Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Abdullah Abdullah, nouvelle étoile de la politique en Afghanistan

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Abdullah Abdullah, nouvelle étoile de la politique en Afghanistan

    Il savoure l'instant, le déguste avec un plaisir non dissimulé. Abdullah Abdullah, l'homme qui est train d'ébranler le pouvoir d'Hamid Karzaï, se plie de fort bonne grâce aux sollicitations que lui vaut son statut de nouvelle étoile de la politique afghane. Depuis le scrutin présidentiel du 20 août, qui l'a placé en deuxième position derrière le président sortant, tous les regards sont tournés vers lui. Qui est-il ? Quelle est sa politique ? Réussira-t-il à calmer ses partisans scandalisés par les fraudes massives imputées au camp présidentiel ?

    Les visiteurs se succèdent en sa villa de Karte Parwan, un faubourg de Kaboul. On y parvient en tanguant sur une ruelle de terre cabossée. Un pick-up de la police afghane est garé à proximité de la porte métallique que l'on ne franchit qu'après une fouille de circonstance. Blazer bleu marine et pantalon de jean, M. Abdullah reçoit dans son jardin piqué de roses avec l'élégance décontractée d'un gentleman-farmer. Son anglais est impeccable. Ses réponses sont ciselées avec soin. L'homme affecte l'assurance et la maîtrise. Quel que soit le résultat du scrutin, M. Abdullah aura gagné son pari. A 49 ans, il s'est imposé comme une figure centrale du jeu politique afghan. Mais s'il veut durer, il lui faudra s'émanciper de sa base historique et consolider le soutien populaire glané durant la campagne électorale.

    Au départ, M. Abdullah n'est qu'un modeste héritier. Il doit sa petite notoriété à son passé de lieutenant d'Ahmed chah Massoud, le "Lion du Panchir" qui tint tête à la fois aux Russes et aux talibans avant d'être assassiné en septembre 2001.

    Diplômé de médecine à l'université de Kaboul en 1983, M. Abdullah avait rejoint la résistance du Panchir en 1985 après avoir transité par un camp de réfugiés de Peshawar (Pakistan), où il exerça sa spécialité d'ophtalmologue dans un hôpital. Dans ses repaires montagneux d'où il défie l'armée rouge, le commandant Massoud en fait son homme de confiance. Le médecin devient secrétaire particulier. S'il garde un fusil-mitrailleur en bandoulière, il ne combat pas vraiment. Il est un administratif.

    Quand les moudjahidins prennent Kaboul en 1992, il suit Massoud au ministère de la défense de la nouvelle République islamique d'Afghanistan, dont il devient le porte-parole. La guerre civile fait alors rage, d'abord entre les factions moudjahidins puis entre Kaboul et des talibans lancés à la conquête du pays à partir du Pakistan. Ahmed Chah Massoud fait de M. Abdullah son émissaire politique. Il l'envoie sur le front - à Kunduz ou à Herat -, où il est chargé d'assurer la coordination entre forces locales et gouvernementales.

    Mais en 1996, c'est la débâcle. Délogé de Kaboul par les talibans, il doit se replier avec Massoud dans les réduits du Panchir. Il devient ministre adjoint des affaires étrangères du "gouvernement en exil". Il sillonne la région, l'Europe et les Etats-Unis en quête de soutiens à la résistance antitaliban. Il soigne ainsi un réseau diplomatique qui se révélera fort utile au lendemain du 11-Septembre, quand une coalition internationale dirigée par les Américains se lancera à l'assaut du régime taliban à Kaboul. Ironie de l'histoire, c'est lui qui suggère le nom d'Hamid Karzaï comme chef de l'administration provisoire de l'Afghanistan lors de la conférence de Bonn, en décembre 2001, chargée de préparer l'ère post-taliban.

    Fin diplomate

    M. Karzaï le remerciera en le nommant ministre des affaires étrangères. Fin diplomate, il cultive ses amitiés passées avec les Russes et les Iraniens - scellées lors de la résistance antitaliban -, sans offenser les Occidentaux qui financent le nouveau pouvoir. En 2006, M. Karzaï le limoge, préférant s'entourer de ministres proches.

    De cette disgrâce, M. Abdullah fera un tremplin politique, capitalisant sur le rejet croissant que suscite le président. Durant la campagne, il a soulevé l'enthousiasme d'une partie de la jeunesse urbaine mais il continue de souffrir d'un handicap : panchiri par sa mère et pachtoune par son père, il reste identifié au clan des Panchiris, abhorré par de nombreux Pachtounes. S'il veut s'inscrire dans la durée, M. Abdullah devra élargir sa base au-delà de son fief.

    Par le Monde
Chargement...
X