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Abdelaziz Rahabi, C’est plus qu’un incident diplomatique classique

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  • Abdelaziz Rahabi, C’est plus qu’un incident diplomatique classique

    ABDELAZIZ RAHABI, DANS UN ENTRETIEN EXCLUSIF AU SOIR D’ALGÉRIE :


    «C’est plus qu’un incident diplomatique classique»


    Entre Alger et Le Caire, rien ne va plus comme avant. Les Egyptiens, ayant raté d’aller à la phase finale du Mondial de football 2010, après une double confrontation avec les Algériens, multiplient les attitudes belliqueuses envers l’Algérie. Entre les deux pays, ça sent, peut être, les relents d’une crise diplomatique. C’est ce que nous avons essayé de comprendre en sollicitant l’analyse savante de Abdelaziz Rahabi, ancien ambassadeur et ancien ministre de la Communication.

    Le Soir d’Algérie : Après la double confrontation algéro-égyptienne et la qualification au bout du parcours de l’Algérie pour la phase finale de la Coupe du monde, l’Egypte a rappelé son ambassadeur à Alger pour consultation. Pourquoi selon vous ?

    Abdelaziz Rahabi : C’est une situation un peu particulière et ne semble pas correspondre aux usages en matière diplomatique. La mesure est assez grave parce que c’est le dernier stade avant le rappel d’un ambassadeur et donne le sentiment, sur le plan de la perception internationale, que c’est l’Egypte qui avait des raisons de le faire. Il aurait été plus judicieux pour l’Algérie de le faire pour montrer au monde sa réprobation et préserver son ambassadeur des attaques qu’il subit actuellement.

    Mais le ministère algérien des Affaires étrangères réagit et a convoqué l’ambassadeur égyptien pour protester contre l’escalade au Caire de la campagne médiatique de dénigrement.

    Le recours aux canaux diplomatiques est nécessaire en situation de crise, car ils servent à maintenir le contact à un niveau adéquat, à transmettre des positions officielles et à favoriser les voies de l’apaisement.
    Dans ce cas précis, leur marge de manœuvre est réduite en raison de l’implication personnelle et déclarée du président Moubarak. Il faut tenir compte du fait qu'il a réuni son Conseil de guerre pour si peu, maintenu la tension par des déclarations ambiguës devant le Parlement égyptien et n’a pas empêché la pour suite de la campagne anti algérienne des officiels et des médias publics égyptiens.

    Pourquoi l’a t il fait selon vous ?

    Sur le plan de la pure stratégie diplomatique, probablement pour susciter des médiations étrangères. Je me demande même si ce n’est pas un des objectifs des concepteurs de ce scénario.

    Ce qui se passe relève-t-il, selon vous, du simple incident diplomatique qui finira par laisser place à des attitudes plus sereines ou amorce-t-il, au contraire, une crise diplomatique véritable ?

    C’est bien plus qu’un incident diplomatique classique. Il s’agit d’un manquement de l’Egypte à un devoir de protection conforté, pourtant, par des assurances de la plus haute autorité de son Etat. On peut, par ailleurs, se poser deux questions. La première est de savoir si le gouvernement algérien a évalué convenablement tous les risques encourus par la sélection nationale et les supporters. La suite des événements ne lui donne pas raison. La seconde est celle de convaincre les Algériens que l’Egypte qui garantit la sécurité de millions de touristes qui viennent chez elle ne porte pas une responsabilité directe dans ces graves incidents.

    L’attitude belliqueuse égyptienne est-elle le fait de la seule défaite sportive ou a-t-elle pour motif véritable quelques conflits diplomatiques latents ?


    L’Egypte vit un moment de transition interne et de statu quo régional. L’organisation de la succession de Moubarak ne semble pas se passer comme prévu en raison notamment de la forte crédibilité interne et internationale de quelques autres candidats potentiels. Sur le plan régional, depuis les accords de paix avec Israël en 1978, Le Caire ne peut plus prétendre au statut de tête de pont de la résistance arabe, les Palestiniens se sont affranchis sensiblement de la tutelle arabe en s’engageant dans des contacts directs avec les Etats Unis et Israël et les pays du Golfe ont souscrit des contrats d’assurances directement auprès des Etats Unis.

    De même que le Qatar et l’Arabie saoudite s’affirment comme de nouvelles puissances dans l’audiovisuel arabe, ce qui a eu pour effet de réduire sensiblement son influence dans le monde arabe. C’est pourquoi à mon sens, les véritables enjeux ne sont pas dans les relations avec l’Algérie. Il est probable que des médiations de pays tiers, notamment des pays du Golfe, replaceraient l’Egypte au centre de l’activité diplomatique régionale pour un certain temps.

    La diplomatie algérienne, on le constate, reste sereine face à la démesure égyptienne. Quelle appréciation en faites vous ?

    Du moment que les motifs de cette campagne ne sont ni clairs ni justifiés, la meilleure des attitudes est de rester vigilant, mais ferme, sur les principes et intransigeant dès qu’il s’agit de déclarations officielles inamicales. Pour le reste, cette crise a surtout révélé les effets désastreux de l’absence d’une politique algérienne d’action audiovisuelle extérieure.

    Vous êtes diplomate de carrière et ancien ambassadeur, donc rompu aux rouages diplomatiques. Quels lendemains prévoyez-vous, à la lumière de ce qui se passe, pour les relations algéro égyptiennes ?

    Il suffit aux deux pays d’avoir tout simplement des relations normales et c’est déjà l’un des exercices les plus difficiles dans les relations internationales.

    S. A.I.
    Le soir d’Algérie
    Si tu parles, tu meurs. Si tu te tais, tu meurs. Alors, dis et meurs
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