De la dentelle en Algérie
Les femmes musulmanes, qu'on imagine souvent cachées sous leur hijab ou contraintes au silence en public, peuvent très bien être coquettes.
Portrait d'une Française d'origine algérienne devenue styliste de sous-vêtements, qui a organisé un défilé l'automne dernier à Alger.
L'hôtel Mercure d'Alger se prépare à accueillir un événement.
Ce soir, pour la première fois dans l'histoire du pays, des mannequins, français et algériens, défilent en sous-vêtements. Et c'est la collection de lingerie d'Amaria Sedrini, Française d'origine algérienne, qui est présentée pour l'occasion.
À l'origine du défilé, le tout jeune magazine féminin algérien Dzeriet, sur le marché depuis seulement un an mais déjà le plus vendu. Il est dirigé par un couple mixte franco-algérien. «Nous avions envie de décoincer un peu les choses», explique simplement la rédactrice en chef, Vanessa Soltani.
Mais on ne bouleverse pas les traditions aussi facilement dans un pays où les podiums de haute couture font la part belle aux caftans et aux robes de mariée. Quelques semaines avant le défilé, un journal extrémiste a saisi le ministère des Affaires religieuses pour faire annuler l'événement. Les journalistes accusaient Amaria Sedrini de pornographie. Ils ont pris contact avec sa famille en Algérie pour obtenir les coordonnées de la créatrice en France.
Les organisateurs ont pris ces pressions au sérieux. Ils ont trié sur le volet les 300 spectateurs du défilé. Et surtout sélectionné les modèles présentés.
«On ne peut pas encore montrer des filles en string ou en porte-jarretelles ici», explique Vanessa Soltani.
S'adapter
Amaria Sedrini a dû renoncer aux boxers et aux strings. Les modèles devaient obligatoirement arriver à mi-cuisse. Alors la créatrice a joué la suggestion. Présenter beaucoup de déshabillés, couverts mais vaporeux. Et des bustiers, follement féminins, parfois aussi décolletés que les bas étaient sages.
Les organisateurs ont eu peur de choquer gratuitement. Peur d'en faire trop et de déplaire aux autorités aussi. Les photos du défilé seront publiées dans Dzeriet le mois suivant.
«On ne peut pas faire n'importe quoi. Si on montre ou publie des choses trop osées, l'État peut nous obliger à fermer le magazine du jour au lendemain», confie Vanessa Soltani.
Mais, c'est promis, il y aura une deuxième présentation. Plus grande, avec beaucoup plus d'invités. Amaria Sedrini rêve déjà d'un défilé en plein air à Alger. Avec des hommes en boxer rose... Qui sait?
Gaëlle Rolin
La Presse
Collaboration spéciale
Alger
Lire aussi :
Amaria, son rire et les faiseurs de morale
La mode sous le tchador
Les femmes musulmanes, qu'on imagine souvent cachées sous leur hijab ou contraintes au silence en public, peuvent très bien être coquettes.
Portrait d'une Française d'origine algérienne devenue styliste de sous-vêtements, qui a organisé un défilé l'automne dernier à Alger.
L'hôtel Mercure d'Alger se prépare à accueillir un événement.
Ce soir, pour la première fois dans l'histoire du pays, des mannequins, français et algériens, défilent en sous-vêtements. Et c'est la collection de lingerie d'Amaria Sedrini, Française d'origine algérienne, qui est présentée pour l'occasion.
À l'origine du défilé, le tout jeune magazine féminin algérien Dzeriet, sur le marché depuis seulement un an mais déjà le plus vendu. Il est dirigé par un couple mixte franco-algérien. «Nous avions envie de décoincer un peu les choses», explique simplement la rédactrice en chef, Vanessa Soltani.
Mais on ne bouleverse pas les traditions aussi facilement dans un pays où les podiums de haute couture font la part belle aux caftans et aux robes de mariée. Quelques semaines avant le défilé, un journal extrémiste a saisi le ministère des Affaires religieuses pour faire annuler l'événement. Les journalistes accusaient Amaria Sedrini de pornographie. Ils ont pris contact avec sa famille en Algérie pour obtenir les coordonnées de la créatrice en France.
Les organisateurs ont pris ces pressions au sérieux. Ils ont trié sur le volet les 300 spectateurs du défilé. Et surtout sélectionné les modèles présentés.
«On ne peut pas encore montrer des filles en string ou en porte-jarretelles ici», explique Vanessa Soltani.
S'adapter
Amaria Sedrini a dû renoncer aux boxers et aux strings. Les modèles devaient obligatoirement arriver à mi-cuisse. Alors la créatrice a joué la suggestion. Présenter beaucoup de déshabillés, couverts mais vaporeux. Et des bustiers, follement féminins, parfois aussi décolletés que les bas étaient sages.
Les organisateurs ont eu peur de choquer gratuitement. Peur d'en faire trop et de déplaire aux autorités aussi. Les photos du défilé seront publiées dans Dzeriet le mois suivant.
«On ne peut pas faire n'importe quoi. Si on montre ou publie des choses trop osées, l'État peut nous obliger à fermer le magazine du jour au lendemain», confie Vanessa Soltani.
Mais, c'est promis, il y aura une deuxième présentation. Plus grande, avec beaucoup plus d'invités. Amaria Sedrini rêve déjà d'un défilé en plein air à Alger. Avec des hommes en boxer rose... Qui sait?
Gaëlle Rolin
La Presse
Collaboration spéciale
Alger
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