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Soudan, le combat de Loubna Hussein

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  • Soudan, le combat de Loubna Hussein

    Cette journaliste, Loubna Hussein âgée de 30 ans, qui écrit dans le quotidien de gauche, Al- Sahafa, a été libérée mardi à Khartoum après paiement par le syndicat soudanais des journalistes de l'amende de 209 dollars à laquelle elle avait été condamnée. Son crime : avoir porté un pantalon, et ce, bien qu'il soit couvert par une longue tunique.

    De plus, elle portait le tarha, ce voile traditionnel en soie que portent les Soudanaises et qui recouvre la tête et les épaules. Rien donc de très sexy. Pour ce crime, elle a été arrêtée le 3 juillet par la police des mœurs en compagnie de 12 autres femmes, toutes en pantalon, dans un restaurant de Khartoum, et risquait 40 coups de fouet au nom de la charia. Les dix femmes arrêtées en même temps qu'elle qui avaient fait amende honorable ont été jugées immédiatement et fouettées dix fois chacune. Loubna Hussein ne s'est pas laissée faire. Elle a contesté l'article 152 du code pénal soudanais prévoyant une peine de 40 coups de fouet pour quiconque «commet un acte indécent ou un acte qui viole la moralité publique ou porte des vêtements indécents». A quoi elle a rétorqué : «Si certains se réclament de la charia pour flageller les femmes en raison de ce qu'elles portent, qu'ils me montrent les sourates du Coran ou les hadiths qui le stipulent. Je ne les ai pas trouvés. Des dizaines de milliers de femmes et de jeunes filles ont été flagellées à cause de leurs vêtements ces vingt dernières années. Ce n'est pas rare au Soudan. Simplement, aucune d'entre elles n'ose se plaindre, car qui croirait qu'elles ont été flagellées juste pour avoir mis un pantalon ? Elles ont peur du scandale, des doutes sur leurs mœurs», a estimé la journaliste. «La journaliste soudanaise Loubna vous invite à sa flagellation demain», a-t-elle écrit dans des centaines d'e-mail envoyés aux ONG de défense des droits de l'homme et aux associations de la société civile soudanaise.

    Embarrassé, le gouvernement soudanais a fait marche arrière. Mardi, elle n'a été condamnée qu'à payer une amende de 209 dollars ou à faire un mois de prison. «Je ne vais pas payer l'amende, je préfère aller en prison », a-t-elle répondu à ses juges. Et elle a été aussitôt conduite à la prison d'Ondurman, près de la capitale soudanaise, avant d'être libérée après que le syndicat des journalistes eut payé l'amende.

    De cette affaire, Loubna Hussein a fait une question de principe. Elle a montré la voie non seulement aux Soudanaises mais aux femmes arabes et des pays de l'ère islamique confrontées aux tenants d'une justice se référant à la charia, qu'ils se font fort d'interpréter selon leur vision rétrograde de la société, une vision complètement décalée des réalités et qui explique le retard culturel et économique du monde musulman sur le monde occidental et asiatique.

    Et en effet, comme je l'ai déjà signalé dans une de mes chroniques, pendant que cet Occident «impie» travaille, maîtrise les dernières technologies et domine par conséquent le monde islamique dans tous les domaines — c'est simple, l'Algérie par exemple leur achète presque tout — chez nous, comme en Egypte et ailleurs, que lit-on et de quoi discute-t-on ?

    Eh bien de savoir si la femme doit porter le hidjab ou non, si l'homme doit porter la barbe ou non, s'il faut faire la prière avant de prendre le volant de sa voiture pour 100 km ou de monter dans le bus, s'il faut boire son café debout (pour ne pas le partager avec satan) ou assis pour être à l'abri du chaïtane, si l'épouse doit laver les pieds de son mari ou non, si les joueurs de l’équipe nationale font ou non la prière, le Ramadan, s’ils sont de vrais musulmans... J'exagère ? Un peu.

    Mais lisez certains journaux, écoutez certains conseils religieux prodigués sur la radio et les chaînes satellitaires ou certains discours pour qui les catastrophes naturelles sont des punitions divines, sans expliquer à ceux qui les écoutent pourquoi ces catastrophes frappent des pays pauvres où les gens vont à la mosquée et ne touchent que rarement les pays du nord de l'Europe !

    Pour ces raisons, le combat de Loubna Hussein est celui de la modernité contre l'archaïsme.

    Par Hassane Zerrouky, le Soir
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