Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Le paradoxe berbère

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Le paradoxe berbère

    Le paradoxe berbère

    Un temps considérée comme un facteur de division, puis comme une menace pour l’unité nationale, l’amazighité constitue désormais l’un des éléments reconnus de l’identité algérienne. Une sacrée avancée, même si tout n’est pas réglé.

    À la veille du match couperet, le 14 novembre 2009, au Caire, entre l’Algérie et l’Égypte, en vue des qualifications pour la Coupe du monde de football, certains médias égyptiens sont tombés dans l’invective et l’insulte. « L’arabité du peuple algérien est douteuse. Il s’agit de Berbères parlant une étrange langue », pouvait-on lire ou entendre. Il y a quelques années, cette formule aurait déclenché le lynchage du premier Égyptien croisé dans une rue d’Alger. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Sabiha Merine, sociologue à Boumerdès, elle-même Berbère du mont Chenoua, est catégorique : « L’Algérien, qui a toujours eu mal à son amazighité, à sa berbérité, si vous préférez, semble s’être réapproprié son identité, réglant ainsi un vieux complexe. Il n’hésite plus à se définir comme arabo-berbère. Cette récente évolution est le produit de la reconnaissance par la Constitution de la dimension amazighe de la personnalité algérienne. » Est-ce à dire que poser la question « Qui est berbère en Algérie ? » est aujourd’hui incongru ? Pas si sûr.


    Le mot berbère est censé désigner les populations autochtones de la Numidie de la période punique, autrement dit de l’Afrique du Nord centrale avant les invasions phénicienne, romaine puis vandale. Dans l’un de ses sketchs, l’humoriste kabyle Mohamed Fellag ironise : « Tous les envahisseurs de l’Algérie – même les Français – ont fini par repartir, sauf les Arabes, qui ont pris racine. » Succession d’invasions, guerres fratricides pour le contrôle des terres fertiles et mouvements de populations ont provoqué un inextricable mélange ethnique. Au fil des siècles, le facteur linguistique est ainsi devenu le seul critère d’appartenance.


    Complexité ethnographique

    « N’est berbère que le berbérophone. » La formule du linguiste Salem Chaker renvoie à une complexité ethnographique. La langue berbère, le tamazight, a au moins six déclinaisons en Algérie et fragmente l’entité berbère en six ramifications: les Kabyles, les Chaouis, les Touaregs, les Mozabites, les Zénètes (Berbères noirs) et les Chenouis. Pour mieux comprendre la question amazighe en Algérie, un rappel historique est donc nécessaire.
    En 2001, J.A. avait consacré un dossier sur cette question (voir J.A. n° 2102-2103) qui expliquait notamment pourquoi, de toutes les régions berbérophones, seule la Kabylie a été à l’avant-garde de cette lutte identitaire. Celle-ci a été abordée pour la première fois lors du congrès du Parti du peuple algérien-Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (PPA-MTLD) en 1949. Mais les principaux leaders berbères, Krim Belkacem et Hocine Aït Ahmed, donnent la priorité à la lutte pour l’indépendance. « Ils étaient convaincus, analyse Sabiha Merine, que le futur État aborderait sans complexe la question identitaire. Le berbérisme est mis entre parenthèses au profit du combat libérateur. Ils se sont trompés. » Quelques ultras ne tombent pas dans le piège et insistent sur les origines berbères du peuple algérien. « Tout cela relève d’une manœuvre de division orchestrée par le colonialisme », répliquent les dirigeants du courant nationaliste et militants de l’arabo-islamisme. La berbérité et les porteurs de cette revendication deviennent ainsi progressivement des ennemis de l’intérieur : une menace pour la Révolution et un péril pour l’unité nationale et la toute jeune République algérienne démocratique et populaire.

