LITTÉRATURE AMAZIGHE
Le vagabond Amnetri, de Guy de Maupassant en Kabyle
Guy de Maupassant est un écrivain français (1850-1893) très prolifique et célèbre qui occupe encore de nos jours une place de choix dans l'histoire de la littérature française. Il est surtout connu pour ses nouvelles. Ahmed Hamoum, enseignant de tamazight de profession, exerçant à Tarerbust (Bouira)- vient de traduire en kabyle 7 de ses nouvelles : « Le Petit », « Le Diable », « Une Vendetta », « L'Orphelin », « L'Aveugle », « Aux champs » et « Le Vagabond ». Le recueil de ces nouvelles intitulé « Amnetri » (Le Vagabond) vient juste de paraître aux éditions Talantikit de Béjaïa, avec le soutien de l'Association Culturelle N’Yimazighen de Belgique.
Une louable initiative pour promouvoir la littérature Amazighe. Ce livre, au format poche de 140 pages, est le quatrième du même auteur. Il est écrit dans un kabyle sobre et dénué de néologismes qui rendent parfois la compréhension difficile. Passer du français au kabyle n'est pas une mince affaire. C'est pourquoi l'auteur est parfois contraint de recourir à l'adaptation de certaines expressions et des personnages pour donner à ces histoires une âme kabyle au risque de dénaturer le sens et les intentions.
Un pari réussi puisque l'auteur a su garder le fil et la cohérence des histoires traduites. Contrairement à ce qui est écrit dans la préface par Abdeslam Abdennour, la traduction n'est jamais « un procédé palliatif au manque de création, d'innovation et d'imagination », mais un moyen d'ouverture sur l'autre, un pont entre les langues et les cultures. Même en Europe d'aujourd'hui, les meilleures oeuvres littéraires et scientifiques sont systématiquement traduites sans pour autant que ce continent ressente un quelconque manque de création ni d'imagination. La traduction a de tout temps été présente à travers l'histoire et les cultures. « Amnetri », de Hamoum Ahmed se veut donc une sorte de fenêtre sur l'universalité et offre au lecteur un voyage dans le temps à travers les campagnes du nord de la France du XIX è siècle.
Cette mobilité perpétuelle sur terre et sur mer serait une stratégie pour échapper à la peur, à la mort qui hantaient Guy de Maupassant, font remarquer en substance les frères Goncourt en 1889. Cette obsession de la peur, cette hantise, gagne évidemment ses personnages en mouvement permanent dans son oeuvre entière. Elle est clairement traduite dans « Le Diable », p.35, Une Vendetta, p.55, « L'Orphelin », p.69, « L'Aveugle », p.85, « Le Vagabond », p.111. Avec ces nouvelles et les autres aussi, notamment « Le Horla »- 1882, « Apparition », 1883, Maupassant fait une double entrée significative : l'une dans la notoriété littéraire et l'autre dans la maladie et la déchéance. Ses peurs sont amplement justifiées par la suite et ses angoisses confirmées. Ce contraste saisissant a déchaîné bien des passions (et continue à le faire) et les supputations les plus pessimistes allaient bon train sur son état de santé mentale à l’époque.
« Le procédé du Journal (la structure du « Le Horla ») donne une réalité saisissante à cette seconde version, plus fouillée, plus lente, où l'horreur est exploitée à fond », note Lanoux, un spécialiste de l'oeuvre de Maupassant. L'autre contraste souligné par ce spécialiste, est celui qui relie à la fois « Le terrifiant et l'histoire, et la limpidité mélancolique de l'écriture. » Ainsi donc à travers la lecture et l'analyse de ces nouvelles, même s'il est difficile de trouver un fil conducteur entre elles, les titres constituent néanmoins une suite logique et chronologique dans les pensées et dans les productions de Maupassant. Certains thèmes et questions fondamentales de l'existence sont récurrents. A titre d'illustration, la question du fantôme dans la nouvelle « Le Diable » et celle de la peur dans le reste du recueil reviennent de façon lancinante et ne peuvent être passées sous silence sous peine de biaiser l'analyse et de passer à côté de l'essentiel de l'oeuvre de Maupassant.
