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Si Ahmed Bouda, un militant exceptionnel

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  • Si Ahmed Bouda, un militant exceptionnel

    L’information est authentique. Lors du décès de Si Ahmed Bouda, des hommes du pouvoir se déplacèrent en nombre pour assister à l’enterrement. Ils n’en croyaient pas leurs yeux en découvrant le domicile du défunt sis au neuvième étage d’un grand immeuble du Ruisseau. Ils ne cessaient de se poser la question.

    Comment se peut-il qu’un militant au long cours de cette trempe habite un si modeste appartement dans une cité populaire ? Vous ne le saviez pas ?, s’était hasardé un de ses fils, froissé beaucoup plus par leur ingratitude et leur hypocrisie que par leur méconnaissance, rappelant toutefois que Ben Bella qui avait beaucoup d’estime pour Si Ahmed, malgré les embrouilles, avait mis à la disposition de la famille Bouda une superbe villa que Si Ahmed avait poliment refusée.

    D’ailleurs, lors de l’inhumation au cimetière de Sidi M’hamed en 1992, le premier président de la République algérienne, ému aux larmes, avait déclaré « que l’Algérie venait de perdre un homme exceptionnel, un monument du mouvement national », se souvient Nourredine, fils du défunt, qui rappelle que son père pour éviter d’escalader les 9 étages et vu sa santé précaire, préférait rester à la mosquée de Oued Kniss pour y effectuer les prières du D’hor et d’El Asr.

    C’est d’ailleurs là qu’il rendit son dernier souffle, prosterné, implorant son Créateur.

    Né en 1938, Nourredine ne l’a connu que presque 10 ans plus tard, car pris par ses activités militantes, Si Ahmed était souvent loin de sa famille. « On ne le voyait que rarement. Ce n’est qu’après l’indépendance que nous avons pu enfin jouir de son incomparable présence. » Si Ahmed Bouda est né le 3 août 1907 à Surcouf, dans un milieu paysan modeste. Il fréquenta très tôt l’école coranique. Disciple assidu de la zaouïa Cheikh El Hamami, il partagea les idées réformistes des Oulémas qu’il combattit sur le plan politique. Dès 1933, il est membre de l’Etoile nord-africaine, puis après sa dissolution, membre du PPA. En 1939, le parti le désigne comme gérant du journal Le Parlement algérien. « Il avait pris sa tâche à cœur, d’autant que les idées véhiculées par le journal prônaient l’idée de l’indépendance de l’Algérie », relève Sid Ali Abdelhamid, vieux militant de la cause nationale.

    Un autodidacte doué

    Si Ahmed était un autodidacte doté d’une mémoire prodigieuse, note M. Tazir Bacha. « Il n’est sorti ni de l’université de la Zitouna à Tunis ni de celle d’El Azhar du Caire, mais il était capable de débattre avec n’importe quel A’lem et de lui tenir tête en citant avec une précision phénoménale des versets du Coran et des hadiths du Prophète (QSSSL). » Son abnégation, son sacrifice au profit du parti étaient sans bornes. Il lui arrivait souvent d’envoyer sa femme et ses petits enfants en bas âge dormir chez les voisins afin d’héberger des responsables militants de passage dans l’unique chambre dont il était locataire au 8, boulevard Cervantès à Belcourt.

    Si Ahmed participa au premier congrès du PPA à Alger sous la présidence de Messali. C’est ce congrès qui entérina la création du MTLD, branche légale du mouvement national et qui décida, à l’unanimité, la création de sa branche armée, l’OS, tout en maintenant dans la clandestinité le PPA considéré comme la colonne vertébrale du mouvement et dont l’organisation était confiée à Ahmed Bouda. Peu après le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, une répression sans précédent s’abat sur le PPA. Les principaux responsables sont arrêtés et incarcérés, Si Ahmed est envoyé dans un camp de concentration dans le Sud algérien, à Djenane Bourezgue près de Aïn Sefra. Libéré en 1943, Si Ahmed renoue avec l’activité militante débordante, notamment à Belcourt son quartier. C’est là qu’il recevait souvent Aït Ahmed.

