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La Guerre oubliée du golf.

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  • La Guerre oubliée du golf.

    REPORTAGE - Les combats entre l'armée yéménite et la rébellion chiite ont redoublé depuis l'été dernier. Après la mort de l'un de ses gardes-frontière, l'Arabie saoudite a dû s'en mêler.

    «Que notre armée chasse tous les rebelles au Yémen pour que nous puissions rentrer chez nous !» s'exclame Yéhia en étendant du linge entre deux tentes. Une semaine après avoir évacué son village de Jabri, ce paysan saoudien qui vit désormais dans un camp de réfugiés, hors de la zone des combats, se veut pourtant fataliste : «notre sort est entre les mains de Dieu».

    Une nuit, les militaires saoudiens sont venus le prévenir qu'il n'avait que quelques heures pour plier bagages. «Les insurgés nous menaçaient à quelques centaines de mètres de chez nous», se souvient Yéhia. Au petit matin, les habitants de Jabri et cinq mille autres venus de hameaux frontaliers ont été conduits dans des camps installés par les autorités saoudiennes avec l'aide d'associations caritatives islamiques.

    Ces réfugiés sont les dernières victimes d'une guerre oubliée aux confins de l'Arabie saoudite et du Yémen. Une zone de non-droit où se mêlent, dans un cocktail explosif, les trafics en tous genres, une rébellion chiite aux portes de la terre sacrée sunnite d'Arabie, et, pour couronner le tout, al-Qaida en embuscade le long de ces 1 500 kilomètres de frontière montagneuse et incontrôlable.

    De quoi inquiéter la monarchie saoudienne, qui va construire un gigantesque mur électronique le long de sa frontière avec le Yémen. «Riyad est convaincu que l'Iran est derrière la révolte de ses voisins chiites. Pour les Saoudiens, il est inacceptable d'avoir un mini-Hezbollah à sa frontière», explique un homme d'affaires occidental.


    Un paradis pour la contrebande

    Les Houthis, une minorité zaïdite d'inspiration chiite, s'estiment opprimés par le président yéménite Ali Abdallah Saleh. Ils se sont révoltés en 2004. Depuis, cette guerre a fait des milliers de morts et de réfugiés. En août, l'armée yéménite a lancé une vaste offensive pour liquider les Houthis, qui pénètrent en territoire saoudien pour contourner les forces de Sanaa.

    Le 3 novembre, un garde-frontière saoudien a été abattu par la rébellion. Quatre officiers ont été également enlevés dans les monts du Djebel Doukhan, à cheval entre les deux pays. L'armée saoudienne est alors passée à l'offensive. Pour la première fois en cinq ans de conflit. Hélicoptères Apache, avions de combat Tornado et F-15 bombardent régulièrement les positions houthies en territoire saoudien et au Yémen. Cinq cents commandos de la base de Tabouk ont été dépêchés en renfort.

    «Nous poursuivrons les raids tant que les rebelles n'auront pas reculé à des dizaines de kilomètres» en territoire yéménite, a prévenu le vice-ministre de la Défense, le prince Khaled Ben Sultan. En évacuant le secteur frontalier de ses habitants, l'armée cherche aussi à éviter les prises d'otages par les Houthis. L'accès à cette «zone de sécurité» est théoriquement interdit à la presse étrangère. À l'intérieur, les soldats ont pris position dans les hameaux fantômes. Dans les localités encore habitées comme al-Raha, les tribus, armées, prêtent main-forte aux militaires.

    Ceux-ci multiplient les patrouilles et les barrages volants. Ils fouillent les rares passants qui s'aventurent dans les rues. Mais faute d'appareils de vision nocturne, la chasse aux infiltrés est ardue. Entre vallées et pitons rocheux, la région est un paradis pour la contrebande. D'armes, de drogue et même d'enfants yéménites, expédiés par centaines chaque année chez leurs riches voisins du nord.

    La semaine dernière, un jeune a été arrêté alors qu'il se faisait passer pour un réfugié. Les militaires saoudiens l'ont abattu avant qu'il n'ait eu le temps de sortir son arme. D'autres rebelles se déguisent en femmes pour déjouer les contrôles. Entre résistance armée et contrebande mafieuse, la violence est aveugle. En mai, trois Anglaises, prises en otages vraisemblablement par des trafiquants, ont été égorgées. Depuis, on est sans nouvelles de leurs six compagnons allemands.

    Les insurgés, qui disposent de missiles sol-air, avaient préparé leurs infiltrations. Des caches d'armes et des tranchées ont été découvertes par les troupes saoudiennes. Elles dataient d'il y a deux mois. «Nous recevions des Yéménites qui venaient faire leurs achats chez nous, raconte Yéhia, mais nous ne savions pas qu'ils pouvaient avoir des liens avec les rebelles.»

