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La poésie africaine éclaire les consciences

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  • La poésie africaine éclaire les consciences

    La poésie africaine comme les autres arts, a nourri la littérature du monde. C’est une poésie qui n’a jamais cessé d’évoluer même si les plus beaux textes sont anonymes, dit-on. Tel un torrent, elle a traversé toutes les époques pour immortaliser des récits oraux et exercer une influence culturelle et morale sur les sociétés.

    La poésie africaine narre l’amour, les exploits historiques ou mythiques. Même aujourd’hui la poésie est considérée comme fondamentale pour comprendre les traditions et mentalités anciennes, la poésie étant témoin de son époque. Celle-ci, toujours à l’affût de la vérité, traque l’interdit, dénonce l’injustice, défend les opprimés et se fait porte parole des sans voix et sublime l’amour, toujours belle et rebelle pétrie de paroles mélodieuses pour le plaisir des oreilles et l’éveil des consciences. "La poésie ne doit pas périr, sinon où serait l’espoir du monde ?" Note Léopold Sédar Senghor qui au delà de la politique a écrit ce magnifique poème célèbre qui se veut, faune, flore sombre, lumineux, jouissances, exaltant et évanescent.

    Femme noire

    Femme nue, femme noire

    Vêtue de ta couleur qui est la vie, de ta forme qui est beauté

    J’ai grandi à ton ombre ; la douceur de tes mains bandait mes yeux

    Et voilà qu’au cœur de l’Eté et de Midi, je te découvre, terre promise, du haut d’un haut col calciné

    Et ta beauté me foudroie en plein cœur, comme l’éclair d’un aigle

    Femme nue, femme obscure

    Fruit mûr à la chair ferme, sombres extases du vin noir, bouche qui fait lyrique ma bouche

    Savane aux horizons purs, savane qui frémit aux caresses ferventes du Vent d’Est

    Tamtam sculpté, tamtam tendu qui gronde sous les doigts du vainqueur

    Ta voix grave de contralto est la chant spirituel de l’aimée.

    Poèmes du soleil

    La femme est créatrice par nature, elle donne libre cours à sa créativité et enfante ce fond immuable qu’elle transmet aux enfants, quel que soit le pays où ils vivent, car il ne doit pas confondre sa culture avec une autre pour qu’il ne soit pas déraciné. La femme parle aussi de sa condition de femme de la liberté d’expression, la liberté de mouvement, elle plaide en faveur des sans-voix de la justice, de l’égalité et de la fin de toute forme de racisme.

    La poésie même rebelle est parée de sons musicaux, de rythmes et de sonorités.

    Ndeye Coumba Mbengue Diakhaté est une poétesse sénégalaise.

    Le titre de son recueil "Filles du soleil" est un vibrant hommage aux femmes :

    Ma sœur, si douce

    Fleur à peine épanouie

    Mais très tôt perdit la vie

    Car voulant la donner

    "Ceinture d’amour" est un poème qui appelle les femmes du monde à s’unir pour créer un monde meilleur pour celles qui sont les victimes éternelles des lois qui les humilient :

    Si des femmes, toutes les mains voulaient s’enlacer,

    Pour former une ceinture embrassant l’univers

    Si des femmes, toutes les voix fredonnaient le même air,

    Dissiper la langueur et prôner la liberté ;

    Si des femmes, tous les cœurs battaient au même rythme,

    Ranimer le vieux monde, par le mal étouffé,

    Si seulement toutes les femmes le voulaient bien

    Il naîtrait au vieux monde un cœur neuf plein d’amour et de vie

    Impulsant sans arrêt du bonheur à foison"

