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Ces galaxies qui grandissent en dépeçant leurs congénères

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  • Ces galaxies qui grandissent en dépeçant leurs congénères

    Ce sont les reliefs d'un gigantesque festin. Des étoiles tombées dans l'obscurité du cosmos, disséminées, comme des miettes, autour de l'immense assiette lumineuse d'une galaxie. Il a fallu une année d'observations à une équipe international d'astronomes, principalement franco-canadiens, pour les discerner dans l'ombre. L'effort était justifié : en fouillant dans ces restes, à la manière des archéologues, les chercheurs savaient qu'ils trouveraient de précieux témoignages sur le déroulement et l'ampleur des banquets passés.

    Leur étude, publiée dans la revue Nature du jeudi 3 septembre, donne une meilleure idée de la violence des actes de cannibalisme que des galaxies font subir à certaines de leurs congénères. Elle apporte de nouveaux éléments à la connaissance de ces conglomérats de milliards d'étoiles dont la formation et l'évolution sont encore très mal comprises.

    Pour percer ces mystères, les astronomes se divisent en deux camps. Il y a ceux qui ont choisi de miser sur les grandes distances, sachant que regarder loin revient à regarder tôt dans l'histoire de l'Univers. Ils espèrent entrevoir, dans les tout premiers âges du cosmos, la naissance d'une galaxie qui permettra de trancher entre les différentes théories. Pour l'heure, ils n'y sont pas parvenus.

    Les autres, dont les auteurs de ce travail, ont pris le parti de chercher au plus "près", dans l'espoir que l'examen minutieux d'une galaxie voisine permettrait de dévoiler les traces de son histoire.

    L'une d'elles est particulièrement adaptée aux contraintes de cette démarche archéologique : Andromède, cousine la moins éloignée (environ 2,5 millions d'années-lumière tout de même) de notre propre galaxie, la Voie lactée. Toutes deux se ressemblent. Elles disposent leurs centaines de milliards d'étoiles dans des bras repliés en spirale autour d'un noyau central. Elles dominent de leur masse les autres occupantes de notre petit coin d'univers.

    Les signataires de la publication ont donc braqué le télescope Canada-France-Hawaï, en août 2008, vers une large portion de la périphérie d'Andromède pour une campagne d'observations qui se poursuivra jusqu'en 2011. Au bout d'un an, les résultats sont déjà probants. La galaxie apparaît entourée d'un très large halo d'étoiles anciennes qui n'ont pu se former sur place, faute d'une densité de gaz suffisante pour les engendrer. Leur présence est interprétée comme le résultat du dépeçage de galaxies naines qui se sont approchées trop près d'Andromède et ont été disloquées par sa gravité.

    Cette violence n'a pas seulement frappé les naines imprudentes. L'étude met aussi en évidence les mauvais traitements que subit la voisine immédiate d'Andromède, dite du Triangle, de taille plus respectable. La densité de miettes stellaires dispersées entre les deux galaxies laisse penser qu'elles se sont déjà heurtées. Cette rencontre a dû avoir lieu il y a environ 2,5 milliards d'années et a arraché des millions d'étoiles à la galaxie du Triangle. Andromède en porte la trace : une légère déformation de son disque.

    Cabossée, mouvante, dotée d'une interminable banlieue d'astres soustraits à leurs propriétaires, la galaxie réelle ressemble ainsi de moins en moins à ses élégantes photographies. "Comme Andromède, nombre de galaxies doivent être bien plus étendues que ce que l'on peut en voir", constate David Valls-Gabaud (Observatoire de Paris, CNRS), cosignataire de l'article.

    Cette complexification n'est pas forcément une mauvaise nouvelle pour les chercheurs. Elle pourrait faciliter le tri entre les théories sur la genèse de ces corps célestes. De fait, ces nouvelles observations confortent le scénario de galaxies nées petites, et croissant par absorption du contenu de congénères. Ce schéma, même s'il est encore loin d'être validé, paraît mieux concorder avec les faits que celui de super-galaxies d'emblée monstrueuses qui, peu à peu, se scinderaient en populations hétéroclites.

    Cette croissance mouvementée implique en revanche une mauvaise nouvelle pour notre Voie lactée. Depuis plusieurs années, des astronomes ont calculé qu'Andromède fonce, à environ 300 km/s, vers notre galaxie. Pas de panique : à cette vitesse, le choc, qui devrait conduire à la fusion des deux mastodontes, n'est pas prévu avant 6 milliards d'années. Il devrait se traduire par des violentes embardées du système solaire hors de son orbite actuelle.

    Durant cette migration, le risque de collision avec d'autres astres sera quasiment inexistant : il y a assez de place à l'intérieur des galaxies pour qu'étoiles et planètes puissent se croiser sans dégâts. En revanche, une dangereuse traversée de nuages de gaz dense n'est pas exclue. D'ici là, la Terre aura toutefois connu bien d'autres épreuves, à commencer par l'agonie programmée de notre Soleil.

    Par le Monde
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