    Et pourtant. Le pouvoir n’a jamais exclu les berbérophones de ses structures, alimentant ainsi un saisissant paradoxe. La haute hiérarchie militaire est restée entre les mains des Chaouis, les Berbères des Aurès : de Tahar Zbiri, premier chef d’état-major, à Khaled Nezzar, dernier ministre de la Défense (le portefeuille est aujourd’hui détenu par le président Abdelaziz Bouteflika). La Sécurité militaire, pilier essentiel du système, a longtemps été également sous la coupe de Kasdi Merbah, de son vrai nom Abdallah Khalef, un Kabyle. Aujourd’hui encore, les services de renseignements, le tout-puissant Département recherche et sécurité (DRS), ont à leur tête le Berbère Mohamed Mediène, alias Tewfik, originaire de Bordj Bou Arreridj, en Petite Kabylie.


    Les Berbères n’ont jamais été loin, non plus, du pouvoir politique : de Ferhat Abbas, président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA), de 1958 à 1961, à Ahmed Ouyahia, actuel Premier ministre, en passant par les Chaouis Houari Boumédiène ou encore l’ex-Premier ministre Ali Benflis. Faut-il également rappeler que le père de l’arabisation en Algérie a été un Kabyle en la personne de Mouloud Kacem Naït Belkacem ? Idem pour ce qui est du pouvoir économique. Les exemples sont nombreux. Le poste de gouverneur de la Banque centrale d’Algérie a souvent été confié à un Berbère : du Kabyle Abdelouahab Keramane au Mozabite Abderrahmane Hadj Nacer. Bon nombre des plus grands capitaines d’industrie sont également berbères, d’Issad Rebrab – le patron du groupe Cevital, qui opère dans l’agroalimentaire et l’industrie – à Ali Haddad, le poids lourd du BTP.
    « La récupération de l’élite kabyle par le pouvoir a durablement affaibli la cause amazighe », tranche Salem Chaker. Quant à cette élite, surnommée parfois « les Kabyles de service », entrisme ou pas, elle a prospéré, enfouissant son sentiment d’appartenance. « Ils ont joué l’arabisme par survie », estime aujourd’hui l’artiste peintre touareg Hawad, qui rappelle que le pouvoir n’a jamais hésité à mater les poussées de fièvre amazighes. De quoi dissuader toute velléité de contestation.


    Les Mozabites cohabitent difficilement avec les arabophones, certes, mais ils évitent soigneusement toute confrontation avec le pouvoir politique. Les Zénètes ou les Touaregs vivent paisiblement leur particularisme. Et finalement, seule la rebelle Kabylie a mené le combat. « Cela tient à l’histoire, explique Salem Chaker. La région a été scolarisée dès le début du XXe siècle, à la différence de celle des Aurès. L’autre facteur est lié à la forte émigration kabyle en métropole au lendemain de la Première Guerre mondiale. À partir de 1915, un immigré sur deux en France était kabyle. Cela a permis la confrontation avec les autres cultures et favorisé la prise de conscience identitaire. » Après la première mobilisation du Printemps berbère en 1980, il faut attendre les années 1990 pour que la contestation s’étende aux autres régions berbérophones.


    Enseignement du tamazight

    En 1994, une « grève du cartable » frappe les établissements scolaires de Kabylie, mais aussi des Aurès et du Touat, et ceux de la vallée du Mzab. Le mot d’ordre : l’enseignement du tama*zight. Le pouvoir recule, enfin, et crée en 1995 un Haut-Commissariat à l’amazighité chargé d’introduire l’idiome dans les manuels scolaires.
    Mais la consécration – ou du moins l’avancée la plus significative – viendra dans la foulée du second Printemps berbère, en avril 2001. La mort suspecte du jeune lycéen Massinissa Guermah, dans les locaux d’une brigade de gendarmerie de Beni Douala, dans la région de Tizi Ouzou, met le feu aux poudres. La contestation gagne toute la Kabylie et s’étend à Alger. Les partis politiques, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) et le Front des forces socialistes (FFS), sont dépassés. Les comités de villages et de tribus, les Arouch, prennent le relais et négocient avec le pouvoir sur une plate-forme de quinze revendications élaborée à El-Kseur. Le Premier ministre Ali Benflis, puis son successeur, Ahmed Ouyahia, tous deux berbères, acceptent le dialogue. En 2002, la Constitution reconnaît le tamazight comme langue nationale. « Désormais l’Algérien se revendique plus comme un Arabo-Berbère que comme arabo-musulman », explique Sabiha Merine. Mais cette juste reconnaissance a affaibli la cause sans atténuer, par ailleurs, le sentiment de marginalisation culturelle. C’est le deuxième paradoxe.


