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Maroc : Diplomatie. Touche pas à mon Sahara

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  • Maroc : Diplomatie. Touche pas à mon Sahara

    Diplomatie. Touche pas à mon Sahara

    Les Affaires étrangères se recentrent sur le défi n°1 : la “cause nationale”. Et multiplient les signes de fermeté à l’encontre de la communauté internationale. Décryptage.


    “Si tu veux la paix, soutiens le Sahara (marocain)”, semble être le nouveau leitmotiv de la diplomatie marocaine, customisant ainsi le célèbre adage romain incitant à préparer la guerre. Longtemps accusées d’effacement, les Affaires étrangères entendent bien se faire plus offensives : “On note une crispation marocaine, ces derniers

    temps, sur la question du Sahara parce que le dossier n’avance plus”, confirme Khadija Mohsen-Finan, chercheuse à l’IFRI (Institut français des relations internationales). Pour cette spécialiste du Sahara, la conjoncture actuelle est moins “favorable” à Rabat. En cause principalement, le rapport sévère de Human Rights Watch et la nomination de Christopher Ross comme envoyé spécial des Nations-Unies pour le Sahara. “Les seules avancées restent des déclarations dont on ne voit pas les retombées concrètes”, estime un ancien diplomate, se demandant si la déclaration “de soutien” de Hillary Clinton à Marrakech suffit à convaincre de l’adhésion de l’administration Obama aux thèses de Rabat.

    Orientations royales
    Dans les couloirs du parlement, ce samedi 14 novembre, on compte aussi les bons et les mauvais points de la diplomatie. C’est le grand oral pour Taïeb Fassi Fihri, qui défend son plan d’action 2008-2012 devant la commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants lors de la discussion du budget. En attendant l’examen du jour, on se remémore les anciennes copies. En moins d’un an : rappel de l’ambassadeur au Sénégal, fermeture de l’ambassade au Venezuela, rupture des relations diplomatiques avec l’Iran et renvoi récent d’une diplomate suédoise. On bavarde du dernier discours de Mohammed VI à l’occasion de l’anniversaire de la Marche Verte. On commente l’affaire de l’expulsion de la militante pro-Polisario Aminatou Haïdar. Et on s’interroge sur les attaques en début de semaine du PAM sur la gestion des Affaires étrangères et notamment les propos du secrétaire général adjoint du parti, Abdelhakim Benchemach, dénonçant “les dysfonctionnements de la diplomatie officielle”.
    Face aux représentants du peuple, le ministre discute de tous “les dossiers chauds de la diplomatie marocaine, à la fois sur le plan stratégique mais aussi opérationnel, du conflit au Sahara aux problèmes administratifs du corps diplomatique à travers le monde”, indique la députée Mbarka Bouaïda, présidente de la commission. “La priorité est de toute évidence donnée au projet d'autonomie dans la région du Sahara et l'avancement des négociations dans ce sens”, analyse-t-elle. Les fins connaisseurs des relations internationales confirment, depuis deux ans, un style Taïeb Fassi Fihri, mais surtout un costume taillé par Mohammed VI. “Le roi a donné de nouvelles orientations. Mais les fondamentaux de notre identité diplomatique sont maintenus”, nous confie un haut diplomate. Un pays qui ne figure pas parmi les grandes puissances ne peut jouer dans leur cour. La récréation est donc finie. Changement de méthode : exit le romantisme, place à la realpolitik.