    D’ailleurs, ce dernier ne tarit pas d’éloges sur les qualités de son aîné. Le témoignage du leader du FFS est significatif. « C’était mon premier contact avec lui et je compris pourquoi ce représentant de la garde nationaliste inspirait la terreur aux policiers qui le recherchaient. L’anecdote de l’inspecteur de police spécialement chargé de l’arrêter et qui prit la fuite dès qu’il le reconnut devant un guichet de cinéma, n’avait pas peu contribué à sa légende. Il avait de grands yeux saillants, dans un visage marqué par la variole. J’ai toujours vu en lui une sorte de Spartacus mâtiné d’Othello. Tragiquement solennel, même dans les gestes les plus quotidiens, il pouvait parler des jours et des nuits durant s’il trouvait un auditoire attentif. Il avait acquis tout seul une culture populaire remarquable dans les rangs de l’Etoile Nord-Africaine, puis au PPA qu’il avait vu naître. Son langage s’était nourri de l’Islam populaire, notamment à l’école coranique et dans la fréquentation des associations religieuses. Il portait également tout un patrimoine culturel dans sa façon de construire un raisonnement, d’utiliser les proverbes et le style indirect des paysans kabyles. Un jour qu’au comité central un camarade lui reprochait de parler trop et dans le vide, il répliqua : ‘‘Non, je parle toujours dans le plein’’ ».

    Je parle toujours dans le plein

    Ahmed Bouda était l’abnégation même. Les sacrifices qu’il s’est imposés et qu’il a imposés à sa femme et à leur ribambelle d’enfants lui valaient le respect et l’estime générale. « C’était mon père spirituel », confie Ahmed Haddanou, dit El Kaba. « C’est grâce à lui que j’ai appris le nationalisme et adhéré au PPA avant de rejoindre le comité de la jeunesse de Belcourt. J’étais jeune, mais je fréquentais les adultes. C’était lui qui m’avait recruté dans la cellule avec comme chef Abdelkader Rebbah, cousin de Lakhdar. J’étais tout le temps en contact avec Si Ahmed qui possédait un magasin au 8, boulevard Cervantès. On habitait le même immeuble. Il m’emmenait avec lui aux réunions au Clos Salembier, à la Redoute, Leveilley, Maison Carrée. Le soir, on rentrait tard et la police ne nous arrêtait pas aux barrages, pensant au père et au fils qui rentraient normalement chez eux.

    Comme agent de liaison, il m’envoyait prendre contact avec des responsables à La Casbah et ailleurs. Si Ahmed a été le fondateur du nationalisme à Belcourt. C’est grâce à lui que le CJB a rejoint le PPA. Directeur du journal et membre du comité directeur du PPA, il est resté le même et à l’écoute de la base. C’était un véritable tribun. Il subjuguait les foules et il était respecté pour sa sincérité, son honnêteté et ses indéniables capacités d’organisation. Il était le seul qui pouvait parler des heures dans une langue comprise par tous. Les militants du parti à travers le pays le réclamaient. Il parlait la langue du cœur. Il croyait en ce qu’il disait. C’était un monument. Il était comme ça. Entier. A prendre ou à laisser. »

    La langue du coeur

    Pour Abdelhamid Mehri qui l’a connu de longues années durant, « Si Ahmed est l’exemple même du sacrifice. Il s’est dévoué corps et âme pour la patrie avec un esprit désintéressé et déterminé qui lui valent aujourd’hui reconnaissance et respect ». Si Ahmed n’ignore pas les limites de son action, mais il sait réinsuffler l’énergie, l’esprit combattant. Ce superactif, à la poignée de main franche et à la silhouette sèche ne rechigne pas à aller au charbon.