    Velléités autonomistes

    L’échec de l’enseignement du tamazight explique cette situation. « L’indigence des outils pédagogiques et l’absence d’une véritable académie tamazight ont réduit cette langue à une simple discipline facultative. Du coup, même en Kabylie, les classes de tamazight se dépeuplent et les enseignants abandonnent cette vocation », dénonce Fatiha Agdader, enseignante à Alger.


    Est-ce à dire que l’Algérie a définitivement rangé la question berbère et tourné le dos aux particularismes ? Peut-on envisager une volonté, indicible et collective, d’ensevelir les sujets qui fâchent après le traumatisme du terrorisme islamiste. À voir l’ambiance qui règne à Berriane et les revendications portées par le Mouvement pour l’autonomie de la Kabylie (MAK) de Ferhat Mehenni, cette analyse, commode, est erronée.
    « Nous n’avons pas renoncé à ce que le tamazight soit une langue officielle et non pas seulement nationale », scande Louisa Hanoune, porte-parole du Parti des travailleurs (PT, première force d’opposition au sein du Parlement).
    En attendant, on regarde sans broncher le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, s’exprimer en kabyle lors des questions orales à l’Assemblée nationale. Une chaîne de télévision tamazight a été créée, et les frontons de certaines administrations arborent des inscriptions en tifinagh (l’alphabet tamazight). Et Aujourd’hui, hormis quelques ultras du nationalisme panarabe, la quasi-totalité des Algériens se revendique amazigh, des « hommes libres ».


    Le Jeune Afrique.
    «Une journée bien employée donne un bon sommeil, une vie bien employée procure une mort tranquille...»

  • #2
    Et Aujourd’hui, hormis quelques ultras du nationalisme panarabe, la quasi-totalité des Algériens se revendique amazigh, des « hommes libres ».
    il aurait fallut que boutef leur dise un jour "nous sommes des berbères arabisés" pour que bon nombre d'algériens se réveillent berbère du jour au lendemain à commencé par les politiques ... mais avec quel héritage ? ... l'héritage historique suffit il à lui seul ? certainement pas.
    non messieurs il n'y a ni berbère arabisé ni berbère francisé il y'a juste le berbère ... et comme là si bien souligné Salem Chaker "ne sont berbères que le berbérophones" ... toute autre tentative de semer la confusion est veine.
    pour les "vrais" berbère l'amazighité n'est pas juste un port-clef accroché à leur taille qu'ils exhibent à l'occasion ... mais la vivent a chaque instant et la transmette.

    Commentaire


    • #3
      Je suis d'accord avec toi Gironimo, et je doute du fait que bcp d'algériens se reconnaissent berbères.

      Commentaire


      • #4
        pour les "vrais" berbère l'amazighité n'est pas juste un port-clef
        Tamazight tella tella, ta aarvuvt tedda texla, ma d ussan a tettwacca
        Kindness is the only language that the deaf can hear and the blind can see - Mark Twain

        Commentaire


        • #5
          non messieurs il n'y a ni berbère arabisé ni berbère francisé il y'a juste le berbère ... et comme là si bien souligné Salem Chaker "ne sont berbères que le berbérophones" ...
          Les autres sont araboberbères.
          Rien de neuf.

