samedi 16 janvier 2010 (11h32)
La malédiction divine n’existe pas. La seule malédiction est celle de l’acharnement de l’homme blanc qui a commencé il y a cinq siècles de cela au nom de la Règle des 3 C : «Christianisation, Commerce, Colonisation.»
Chems Eddine Chitour
Mardi dernier un séisme d’une rare violence dévaste l’île de Haïti. Les images de désolation nous montrent des citoyens désemparés, un chaos total et les images en boucle nous saturent de communiqués de pays qui font assaut de «compassion» en rivalisant dans les tonnages d’aide promise à ce pays qui manque de tout. Les Etats-Unis sont le premier pays à réagir en «force» en annonçant de l’aide et l’envoi de 1500 marines. Un autre pays la France en fait autant et déclare envoyer des vivres, des médicaments et un navire de guerre pour secourir les Haïtiens...
Un peu d’histoire nous fera comprendre comment ce pays n’a jamais pu décoller. Officiellement, la République d’Haïti, est un pays des Grandes Antilles occupant le tiers occidental de l’île d’Hispaniola (28.000 km2 environ). Sa capitale est Port-au-Prince. Haïti devint en 1804 la première République indépendante de population majoritairement noire après la Révolution haïtienne (1791-1803). Le 1er janvier 1804, en déclarant l’indépendance du pays, Dessalines lui redonne le nom taïno d’origine, Haïti-Bohio-Quisqueya, en honneur à ce peuple amérindien. Les peuples de culture Arawak, Caraïbes et Taïnos occupaient l’île avant l’arrivée des Espagnols, le 5 décembre 1492. Christophe Colomb la nomma Hispaniola. Les Espagnols exploitèrent l’île pour son or. Les Amérindiens refusant de travailler dans les mines furent massacrés et réduits en esclavage ; les Espagnols furent alors amenés à faire venir d’Afrique des esclaves noirs déportés. Au XVIIe siècle, sous l’autorité du cardinal de Richelieu, l’installation française s’institutionnalisa. L’île de la Tortue, au nord-ouest d’Hispaniola, devient le siège de la flibuste. Par la suite, Colbert, Ministre de Louis XIV, encouragea la création de plantations de l’indigo et de la canne à sucre. Enfin, il réglementa l’esclavage en préparant le Code noir.
Un pays très pauvre
Des dizaines de milliers d’Africains avaient été amenés comme esclaves pour faire fonctionner ces industries. Leur sort était juridiquement encadré par le Code noir, mais, dans les faits, ils subissaient des traitements souvent pires que ceux dudit code. Leur nombre (400.000) était dix fois plus élevé que celui des blancs. Le plus important fut la révolte des esclaves qui aboutit en 1793 à l’abolition de l’esclavage. Toussaint Louverture, un nationaliste, promulgue une Constitution autonomiste. La réaction française fut brutale. Napoléon Bonaparte, sous l’influence des Créoles et des négociants, envoya une expédition de 30.000 hommes qui avait pour mission de démettre Louverture. Mais, après quelques victoires, l’arrestation et la déportation de Toussaint Louverture, les troupes françaises commandées par Rochambeau finirent par être battues à la bataille de Vertières par Jean-Jacques Dessalines. Haïti était devenue le premier pays au monde issu de l’abolition de l’esclavage. Il est cependant à noter que la France a obtenu des millions de francs-or en 1825 sous peine de ´´ré-envahissement´´ du territoire Aïcient. Juste retour des choses, au printemps 2003, le président Aristide avait réclamé à la France le remboursement des millions de francs-or versés à la France pendant des décennies en échange de la reconnaissance de l’indépendance. Cette somme réactualisée, a été estimée par le gouvernement haïtien à 21 milliards de dollars.
Au début du XXe siècle, le pays était en état d’insurrection quasi permanente. Les États-Unis occupèrent l’île de 1915 à 1934. Par la suite, de 1957 à 1986, les Duvalier régnèrent en dictateurs. S’appuyant sur les escadrons de la mort dits «Tonton Macoute». Par la sute, l’ancien prêtre Jean-Bertrand Aristide remporta les élections de décembre 1990 et fut réélu en 2000. Après les pressions exercées par la France et les États-Unis, Aristide fut emmené en exil par des militaires des États-Unis, le 29 février 2004, En février 2006, René Préval, ancien président de la République d’Haïti entre 1995 et 2000, fut élu.
Haïti compte présentement 8,5 millions d’habitants pour une surface de 27.750 km2. L’espérance de vie est de 51,5 années, Le taux d’alphabétisation est de 50,8% Ses principales ressources sont la canne à sucre, le bois. Son PNB-PPA par habitant (à parité de pouvoir d’achat) (en dollars) Indicateur du développement humain, 0,521 (148e sur 179). Sa consommation d’énergie (en kilogramme-pétrole par habitant) 265. 32 fois moins que son voisin américain. Voilà donc un pays qui a proclamé son indépendance il y a plus de deux siècles et qui est toujours à la traine. La saison des pluies s’étend d’avril à juin puis d’octobre à novembre. La saison des ouragans s’étend du mois de juin jusqu’à la fin du mois de novembre.
