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    La Tahya, version 2009
    par Kamel Daoud
    En un : ceux qui sont néslongtemps après l'indépendance, et qui sont ve nus au monde alors qu'il ne restait plus rien de la joie collective, des biens-vacants et de l'enthousiasme, ont aujourd'hui une occasion de flotter dans les airs sans se gonfler les joues. Depuis une semaine, le pays est unanimement dans la case émotionnelle du 5 juillet 1962. Les plus vieux le confirment : du jamais vu depuis cette date d'accouchement. Du coup, même si ce retour au pays pour des gens qui y habitent déjà a été entaché par des haines, des tristesses ou des récupérations politiques, on souhaiterait presque une chose incroyable : que l'Egypte égalise avec l'Algérie, et qu'indéfiniment nous ayons un match à jouer, un espoir à vivre et des drapeaux à coudre.

    Le sentiment est primaire, brut, indifférencié et presque kitch, mais il donne envie de pleurer de joie : enfin un pays à mettre sous le bras pendant qu'il vous prend dans les siens ! De quoi vous démontrer qu'on peut fabriquer une nation avec presque rien : un but, une équipe de foot et la liberté donnée à chacun d'organiser son nationalisme à sa façon et sans passer ni par la kasma, ni par l'agrément. De quoi manquaient donc les Algériennes et les Algériens ? Seulement de buts et de loisirs et d'occasion de joie. Simpliste mais très vrai.

    En deux : d'un coup, les mêmes objets servent à d'autres sujets. Le drapeau n'est pas celui de l'Etat et des siens, mais du peuple et de ses couturiers. Le passeport n'est pas un message de départ, la sémiologie d'une harga en attente et la photo de groupe d'une génération qui ne veut pas rester, mais le signe émouvant d'un ralliement pour un penalty contre le mauvais oeil et la fatalité. L'hymne national n'est pas une chanson autobiographique du régime et des anciens moudjahidine, mais une chanson collective, qui s'écrit à chaque fois à l'instant même où on la chante. Le Soudan n'est pas un pays qu'on regarde à El Jazeera quand on n'arrive pas à dormir, mais un pays qui vaut aujourd'hui plus que la destination Montréal.

    Trois : la facture de la fracture avec l'Egypte est déjà lourde et quasi irréversible. On pouvait admettre quelques cailloux jetés par quelques voyous, mais pas tout un Etat, des dizaines de chaînes TV et des centaines de propagandistes soutenant des versions invraisemblables sur une automutilation de l'EN algérienne.

    De fil en bazooka, le match a fini par convoquer les profondeurs à la surface de la terre. Il s'agit pour certains de se décoloniser par rapport au baâthisme et au panarabisme, pour d'autres de répondre par le boycott commercial et économique et pour des derniers de fonder un vrai pays adossé à une vraie nationalité. Le pire est qu'ils continuent de jouer les victimes à l'unanimité. Après la lapidation des supporters algériens au Caire, c'est leur Premier ministre qui demande officiellement aux autorités algériennes de protéger les ressortissants égyptiens en Algérie. De quoi camper les rôles du cinéma égyptien nombriliste : des Algériens agresseurs et sauvages face à des Egyptiens fraternels et innocents.

    Le Quotidien d'Oran
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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