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D G de EPAL.:Si nous n’avions rien fait, l’Algérie aurait dépendu de Tanger Med

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  • D G de EPAL.:Si nous n’avions rien fait, l’Algérie aurait dépendu de Tanger Med

    Abdelhaq Bourouai est le président directeur général de l’Entreprise portuaire d’Alger EPAL. Il vient de signer la naissance de Djazair Port World, une joint venture avec le 3e opérateur mondial, l’émirati Dubaï World Port. Djazair PW détiendra, en concession, le terminal à conteneurs d’Alger durant 30 ans. La même opération est prévue au port de Djendjen. Le PDG de l’Epal explique aux Afriques le but de ce partenariat inédit en Algérie.

    Les Afriques : Pourquoi ce partenariat alors que l’EPAL gagne beaucoup d’argent et que l’activité conteneurs est très rentable ?

    Abdelhaq Bourouai : Le pétrole est bien dans notre sous-sol et nous avons le savoir-faire pour l’extraire. Personne ne demande pour autant, pourquoi Sonatrach s’associe avec des étrangers. Nous aurions pu, seuls au port d’Alger, acheter des portiques, moderniser les équipements. Mais nous n’avions pas l’organisation qui va avec. Nous n’aurions pas su les maintenir et les renouveler avantageusement. En fait, nous sommes hors réseau. L’économie mondiale est organisée en réseaux. Dubaï Port World nous apporte le sien, celui du 3e opérateur mondial dans les terminaux à conteneurs. Trouvez-vous normal qu’un fret Marseille – Alger coûte 40% plus cher qu’un Marseille – Tunis ? Les transporteurs facturent la non-performance du port d’Alger. La moyenne y est de dix conteneurs déchargés par heure. C’est la plus faible de la Méditerranée. Avec DPW elle passera entre vingt et vingt-cinq conteneurs par heure. Le taux de fret va baisser, toute l’économie nationale en profitera. Et puis, il y a une seconde joint venture pour exploiter le terminal de Djendjen, un port en eaux profondes qui reste à développer. Si nous n’avions rien fait, l’Algérie aurait dépendu du port de Tanger Med pour ses approvisionnements.

    LA : Vous voulez dire que l’Algérie ne peut pas recevoir dans ses ports les nouvelles générations de porte-conteneurs ?

    AB : Je vais vous dire. Le port d’Alger ne peut même pas recevoir un 1200 EVP (équivalent vingt pieds) de première génération. Il y a un problème de tirant d’eau, mais aussi de longueur linéaire de quai. La nouvelle joint venture bénéficiera cependant de 18 ha de surface, au lieu de 12 ha actuellement. Le futur grand port d’éclatement, c’est Djendjen. Sans Djendjen, on ne trouvera pas de grands navires de 15 000 EVP pour venir chez nous. Ce qui ne signifie pas que notre terminal d’Alger n’a pas d’avenir. Il traite 50% du trafic, et DPW a payé 16 millions d’euros pour y entrer. Notre partenaire s’est engagé à en accroître le trafic pour le porter à 760 000 boites en sept ans. Il représentait les 2/3e des 600 000 boites traitées en 2008. Il faut noter que dans son nouveau business plan, le terminal de Djendjen traitera 1,5 million d’EVP au bout de dix ans. Il se situe à moins de 100 000 aujourd’hui.

    LA : Comment est organisé votre partenariat avec DPW et comment va-t-il se mettre en place ?

