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L'épouse de Mehdi Karoubi inquiète pour sa vie en Iran

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  • L'épouse de Mehdi Karoubi inquiète pour sa vie en Iran

    A plusieurs reprises, ces derniers mois, Mehdi Karoubi, ce religieux de 72 ans, ancien président du Parlement et candidat réformateur malheureux à l'élection présidentielle iranienne contestée du 12 juin, où il est arrivé troisième derrière Mahmoud Ahmadinejad et Mir Hossein Moussavi, l'actuel chef de file de l'opposition, a été pris à partie et menacé en Iran. Y compris physiquement. Son journal, Ettemad-e-melli, a été fermé, ses conseillers arrêtés.

    Lors des grandes manifestations qui se sont tenues en marge des fêtes religieuses de l'Achoura, le 27 décembre 2009, au cours desquelles la police a tiré sur la foule (un bilan officiel parle de huit morts, dont le neveu de M. Moussavi), Mehdi Karoubi a été une des cibles privilégiées des attaques des fondamentalistes qui soutiennent M. Ahmadinejad. Plusieurs grands dignitaires religieux ont réclamé son "jugement" et "une punition exemplaire".

    Le lendemain, alors qu'il quittait une cérémonie de deuil dans une mosquée de l'est de Téhéran, un petit groupe de nervis fondamentalistes l'a attaqué. Il était en voiture, le pare-brise a volé en éclats. La foule a dû disperser les assaillants. M. Karoubi, qui, le premier, a eu le courage de dénoncer les tortures et les viols en prison des manifestants, est devenu l'un des chefs de file les plus écoutés du mouvement "vert" de contestation. Il poursuit sa lutte, mais qu'en est-il de sa sécurité ?

    Fatemeh, son épouse, qui dirigeait le magazine féminin Irandokht, fermé, lui aussi, manu militari il y a quelques jours, jointe à Téhéran, a répondu à nos questions. Pense-t-elle que le pouvoir ira jusqu'au bain de sang, jusqu'au bout de cette répression qui a déjà fait des dizaines de morts ?


    "La politique sans compromis n'a pas de sens, estime-t-elle, mais ceux qui détiennent le pouvoir en Iran semblent avoir choisi la voie de la répression. Or, jamais dans notre histoire les méthodes répressives n'ont eu de succès contre le peuple courageux de l'Iran. Je crois qu'elles n'en auront pas davantage cette fois-ci." Et Fatemeh Karoubi, qui dit espérer que les responsables de son pays "changeront bientôt leur vision et leurs méthodes vis-à-vis des revendications du peuple", n'en est pas moins inquiète pour la sécurité de son mari, la sienne et celle de ses enfants.

    "Actuellement, le pouvoir ne nous assure aucune assistance ou protection notable, précise Fatemeh Karoubi, une ancienne infirmière, qui, par respect, désigne souvent son mari comme "M. Karoubi". En fait, durant ces deux dernières semaines, même l'équipe chargée de la protection de M. Karoubi a manqué à ses devoirs, en raison des ordres mêmes qui lui ont été donnés."

    "Alors que la situation a beaucoup empiré, le niveau de protection de M. Karoubi et celui de la résidence de notre famille s'est réduit à un niveau très bas, insuffisant. Nous avons dû, nous-mêmes, prendre des mesures pour assurer notre protection...", raconte-t-elle.

    Cette femme courageuse, elle aussi - tenue à une certaine discrétion -, entend-elle par là que sa famille a été l'objet de menaces accrues ?

    "Oui, il y a eu, à plusieurs occasions, des agressions et des menaces de la part d'agents qui sont habillés en civil, mais munis d'une arme. Ces mêmes agents sont d'ailleurs soutenus et protégés par les forces de sécurité. La voiture de M. Karoubi a été sabotée."

