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Cinéma-" London River" de Rachid Bouchareb

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    Cinéma-« London River » de Rachid Bouchareb : Fleuve d’émotions


    Ce plaidoyer humaniste, en salle depuis une semaine à Paris et Alger, représentera l’Algérie aux Oscars 2010. Convaincant. Crédible. Remarquable. Intelligent. Généreux. Emouvant… Les superlatifs sont légion pour London River, le dernier opus de Rachid Bouchareb (sorti la semaine dernière en France et en Algérie), avant le très attendu Hors-la-loi qui prolongera Indigènes au large succès public (4 millions d’entrées).



    Paris : De notre bureau
    Il y a dans ce plaidoyer pour la tolérance, une simplicité narrative qui masque l’épaisseur et la densité d’un propos qui embrasse nombre de problématiques. Le postulat de départ est pourtant des plus minces : une rencontre improbable provoquée par des circonstances tragiques - les attentats terroristes de Londres en juillet 2005- entre deux êtres que tout sépare et différencie. Une mère anglaise, bon teint et bons préjugés, protestante et conservatrice, va croiser la route d’un garde forestier africain et musulman. La première cherche sa fille, le second, son fils. Tous deux ont disparu le même jour, celui des attentats. Dès lors, va s’enclencher une relation dans la singularité et finalement l’échange, sur fond d’humanisme universel. Cette interface va détricoter toute une palette de sentiments contraires et ambivalents. De la méfiance au rapprochement, en passant par la peur, les préjugés, les différences de culture et donc les incompréhensions…autant de sentiments qui vont déboucher in fine sur l’émotion et sans doute une affection réciproque empreinte de respect quand l’échange bascule dans l’humanité.
    L’intrigue voit donc Elisabeth Sommers (la sublime Brenda Bleithyn révélée par Mike Leigh dans Secrets et Mensonges) enfermée deux fois, d’une part par des préjugés qu’elle ne soupçonne pas elle-même, et d’autre part, par sa posture géographique puisqu’elle vit en paysanne lambda dans l’enfermement caractéristique des insulaires (elle habite l’île de Guernesey). De l’autre côté, Ousmane qui réside en France depuis quinze ans où il côtoie également l’isolement professionnel et humain par son métier de garde-forestier. L’un et l’autre vont se côtoyer dans Finnsbury Park, le quartier algérien de Londres, où ils découvrent, au grand dam de la mère anglaise (« ici, çà grouille de musulmans ! » dira-t-elle) que leurs enfants partageaient leurs vies. La narration et le traitement du film empruntent les bas-côtés d’une enquête policière, qui voit Ousmane et Elisabeth interrogés ici et là dans l’appréhension d’un dénouement tragique, un boucher algérien (Roschdy Zem), un imam avenant (Sami Bouajila) ou même un inspecteur de police britannique, lui-même musulman.
    L’un et l’autre, parents angoissés plongés dans la douleur, vont passer par un spectre d’émotions contradictoires, tant les questions récurrentes et sans réponses convaincantes, les submergent d’inquiétude. « Mon fils qui prenait des cours d’arabe et de religion serait-il l’un de ces terroristes ? ». « Ma fille s’est-elle laissée influencer et manipuler par ce garçon à la fibre religieuse développée ? » Le déroulement de l’histoire va générer des réponses changeantes au gré des rencontres, des évènements et des informations qu’ils auront à recueillir jusqu’à un dénouement inéluctable qui culmine dans une scène finale (totalement improvisée) où le chant du griot suscite une émotion intense en clôture à cette ode à la tolérance et à la solidarité. Rachid Bouchareb signe là, en termes de profondeur humaine, une de ses meilleures œuvres dans laquelle la petite musique des sentiments s’égrène sur la gamme de l’harmonie. Cette harmonie résulte avant tout de la rencontre cinématographique entre deux comédiens aussi sublimes l’un que l’autre. Sotigui Kouyaté (Ousmane) « Guinéen d’origine, Malien de naissance, Burkinabé d’adoption » que Rachid Bouchareb avait dirigé quelques années auparavant dans le déjà remarquable Little Sénégal, compose un personnage dont la stature autant physique qu’artistique, lui a valu L’Ours d’argent au Festival de Berlin 2009. Invité du Panaf 2009, les Algérois ont pu voir sa silhouette immense se promener dans leur ville.
    Quant à Brenda Blethyn (Elisabeth), la mère courage du formidable Secrets et mensonges de Mike Leigh, capable de rendre crédible les moindres facettes de son personnage, elle serait nommée à l’Oscar 2010 de la meilleure actrice et ce, c’est à souligner, sous pavillon algérien. Car, est-il utile de l’ajouter, London River concourra pour le meilleur Oscar du film étranger en mars 2010 à Los Angeles et toujours sous les couleurs algériennes. Le grand mérite en revient à ce Rachid Bouchareb dont la détermination n’a d’égal que la ténacité et le talent, au point qu’il est désormais un cinéaste de dimension internationale. Il est le second dans cet ordre après un certain Mohamed Lakhdar Hamina. Mais c’était en 1975. Mouloud Mimoun




    Par Mouloud Mimoun

    El Watan .
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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