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H1N1pdm: Les précieuses leçons des anatomopathologistes

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  • H1N1pdm: Les précieuses leçons des anatomopathologistes

    La virologie et l’épidémiologie triomphantes nous avaient presque fait oublier l’anatomie pathologique et ses vertus. Cette spécialité médicale (« pathology » pour les Anglo-Saxons) trop méconnue est pourtant d’une importance considérable. Elle consiste à analyser (le plus souvent au microscope) les prélèvements tissulaires effectués chez des patients afin de porter le diagnostic le plus précis possible et de guider au mieux la décision thérapeutique.. Elle peut aussi, comme dans le cas qui nous passionne aujourd’hui, être pratiquée post mortem pour élucider les causes de la mort et aider à la compréhension des mécanismes qui en sont à l’origine.

    Le travail qui nous éclaire aujourd’hui vient d’être mis en ligne sur le site (pdf en anglais) de la revue hautement spécialisée Archives of Pathology and Laboratory Medicine. Sa lecture n’est pas des plus aisées mais ses conclusions sont assez simples à saisir. Pour résumer à l’extrême l’infection par le nouveau H1N1pdm peut tuer en provoquant des lésions de l’ensemble des voies respiratoires, depuis la trachée jusqu’aux alvéoles pulmonaires. De ce point de vue il semble se comporter de la même manière que les virus à l’origine des pandémies de grippe hautement meurtrières de 1918 et 1957.

    Pour parvenir à ce résultat un groupe de douze spécialistes de l’Institut national américain de la santé (NIH) et des services de santé de la ville de New York ont réalisés une série d’examens anatomopathologiques sophistiqués sur des prélèvements tissulaires provenant de 34 personnes (âgées, deux fois sur trois, de 25 à 49 ans) décédées des suites de la grippe H1N1pdm entre le 15 mai et le 9 juin à New York. Conclusions, résumées en substance par le Dr Jeffery K. Teubenberger : présence d’un éventail de lésions, aussi bien dans les voies respiratoires supérieures que dans les voies inférieures ; dans l’ensemble des cas étudiés, la trachée et les bronches présentaient des signes d’inflammation et étaient parfois gravement lésées ; des lésions importantes ont également été observées dans les bronchioles et, près des trois fois sur quatre, jusque dans les alvéoles pulmonaires.

    Il n’y a d’autre part aucun doute quant au rôle joué par le H1N1pdm : ses stigmates moléculaires ont été retrouvés par différentes techniques de biologie moléculaire dans l’ensemble des tissus et des cellules pulmonaires ainsi que dans certaines cellules du système immunitaire envoyées en première ligne pour lutter contre l’agresseur ; en vain. Plus d’une fois sur deux une infection pulmonaire bactérienne est associée à l’infection virale. Un scanner pulmonaire a été pratiqué dans quatre cas d’infection bactérienne pulmonaire qui, nous disent les spécialistes, montrent tous « une opacité en forme de verre dépoli, arrondie et brumeuse ».

    Pour le Dr Taubenberger ces profils lésionnels sont similaires à ce que l’on sait des pandémies de grippe de 1918 et de 1957 ; et bien différents de ce que l’on sait des grippes saisonnières : elles provoquent généralement des lésions dans la trachée et les bronches, mais pas plus avant dans l’arbre respiratoire. Neuf fois sur dix les victimes souffraient ici de problèmes de santé préalables plus ou moins associés (maladies cardiaques et respiratoires, asthme, déficience du système immunitaire). Mais il s’agissait aussi de femmes enceintes, et (trois fois sur quatre) de personnes obèses ; une donnée tout particulièrement importante aux Etats-Unis où l’obésité morbide affecte une proportion croissante de la population. Une donnée aussi qui, avec la progression de la pandémie, doit désormais retenir l’attention de tous.

    Jean-Yves Nau


    (1) ‘’Pulmonary Pathologic Findings of Fatal 2009 Pandemic Influenza A/H1N1 Viral Infections’’ (Arch Pathol Lab Med. 2010; 134: E1–E9)

    James R. Gill, MD; Zong-Mei Sheng, MD, PhD; Susan F. Ely, MD, MPHTM; Donald G. Guinee Jr, MD; Mary B. Beasley, MD; JamesSuh, MD; Charuhas Deshpande, MD; Daniel J. Mollura, MD; David M. Morens, MD; Mike Bray, MD; William D. Travis, MD;

    Jeffery K. Taubenberger, MD, PhD

    Nous progressons dans la compréhension de l’infection

    Il s’agit ici d’un papier publié par les excellentes équipes américaines de James Gill (NYU) et de Jeffery Taubenberger (Bethesda, USA). C’est cette dernière équipe qui avait identifié le virus H1N1 responsable de la pandémie « espagnole » de 1918 ; un identification post mortem réalisée sur des soldats américains décédés de la grippe espagnole dont les corps avaient été conservés dans le permafrost d’Alaska jusqu’à leur découverte récente.