Le Courrier d'Algérie
Le vagabond Amnetri, de Guy de Maupassant en Kabyle
Guy de Maupassant est un écrivain français (1850-1893) très prolifique et célèbre qui occupe encore de nos jours une place de choix dans l'histoire de la littérature française. Il est surtout connu pour ses nouvelles. Ahmed Hamoum, enseignant de tamazight de profession, exerçant à Tarerbust (Bouira)- vient de traduire en kabyle 7 de ses nouvelles : « Le Petit », « Le Diable », « Une Vendetta », « L'Orphelin », « L'Aveugle », « Aux champs » et « Le Vagabond ». Le recueil de ces nouvelles intitulé « Amnetri » (Le Vagabond) vient juste de paraître aux éditions Talantikit de Béjaïa, avec le soutien de l'Association Culturelle N’Yimazighen de Belgique.
Une louable initiative pour promouvoir la littérature Amazighe. Ce livre, au format poche de 140 pages, est le quatrième du même auteur. Il est écrit dans un kabyle sobre et dénué de néologismes qui rendent parfois la compréhension difficile. Passer du français au kabyle n'est pas une mince affaire. C'est pourquoi l'auteur est parfois contraint de recourir à l'adaptation de certaines expressions et des personnages pour donner à ces histoires une âme kabyle au risque de dénaturer le sens et les intentions.
Un pari réussi puisque l'auteur a su garder le fil et la cohérence des histoires traduites. Contrairement à ce qui est écrit dans la préface par Abdeslam Abdennour, la traduction n'est jamais « un procédé palliatif au manque de création, d'innovation et d'imagination », mais un moyen d'ouverture sur l'autre, un pont entre les langues et les cultures. Même en Europe d'aujourd'hui, les meilleures oeuvres littéraires et scientifiques sont systématiquement traduites sans pour autant que ce continent ressente un quelconque manque de création ni d'imagination. La traduction a de tout temps été présente à travers l'histoire et les cultures. « Amnetri », de Hamoum Ahmed se veut donc une sorte de fenêtre sur l'universalité et offre au lecteur un voyage dans le temps à travers les campagnes du nord de la France du XIX è siècle.
Cette mobilité perpétuelle sur terre et sur mer serait une stratégie pour échapper à la peur, à la mort qui hantaient Guy de Maupassant, font remarquer en substance les frères Goncourt en 1889. Cette obsession de la peur, cette hantise, gagne évidemment ses personnages en mouvement permanent dans son oeuvre entière. Elle est clairement traduite dans « Le Diable », p.35, Une Vendetta, p.55, « L'Orphelin », p.69, « L'Aveugle », p.85, « Le Vagabond », p.111. Avec ces nouvelles et les autres aussi, notamment « Le Horla »- 1882, « Apparition », 1883, Maupassant fait une double entrée significative : l'une dans la notoriété littéraire et l'autre dans la maladie et la déchéance. Ses peurs sont amplement justifiées par la suite et ses angoisses confirmées. Ce contraste saisissant a déchaîné bien des passions (et continue à le faire) et les supputations les plus pessimistes allaient bon train sur son état de santé mentale à l’époque.
« Le procédé du Journal (la structure du « Le Horla ») donne une réalité saisissante à cette seconde version, plus fouillée, plus lente, où l'horreur est exploitée à fond », note Lanoux, un spécialiste de l'oeuvre de Maupassant. L'autre contraste souligné par ce spécialiste, est celui qui relie à la fois « Le terrifiant et l'histoire, et la limpidité mélancolique de l'écriture. » Ainsi donc à travers la lecture et l'analyse de ces nouvelles, même s'il est difficile de trouver un fil conducteur entre elles, les titres constituent néanmoins une suite logique et chronologique dans les pensées et dans les productions de Maupassant. Certains thèmes et questions fondamentales de l'existence sont récurrents. A titre d'illustration, la question du fantôme dans la nouvelle « Le Diable » et celle de la peur dans le reste du recueil reviennent de façon lancinante et ne peuvent être passées sous silence sous peine de biaiser l'analyse et de passer à côté de l'essentiel de l'oeuvre de Maupassant.
Le Courrier d'Algérie