    Un spectacle nommé Izlan

    Izlan, spectacle de chants et de poésie spécialement crée pour le musée du quai Branly est conçu comme un hommage à la richesse poétique de la culture amazighe de l’Atlas marocain. Il est composé de femmes et d’hommes chantant les joies, les peines, des chants qui pleurent ou rient qui exaltent des sentiments chargés d’émotions qui s’inspirent des plaines et des montagnes. Tous les parlers berbères s’y mêlent, se côtoient ; s’épousent pour former une seule langue unique, celle de la poésie gravée dans la mémoire infaillible et dans l’esprit en perpétuel création à contre-courant des orages et de la dureté de la vie. Izlan,imurig,urar issefra,quel que soit son nom,la poésie amazighe chante l’amour de la terre,célèbre la douceur du printemps,les naissances,les mariages ;les labours et la mélodie qui transmet la bonne parole. Comme dans tous les pays d’Afrique, le poème est souvent chanté, psalmodié et accompagné d’un instrument de musique. Pour Senghor, "un poème ne peut vivre que déclamé, il n’est accompli que s’il se fait chant, parole et musique en même temps."

    Les poètes sont les porte-parole de leur sociétés.La poésie révèle des saveurs héritées de la tradition orale qui viennent enrichir le patrimoine qui est la source d’inspiration intarissable pour toutes les générations.

    L’Atlas marocain regorge de ces aèdes anonymes ou connus tel que Rais Saïd Outajjajt, Moulay Hmad Lhini ou Raïssa Fatima Tabaamrant.

    Fatima la rebelle

    Raïssa Fatima Tabaamrant est célèbre dans tout le Maroc et au-delà, grâce à sa poésie déclamée ou chantée et à sa voix qui porte les revendications de son peuple. Elle défend son identité et les droits des imazighens du Maroc, elle en fait son cheval de bataille, sa raison d’être et ne craint personne. Ses cassettes se vendent à des milliers d’exemplaires. Depuis quinze ans, elle se produit dans tous les festivals nationaux dédiés à l’Art Amazigh et a chanté dans des salles à Paris, Milan, Bruxelles, Amsterdam.

    Fatima écrit elle-même ses poèmes, œuvres réelles qui par leurs métaphores et tournures d’esprit sont considérées du domaine de la littérature. Elle aborde tous les thèmes dans ses chansons, la patrie, la misère, le chômage des jeunes, l’exil .des textes chargés de signes et de clins d’œil sur les réalités de son pays ; mais l’identité amazighe est son éternel combat tout comme l’a fait avant elle le grand poète engagé, Mohamed Damsiri. Sa musique est un mélange subtil de la musique traditionnelle et moderne.

    Fatima a beaucoup souffert dans sa jeunesse. Orpheline de mère à trois ans, sa belle-mère la maltraite avant de la marier à dix neuf ans à un homme âgé .Elle le quitte pour retourner chez ses parents qui la rejettent de nouveau. En 1981, elle est accueillie par une femme qui la présente à des musiciens et danseuses.

    En 1985, elle enregistre son premier album dans lequel elle déclame cinq poèmes et joue un morceau de musique de sa propre composition.

    En 1991, elle travaille dans un studio avec sa propre équipe de musiciens. Toujours fidèle à ses convictions, elle chante l’histoire et la civilisation berbère.

    En 1994, après un concert dédié à la musique Amazigh dans le célèbre Opéra Garnier de Paris, elle est escortée par des policiers pour l’aider à sortir tant ses fans sont nombreux.

    Fatima a construit sa carrière internationale, elle a acquis une grande expérience en voyageant et en côtoyant des professionnels de la musique. Elle attache une grande importance aux thèmes qu’elle chante et emploie l’Awal Amazigh, car dit-elle : "Il faut que la langue évolue." Ahmed Assid, chercheur à l’Ircam ajoute : "Tabaamrant est consciente qu’on a besoin d’un Amazigh un peu travaillé, il faut aller vers une langue standart, celle de l’école et la production artistique." La poésie est la mémoire du peuple, la lanterne qui éclaire les consciences. Pour son épanouissement, sa compréhension, pour intéresser les jeunes à cet art, ne faudrait-il pas L’ouverture de salles de lecture ? La poésie plus que les autres arts souffre de grands problèmes d’édition et de diffusion. La littérature reste dominée par le roman, le théâtre et la musique.

    Par Hadjira Oubachir, La Dépêche de Kabylie
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