Le pays subit régulièrement des précipitations importantes et des ouragans. L’ouragan Jeanne qui a ravagé Haïti en septembre 2004 s’est soldé par un bilan provisoire de plus de 1160 morts et 1250 disparus. Les effets de la tempête aggravent les conditions de vie déjà difficiles de ce pays : 170.000 personnes manquent de nourriture et d’eau, et les bananiers ont été en grande partie détruits par le cyclone, alors que le pays avait déjà souffert des pluies diluviennes en mai 2004 avec 1220 personnes décédées. Le 12 janvier 2010, un séisme dévastateur de magnitude 7 sur l’échelle de Richter a ravagé Haïti, le pays le plus pauvre du continent américain. Il aurait fait des dizaines de milliers de victimes et un grand nombre de personnes sont portées disparues. La capitale, Port-au-Prince, offre une image de désolation. Des millions d’Haïtiens qui vivaient déjà au-dessous du seuil de pauvreté ont tout perdu.
Olivier Talles du journal La Croix nous rapporte l’état de chaos à Haïti : «Sans eau ni nourriture, les habitants de Port-au-Prince attendent fébrilement les secours qui accèdent difficilement à la zone sinistrée. Une course contre la montre s’est engagée pour soigner les blessés, acheminer les médicaments, la nourriture, l’eau, au milieu d’une capitale «où la population est totalement livrée à elle-même», résume Florence Denis, de l’ONG Action contre la faim. (...) Lors des catastrophes de grande ampleur qui bénéficient d’une aide massive de la communauté internationale, la difficulté reste d’établir une hiérarchie des priorités entre les soins aux blessés, les recherches des survivants dans les décombres, les distributions de vivre, d’eau, de couvertures, de tentes...La faiblesse des autorités locales conjuguée avec la pauvreté ambiante fait de Port-au-Prince une des capitales les plus dangereuses au monde en temps normal, même si la présence de l’ONU a établi un semblant de calme. Agressions et rackets sont monnaies courantes de la part des gangs qui contrôlent les bidonvilles. (...) Pour limiter les risques d’émeutes de la faim, les humanitaires insistent sur la nécessité d’agir le plus vite possible et de faire garder les entrepôts de matériel et de vivre par les Casques bleus».(1)
La malédiction divine n’existe pas. La seule malédiction est celle de l’acharnement de l’homme blanc qui a commencé il y a cinq siècles de cela au nom de la Règle des 3 C : «Christianisation, Commerce, Colonisation.»
Chems Eddine Chitour
Mardi dernier un séisme d’une rare violence dévaste l’île de Haïti. Les images de désolation nous montrent des citoyens désemparés, un chaos total et les images en boucle nous saturent de communiqués de pays qui font assaut de «compassion» en rivalisant dans les tonnages d’aide promise à ce pays qui manque de tout. Les Etats-Unis sont le premier pays à réagir en «force» en annonçant de l’aide et l’envoi de 1500 marines. Un autre pays la France en fait autant et déclare envoyer des vivres, des médicaments et un navire de guerre pour secourir les Haïtiens...
Un peu d’histoire nous fera comprendre comment ce pays n’a jamais pu décoller. Officiellement, la République d’Haïti, est un pays des Grandes Antilles occupant le tiers occidental de l’île d’Hispaniola (28.000 km2 environ). Sa capitale est Port-au-Prince. Haïti devint en 1804 la première République indépendante de population majoritairement noire après la Révolution haïtienne (1791-1803). Le 1er janvier 1804, en déclarant l’indépendance du pays, Dessalines lui redonne le nom taïno d’origine, Haïti-Bohio-Quisqueya, en honneur à ce peuple amérindien. Les peuples de culture Arawak, Caraïbes et Taïnos occupaient l’île avant l’arrivée des Espagnols, le 5 décembre 1492. Christophe Colomb la nomma Hispaniola. Les Espagnols exploitèrent l’île pour son or. Les Amérindiens refusant de travailler dans les mines furent massacrés et réduits en esclavage ; les Espagnols furent alors amenés à faire venir d’Afrique des esclaves noirs déportés. Au XVIIe siècle, sous l’autorité du cardinal de Richelieu, l’installation française s’institutionnalisa. L’île de la Tortue, au nord-ouest d’Hispaniola, devient le siège de la flibuste. Par la suite, Colbert, Ministre de Louis XIV, encouragea la création de plantations de l’indigo et de la canne à sucre. Enfin, il réglementa l’esclavage en préparant le Code noir.
