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Les jeunes générations et l’esprit de Novembre en Algérie

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  • Les jeunes générations et l’esprit de Novembre en Algérie

    1er Novembre 1954. En Algérie, une journée qui a fait date et qui est restée gravée dans la mémoire collective, une date repère intimement liée à la volonté inébranlable de tout un peuple dont les meilleurs fils se sont sacrifiés sur l’autel de la liberté.

    Pour que cette Algérie oppressée, meurtrie, souillée et asservie par le fer et par le feu retrouve sa liberté et sa souveraineté, il avait fallu abreuver ses vertes campagnes et ses hautes montagnes par le sang de centaines de milliers de ses enfants innocents.

    En ces temps héroïques, des hommes s’étaient élevés, avaient protesté et manifesté, l’occupant leur avait opposé matraque, bâton et répression dans le sang. Un peuple pacifique et pacifiste qui n’aspirait qu’à vivre dans la dignité s’est vu contraint de reprendre par la force ce qui lui avait été confisqué par la force. La parole était désormais aux armes et l’appel de l’Algérie vola de douar en douar de dechra en dechra, hameaux, villages et villes ne pouvaient pas ne pas l’entendre.

    Et même la terre, les arbres, les oueds, les vallées, les talwegs et les défilés se mettaient à parler algérien ; ils faisaient corps avec ces hommes et ces femmes qui luttaient pour leur liberté.

    L’Algérie rebelle, l’Algérie farouche et fière s’était réveillée et rien ni personne ne pouvait plus l’arrêter ou la dompter ; l’embrasement dura près de 8 années pendant lesquelles d’horribles crimes avaient été commis par l’occupant pour «pacifier» l’Algérie.

    Tortures, «corvées de bois», ratonnades, exécutions sommaires, assassinats collectifs, misères et drames étaient le quotidien de tout un peuple qui était resté debout parce qu’ayant foi en sa cause et intimement convaincu qu’il était dans son bon droit et qu’il ne pouvait que gagner et recouvrer sa liberté confisquée.

    La France avec ses généraux formés aux arts de combats dans les plus brillantes académies militaires n’a pu vaincre ces hommes dont le cœur battait pour l’Algérie.

    Ali la Pointe, Hassiba Ben Bouali, Amirouche, Ben Boulaid, Larbi Ben M’hidi, Badji Mokhtar, Ahmed Zabana et bien d’autres sont aujourd’hui pour tous un exemple de sacrifice et de négation de soi, des repères phares qui éclairent les générations et qui leur rappelle que cette liberté dont ils jouissent n’est pas le fait du hasard mais une somme de luttes et de souffrances plurielles qui ont abouti à cette indépendance si chèrement payée.

    La jeunesse d’aujourd’hui a de qui tenir, elle tire toute sa force de ses aînés, elle porte la verte Algérie dans son cœur et l’Algérien où qu’il aille, où qu’il se trouve a ce cordon ombilical qui le nourrit et le relie à cette terre où il a ses racines, à cette patrie où sont nés ses ancêtres qu’il respecte et vénère. Et si son comportement est parfois dévoyé et se transforme en un mouvement destructeur, c’est que cette force a été manipulée et son amour pour le pays a été instrumentalisé pour des desseins inavoués. On chauffe à blanc, on ravive cette flamme rebelle que tout Algérien a en lui, on fait appel à sa fierté et on le pousse à adopter un comportement qui souvent aboutit à une violence heureusement très vite contenue.

    Parce que rien qu’à voir l’amour et la passion de cette jeunesse pour son pays, on ne croira jamais qu’elle peut se défaire de son appartenance, de ses origines, de son Histoire glorieuse.Le déferlement des jeunes dans les rues de toutes les villes et villages et même dans les douars les plus reculés à la suite d’une victoire de l’équipe nationale de football montre cet amour filial que les Algériens ont pour leur pays.

