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Le syphon de l'oisiveté .

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  • Le syphon de l'oisiveté .

    Le siphon de l'oisiveté
    par Kamel Daoud
    Parfois, il n'y a rien à écrire. Et rien à lire ou à relire. La raison ? La chronique est comme les journaux algériens qui sont prisonniers de l'effet «photocopie». Explication : lorsqu'un ministre ne fait rien, lorsque Bouteflika ne dit rien et lorsque aucun ex-haut cadre n'ouvre la bouche dans un tribunal parce qu'il est accusé d'avoir détourné un milliard, que reste-il à écrire ? Au choix : faire comme la presse arabophone et découvrir un savon de fabrication israélienne dans les marchés de Souk Ahras ou inviter un Cheikh importé à nous faire la leçon sur l'accouplement des fourmis et sur l'Islam qu'il monopolise parce qu'il est né en Arabie saoudite. Ou faire comme la presse francophone : analyser l'analyse d'un collègue, attendre le bilan d'un accident de la route ou chercher les poux au Maroc, faute d'actualité. Dans les deux cas de figure, la presse algérienne, son «monde-media», sont prisonniers de leur chaussures et pas de leur parcours. On n'est pas arrivé à passer de la dépêche d'agence à l'enquête «watergate» - sauf quand c'est soufflé par certains cercles -, et on n'est pas arrivé à passer de l'islamisme vers l'algériannité pour les arabophones et de la polémique vers la Structure. Ce tableau clinique d'autisme corporatiste s'aggrave par quelques autres facteurs : le «Pouvoir» ne se sent pas obligé de communiquer avec son peuple de service dont il gère la terre et l'argent, il n'y a pas de «freedom act» en Algérie et, enfin, lorsqu'on prouve qu'un haut cadre possède un hôtel dans un pays étranger avec l'argent de l'Indépendance et du Pétrole ou qu'il a volé 3.000 milliards, il ne se passe rien, justement.

    Pour qu'il y ait réaction, il faut qu'il y ait scandale. Et pour qu'il y ait scandale, il faut qu'il existe une opinion (libre), une justice (indépendante), une morale (autre que celle des affaires religieuses et de la prière du vendredi) et une échelle de Richter. Sans cette mécanique, il ne sert à rien de dénoncer, et dénoncer ne provoque aucune réaction. Un «dossier» étalé dans un journal dérange non pas parce qu'il va impliquer le peuple et l'intéresser sur une sale affaire, mais parce que ce dossier prouve qu'une «partie» adverse s'agite, entre en guerre, délivre un avertissement ou veut une SPA. Sinon, un bon «Watergate» en Algérie, avec un Nixon et son parti en cible, des preuves et des enregistrements, ne pourra jamais aller au-delà du fait divers d'un retrait de confiance dans une APC. D'où cet état des lieux d'aujourd'hui : rien à écrire parfois. Le sens se rapprochant dangereusement du siphon de l'oisiveté. Peut-on faire scandale si on se promène sans pantalon dans un pays où tout le monde est nu ? Bien sûr que non.

    Le Quotidien d'Oran
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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