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Les enfants ,gras et flottants du Titanic

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    Les enfants gras et flottants du Titanic

    par Kamel Daoud
    C'est le paradoxe du Titanic: quand il coule, tout le monde fait naufrage et sans considérations de classes, de fortunes ou de grades. En Algérie, la pathologie de l'instinct filial est donc telle qu'on a fabriqué une religion de la vénération des ancêtres, sans remarquer qu'on ne laisse pour nos enfants que des stèles et des sachets noirs accrochés aux arbres et aux poteaux. C'est-à-dire que l'on peut être riche, vraiment, mais on est toujours enfermé dans ce pays même quand on le quitte. C'est-à-dire que l'argent ne peut pas tout acheter et surtout pas un pays habitable.

    D'où cette mine triste ou violente des enfants des très hauts cadres et gradés de la république et que la plèbe accuse de manger la terre et de sucer le sang de la nation par le cou des appels d'offres. Leurs Pères sont puissants, eux ils s'en héritent, ils peuvent voyager là où ils veulent avec l'argent d'un quelconque ministère, créer des boites de consulting rien que pour acheter des bonbons ou détourner des fonds, ils seront toujours les enfants d'un pays que leurs Pères et eux-mêmes ont réduit à un tuyau orné d'un drapeau et filmé par une télé publique pour cacher le reste. Et pour être plus clair, il faut donc dire les choses directement: de l'oeil à la cervelle. C'est-à-dire que même ceux qui volent ce pays, n'arrivent pas à jouir de ce qu'ils volent puisqu'ils se retrouvent sans pays (volé) à la fin pour jouir de leur butin. Voici, en mieux, l'idée du paradoxe du Titanic exprimée par un lecteur dans un e-mail ravissant: «Cher objet de mes dépenses, j' me fends chaque matin de 10 DA pour lire votre chronique. Avec, bien sûr, le petit suspens (suspendu): est-ce qu'aujourd'hui elle sera jouissive? Alors je me permets de vous importuner pour vous confier mon fantasme. Au point où on en est... je balaie allègrement mes scrupules. je me dis qu'on devrait publier une lettre ouverte, non pas au président mais aux enfants de la nomenklatura pour leur dire à quel point il sont «aussi les victimes» de la gestion de m... de leurs papas de m... Un pays où ils ne peuvent pas se promener librement à la campagne, sortir la nuit en sécurité, ne pas pouvoir faire des bivouacs dans le plus beau désert du monde, vivre avec une épée de Damoclès sur la tête parce que l'explosion de la «plèbe» est imminente, qu'ils ne peuvent pas aller voir un film dans un vrai cinéma, ils ne peuvent pas inviter leur copine scandinave pour des vacances, etc... etc... parce que leurs papas sont des incapables et qu'ils ne sont aptes qu'à bâtir un enfer».

    C'est vrai et aux trois quarts. Pour le quart restant, beaucoup de ces enfants obèses du pipe-line, la solution est de fuir le pays dix mois sur douze. Une solution peu finale: car si, ici, on peut être le fils de..., en exil, même doré, on n'est que sa propre nationalité et son propre pays juché sur le dos: algérien d'Algérie, avec ou sans carte de crédit. Lorsqu'on vole son pays, il vous vole votre bonheur et vous pousse à partir et à ne jamais arriver. L'autre solution aurait été celle du gagnant-gagnant: voler ce pays mais le construire en même temps. Ainsi tout le monde pourra en jouir selon ses moyens et ses hold-up. C'est ce qu'on appelle le contrat social.


    Le Qotidien d'Oran .
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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