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Les Moudjahidins du Peuple empoisonne les relations France Iran

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  • Les Moudjahidins du Peuple empoisonne les relations France Iran

    Abrités par la France, les opposants au régime de Téhéran cherchent à bénéficier de la fermeté de Nicolas Sarkozy contre l'Iran, sur le dossier nucléaire, pour faire oublier leur passé terroriste.

    Chassés de leur pays peu après la Révolution islamique de 1979, trois à quatre mille membres de l'Organisation des moudjahidins du peuple (OMP), mouvement d'inspiration marxiste et islamique, se réfugièrent alors à Auvers-sur-Oise, en banlieue parisienne. De là, ils continuent d'œuvrer à la chute de la République islamique. «Comment la France peut-elle prétendre lutter contre le terrorisme, alors qu'elle héberge un mouvement qu'elle considère comme terroriste, et qui ne représente rien parmi l'opposition à notre régime ?», s'offusque un diplomate à l'ambassade d'Iran à Paris.

    Difficile de croire que les Moudjahidins puissent faire trembler les gardiens de la révolution depuis leur modeste quartier général d'Auvers, avec ses deux pavillons de banlieue et sa dizaine de bâtiments en préfabriqué, dissimulés derrière un grillage verdâtre, le long de l'Oise. Protégés et surveillés par des gendarmes, une quarantaine de militants y sont employés à temps plein. Le matin de notre visite, deux femmes, portant un voile kaki, faisaient de la veille sur Internet. De son côté, un cinéaste montait des reportages de propagande à partir d'images diffusées depuis Londres par leur chaîne de télévision (Iran National TV) que les Iraniens regardent en cachette sur le câble.

    Depuis qu'elle a dû renoncer aux attaques armées sur le sol iranien en 2001, l'OMP a opté pour la guerre de l'information contre Téhéran. Devant le visiteur, de vieilles dames éplorées égrènent les souvenirs de leurs fils, frères ou maris, liquidés par les services de sécurité iraniens. À l'heure du déjeuner, la petite communauté se retrouve à la cantine autour d'un chello kebab (des brochettes d'agneaux au riz), qui rappelle le pays natal. «Cela fait trente ans que je soutiens ces terroristes !», sourit Jean-Pierre Guillou, un voisin à la retraite.

    Mais ne nous y trompons pas : derrière l'apparente modestie de ses installations, l'OMP est un mouvement encore riche. Surtout très bien organisé. Depuis leurs antennes à Londres, Berlin ou Washington, surfant sur la mauvaise image du régime iranien, les Moudjahidins cherchent à se refaire une virginité. Et les résultats sont au rendez-vous. En début d'année, grâce à un intense lobbying auprès des eurodéputés, l'OMP a obtenu d'être retirée de la liste des organisations terroristes de l'Union européenne. En France, son réseau d'appuis est impressionnant : un ancien patron de la DST (Yves Bonnet), la veuve d'un ancien président de la République (Danielle Mitterrand), un ancien premier ministre (Édith Cresson) et une kyrielle de députés et sénateurs, signataires de très nombreuses pétitions, adressées illico presto à la presse.

    Alors que la rue s'enflamme à Téhéran, les Moudjahidins rêvent d'engranger les dividendes de la fermeté affichée par Nicolas Sarkozy à l'encontre du pouvoir iranien. C'est lui, l'ancien ministre de l'Intérieur, qui avait lancé, en 2003, la vaste opération de police contre leur siège d'Auvers. «Nous félicitons aujourd'hui Nicolas Sarkozy, il n'y a pas d'autre option possible face à une dictature», soutient Mohammad Mohandessine, un des responsables. «Mais s'il était logique avec lui-même, le président de la République devrait relâcher la pression sur nous. Malheureusement, l'hostilité de la France à notre égard n'a pas changé», regrette-t-il aussi. Officiellement, les Moudjahidins restent une dangereuse secte, capable de recourir aux immolations, comme en 2003 à proximité du siège parisien de la DST. L'emprise de leur chef, Maryam Radjavi, sur ses partisans fit alors froid dans le dos des policiers, qui l'avaient mise en garde à vue. «Elle nous menaça en prétendant qu'elle était plus qu'une mère pour eux, qu'il suffisait qu'elle lève le petit doigt pour qu'ils s'immolent par le feu, raconte un policier. Lorsqu'à notre demande, elle ordonna à ses troupes d'arrêter leurs protestations, elle leur fit passer un message codé, qui fut aussitôt suivi d'effet. On n'en est pas revenu.»

