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Obama surpris par la fronde contre sa réforme de la santé.

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    Obama surpris par la fronde contre sa réforme de la santé.

    Le Monde

    Aux Etats-Unis, les images ont fait le tour des écrans et la "une" des journaux. On y voit le sénateur démocrate Arlen Specter, visage blême et lèvres pincées. Face à lui, un homme, la barbe grisonnante, éructe : "Un jour, vous serez devant Dieu et il vous jugera." Quel crime a commis le sénateur pour que l'homme évoque ainsi le jugement divin ? Il défend la réforme de l'assurance-santé voulue par le président Barack Obama.

    On est à Lebanon, une ville moyenne de Pennsylvanie. M. Specter est venu y expliquer le plan de la Maison Blanche. Un homme lui lance : "Avec cette loi, le gouvernement aura le droit de nous contrôler de la naissance au tombeau." Une retraitée ne veut pas "payer pour une assurance qui remboursera les avortements". Une autre élargit l'enjeu : "Le problème n'est pas la santé. C'est la transformation de ce pays en une Russie, en pays socialiste." Le sénateur démocrate n'est pas seul...

    Le sénateur n'est pas seul, les envoyés de la Maison Blanche sont de plus en plus accueillis par des groupes organisés qui portent la contradiction avec virulence.

    Ces militants, souvent déjà actifs contre le droit à l'avortement ou la restriction des ventes d'armes à feu sont aux trois-quarts masculins. Ils ne discutent pas de la réforme de la santé, qui voudrait que l'assurance fédérale garantisse que tous les Américains soient assurés, ce que les compagnies privées considèrent comme une concurrence déloyale. Ces militants en appellent aux "valeurs " : la famille, la non-intervention de l'Etat, le refus de toute contrainte collective.

    Exemple typique : jeudi, Joe Donelly, un démocrate blue dog (conservateur sur les problèmes fiscaux) organise une réunion politique dans son Etat, l'Indiana. Un homme récemment licencié, Ron Ammerman, 35 ans, se lève : "Je suis responsable de moi-même, pas des autres, dit-il. Je ne devrais pas avoir à partager les fruits de mon travail avec d'autres." Il est contre la réforme car M. Obama empiète sur son libre arbitre. Et que, partager, c'est communiste.

    La santé coûte aux Etats-Unis 5 points de PIB de plus que dans les autres pays riches. Et elle laisse sans couverture 16 % de la population (46 millions d'individus). Comment l'améliorer ? Schématiquement, le débat opposait jusqu'ici les tenants d'une assurance-maladie publique concurrente des assurances privées, afin de faire baisser les coûts de celles-ci.
    Ce débat a basculé dans l'irrationnel. Des arguments insensés, des accusations infamantes, qui jusqu'ici émanaient de groupes ultraconservateurs, souvent racistes, influencent désormais les discours des responsables républicains et même de démocrates centristes, jusqu'à faire oublier les enjeux réels de la réforme.

    Le tournant est survenu le 7 août. Sarah Palin, ex-colistière du candidat républicain à l'élection présidentielle, John McCain, a écrit sur le site Facebook : "Mes parents ou mon bébé trisomique devront comparaître devant le tribunal de la mort d'Obama, où des bureaucrates décideront s'ils sont dignes ou non de recevoir des soins." La "santé nationalisée", ce serait l'euthanasie officialisée pour les vieillards et les handicapés. "Un tel système serait l'incarnation du mal", dénoncent les adversaires de la réforme.
    Ce fantasme est construit en dénaturant le sens de quelques lignes d'un projet de loi déjà adopté par trois commissions de la Chambre. Peu importe. Des groupes ultraconservateurs tels Americans for Prosperity et Freedom Works organisent des interventions dans les réunions publiques.

    "MENSONGES NAUSÉABONDS"

    Les démocrates s'étranglent d'indignation. M. Obama récuse des "déformations sauvages" sans rapport avec sa réforme. David Axelrod, son conseiller politique, dénonce des "mensonges et distorsions". Rien n'y fait. Ezekiel Emanuel, un oncologue renommé - et frère du chef de cabinet de M. Obama -, chargé de mission à la Maison Blanche sur des projets sanitaires, se voit reprocher trois lignes dans un ancien article scientifique censées prouver qu'il est un adepte des méthodes nazies d'euthanasie. Hitler ! Le nom est lancé : la réforme de la Maison Blanche est hitlérienne...


    Cela paraît ahurissant ? Ça l'est. Mais c'est aussi efficace. Les élus républicains ne justifient pas les pires outrances, mais laissent faire.
    Les démocrates, clame Mitch McConnell, le chef de la minorité républicaine au Sénat, "diabolisent des citoyens" qui ne font rien d'autre que défendre leur point de vue.
    Mi-juin, un sondage CBS-New York Times donnait 70 % des Américains favorables à la réforme de l'assurance santé. Cette semaine, selon un sondage Gallup-USA Today, 49 % de citoyens sont critiques sur la réforme. Ils ne sont plus que 43 % à l'approuver.

    La vague anti-réforme semble avoir pris les partisans de M. Obama par surprise. Ce dernier fait le pari de la rationalité des Américains : "A l'automne, lorsque les gens connaîtront la législation proposée, on entendra des arguments plus sensés", a-t-il déclaré.
    La base démocrate est appelée à se mobiliser. La centrale syndicale AFL-CIO a débloqué 15 millions de dollars (10,5 millions d'euros) pour promouvoir la réforme.
    Un lobby pro-Obama, le Health Care for America Now (HCAN), se mobilise. Le président met directement la main à la pâte avant de partir en vacances. Vendredi, il portait la bonne parole dans l'Etat du Montana. Il devait consacrer son week-end à s'expliquer dans le Colorado et l'Arizona.
    Sylvain Cypel
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