    L’emblème national omniprésent est arboré fièrement par tous : allez voir du côté des gens de condition modeste, de ces petits vendeurs à la sauvette, de ces vendeurs de cigarettes devant leurs petits étals qu’ils ont couvert de la bannière frappée de l’étoile et du croissant, ils vous diront en se drapant de cet emblème que c’est leur Algérie, cette Algérie qui gagne et qui leur rend espoir, cette Algérie qui est en eux, qui leur parle dans le langage qu’ils comprennent. Pourtant personne ne les a obligés ou ne serait-ce que soufflé à l’oreille de manifester cet amour qu’ils ont. Cette passion est unique et on ne la trouve nulle part ailleurs.

    Bien avant le match Algérie-Rwanda, comme dans toutes les villes du pays, Annaba a pris possession des couleurs nationales, balcons, fenêtres, terrasses, magasins, kiosques, étals avaient hissé le drapeau, des drapeaux flambants neufs sortis d’on ne sait où.

    A croire que chaque Algérien a son drapeau qu’il conserve jalousement et qu’il ne sort que dans les grandes occasions.

    Du côté des bidonvilles, des quartiers qu’on dit chauds et difficiles, l’emblème national est visible de loin et on aurait dit que tout s’est coloré en vert et rouge. «Là, nous n’avons plus affaire à personne, c’est le match et c’est l’Algérie, notre Algérie et nous la supportons de toute notre force, nous avait dit un jeune habitant d’El M’haffer, c’est l’Algérie qui gagne cette Algérie que nous aimons et chérissons, nous voulons vivre cette joie que nous partageons avec nos frères à travers le pays, tout est évacué et tout s’aplanit devant l’Algérie.» Plus tard, la victoire a été le point de départ d’une liesse qui avait duré toute une nuit pour se prolonger jusqu’au petit matin malgré le froid et la pluie. C’est dire toute cette passion et cet amour que les Algériens ont pour leur pays.

    Ce sont les dignes héritiers de ces grands hommes qui ont tenu la promesse qu’ils ont faite un certain 1er Novembre 54, ils sont les remparts imprenables de l’Algérie, prêts à la défendre et à la soutenir envers et contre tout. Et même si, il y en a qui veulent quitter le pays à tout prix ce n’est pas tant parce qu’ils n’aiment plus leur mère nourricière mais c’est plutôt parce que les problèmes qu’ils vivent n’ont pas trouvé de solution.

    En prenant la mer à bord de ces embarcations de la mort, ils portent ce pays dans leur cœur, chacun sent que quelque part un petit quelque chose meurt en lui avec pourtant l’espoir de le ressusciter en revenant plus tard au pays après avoir réussi «là-bas». «Vous croyez qu’on est heureux de quitter notre pays, laisser la terre de nos ancêtres, nous confie un des harragas ramenés sur la terre ferme par les garde-côtes il y a près d’un mois, mon grand père est un martyr de la Révolution, il est mort pour ce pays, l’Algérie, elle est là dans mon cœur, je la porte avec moi là où je vais. Vous savez que nous avions pris avec nous un drapeau pour supporter notre équipe une fois arrivés là bas. Si nous bravons les dangers de la mer c’est pour améliorer notre situation et revenir plus tard vivre dans notre pays ; il n’y a pas mieux que chez soi quelque soit ce qu’on dira, vous resterez toujours l’Etranger. Tous les jeunes chômeurs voudraient rester au pays mais comme ils ne trouvent pas de travail, ils tentent leur chance et prennent la mer. Les risques sont grands et comme vous le savez, l’Algérien est prêt à jouer le tout pour le tout pourvu qu’il réussisse, il y a en lui cette prédisposition à foncer malgré le danger et il le sait, c’est ce qui fait que nous sommes un peu particulier par rapport aux autres mais que voulez-vous les choses sont ainsi.»

    Dans ces propos de jeune harrag, l’esprit de Novembre est présent, le refus d’une situation, le besoin de la changer, le défi qu’on se lance, l’espoir de trouver une vie meilleure, le sacrifice et l’amour du pays.

    En ces jeunes hommes, Novembre est toujours là, il s’agit juste d’en canaliser la force pour redresser la barre. Une entreprise un peu difficile mais réalisable.

    Par Mohamed Rahmani, La Tribune
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