    Et elle ajoute : "Ce qui m'a inquiétée et m'a fait réagir, c'était la menace manifeste, lancée contre nous par le président de la commission de la sûreté nationale du Parlement, et celle de certaines figures extrémistes dans les médias nationaux. Le fait que les autorités du pays lancent un appel public pour que "le peuple, lui-même, agisse directement et de sa propre initiative, contre les dirigeants du mouvement vert"."

    Qu'est-ce que cela signifie
    ?

    "Que le pouvoir donne son aval à des mercenaires qui se doivent, au nom du "peuple", d'accomplir leurs devoirs en nous attaquant."

    Estime-t-elle que sa vie et celle de son mari sont en danger ?

    "Oui, compte tenu de l'absence de protection adaptée, je suis inquiète pour moi, pour mon époux, et même pour mes enfants. Car les figures extrémistes qui ne pensent qu'à la répression croient en cette idée fausse, selon laquelle, avec la suppression physique de M. Karoubi et de M. Moussavi, ils peuvent jeter les revendications du peuple aux oubliettes."

    Et elle ajoute ces mots très forts :

    "Moi, je déclare catégoriquement : si quelque chose de grave arrive à M. Karoubi, c'est le gouvernement qui en sera responsable. Le gouvernement ne doit ni ne peut se décharger de ce crime éventuel, en l'imputant aux étrangers ou à d'autres groupes."

    Sans aller jusqu'à cette extrémité, que se passerait-il, à son avis, en cas d'arrestation des deux figures de proue de la contestation, son époux et Mir Hossein Moussavi ?

    "Le mouvement "vert" du peuple d'Iran a des revendications conformes à la Constitution de la République islamique de l'Iran, tient-elle à préciser. M. Karoubi, dans ses déclarations, a réclamé à plusieurs reprises l'application de tous les articles de la Constitution iranienne, et M. Moussavi en a fait autant dans son communiqué n° 17, réclamant que, conformément à la Constitution, une partie des revendications soient prises en compte."

    "Quiconque voudrait trouver une solution au problème actuel, doit admettre, dit-elle encore, que la loi est souveraine et qu'elle s'applique de la même façon pour tous. Il faut en finir avec les comportements illégaux. Sinon, prévient-elle, la crise actuelle ne s'en approfondira que davantage, chaque jour. L'arrestation de MM. Karoubi et Moussavi, non seulement serait injuste, mais jetterait de l'huile sur le feu, provoquant la colère de la société."

    Que deviendrait le mouvement "vert" dans ce cas ?

    "Dans une telle hypothèse, nous devrons tous faire un effort pour que le peuple continue, comme avant, à manifester pacifiquement , et qu'il n'ait pas un lourd prix à payer pour cela."

    Quant à l'attitude à l'étranger des militants des droits de l'homme et des défenseurs de la démocratie, vis-à-vis de la crise iranienne, Fatemeh Karoubi préfère ne pas se lancer dans des commentaires politiques : "Moi, répond-elle avec humilité, je ne suis pas en mesure de déterminer quel doit être le devoir des autres... Je préfère me référer à ce que mon époux a déclaré à plusieurs reprises : "J'ai accompli mon devoir religieux, légal et national. Je n'attends rien de personne"."

    5 personnes jugées pour les affrontements de l'Achoura

    Le tribunal révolutionnaire de Téhéran va juger cinq personnes pour leur participation aux manifestations de l'opposition, le 27 décembre, durant lesquelles au moins huit manifestants ont été tués et plusieurs centaines interpellés, a rapporté, jeudi 7 décembre, l'agence officielle Isna.

    Le procureur général de Téhéran, Abbas Jafari Dolatabadi, a déclaré qu'en incendiant des biens publics, certains manifestants étaient considérés comme moharebs - "ennemis de Dieu". Etre mohareb est passible de la peine de mort. La police a annoncé avoir arrêté 500 manifestants à Téhéran le 27 décembre, 300 sont encore détenus.

    Par le Monde
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