    Les données présentées aujourd’hui sont très précieuses pour mieux comprendre les causes de mortalité directe de la grippe due au H1N1pdm. Cette publication confirme l’importance des surinfections bactériennes de l’arbre respiratoire profond (retrouvées dans 55% des cas) parmi les causes – au moins associées- aux décès. Il s’agit principalement de pneumocoques, rarement de streptocoques pyogènes ou de staphylocoques résistants à la méthicilline. C’est là une preuve supplémentaire, s’il en était besoin, que le combat contre les bactéries ne s’est pas achevé avec l’avènement des antibiotiques : les infections bactériennes peuvent encore de nos jours, dans les meilleurs hôpitaux du monde, évoluer de façon fulminante, hors de toute ressource thérapeutique, vers la mort.

    Ce travail confirme aussi le caractère hautement invasif de la pneumopathie virale. Elle induit des lésions qui font que les poumons du malade sont dans un état de quasi-noyade et peuvent ainsi conduire au décès. Ce même travail permet aussi de confirmer, dans la grande majorité des cas, des facteurs de risque aujourd’hui bien connus de mortalité directe due au H1N1pdm : l’obésité, l’asthme ou les maladies cardiovasculaires pré-existantes. Les anatomopathologistes nord-américains très spécialisés dans ce type d’autopsie, sont frappés des similitudes retrouvées avec la grippe « espagnole » (H1N1) de 1918 et la grippe asiatique (H2N2) de 1957.

    Avec cette nouvelle souche pandémique nous sommes confrontés à un surprenant paradoxe. D’une part cette souche virale peut-être d’une extrême virulence chez un petit nombre de malades souvent atteints de facteurs de risques banals ; des facteurs de risques qui ne sont pas annonciateurs de mortalité dans les épidémies de grippe saisonnière. D’autre part il nous faut compter avec la grande bénignité de l’infection chez le très grand nombre de personnes infectées par le virus. Il est aussi possible que le H1N1pdm soit à l’origine de beaucoup plus d’infections asymptomatiques ou pauci-symptomatiques qu’on le supposait jusqu’à présent (on évaluait généralement que moins de la moitié des infections pouvait être asymptomatique). Or ces formes cliniques à peine décelables ne sont pas comptabilisées dans les systèmes de surveillance classique de la grippe clinique (qui reposent, comme le réseau Sentinelles en France, sur une définition de cas de syndrome grippal typique associant une fièvre supérieure à 39°C, des douleurs musculaires et des signes respiratoires).

    Peut-être observera-t-on en fin d’épidémie que nos modèles mathématiques n’étaient pas très loin de la réalité quand ils prédisaient des taux de 40 à 50% de la population touchée par le virus alors même que la proportion cliniquement détectable aura, de manière inattendue, été particulièrement basse.

    Plusieurs experts nord-américains avaient constaté de manière précoce (à partir de l’analyse des cas observés durant l’été dernier) que ce nouveau virus semblait la plupart du temps provoquer des symptômes plus légers que ceux des grippes saisonnières et, à l’inverse et beaucoup plus rarement des symptômes beaucoup plus graves ; deux extrêmes sans beaucoup des habituelles formes intermédiaires. Il nous faut encore attendre les premiers résultats des études en cours (au moins en France) qui recherchent la présence des anticorps antiviraux dans le sang (études de séroprévalence) pour préciser ces premières impressions de nos collègues d’outre-Atlantique. Quoi qu’il en soit une chose est certaine : nous progressons dans la compréhension de l’infection.

    Par Antoine Flahault, Slate

  • #2
    ce nouveau virus semblait la plupart du temps provoquer des symptômes plus légers que ceux des grippes saisonnières et, à l’inverse et beaucoup plus rarement des symptômes beaucoup plus graves ; deux extrêmes sans beaucoup des habituelles formes intermédiaires
    Pour ceux qui doivent décider en matière de santé publique, c'est le cas le plus chiant : les cas graves sont très rares, pas de symptome dans la moitié des cas, des légers dans l'autre.

    Ils restent ainsi de gros incompris ... Va expliquer ce problème au grand public. Bah, c'est leur métier aussi, d'être face à l'ingratitude des gens ... Qui préfèrent se pâmer devant quelque bon gros complot.

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