Campus pharaoniques, accords avec des universités occidentales de renom… Les pays du Golfe investissent dans l'enseignement supérieur.
Le golfe Persique, nouvelle terre de conquête pour l'enseignement supérieur et pour l'éducation en général ? Après l'Asie et, dans une moindre mesure, l'Amérique latine, les initiatives se multiplient dans cette partie du monde. Les uns après les autres, les pays de la région annoncent la construction de nouveaux campus, signent des accords avec des universités de renom, organisent colloques et Salons dédiés à la formation. Forts des milliards de dollars du gaz et du pétrole, tous semblent décidés à investir dans la connaissance.
Le Qatar est, sans conteste, l'un des plus engagés dans cette stratégie. L'émirat a édifié depuis trois ans, aux portes de Doha, un somptueux campus de 1.400 hectares, baptisé « Education City », qui héberge six universités américaines. De leur côté, plusieurs grands groupes, parmi lesquels EADS, ExxonMobil, Microsoft, Cisco et Total, prévoient d'y investir 225 millions de dollars en recherche appliquée. Le Qatar vient pour sa part d'organiser le « World International Summit for Education », avec la participation d'un millier d'experts et de leaders d'opinion de tous horizons.
Les autres émirats se mobilisent également. Dubaï accueille depuis plusieurs années le Getex, l'un des plus importants Salons internationaux consacrés à l'éducation et à l'emploi des diplômés. A Bahreïn vient de se tenir la première édition de « The Education Project », un événement annuel visant à « faire progresser la qualité de l'éducation à travers le monde ». Cass Business School, avec un Executive MBA, et Oxford sont aussi présentes dans le Golfe.
Campus géants
Plusieurs raisons expliquent cet engouement. D'abord, les émirats y voient un excellent placement pour les revenus colossaux des hydrocarbures. « Investir dans l'éducation est le choix le plus prometteur en termes de développement humain et de progrès économique », affirme l'émir du Qatar, cheikh Hamad ben-Khalifa al-Thani, qui ambitionne de mettre sur pied, à l'horizon de vingt ans, une « économie de la connaissance » parmi les plus avancées au monde. Les responsables émiriens rêvent d'attirer des étudiants du Moyen-Orient, de l'Inde, du Pakistan, d'Afrique… et même d'Europe.
Ensuite, les pays du Golfe manquent cruellement de main-d'oeuvre qualifiée, qu'ils doivent importer. « Tous veulent éduquer leur population et leurs expatriés,observe Brigitte Fournier, directrice de l'agence Noir sur Blanc, qui a réalisé une étude sur la région. Les autorités ont vu les choses en grand et ont construit des campus géants, mais qui peinent à se remplir. Ne sont-ils que des châteaux de sable ? La crise qui touche Dubaï peut le laisser penser, mais il est encore trop tôt pour se prononcer. »
De leur côté, les institutions étrangères voient dans leur présence dans le Golfe un moyen de développer leur notoriété internationale et de renforcer leurs ressources financières - souvent avec le soutien d'industriels, attirés par les gisements de pétrole et de gaz. « Notre activité au coeur de la City de Londres nous a permis de développer des expertises en finance, en stratégie, en import-export et en promotion immobilière,souligne Roy Batechelor, directeur de l'Emba de Cass à Dubaï. Ce sont précisément les compétences dont Dubaï a besoin aujourd'hui. »
Les institutions françaises ne sont pas en reste. La Sorbonne a donné le signal, en s'installant à Abu Dhabi dès 2006. Une arrivée contestée, car l'accord interdirait à Paris-I, également intéressée, d'utiliser le nom « Sorbonne » dans la région. L'Insead y est aussi présent. L'Epitech (groupe Ionis), une école d'informatique, vient de conclure un accord d'échanges avec l'université Ahlia, au Bahreïn. D'autres sont dans les starting-blocks : l'université Lyon-II prévoit de s'installer dans le Golfe, avec l'Ecole Louis-Lumière. EM Lyon devrait y ouvrir un campus. HEC serait en pourparlers avancés avec le Qatar pour dispenser des formations pour dirigeants. L'école de Saint-Cyr-Coëtquidan devrait aussi prendre pied au Qatar pour former, à compter de 2011, des cadres civils et militaires de haut niveau.
