En Algérie, les lois et règlements relatifs à la protection du cadre de vie et de l’environnement se suivent et butent approximativement sur les mêmes contraintes qui en retardent ou dénaturent l’application.
La dernière loi relative à la gestion, protection et développement des espaces verts, promulguée en mai 2007, n’a pas encore visiblement bénéficié d’une vulgarisation à la hauteur des enjeux qu’elle charrie.
Son contenu demeure en effet quasi hermétique pour les acteurs de la société civile. Si cette situation perdure, le texte en question risque d’être vidé de sa substance, soumis qu’il est à la seule ‘’discrétion’’ de l’administration.
Et pourtant, dans le contexte de l’urbanisation forcenée et d’anarchie architecturale ayant caractérisé les paysages citadin et rural d’Algérie, cette loi constitue, de par les orientations qu’elle prodigue, le cadre réglementaire qu’elle instaure et les sanctions qu’elle prévoit une mini-révolution en matière de cadre de vie des citoyens.
Pour étudier les modalités d’application de cette loi et définir clairement les parties intervenantes et les missions respectives qu’elles sont censé assumer, des ateliers ont été organisés au cours de l’année 2007 par le ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Environnement et du Tourisme au niveau de plusieurs wilayas. Les parties convoquées pour assister à cet atelier représentent les structures intervenant directement dans la gestion des espaces urbains de nos villes : les présidents d’APC ou les secrétaires généraux de mairies, les chefs de daïra, les directeurs de l’Urbanisme, des Travaux Publics, de la Planification, des Domaines et des Forêts.
Il n’est un secret pour personne que le patrimoine “espace ver”’ s’est réduit en peau de chagrin depuis l’indépendance du pays. Les bouleversement vécus par les quartiers urbains, les centres-villes et les banlieues suite à l’exode rural massif ayant accompagné la politique d’industrialisation ont valu au cadre de vie des revirements et des régressions dommageables pour l’ensemble des habitants. Les arbres d’alignement, les arbustes d’ornement et les frondaisons d’embellissement ont subi des coupes réglées au fur et à mesure que se construisaient les cités, s’édifiaient les bidonvilles et s’ouvraient les routes.
Si, à l’échelle internationale, la norme en matière d’espace vert est fixée à 10 mètres carrés par habitant, en Algérie ce chiffre se réduit au un dixième, c’est-à-dire : 1M2. L’avancée du béton, après avoir ‘’bouffé’’ des centaines d’hectares des meilleures terres agricoles au niveau de la Mitidja Ouest (Blida, Boufarik, El Affroun), a étendu ses griffes à la Mitidja Est particulièrement après la création de la wilaya de Bourmerdès en 1984. Partout à l’intérieur du pays, l’Algérie a hérité de la colonisation des jardins publics qui embellissent parfois des espaces semi-arides (Sidi Belabbès) et même arides (le fameux jardin de Biskra célébré par le romancier André Gide) ; cela, pour ne rien dire de la Ville des Roses, du Jardin du Hamma ou de la Coquette Annaba.
L’Algérie, avec un volontarisme et un populisme effrénés permis par la rente pétrolière, avait investi dans la construction industrielle et l’urbanisation à telle enseigne que le visage du pays — panorama rural, tissu urbain, rythme de vie — se trouve complètement chamboulé au bout de trois décennies.
Une urbanisation à humaniser
Dans le fatras des lois relatives à l’urbanisme, à l’architecture et à la construction, il est difficile de positionner la valeur et l’importance des espaces verts. Il est surtout quasi impossible d’y trouver des clauses strictes et coercitives qui feraient des espaces verts une préoccupation des institutions chargées de l’urbanisme et de la politique de la ville ou une donnée incontournable de la vie dans la Cité. Le ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Environnement et du Tourisme a conçu au cours des dernières années un “Central Park” de 237 ha à Dély Brahim qui va contribuer à réactiver l’ancien projet de la ceinture verte d’Alger. Mais, un besoin réel en matière d’espaces verts sur l’ensemble du territoire national a fait que ce même département ministériel a milité pour une législation globale.
La loi du 13 mai 2007 est venue assurément combler un vide conceptuel et juridique dans la gestion de nos espaces urbains. Dorénavant, cette loi accompagnera et encadrera l’acte de construction qu’auront accompli les pouvoirs publics ou même les particuliers. Dans ses dispositions générales, la nouvelle loi définit les objectifs de la gestion, de la protection et du développement des espaces verts en ces termes : "améliorer le cadre de vie urbain ; entretenir et améliorer les qualités des espaces verts urbains existants ; promouvoir l’extension des espaces verts par rapport aux espaces bâtis ; et de faire de l’introduction des espaces verts, dans tout projet de construction, une obligation prise en charge par les études urbanistiques et architecturales publiques et privées".
Dans le corpus de l’article 3 de la loi, sont définis les espaces d’interventions inhérents au jardin botanique, jardin collectif, jardin ornemental, jardin résidentiel et jardin particulier. À ces entités strictement urbaines, s’ajoutent les forêts urbaines (bosquets, groupes d’arbres, ceintures vertes) et les alignements boisés (formations arborées situées le long des routes et autoroutes).
