois superieur (car "bon") et universel.
            "L'armée ne doit être que le bras de la nation, jamais sa tête" [Pio Baroja, L'apprenti conspirateur, 1913]

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            • #7
              Envoyé par Dandy Voir le message

              Voilà le point intéressant : le problème ne vient pas d’un trouble à l’ordre public, mais du fait de rester dans la sphère privée. C’est là que se trouve le changement : maintenant on va jusque dans la chambre, on l’a vu encore dans le débat sur l’annulation du mariage pour cause de non-virginité de l’épouse, une annulation qui n’était ni contestée par la femme, ni par les juges, mais par les voix politiques qui ont estimé que ces distinctions n’avaient pas lieu d’être dans la sphère privée. Dans l’affaire de la burqa, on considère que la vie privée peut être source de défauts dans la sphère publique – défaut de laïcité, d’assimilation etc. Ce qui m’intéresse beaucoup c’est l’évolution de la notion d’ordre public ; il y a d’une part l’espace public en ce qu’il s’oppose à l’espace intime, familial, et d’autre part il y a l’ordre public, cette idée très durkheimienne d’un ordre social, moral, qui peut être bafoué même en privé. Et c’est cette idée d’un ordre moral qui pourrait nous amener à une interprétation en faveur de l’interdiction de la burqa ; mais dans notre période post-Vichy on a du mal à parler d’ordre moral.

              Très pertinent comme analyse. Cette phrase résume à elle seule la moitié de la problématique.

              La laïcité française à travers son évolution démontre la limite de son concept de la liberté. À ses débuts le concept de la liberté était abstrait, car se voulant "universelle" ignorant que ses référents sociétales était à saveur judéo-chrétienne.
              Mais depuis qu'elle est confrontée au fait musulman, elle s'est transformé en concept normatif et conformiste; Ce système ne peut que déboucher en crise, car il ne peut fonctionner en la présence de communautés ayant différents points de repère...

              À mon avis cette contradiction va plonger l'état français dans une grave crise identitaire si ce n'est déja fait. Et dont il serait intéressant d'en imaginer l'issue...

              La guerre contre l'islam dans les médias exprime tous les enjeux en vogue, car ce dernier met à nue le système...
              Dernière modification par absent, 09 août 2009, 06h39.

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              • #8
                Je trouve l’ intervention de John Bowen tres superficielle et non fondée car il donne son avis en tant que anglo-saxon. Il faut noter que tout signe ou symbole est perçu dans un cadre culturel donné, les francais ne sont pas aussi religieux autant que les américains, c'est evident.
                Les américains ne se sont jamais souciés d’ integerer les immigrés. Aux USA les immigrés sont cantonnés par communauté sans que cela ne pose un problème.
                J’ai noté aussi qu’il mélange la burqa avec le foulard, il nous parle de liberté mais il oublie une chose : entre liberté prive et liberté publique il y a loin !

                La laicite comme tout le monde le sait est une spécificité francaise qui est nee graduellement après la bataille avec l'Eglise. Les signes ostentatoires ont presque disparus de la vie publique en France et aujourd'hui les musulmans posent un vrai dilemme a la république. Et au dela du concept francais et de l' interprétation de ce qui est signe religieux ou pas, le voile, entre autre, est la preuve indiscutable que l’islam n'est pas universel comme on le pretend souvent. c'est une croyance qui veut imposer ses règles a elle au lieu de s’adapter dans le milieu ou elle se trouve. Les musulmans aujourd’hui accules par leurs sous développement et leur complexe d’ancien colonisés, font tout pour se démarquer des autres dans le seul but « khalif tou3raf ». Ce qui est effarant ils sont plus concernés par le détail du paraitre que le spirituel.

                Après tout le voile intégrale a mis les femmes au ban de la société, je dirais même que c’est la disparation et la négation de de la femme de l'espace publique au profit de la seule appartenance au groupe, car comment peut on agir et influencer la société dans laquelle elles vivent en adoptant un accoutrement pareil ( burqa) dans un pays ou les femmes ont changé le cours de l’histoire grace a leur revolte et leur combat pour l'émancipation des femmes.
                Je ne comprends pas les musulmans, ils se tirent une bal dans le pied en adoptant des attitudes pareilles en les justifiant avec des motifs religieux faux.
                البعره تدل على البعير

                Quand l’injustice devient la loi, la Résistance est un Devoir !✊🏼DZ

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