JEAN-CLAUDE LEWANDOWSKI,
Les Echos
Le golfe Persique, nouvelle terre de conquête pour l'enseignement supérieur et pour l'éducation en général ? Après l'Asie et, dans une moindre mesure, l'Amérique latine, les initiatives se multiplient dans cette partie du monde. Les uns après les autres, les pays de la région annoncent la construction de nouveaux campus, signent des accords avec des universités de renom, organisent colloques et Salons dédiés à la formation. Forts des milliards de dollars du gaz et du pétrole, tous semblent décidés à investir dans la connaissance.
Le Qatar est, sans conteste, l'un des plus engagés dans cette stratégie. L'émirat a édifié depuis trois ans, aux portes de Doha, un somptueux campus de 1.400 hectares, baptisé « Education City », qui héberge six universités américaines. De leur côté, plusieurs grands groupes, parmi lesquels EADS, ExxonMobil, Microsoft, Cisco et Total, prévoient d'y investir 225 millions de dollars en recherche appliquée. Le Qatar vient pour sa part d'organiser le « World International Summit for Education », avec la participation d'un millier d'experts et de leaders d'opinion de tous horizons.
Les autres émirats se mobilisent également. Dubaï accueille depuis plusieurs années le Getex, l'un des plus importants Salons internationaux consacrés à l'éducation et à l'emploi des diplômés. A Bahreïn vient de se tenir la première édition de « The Education Project », un événement annuel visant à « faire progresser la qualité de l'éducation à travers le monde ». Cass Business School, avec un Executive MBA, et Oxford sont aussi présentes dans le Golfe.
Campus géants
Plusieurs raisons expliquent cet engouement. D'abord, les émirats y voient un excellent placement pour les revenus colossaux des hydrocarbures. « Investir dans l'éducation est le choix le plus prometteur en termes de développement humain et de progrès économique », affirme l'émir du Qatar, cheikh Hamad ben-Khalifa al-Thani, qui ambitionne de mettre sur pied, à l'horizon de vingt ans, une « économie de la connaissance » parmi les plus avancées au monde. Les responsables émiriens rêvent d'attirer des étudiants du Moyen-Orient, de l'Inde, du Pakistan, d'Afrique… et même d'Europe.
Ensuite, les pays du Golfe manquent cruellement de main-d'oeuvre qualifiée, qu'ils doivent importer. « Tous veulent éduquer leur population et leurs expatriés,observe Brigitte Fournier, directrice de l'agence Noir sur Blanc, qui a réalisé une étude sur la région. Les autorités ont vu les choses en grand et ont construit des campus géants, mais qui peinent à se remplir. Ne sont-ils que des châteaux de sable ? La crise qui touche Dubaï peut le laisser penser, mais il est encore trop tôt pour se prononcer. »
De leur côté, les institutions étrangères voient dans leur présence dans le Golfe un moyen de développer leur notoriété internationale et de renforcer leurs ressources financières - souvent avec le soutien d'industriels, attirés par les gisements de pétrole et de gaz. « Notre activité au coeur de la City de Londres nous a permis de développer des expertises en finance, en stratégie, en import-export et en promotion immobilière,souligne Roy Batechelor, directeur de l'Emba de Cass à Dubaï. Ce sont précisément les compétences dont Dubaï a besoin aujourd'hui. »
Les institutions françaises ne sont pas en reste. La Sorbonne a donné le signal, en s'installant à Abu Dhabi dès 2006. Une arrivée contestée, car l'accord interdirait à Paris-I, également intéressée, d'utiliser le nom « Sorbonne » dans la région. L'Insead y est aussi présent. L'Epitech (groupe Ionis), une école d'informatique, vient de conclure un accord d'échanges avec l'université Ahlia, au Bahreïn. D'autres sont dans les starting-blocks : l'université Lyon-II prévoit de s'installer dans le Golfe, avec l'Ecole Louis-Lumière. EM Lyon devrait y ouvrir un campus. HEC serait en pourparlers avancés avec le Qatar pour dispenser des formations pour dirigeants. L'école de Saint-Cyr-Coëtquidan devrait aussi prendre pied au Qatar pour former, à compter de 2011, des cadres civils et militaires de haut niveau.
JEAN-CLAUDE LEWANDOWSKI,
Les Echos
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