    Intransigeance ou impulsivité ?
    “Le Maroc était connu jusqu’ici pour sa modération : beaucoup de conférences mais peu de coups d’éclat, résume un ancien habitué des cercles diplomatiques. Il a accepté de nombreuses concessions aux Etats-Unis, notamment sur le Proche-Orient”. Aujourd’hui, si le discours officiel nie avoir délaissé la question palestinienne, nombre d’observateurs constatent un détachement du Maroc sur le conflit du Proche-Orient. Rabat se concentre sur ses intérêts directs, essentiellement, le premier d’entre eux : la “cause nationale”. Et surtout le fait savoir. Taper du poing sur la table diplomatique est devenu une habitude. Convocations ou rappels d’ambassadeurs et réactions orageuses figurent désormais à la météo des relations internationales. “Ces coups de boutoir de Rabat sont des actes voulus qui dessinent une ligne de fracture : nous ne cèderons rien sur le dossier du Sahara”, analyse cet ancien diplomate.
    D’autres observateurs dénoncent des réactions souvent disproportionnées. “Il n’existe pas de traits saillants dans la diplomatie marocaine. Elle fonctionne par à-coups. L’absence du Maroc sur la scène du Moyen-Orient, ou en Amérique Latine, souligne l’absence de vision globale”, estime Abdelmoughit Ben Massoud, professeur de relations internationales à l’Université de Rabat. L’universitaire dresse un sombre tableau de la diplomatie marocaine, qui, selon lui, “a besoin de réformes structurelles”. “Au jour le jour, on constate des dysfonctionnements dus à un manque flagrant de moyens au sein des représentations consulaires”, fait remarquer un membre de la commission parlementaire. Devant les députés, Fassi Fihri a annoncé un “processus de réforme sur les plans humain, financier et méthodologique”. Car c’est avec la technicité de son ministère au staff rajeuni que le technocrate compte gérer les Affaires étrangères. Mais pas sûr que le budget de 2 milliards de dirhams et les 100 postes supplémentaires obtenus suffisent.

    Investissements stratégiques
    Dans la diplomatie du nouveau règne, la bonhomie de Taïeb Fassi Fihri fait un duo gagnant avec un nouveau bras armé : la diplomatie économique. Lors de sa présentation aux députés, Taïeb Fassi Fihri a également exposé son objectif de “diversifier les partenariats”. En d’autres termes, il s’agit de lobbying diplomatique où le Maroc offre des investissements de courtoisie de la part d’entreprises nationales ou l’expertise d’un office public (eau potable, électricité) pour des projets de développement. Cible numéro 1 : l’Afrique. “Le Maroc accorde un intérêt particulier à la coopération avec l'Afrique dans le cadre d'une politique renouvelée à l'égard des pays du continent”, a expliqué Taïeb Fassi Fihri aux députés, rapporte la MAP. Un haut diplomatique explique : “Aujourd’hui, ce sont les projets de développement humain qui sont favorisés plutôt que les relations d’Etat à Etat”. Entendre de chef d’Etat à chef d’Etat. Fini le temps où les amitiés des dirigeants faisaient la pluie et le beau temps dans les relations internationales. “Désormais, il s’agit d’engager aussi les populations. Les nombreuses visites de Mohammed VI au Sénégal et au Gabon vont dans ce sens”, poursuit notre source. De fait, la diplomatie reste une affaire royale. Dans les capitales étrangères, Taïeb Fassi Fihri a pour usage de se présenter comme “l’émissaire de Sa Majesté”. Jamais comme celui de Abbas El Fassi…

    Profil. Taïeb Fassi Fihri, le négociateur
    Au ministère des Affaires étrangères, Taïeb Fassi Fihri est comme à la maison. Non pas qu’il y passe tout son temps- déplacements de fonction obligent, mais parce que c’est un enfant du sérail. Économiste de formation, il a choisi la carrière diplomatique. Aujourd’hui, à la petite cinquantaine, il est connu et apprécié des chancelleries étrangères. Ce natif de Casablanca, titulaire d’un doctorat en analyse et politique économique à Sciences Po Paris, a été recommandé à Hassan II par son directeur de thèse, Raymond Barre. En 1984, il intègre donc le ministère du Plan avant de rejoindre, moins de deux ans plus tard, le ministère des Affaires Etrangères. Fassi Fihri fait ses armes dans le cabinet de Abdellaif Filali, lors des négociations avec la communauté européenne. A 35 ans, il est nommé (et reconduit trois fois) secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères et à la Coopération. Puis vient l’Alternance. En 1998, il fait un petit tour par le cabinet royal, avant de retrouver en 1999 son portefeuille. On évoque un homme bien né, confident du prince. Chez les Fassi Fihri, la politique est une affaire de famille, mais Taïeb, réputé grand travailleur, gère ses dossiers en bon technocrate. Il entame les négociations sur l’accord de libre-échange avec les Etats-Unis et devient, en 2002, ministre délégué dans le gouvernement Jettou. En 2007, celui qui est alors l'homme des grands dossiers (notamment le Sahara) devient le diplomate n°1 du Maroc : un poste qui lui revient “de fait” depuis des années.

    telquel
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