Annonce

Réduire
Aucune annonce.

La longue histoire des annonces apocalyptiques

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • La longue histoire des annonces apocalyptiques

    Sciences et Avenir : Les rumeurs de fin du monde en 2012 ont-elles quelque chose de commun avec les apocalypses anciennes ?

    André Vauchez , historien à l'université Paris 10 Nanterre, membre de l'Institut de France: S’il y a un point commun, c’est le climat d’anxiété que nos sociétés connaissent actuellement. Aujourd’hui, nous nous inquiétons en effet de l'état de santé de la planète. Nous risquons de la détruire. Cette situation pourrait ressembler à une nouvelle version de l'apocalypse ; mais bien sûr laïcisée. Cependant les idéologies qui se construisent autour de cette inquiétude me semblent assez pessimistes. Il n’y a pas de réel espoir de renverser la vapeur : au mieux, si on fait tous les efforts nécessaires, on ne peut que retarder un processus déjà en cours.

    Au Moyen-Age, les discours étaient plus positifs. Ils émanaient souvent d'une minorité qui annonçait une catastrophe espérée. En effet, l'apocalyptisme ne se réduit pas au catastrophisme. Le judaïsme tardif et le christianisme ont développé, au IIe siècle, une eschatologie décrivant une fin des temps, certes très mouvementée, mais qui annonce surtout l'arrivée d'une ère de paix et de bonheur. Cette période durera "mille ans" : pour les uns, elle sera terrestre, pour d'autres ce sera au Ciel, comme l'imaginait Saint Augustin. Toutes ces eschatologies considèrent que le monde des hommes doit prendre fin car l'Homme est un pécheur. Au moment de la fin, l'affrontement habituel entre les forces du Bien et du Mal redoublera de violence. Mais cela fait partie du programme qui doit nous amener vers un « monde meilleur ». A l’époque, les messages n'étaient donc pas pessimistes.

    Pourtant on parle bien des "Terreurs de l'An mil" ?

    Il n'y avait pas de terreurs. Les gens n'étaient pas obsédés par la peur du jugement. Il y avait une situation de crise économique, sanitaire, politique... mais les populations aspiraient au changement. Cela n'était pas vécu comme un mal, une catastrophe mais comme un bien, avec la fin du désordre, des injustices, de la famine... Ce fut le cas au moment de l'an mil. De même, au moment des croisades entre le XIe et le XIIIe siècle, les mouvements millénaristes refleurissent. Le peuple semble en avoir été le moteur. Il aspire au changement, au salut. Les croisades sont une opportunité pour améliorer son sort... Les gens avaient l'impression que la vie individuelle était liée à la Grande Histoire, à une destinée collective.

    L'idée ressurgit aux XIVe et XVe siècle dans un contexte là encore de crises : la peste Noire de 1348 ; la guerre de Cent Ans (1337-1453), le Grand Schisme d'Occident (1378-1417)... En fait l'eschatologie est une manière de donner un sens à l'Histoire. Le rôle des prophètes est de révéler aux autres ce sens. Mais il ne faut pas prendre leurs textes au premier degré. Ces écrits ne décrivent pas une situation de leur temps. C'est plutôt une grille de lecture, une dramatisation de l'Histoire.

    Ces mouvements ont-ils perduré ?

    Les utopies sont les formes modernes de l'eschatologie. Ce mot inventé par Thomas More décrit les espoirs d'avènement d'une nouvelle société. La découverte du Nouveau Monde à la fin du XVe siècle et l'émigration qui s'ensuit est une manière de dire qu'il n'y a plus rien à espérer de l'Europe, en proie aux guerres, à l'intolérance et à l'injustice et qu'il faut aller créer outre-Atlantique un monde parfait.

    Le marxisme, évidemment sans connotation religieuse, est aussi une utopie. Après l'affrontement des forces sociales, une nouvelle société émergera. Le président américain Obama, dans ses discours appelant au changement, m'évoque aussi les prophètes du Moyen-Age.

    Par David Larousserie et Sylvie Rouat, Sciences et Avenir
Chargement...
X