Les deux instruments de gestion des espaces verts prévus par la nouvelle loi sont le classement officiel de l’aire à déclarer comme étant un espace vert et, ensuite, l’établissement des plans de gestion de ces mêmes espaces. La nouvelle législation prévoit aussi que le déclassement d’un espace vert-pour une utilité publique avérée et incompressible- ne peut avoir lieu que par décret.
En matière de construction dans la proximité immédiate d’un espace vert, l’article 15 précise "toute construction ou infrastructure devant être implantée inférieure à 100 mètres des limites d’un espace vert est interdite". Dans le même esprit, l’article 16 stipule que "toute demande de permis de construire est refusée si le maintien des espaces verts n’est pas assuré ou si la réalisation du projet entraîne la destruction du couvert végétal".
Mieux encore, la loi sur les espaces verts astreint les bureaux d’études en architecture et urbanisme à intégrer cette donne dans leurs plans de construction : "Toute production architecturale et/ou urbanistique doit intégrer et prendre en charge la nécessité des espaces verts selon les normes et objectifs fixés par la présente loi". Les alinéas de l’article 29 fait état des critères à prendre en compte dans la création d’espaces verts (caractère sur site, angles de vue, ressources de terrain, espèces végétales de la région, patrimoine architectural de la zone, servitudes et contraintes liées à la mitoyenneté, au régime des eaux, au droit de passage, au bornage, aux aliments de voirie…). Enfin, un prix national de la ville verte est institué par ladite loi. Les dispositions pénales de la loi sur les espaces verts sont portées par 7 articles dont l’un précise qu’"est puni d’un emprisonnement de 3 à 6 mois et d’amende de 20 000 à 50 000 dinars quiconque est responsable de la dégradation des espaces verts et d’arrachage de jeunes plants". Quant à ceux qui seraient tentés de détruire un espace vert a l’intention de s’emparer des lieux ou de les affecter à une quelconque autre activité, la nouvelle loi leur réserve une peine d’emprisonnement de 6 à 18 mois et une amende allant de 50 000 à 1 million de dinars.
En procédant à la vulgarisation maximale au niveau des autorités locales des wilayas de la nouvelle loi sur les espaces verts, le département de Cherif Rahmani compte passer à la phase d’exécution de son contenu avec le maximum d’atouts. Car, par le passé, des dizaines de lois et décrets liés à la ville, à l’aménagement du territoire, à l’urbanisme et à la construction sont restées lettres mortes.
Qu’en sera-t-il de la loi sur les espaces verts ?
La dernière loi relative à la gestion, protection et développement des espaces verts, promulguée en mai 2007, n’a pas encore visiblement bénéficié d’une vulgarisation à la hauteur des enjeux qu’elle charrie.
Son contenu demeure en effet quasi hermétique pour les acteurs de la société civile. Si cette situation perdure, le texte en question risque d’être vidé de sa substance, soumis qu’il est à la seule ‘’discrétion’’ de l’administration.
Et pourtant, dans le contexte de l’urbanisation forcenée et d’anarchie architecturale ayant caractérisé les paysages citadin et rural d’Algérie, cette loi constitue, de par les orientations qu’elle prodigue, le cadre réglementaire qu’elle instaure et les sanctions qu’elle prévoit une mini-révolution en matière de cadre de vie des citoyens.
Pour étudier les modalités d’application de cette loi et définir clairement les parties intervenantes et les missions respectives qu’elles sont censé assumer, des ateliers ont été organisés au cours de l’année 2007 par le ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Environnement et du Tourisme au niveau de plusieurs wilayas. Les parties convoquées pour assister à cet atelier représentent les structures intervenant directement dans la gestion des espaces urbains de nos villes : les présidents d’APC ou les secrétaires généraux de mairies, les chefs de daïra, les directeurs de l’Urbanisme, des Travaux Publics, de la Planification, des Domaines et des Forêts.
Il n’est un secret pour personne que le patrimoine “espace ver”’ s’est réduit en peau de chagrin depuis l’indépendance du pays. Les bouleversement vécus par les quartiers urbains, les centres-villes et les banlieues suite à l’exode rural massif ayant accompagné la politique d’industrialisation ont valu au cadre de vie des revirements et des régressions dommageables pour l’ensemble des habitants. Les arbres d’alignement, les arbustes d’ornement et les frondaisons d’embellissement ont subi des coupes réglées au fur et à mesure que se construisaient les cités, s’édifiaient les bidonvilles et s’ouvraient les routes.
Si, à l’échelle internationale, la norme en matière d’espace vert est fixée à 10 mètres carrés par habitant, en Algérie ce chiffre se réduit au un dixième, c’est-à-dire : 1M2. L’avancée du béton, après avoir ‘’bouffé’’ des centaines d’hectares des meilleures terres agricoles au niveau de la Mitidja Ouest (Blida, Boufarik, El Affroun), a étendu ses griffes à la Mitidja Est particulièrement après la création de la wilaya de Bourmerdès en 1984. Partout à l’intérieur du pays, l’Algérie a hérité de la colonisation des jardins publics qui embellissent parfois des espaces semi-arides (Sidi Belabbès) et même arides (le fameux jardin de Biskra célébré par le romancier André Gide) ; cela, pour ne rien dire de la Ville des Roses, du Jardin du Hamma ou de la Coquette Annaba.