    Torches humaines

    Entre la France et les Moudjahidins, le contentieux reste lourd. Depuis Auvers, l'OMP envoyait des GPS à ses combattants qui s'infiltraient en Iran, à partir de leur base arrière d'Ashraf en Irak, où Saddam Hussein les protégeait, tout en les instrumentalisant. Les opposants revendiquaient également depuis la France des opérations anti-iraniennes aux États-Unis, qui les considèrent toujours comme une organisation terroriste. Plus grave, au cours de l'opération de police de 2003, la DST mit la main sur leur trésor de guerre : du matériel de transmission, des documents cryptés, mais surtout une partie de leurs archives, avec la description de leur armement, et - cerise sur le gâteau - les détails sur leur participation à la répression antikurde menée par le régime de Saddam Hussein au printemps 1991. Des pièces versées au dossier du juge d'instruction antiterroriste Marc Trévidic qui intéressent au plus haut point les autorités iraniennes, dont les discrètes offres de coopération ont été repoussées par la justice française. Dernière trouvaille : neuf millions de dollars en liquide, certaines coupures fraîchement sorties de la Central Bank of Irak, leur principal bailleur de fonds à l'époque.

    Et aujourd'hui ? Téhéran accuse les Moudjahidins d'avoir créé des sociétés fictives d'informatique pour drainer des fonds, et de se livrer à un véritable racket via des ONG, elles aussi bidons. Mais il n'y a qu'en France que leur argent est bloqué. Certains pays arabes du Golfe, hostiles à l'Iran, pourraient encore les financer. Les dirigeants du mouvement nient en bloc ces «accusations de terrorisme et de financement du terrorisme». Une secte ? «On doit bien se défendre. Les agents iraniens essaient de nous infiltrer.» L'argent ? «Il vient des Iraniens eux-mêmes, et c'est tout à fait légitime qu'un mouvement d'opposition en dispose.» Les immolations par le feu ? «Elles étaient le fait d'individus isolés, qui réagissaient à l'usage disproportionné de la force par les policiers français.»

    L'Iran et ses ennemis sont au moins d'accord sur un point : pourquoi six ans après l'opération de police à Auvers, et la mise en examen de 17 dirigeants des Moudjahidins, la justice française n'a-t-elle pas encore rendu son jugement ? «Si les Français ne veulent pas de procès, qu'ils prononcent au moins un non-lieu», insiste Afchine Alavi, un autre de leurs responsables, pour qui le dossier d'instruction est vide. «Malheureusement, l'ombre de la politique plane sur cette affaire», déplore, de son côté, le diplomate iranien précité. Depuis vingt ans, les Moudjahidins sont une carte entre les mains des autorités françaises. En 1987, pour s'attirer les bonnes grâces de l'Iran, qui tirait les ficelles des prises d'otages au Liban, le gouvernement de Jacques Chirac expulsa leur chef, Massoud Radjavi, vers Ashraf. Quinze ans plus tard, en 2003 exactement, c'est toujours pour apaiser Téhéran, avant une importante visite consacrée au nucléaire, que le ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin plaida pour «la rafle» d'Auvers. Aujourd'hui que la France est engagée dans un bras de fer avec l'Iran sur ses ambitions nucléaires, pas question de se défausser, sans contrepartie, de cette carte. Pas encore. Mais, en cas d'abandon, on redoute de voir encore des torches humaines dans les rues de Paris. Dans l'immédiat, invoquant des raisons de sécurité, la France a dit non aux demandes américaines d'accueillir des Moudjahidins, dont l'Irak ne veut plus à Ashraf. Galvanisée par la fronde iranienne, l'OMP jure que le «grand soir» est proche. «Nos hommes sont dans les marches pour protester contre l'élection truquée d'Ahmadinejad à la présidence de la République», assure Afchine Alavi.

  • #2
    Réseau de sympathisants

    Si les Moudjahidins n'ont plus de capacité opérationnelle à l'intérieur de l'Iran, ils y ont gardé, en revanche, un réseau de sympathisants, dont le recrutement a été facilité par l'ouverture pratiquée sous les présidences du réformateur Mohammad Khatami (1997-2005). «Des gens malheureux sont plus faciles à enrôler», reconnaît Mohammad Mohandessine. L'OMP eut son heure de gloire le 14 août 2002, lorsqu'elle révéla l'existence de l'usine d'enrichissement d'uranium de Natanz, à 200 km au sud de Téhéran. Un scoop relayé par Ali Reza Jafarzadeh, analyste attitré de la chaîne américaine Fox News, et membre des Moudjahidins. Véritable scoop ou renseignement livré par un service occidental, afin de renforcer la crédibilité des opposants au régime des mollahs ? Le doute persiste. Une chose est sûre : Téhéran voit rouge à la simple évocation des Moudjahidins. «Pourquoi une telle fixation sur nous, si nous ne représentons aucune menace ?», se demande Afchine Alavi. Dans la foulée de la guerre américaine en Irak, le régime iranien proposa aux États-Unis un troc : «Nous vous livrons les membres d'al-Qaida que nous avons récupérés alors qu'ils fuyaient l'Afghanistan après le 11 septembre 2001 ; en échange, vous nous remettez les 3 000 Moudjahidins d'Ashraf.» Washington fit la sourde oreille, préférant conserver la carte OMP. À toutes fins utiles.

    Par Le figaro

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