          Commentaire


          • #6
            Tant mieux, tant mieux. Si aujourd'hui tous les Algeriens renouent avec leur identite, tant mieux. Mieux vaut tard que jamais et j'espere que cette fois-ci, tous nos intellectuels et politiques mesurent l'importance et l'etendue d'une telle eventualite. N'ayant pas peur de nous memes et de notre histoire, affirmons-nous !
            Si la vie n'est pas une partie de plaisir, l'alternative est pire.

            Commentaire


            • #7
              L'identité dépasse les études des sociologues, ethnologues et autres généticiens. Elle se vit en chacun des individus, se communie dans les rues et cités. Les identités algériennes sont multiples...
              Arabe, amazighe, algérien, musulman, dans le sens de l'identité, ca veut dire quoi au juste ? Quelle importance ca représente dans l'identité individuelle ?

              Commentaire


              • #8
                La vérité c'est que le pays tout entier se rend enfin compte qu'il a été floué, tel un enfant adoptif à qui des parents font croire aussi longtemps que possible qu'ils sont ses véritables géniteurs.

                Or, que fait cet enfant quand il découvre enfin la vérité ? en général, il continue à avoir de l'amour pour ses parents adoptifs (pour services rendus), mais son esprit est ailleurs: la recherche de ses véritables racines.
                Kindness is the only language that the deaf can hear and the blind can see - Mark Twain

                Commentaire


                • #9
                  reduire le printemps berbere a une histoire de langue et de culture ...c'est faire l'erreur originelle..qui débouche sur ce que l'auteur appelle paradoxe ...la dimension la plus grand dans ce mouvement c'est la revendication democratique avant tout ( voir la plate forme d'el kseur) ..

                  c'est l'incapacité de ce mouvement a forcer un changement démocratique ( cela pour plusieurs raisons qui meriterait a elle seule beaucoup de discussion ) qui fait que ca patine toujours... la donne integriste et son pendant populiste a remis a plutard ..ce combat democratique ...

                  Commentaire


                  • #10
                    J'aimerai bien que pour le 30e anniversaire n tfsut en 2010, bouteflika nous offre une Académie Amazigh (où on pourrait d'ailleurs inclure un section d'aménagement de l'arabe algérien, en collaboration avec l'ac' de la langue arabe), 7

                    et surtout un troisième département de langue et culture amazigh pour l'université d'Alger..

                    Commentaire


                    • #11
                      Il ne faut pas ignorer le paradoxe Islam qui nous lie aux arabes, qu'on la veuille ou pas. Ce n'est pas un match de foot qui va changer le destin de l'algérien.

                      Qu'on reste fier de ce que nous sommes c'est le plus important. Je pense c'est ce à découler du match.

                      Restons algériens et fier!
                      Ask not what your country can do for you, but ask what you can do for your country.

                      J.F.Kennedy, inspired by Gibran K. Gibran.

                      Commentaire


                      • #12
                        Il ne faut pas ignorer le paradoxe Islam qui nous lie aux arabes, qu'on la veuille ou pas
                        pourquoi les turques par exemple n'ont pas ce problème.......

                        Commentaire


                        • #13
                          oui tu as raison djamal,comme moi,je suis ni berbere ni arabe,je suis tout simplement un algerien et fier!!

                          Commentaire


                          • #14
                            Qui t'aurait dit que les turcs ne sont pas liés aux arabes?
                            de façon moins étroite néanmoins.
                            Ask not what your country can do for you, but ask what you can do for your country.

                            J.F.Kennedy, inspired by Gibran K. Gibran.

                            Commentaire


                            • #15
                              Qui t'aurait dit que les turcs ne sont pas liés aux arabes?
                              qu'est ce que le turc a en commun avec l'arabe à part l'islam?? et ne me parle pas des mots arabe dans la langue turque,il y en a aussi dans l'espagnol et dans le francais.

                              Commentaire

                              Chargement...
                              X