L’Algérie, avec un volontarisme et un populisme effrénés permis par la rente pétrolière, avait investi dans la construction industrielle et l’urbanisation à telle enseigne que le visage du pays — panorama rural, tissu urbain, rythme de vie — se trouve complètement chamboulé au bout de trois décennies.
Une urbanisation à humaniser
Dans le fatras des lois relatives à l’urbanisme, à l’architecture et à la construction, il est difficile de positionner la valeur et l’importance des espaces verts. Il est surtout quasi impossible d’y trouver des clauses strictes et coercitives qui feraient des espaces verts une préoccupation des institutions chargées de l’urbanisme et de la politique de la ville ou une donnée incontournable de la vie dans la Cité. Le ministère de l’Aménagement du territoire, de l’Environnement et du Tourisme a conçu au cours des dernières années un “Central Park” de 237 ha à Dély Brahim qui va contribuer à réactiver l’ancien projet de la ceinture verte d’Alger. Mais, un besoin réel en matière d’espaces verts sur l’ensemble du territoire national a fait que ce même département ministériel a milité pour une législation globale.
La loi du 13 mai 2007 est venue assurément combler un vide conceptuel et juridique dans la gestion de nos espaces urbains. Dorénavant, cette loi accompagnera et encadrera l’acte de construction qu’auront accompli les pouvoirs publics ou même les particuliers. Dans ses dispositions générales, la nouvelle loi définit les objectifs de la gestion, de la protection et du développement des espaces verts en ces termes : "améliorer le cadre de vie urbain ; entretenir et améliorer les qualités des espaces verts urbains existants ; promouvoir l’extension des espaces verts par rapport aux espaces bâtis ; et de faire de l’introduction des espaces verts, dans tout projet de construction, une obligation prise en charge par les études urbanistiques et architecturales publiques et privées".
Dans le corpus de l’article 3 de la loi, sont définis les espaces d’interventions inhérents au jardin botanique, jardin collectif, jardin ornemental, jardin résidentiel et jardin particulier. À ces entités strictement urbaines, s’ajoutent les forêts urbaines (bosquets, groupes d’arbres, ceintures vertes) et les alignements boisés (formations arborées situées le long des routes et autoroutes).
Les deux instruments de gestion des espaces verts prévus par la nouvelle loi sont le classement officiel de l’aire à déclarer comme étant un espace vert et, ensuite, l’établissement des plans de gestion de ces mêmes espaces. La nouvelle législation prévoit aussi que le déclassement d’un espace vert-pour une utilité publique avérée et incompressible- ne peut avoir lieu que par décret.
En matière de construction dans la proximité immédiate d’un espace vert, l’article 15 précise "toute construction ou infrastructure devant être implantée inférieure à 100 mètres des limites d’un espace vert est interdite". Dans le même esprit, l’article 16 stipule que "toute demande de permis de construire est refusée si le maintien des espaces verts n’est pas assuré ou si la réalisation du projet entraîne la destruction du couvert végétal".
Mieux encore, la loi sur les espaces verts astreint les bureaux d’études en architecture et urbanisme à intégrer cette donne dans leurs plans de construction : "Toute production architecturale et/ou urbanistique doit intégrer et prendre en charge la nécessité des espaces verts selon les normes et objectifs fixés par la présente loi". Les alinéas de l’article 29 fait état des critères à prendre en compte dans la création d’espaces verts (caractère sur site, angles de vue, ressources de terrain, espèces végétales de la région, patrimoine architectural de la zone, servitudes et contraintes liées à la mitoyenneté, au régime des eaux, au droit de passage, au bornage, aux aliments de voirie…). Enfin, un prix national de la ville verte est institué par ladite loi. Les dispositions pénales de la loi sur les espaces verts sont portées par 7 articles dont l’un précise qu’"est puni d’un emprisonnement de 3 à 6 mois et d’amende de 20 000 à 50 000 dinars quiconque est responsable de la dégradation des espaces verts et d’arrachage de jeunes plants". Quant à ceux qui seraient tentés de détruire un espace vert a l’intention de s’emparer des lieux ou de les affecter à une quelconque autre activité, la nouvelle loi leur réserve une peine d’emprisonnement de 6 à 18 mois et une amende allant de 50 000 à 1 million de dinars.
En procédant à la vulgarisation maximale au niveau des autorités locales des wilayas de la nouvelle loi sur les espaces verts, le département de Cherif Rahmani compte passer à la phase d’exécution de son contenu avec le maximum d’atouts. Car, par le passé, des dizaines de lois et décrets liés à la ville, à l’aménagement du territoire, à l’urbanisme et à la construction sont restées lettres mortes.
Qu’en sera-t-il de la loi sur les espaces verts ?
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