    A dire vrai, Si Ahmed se partage depuis toujours entre la lutte et la patrie. Il a toujours œuvré pour casser les cases dans lesquelles on voulait le faire entrer pour museler ses libertés ! Il était un admirateur acharné de Messali et lorsque celui-ci a été emporté par les dérives, Si Ahmed est devenu son adversaire le plus résolu. C’est dire le caractère trempé de l’homme presque envoûté par les luttes, comme le décrit avec justesse son frère de combat Ahmed Mahsas.

    Si Ahmed avec sa franchise habituelle ne manquait jamais d’asséner des vérités à son interlocuteur sur son règne et sur son entourage. Boumediène qui avait une expérience sur la faiblesse des hommes qui l’entouraient, et dont certains ne s’embarrassaient pas de solliciter des villas, des appartements de grand standing et des privilèges de toutes sortes, savait que Si Ahmed habitait avec sa nombreuse famille un modeste appartement HLM au Ruisseau au neuvième étage.

    Aussi, chaque fois qu’il le recevait, Boumediène s’inquiétait sur ses conditions de vie, s’attendant à ce que M. Bouda lui demande soit une villa, soit un appartement plus spacieux. Mais il reçut toujours la même réponse. « Mon logement me suffit et j’en suis très satisfait. D’ailleurs, ce n’est pas pour cela que je suis venu. Je suis là pour vous donner mon point de vue sur l’état du pays et sur les moyens de remédier à certaines situations préjudiciables à son essor. » A l’indépendance, il se retira de la politique. En 1989, il a soutenu le multipartisme « qui est un bienfait (Ni’ma) qui ouvre la voie à la liberté d’expression, à la liberté d’organisation, après les années noires de la pensée unique et du parti unique. Diffusons nos idées, recommandons le bien, interdisons le mal, luttons contre l’analphabétisme, la pauvreté. »

    PARCOURS

    De 1907, sa date de naissance, à sa mort en 1992, Si Ahmed Bouda aura consacré toute sa vie à la lutte pour que ce pays, qu’il chérissait tant, recouvre sa liberté et son indépendance.

    De l’Etoile nord-africaine au FLN en passant par le PPA, Si Ahmed a milité avec abnégation et sincérité. Il est resté le même. Simple, modeste, près des petites gens. Humble parmi les humbles, il est mort dans la discrétion. « Figurez-vous qu’il n’avait pas de pension et qu’il n’a jamais demandé quoi que ce soit en contre-partie, même pas les papiers justifiant son engagement », révèle son fils. Selon le regretté Benkhedda, la devise de Bouda se résumait en deux mots : religion et patrie.

    Avide d’action politique, il s’engage à l’Etoile Nord-Africaine qui revendique ouvertement l’indépendance de l’Algérie et dont l’activité se poursuit dans le PPA en 1997. Il assura la direction du PPA, alors clandestin entre 1939 et 1943, avec Lamine Debaghine, Ahmed Mezerna, Embarek Fillali et Amar Khellil. Si Ahmed a laissé 6 garçons et 3 filles.

    Par El Watan

  • #2
    Ils n’en croyaient pas leurs yeux en découvrant le domicile du défunt sis au neuvième étage d’un grand immeuble du Ruisseau.

    j'airais bien aimé voir l'expression de leur visage
    ces rentiers
    pour certains issus du 19 mars
    Gone with the Wind.........

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    • #3
      Ce Grand Monsieur n'a jamais rien reclamé et il a méme refusé ce que certains dirigeants voulaient lui donné (une villa).
      Ce Grand Monsieur que je connais a été élevé dans la tradition du respect de son prochain et du bien d'autrui.
      Ce Grand Monsieur le 19 Mars 1962 avait déja 55 ans et plusieurs descenies de luttes pour sa patrie.
      Ce Grand Monsieur sort d'une gande école religieuse La Zaouia de Cheikh El-Hammami a Lakhdaria.
      Rappele cette Zaouia qui a subit le Massacre des colons en 1869 parceque elle appellait a la lutte au coté du Cheikh El-Mokrani.

      .
      Dernière modification par myra21, 13 septembre 2009, 16h07.

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