    Pourchassés par l'armée yéménite, les Houthis se sont regroupés l'été dernier dans le district de Malahidh, sur l'autre versant des montagnes. Cette région est connue pour ses marchés d'armes. Les kalachnikovs et les grenades sont ensuite acheminées en Arabie saoudite à dos de mulet avec la complicité des Qairis, la tribu qui vit de part et d'autre de la frontière. Mais ces derniers temps, l'étau de l'armée yéménite s'est resserré. Les insurgés avaient besoin d'une porte de sortie. «Leur incursion en Arabie devait leur permettre d'accéder à la côte saoudienne, d'où les rebelles devaient recevoir leurs armes», explique un militaire de retour du front. D'autres les accusent de vouloir établir un miniport clandestin au sud de la ville saoudienne de Jizzan, sur la mer Rouge.

  • #2
    la suite

    Une aubaine pour al-Qaida

    «Les Houthis reçoivent leurs armes d'Iran via les ports érythréens situés en face, sur l'autre rive de la mer Rouge, notamment celui d'Assab», affirmait récemment Bashir Eshaq, responsable d'un mouvement d'opposition au régime d'Asmara. Le mois dernier, les autorités yéménites ont annoncé avoir arrêté cinq ressortissants iraniens à bord de bateaux remplis d'armes.

    «Les rebelles veulent créer leur mini-État à la frontière saoudo-yéménite et attirer les Saoudiens dans la guerre civile entre eux et Sanaa, analyse le général en retraite Saleh Ben Faris al-Zaharani, membre du Majlis al-Shoura, le conseil consultatif local. Mais ils commettent des meurtres inacceptables et l'Arabie a décidé de défendre sa frontière.»

    Alors que les Houthis nient être soutenus logistiquement par l'Iran, en Arabie, certains estiment que l'intervention militaire de leur pays pourrait avoir d'autres motifs. «Les insurgés cherchaient à installer des réseaux de contrebande en Arabie plus qu'à vraiment déstabiliser le royaume, assure un expert. Ils avaient simplement besoin de soutiens parmi les tribus.» Ces relais auraient été neutralisés à la faveur du «nettoyage» de la zone frontalière.

    «Il y a certainement des liens entre les trafiquants et les rebelles, affirme Barakat Qoureiha, professeur à l'université de Jizzan. C'est pour cela que les autorités ont décidé d'intervenir militairement». D'autant qu'une autre menace guette : al-Qaida profite du bourbier pour s'infiltrer en territoire saoudien et y lancer des attaques. «Quand je pars au travail le matin, ma femme ferme la porte à clé derrière moi», raconte Barakat Qoureiha.

    Il y a un mois, deux terroristes déguisés en femmes ont été tués à Jizzan avant qu'ils ne commettent un attentat. Venus du Yémen où la branche locale d'al-Qaida et la saoudienne ont fusionné en début d'année, ils portaient des ceintures d'explosifs et des armes automatiques. Leur cible reste inconnue. Mais quelques semaines auparavant, un autre membre d'al-Qaida, venu lui aussi du Yémen, s'était déjà fait exploser devant le prince Mohammed Ben Nayef, manquant de peu le patron de l'antiterrorisme saoudien.

    Cette guerre aux ressorts confus est une aubaine pour la mouvance terroriste. En effet, l'armée saoudienne a dû dégarnir sa présence plus à l'est de la frontière, en face des repaires djihadistes au Yémen. Dans ce contexte, la nouvelle stratégie d'al-Qaida - s'en prendre aux «têtes» du régime saoudien, alliés de l'Occident - ne peut qu'accroître l'inquiétude de Riyad.

    Après dix jours de combat, l'armée saoudienne affirme avoir arrêté des centaines d'infiltrés et regagné le territoire conquis par la rébellion. Une chose est sûre : la troupe ne s'aventurera pas au Yémen. Elle garde un souvenir horrifié des derniers accrochages de 1995 lorsque quinze soldats saoudiens avaient été égorgés la nuit par des guerriers yéménites.

    Mais aujourd'hui, cette «guerre pour la défense du royaume» est populaire. Les convois militaires en partance pour le front sont salués par les badauds. Quant à Khaled Ben Sultan, il n'est pas mécontent de pouvoir ainsi s'affirmer comme possible successeur à la Défense de son père, le prince Sultan, hospitalisé hors du pays depuis un an. Mais le conflit peut aussi s'embourber. «Tant que la guerre ne sera pas terminée au Yémen, elle se poursuivra côté saoudien, redoute un diplomate. Or les Yéménites n'ont pas les moyens de la gagner seuls.». Le Figaro.

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    • #3
      Apparemment ça va être dur de les déloger car ça ressemble un peu au contexte des zones tribales en Afghanistan et Pakistan.

      De toutes façons, l'Iran joue cette carte comme elle le fait au Liban. Il y a pas mal de minorités chiites dans la région (plus encore au Bahrein car là c'est une majorité) et l'Iran s'en sert comme bras armé contre ses ennemis héréditaires les sunnites.

      Le Yemen est un pays trop fragile. Il est pauvre, géré de manière féodale avec des tribus rebelles au pouvoir central. Il garde les sequelles de la partition entre le nord et sud. C'est un pouvoir quasi failli qui est à quelques kilomètres de la Somalie autre pays failli.

      Pour en revenir à cette "guerre" dans les montagnes, c'est là qu'il y aurait des forces spéciales marocaines et jordaniennes d'après ce qu'on avait lu il y a quelques semaines.

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