    AB : Nous avons donc créé le 15 février dernier la société Djazair Port World à 50-50 au capital de 20 millions d’euros. Elle bénéficie d’une concession de 30 ans sur le terminal à conteneurs. Son management est confié à Dubai Port selon deux modalités. La première est un contrat de performance, payé durant sept ans par la société concessionnaire. La seconde, au-delà, prévoit un management sans paiement, à la responsabilité de Dubai Port et une algérianisation de l’encadrement. En tant que concessionnaire historique, nous ne payons pas de ticket d’entrée, mais nous partageons à moitié avec notre partenaire, les dépenses d’investissements de 96,2 millions d’euros prévus notamment pour des travaux, l’acquisition d’équipements et la mise en place d’un système de gestion informatique. L’achat des quatre portiques qui changeront l’organisation du travail sur les quais n’est prévu qu’en seconde année. Le business plan prévoit 20% de rentabilité en bout de dix ans. Djazair PW prend les commandes du terminal le 17 mars prochain. Un mois plus tard, ce sera au tour de la joint-venture créée sur le même business modèle, entre DPW et l’entreprise portuaire de Djendjen, de débuter. Les deux sociétés concessionnaires payeront à l’Etat algérien une redevance fixe sur le m2 et une redevance variable sur le chiffre d’affaires.

    LA : Ne redoutez-vous pas de réaliser vos objectifs d’investissements, mais de ne pas réduire le séjour des conteneurs sur les terre-pleins à cause d’un environnement administratif qui ne suivra pas le mouvement ?

    AB : C’est un risque, mais je reste confiant. Je vois par exemple ce qui se passe au port de Béjaia, où un contrat de management a été signé il y a trois ans avec une société de Singapour. Elle a dynamisé avec elle tout le monde : la douane et les autres administrations. Les conteneurs sortent en trois jours là-bas. C’est un management différent, ce sont des privés qui sont attentifs à ne pas perdre de l’argent en perdant du temps. Ils sont plus agressifs pour faire bouger leur vis-à-vis de l’administration. La même chose va arriver au terminal d’Alger.

    LA : La coordination syndicale des ports d’Algérie a beaucoup combattu votre association avec DPW. L’une de ses critiques vise le volet social. Va-t’il y avoir des licenciements ?

    AB : Aucun. C’est l’inverse que je redoute. Nous devons, EPAL, fournir à Djazair PW 660 travailleurs dès la première année. Je ne suis pas certain d’avoir tous les profils recherchés. En fait, le terminal va devoir recruter. Maintenant, il faut bien voir que, sur la durée des 30 ans, les effectifs baissent avec la montée des rendements. En 1982, au moment de la naissance de l’EPAL, nous étions 7000 travailleurs pour traiter environ 4 millions de tonnes de marchandises par an. En 2008, nous en traitons plus de 6 millions de tonnes, et nous ne sommes plus que 3500 travailleurs. Mais jamais il n’y a eu de licenciements. Les départs ne sont pas toujours remplacés. La réduction d’effectif est un processus naturel de la modernisation des équipements et de l’organisation. Nous sommes aujourd’hui en retard dans les qualifications requises pour un terminal moderne. Dubai Port World se chargera de la mise à niveau. Le niveau de compétence du travailleur portuaire va s’élever.

    LA : Que va faire l’EPAL sur le reste du domaine portuaire d’Alger ?

    AB : Nous allons tenter de profiter de l’autonomisation du terminal à conteneurs pour poursuivre les réformes qui s’imposent. Il y a des métiers qu’il nous faut filialiser. Le remorquage par exemple, n’a rien à voir avec la manutention. Nous devons séparer la fonction commerciale de l’EPAL et sa mission de puissance publique. Nous attendons la naissance d’un organe de régulation pour arbitrer les activités concurrentielles qui se développent dans les ports. Le gouvernement y travaille.

    LA : Votre négociation avec DPW s’est déroulée en gré à gré. Ne pensez-vous pas que l’appel d’offres était plus approprié pour trouver un partenaire à Djendjen et à Alger ?

    AB : Dans ce cas précis, je ne le pense pas. Vous savez, les appels d’offres ne réussissent pas toujours. On ne sait pas parfois sur qui nous allons tomber. Nous avions, dans ce gré à gré, l’avantage de la confiance entre les deux Etats, Algérien et Emirati, et la volonté d’aboutir. Dubai Port World était absent de la Méditerranée, et nous avions besoin d’un gros partenaire qui nous introduise dans le circuit mondial. Je crois vraiment que c’est un accord gagnant-gagnant.
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