Un pays très pauvre
Des dizaines de milliers d’Africains avaient été amenés comme esclaves pour faire fonctionner ces industries. Leur sort était juridiquement encadré par le Code noir, mais, dans les faits, ils subissaient des traitements souvent pires que ceux dudit code. Leur nombre (400.000) était dix fois plus élevé que celui des blancs. Le plus important fut la révolte des esclaves qui aboutit en 1793 à l’abolition de l’esclavage. Toussaint Louverture, un nationaliste, promulgue une Constitution autonomiste. La réaction française fut brutale. Napoléon Bonaparte, sous l’influence des Créoles et des négociants, envoya une expédition de 30.000 hommes qui avait pour mission de démettre Louverture. Mais, après quelques victoires, l’arrestation et la déportation de Toussaint Louverture, les troupes françaises commandées par Rochambeau finirent par être battues à la bataille de Vertières par Jean-Jacques Dessalines. Haïti était devenue le premier pays au monde issu de l’abolition de l’esclavage. Il est cependant à noter que la France a obtenu des millions de francs-or en 1825 sous peine de ´´ré-envahissement´´ du territoire Aïcient. Juste retour des choses, au printemps 2003, le président Aristide avait réclamé à la France le remboursement des millions de francs-or versés à la France pendant des décennies en échange de la reconnaissance de l’indépendance. Cette somme réactualisée, a été estimée par le gouvernement haïtien à 21 milliards de dollars.
Au début du XXe siècle, le pays était en état d’insurrection quasi permanente. Les États-Unis occupèrent l’île de 1915 à 1934. Par la suite, de 1957 à 1986, les Duvalier régnèrent en dictateurs. S’appuyant sur les escadrons de la mort dits «Tonton Macoute». Par la sute, l’ancien prêtre Jean-Bertrand Aristide remporta les élections de décembre 1990 et fut réélu en 2000. Après les pressions exercées par la France et les États-Unis, Aristide fut emmené en exil par des militaires des États-Unis, le 29 février 2004, En février 2006, René Préval, ancien président de la République d’Haïti entre 1995 et 2000, fut élu.
Haïti compte présentement 8,5 millions d’habitants pour une surface de 27.750 km2. L’espérance de vie est de 51,5 années, Le taux d’alphabétisation est de 50,8% Ses principales ressources sont la canne à sucre, le bois. Son PNB-PPA par habitant (à parité de pouvoir d’achat) (en dollars) Indicateur du développement humain, 0,521 (148e sur 179). Sa consommation d’énergie (en kilogramme-pétrole par habitant) 265. 32 fois moins que son voisin américain. Voilà donc un pays qui a proclamé son indépendance il y a plus de deux siècles et qui est toujours à la traine. La saison des pluies s’étend d’avril à juin puis d’octobre à novembre. La saison des ouragans s’étend du mois de juin jusqu’à la fin du mois de novembre.
Le pays subit régulièrement des précipitations importantes et des ouragans. L’ouragan Jeanne qui a ravagé Haïti en septembre 2004 s’est soldé par un bilan provisoire de plus de 1160 morts et 1250 disparus. Les effets de la tempête aggravent les conditions de vie déjà difficiles de ce pays : 170.000 personnes manquent de nourriture et d’eau, et les bananiers ont été en grande partie détruits par le cyclone, alors que le pays avait déjà souffert des pluies diluviennes en mai 2004 avec 1220 personnes décédées. Le 12 janvier 2010, un séisme dévastateur de magnitude 7 sur l’échelle de Richter a ravagé Haïti, le pays le plus pauvre du continent américain. Il aurait fait des dizaines de milliers de victimes et un grand nombre de personnes sont portées disparues. La capitale, Port-au-Prince, offre une image de désolation. Des millions d’Haïtiens qui vivaient déjà au-dessous du seuil de pauvreté ont tout perdu.
Olivier Talles du journal La Croix nous rapporte l’état de chaos à Haïti : «Sans eau ni nourriture, les habitants de Port-au-Prince attendent fébrilement les secours qui accèdent difficilement à la zone sinistrée. Une course contre la montre s’est engagée pour soigner les blessés, acheminer les médicaments, la nourriture, l’eau, au milieu d’une capitale «où la population est totalement livrée à elle-même», résume Florence Denis, de l’ONG Action contre la faim. (...) Lors des catastrophes de grande ampleur qui bénéficient d’une aide massive de la communauté internationale, la difficulté reste d’établir une hiérarchie des priorités entre les soins aux blessés, les recherches des survivants dans les décombres, les distributions de vivre, d’eau, de couvertures, de tentes...La faiblesse des autorités locales conjuguée avec la pauvreté ambiante fait de Port-au-Prince une des capitales les plus dangereuses au monde en temps normal, même si la présence de l’ONU a établi un semblant de calme. Agressions et rackets sont monnaies courantes de la part des gangs qui contrôlent les bidonvilles. (...) Pour limiter les risques d’émeutes de la faim, les humanitaires insistent sur la nécessité d’agir le plus vite possible et de faire garder les entrepôts de matériel et de vivre par les Casques bleus».(1)
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