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Jijel en 2009 : Le cauchemar de la disparition forcée resurgit

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    Jijel en 2009 : Le cauchemar de la disparition forcée resurgit
    Algeria-Watch et l’Association Mich’al des Enfants de Disparus de Jijel, 20 décembre 2009

    La wilaya de Jijel compte des centaines de disparus, victimes des forces de sécurité lors de la « sale guerre » des années 1990, dont beaucoup ne sont toujours pas connus. Jour après jour, ils sont identifiés grâce au courage de défenseurs de droits de l’homme, qui ne ménagent pas leurs efforts pour sortir de l’anonymat ces victimes et leurs familles. Alors que la pratique de la disparition forcée semblait révolue, nous apprenons l’arrestation arbitraire et la détention au secret de deux personnes soupçonnées de soutien au terrorisme.

    MM. Noureddine Bouilouta, âgé de 28 ans, commerçant, et Larbi Ansal, âgé de 31 ans, cordonnier, habitant tous les deux la cité Laaricha dans la commune de Emir Abdelkader (wilaya de Jijel), se trouvent depuis lundi 9 novembre 2009 à la prison de Jijel après avoir été accusés d’« appartenance à un réseau de soutien aux groupes terroristes ». Tous deux avaient disparu pendant deux semaines après leur arrestation par des agents du DRS (Département du renseignement et de la sécurité).

    Larbi Ansal a été surpris dimanche 25 octobre 2009 vers 8 heures du matin à quelques mètres de son domicile, alors qu’il se trouvait sur sa moto et se rendait à son travail. Deux véhicules banalisés de marque Peugeot Partner et Chevrolet, immatriculés tous deux à Constantine (25), l’ont contraint de s’arrêter et cinq agents en civil se sont présentés comme « Amn : sécurité ». Immédiatement, il a été embarqué avec sa moto dans le véhicule et conduit vers un endroit inconnu. Pendant quatorze jours, il n’a plus donné signe de vie.

    Le lendemain, lundi 26 octobre 2009, tandis que Noureddine Bouilouta était dans son magasin se trouvant à quelques dizaines de mètres de chez lui, il a vu stationner devant lui les deux mêmes véhicules et descendre quatre agents qui se sont présentés à lui comme étant de la « sécurité : Amn », en montrant leurs cartes professionnelles. Ils lui ont demandé de les accompagner « pour affaire le concernant ». Lui aussi n’a donné aucun signe de vie pendant deux semaines.

    Leurs parents, apprenant les arrestations, se sont présentés successivement à la brigade de gendarmerie nationale de Emir Abdelkader puis au siège du secteur militaire opérationnel de Jijel se trouvant en face de l’école paramédicale, lieu tristement célèbre où durant les années 1990 des dizaines de personnes ont été détenues au secret avant de disparaître. Les agents qui les ont reçus, comme par le passé, ont nié totalement leur responsabilité dans ces arrestations.

    Les deux victimes ont en fait été immédiatement transférées à la fameuse villa avoisinant le siège du secteur militaire opérationnel de Jijel et hébergeant l’antenne locale du DRS.

    Les deux hommes y ont été détenus quatorze jours sans aucun contact avec le monde extérieur, subissant des tortures sauvages. Ils étaient accusés d’« appartenance à un réseau de soutien aux groupes terroristes » probablement sur la base d’informations recueillies auprès d’un repenti.

    Au cinquième jour de leur détention à Jijel, ils ont été transférés au CTRI (Centre territorial des renseignements et des investigations) de Constantine, antenne du DRS où les pratiques de tortures ont continué. Larbi Ansal se plaint à ce jour de douleurs au thorax suite à la fracture d’une côte.

    À la fin de leur garde à vue au secret, ils ont été contraints sous la menace de signer un procès-verbal dont ils n’ont même pas pu lire le contenu. Puis ils ont été transférés à Jijel et présentés le 9 novembre 2009 au procureur de la république près du tribunal de Taher, qui les a placés sous mandat de dépôt. Ils ont également été auditionnés par le juge d’instruction auprès du même tribunal, qui les a inculpés pour une affaire « pénale ». Il est à craindre qu’ils ne soient jugés lors d’un procès inéquitable se basant sur des « aveux » soutirés sous la torture.

    Ces pratiques rappellent étrangement celle des « années de sang », lorsque des agents du DRS en civil et dans des véhicules banalisés embarquaient des centaines de personnes qui disparaissaient dans leurs centres de détention. Contrairement à ce que prétendent les autorités algériennes et le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’homme (CNCPPDH), Me Farouk Ksentini, les centres de détention au secret du DRS continuent d’exister, la torture y est courante et l’autorité civile n’a aucun contrôle sur ces pratiques.

    Les organisations Mich’al et Algeria-Watch demandent aux autorités algériennes d’enquêter sur ces deux détention au secret et les tortures subies par MM. Larbi Ansal et Nourreddine Bouilouta, d’inculper les responsables de ces crimes et de les juger, comme le préconise la loi algérienne.

    Nous rappelons aussi que la ratification par l’Algérie du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention contre la torture confère à ces traités force de loi interne à laquelle peut se référer toute victime d’abus et son avocat.
    « Mais quand on parle au peuple dans sa langue, il ouvre grand les oreilles. On parle de l'arabe, on parle du français, mais on oublie l'essentiel, ce qu'on appelle le berbère..."
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