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La lettre secrète de Sarkozy à Obama

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  • La lettre secrète de Sarkozy à Obama

    Le président français y expose sa vision de ce que devraient être les relations transatlantiques.
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    samedi 19 septembre 2009
    Barack ObamadiplomatieEtats-UnisFrancelettreNicolas SarkozyObama
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    Cher Barack,

    J'espère que tu as pu prendre un peu de repos au cours de l'été.

    Nous allons nous retrouver prochainement à Pittsburgh pour le sommet du G 20. Ce sera une réunion importante car nos opinions attendent de leurs dirigeants qu'ils prennent des décisions courageuses pour sortir de la crise. J'ai fait des propositions. Je me suis concerté avec Angela et Gordon. J'espère que nous obtiendrons de bons résultats.

    Mais sans attendre ce rendez-vous capital, et au-delà de la crise économique mondiale, je tenais à te faire part de mes préoccupations et de mes réflexions sur la façon dont Européens et Américains devraient travailler ensemble pour résoudre les grands problèmes du monde.

    Ton élection à la Présidence des Etats-Unis a été un évènement d'une portée considérable. Elle a suscité à travers la planète un immense espoir: celui de voir l'Amérique redevenir un pays de progrès ; celui aussi de permettre enfin un vrai partenariat entre les Etats-Unis et l'Europe pour relever ensemble les défis auxquels nous devons faire face: mettre fin aux conflits internationaux, diminuer la pauvreté, lutter contre le réchauffement climatique, organiser un monde plus solidaire etc.

    A cet égard, comme d'habitude, je me dois de te parler franchement et te dire mon inquiétude et mon espoir.

    Depuis ton élection à la présidence des Etats-Unis, tu as décidé de prendre les problèmes internationaux à bras le corps: le conflit israélo-palestinien, l'Iran, l'Afghanistan, la Russie, les relations avec le monde musulman. Nous savons tous qu'aucun de ces problèmes ne peut être résolu sans l'implication des Etats-Unis ; mais ce n'est pas faire injure à ton grand pays d'ajouter que les Etats-Unis ne peuvent plus les résoudre seuls. J'ose affirmer que les Européens peuvent et doivent être pour ton pays des partenaires indispensables.

    Pendant longtemps, un vrai partenariat entre les Etats-Unis et l'Europe a été impossible. Du temps de la guerre froide parce que les Etats-Unis étaient les seuls à même de pouvoir contenir la menace soviétique ; après la chute du mur de Berlin, le décalage a continué. Avec la présidence américaine précédente, il a été malheureusement impossible de faire quoi que ce soit et les dégâts ont été considérables. Après le 11 septembre 2001, certains ont pensé que de cette immense tragédie, pourrait naître un nouvelle donne dans les relations entre les deux rives de l'Atlantique. Hélas, ce fut l'inverse.

    Pour la première fois depuis cinquante ans, ce partenariat entre l'Amérique et l'Europe, c'est-à-dire la possibilité de partager les risques mais aussi l'élaboration des stratégies et la prise des décisions, est devenu possible. L'Union européenne est devenue la première puissance commerciale de la planète, le premier donateur d'aide publique au développement. L'Euro est devenu une réalité incontournable. Nous avons fait des progrès considérables dans la convergence de nos politiques étrangères, y compris en nous dotant de moyens militaires et de capacités de défense autonomes. Nous avons collectivement répondu à la crise financière de façon responsable. Nous aurons, demain, lorsque le Traité de Lisbonne aura été ratifié, une Présidence stable et un Ministre des Affaires Etrangères avec des moyens. J'ajouterai que nous avons accompli tout cela en élargissant constamment l'Union européenne, ou plutôt, en réussissant à réunifier la famille européenne, arbitrairement divisée par le communisme et la guerre froide.

    Le temps est donc venu, pour l'Europe, d'assumer ses responsabilités et de savoir prendre des risques, bref d'être crédible sur la scène internationale ; pour les Etats-Unis, de l'accepter comme un vrai partenaire et de mettre un terme à une attitude de condescendance qui a trop été celle de certains de tes prédécesseurs.

    Le temps de l'anti-américanisme est passé et c'est bien ainsi. La dénonciation de l'unilatéralisme traduisait en fait l'incapacité des Européens à faire entendre leur voix et à peser sur le cours des choses. Parler sans cesse de l'hyper-puissance américaine, c'était une façon de parler de l'impuissance européenne.

    Nous ne devons pas nous dissimuler les difficultés de l'exercice. Trop d'habitudes, voire de réflexes, ont été pris, d'arrogance et d'indifférence, d'un côté ; de résignation, de faiblesse et de complaisance de l'autre. Pour rendre ce partenariat possible, il nous faudra reconnaitre nos différences sur certains sujets, nos oppositions d'intérêt sur d'autres. Il faudra refuser de nous payer de mots ou de nous contenter de faux-semblants. Mais nous pourrons ainsi unir nos forces, maximiser nos atouts et faire jouer nos complémentarités.

    Dans l'immédiat, outre la crise économique et financière sur laquelle nous aurons l'occasion de nous concerter à Pittsburgh, je souhaite que la question iranienne soit le premier sujet sur lequel nous puissions mettre en œuvre ce nouveau partenariat. Le dossier iranien est le seul problème de politique étrangère - et aussi le plus difficile - sur lequel les Européens, emmenés par l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France, aient pris l'initiative de définir, par eux-mêmes, une politique claire et courageuse. Je connais ta volonté d'engager le dialogue avec les Iraniens. Nous nous en réjouissons. L'expérience des six dernières années de discussions avec l'Iran nous a aussi appris qu'il ne suffisait pas de vouloir dialoguer pour avoir un dialogue. Comme disait un ancien Président des Etats-Unis, «il faut être deux pour danser». Nous devons donc définir ensemble, avec nos amis Russes et Chinois, une politique réaliste, fondée sur une analyse rigoureuse des rapports de force en présence. Je te propose une réunion confidentielle, à brève échéance, soigneusement préparée par nos Ministres des Affaires étrangères et nos conseillers.

    Une nouvelle donne entre les Etats-Unis et l'Europe est devenue aujourd'hui possible. Elle est aussi désormais nécessaire si nous voulons être à la hauteur des enjeux.

    Telles sont les considérations que je souhaitais porter à ta connaissance afin de contribuer à une meilleure compréhension entre nous et, surtout, à la définition de politiques correspondant à l'intérêt de nos peuples.

    Je te prie de croire, cher Barack, à l'assurance de mes sentiments les plus amicaux,

    Nicolas Sarkozy



    NDLR: cette lettre est imaginaire mais elle pourrait être véridique.

    G. Le Hardy
    The truth is incontrovertible, malice may attack it, ignorance may deride it, but in the end; there it is.” Winston Churchill
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