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Sid Ali Mézouane . Fidaî à 15 ans .

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  • Sid Ali Mézouane . Fidaî à 15 ans .

    Sid Ali Mezouane. Fidaï à 15 ans, membre de la résistance palestinienne à 28 ans :



    le dit ténébreux, ombrageux, recroquevillé sur lui-même, peu enclin à se livrer. La réalité est tout autre. En vérité, depuis son enfance, Sid Ali mène son chemin sans faire de concessions, sans céder à la tentation du compromis. C’est un homme courtois, volontiers pointilleux et qui peut être disert si on prête bien attention à son discours. Lui demande-t-on qui il est ? « C’est l’histoire d’un jeune homme qui n’a pratiquement pas vu passer sa jeunesse. » En fait, Sid Ali Mezouane a plusieurs vies. Agent de liaison du fln dans la Zone autonome à 13 ans, arrêté et torturé à 15 ans. Il lui en a fallu pour se refaire un moral en vouant une haine mortelle à ses tortionnaires qu’il n’a cessé de traquer tout au long de sa vie pour avoir « le cœur apaisé », concède-t-il.
    C’est l’histoire d’un gamin engagé dans la Révolution en quête d’un besoin d’exister, d’une envie de reconnaissance et dont les idéaux le mèneront, à 28 ans, sous d’autres cieux pour défendre la cause d’un peuple opprimé, le palestinien en l’occurrence. Il a fait partie d’un réseau de Septembre noir. Il pose un regard très personnel sur son parcours. Il persiste à dire que la France, qui ne veut pas entendre parler de repentance, a fait des dégâts énormes en recourant à ce moyen abject qu’est la torture et la gégène. Quand il en parle, ses colères font rouler dans leurs orbites ses yeux bleus. Ses pensées vont à Aghrib Saïd, digne dans la torture, d’un courage incroyable mais qui mourra perturbé psychologiquement ou encore à Hamraras Nouar, à peine plus âgé que lui et qui décédera sous l’effet de la torture. les yeux embués, il s’incline à la mémoire de tous les chouhada. Il nous raconte ses pages d’errance hallucinée, de la torture qui l’a marqué à vie alors qu’il était à peine adolescent.
    A 15 ans, Sid Ali était agent de liaison. Il avait fait l’expérience de la violence. Son tempérament de guerrier bouscule toutes les appréhensions. Il n’a pas peur de mettre son corps en danger et il a été tout le temps au contact de la mort qu’il haïssait « parce qu’il aimait la vie passionnément. »

    Une enfance tourmentée

    Son père, Mohamed Seghir, navigateur, dont les gros bras sont tatoués, et toujours élégant dans son bleu Shangaï, bien que souvent absent, lui avait légué les vertus de la redjla, du courage et de la rectitude. Sid Ali est né le 3 mars 1943 à Bab Jdid, impasse Tombouctou. Il a fait les écoles Rovigo et Sarouy jusqu’à la classe de cinquième. Une enfance tourmentée, comme vécue par tous les yaouled. « A l’école, pendant la récréation, on était 3 ou 4 jeunes à épier les enseignants français qui fumaient, dans l’attente des mégots qu’ils jetaient sans les écraser. Après l’école, on allait suivre l’enseignement du Coran chez Cheikh Tahar, celui-là même qui assistait les condamnés à mort à Serkadji. » Dans cet univers, Sid Ali fit ses classes en ayant pour modèle un grand homme, toujours bien habillé qui le faisait traverser la rue.
    « C’était Omar Soustara dont l’ami Mostefa Seghir, un voisin, était déjà dans ‘‘l’organisation’’ aux côtés de Hami Tahar, le chef de groupe. A 13 ans, j’étais utilisé comme agent de liaison. J’exécutais toutes les consignes. J’activais ainsi pendant des mois jusqu’à mon arrestation en 1958. Il pleuvait ce soir-là, on est venu m’arrêter ainsi que ma mère Zineb, ma tante et Kadri Khodja. Ils m’ont emmené à l’intendance à la Basse-Casbah. Ils ont commencé à me frapper. C’était les préliminaires dans le bureau du capitaine Lefebvre. Il y avait un carré. J’étais voûté, le doigt au milieu du carré, tournant sans bouger le doigt. Après, on m’a transféré à la caserne d’Orléans puis à l’école des sourds et muets qui était un centre de tortures, où j’ai subi les pires atrocités. Le capitaine tortionnaire m’avait ausculté, j’avais compris que c’était un médecin. Son nom, Lefebvre. J’ai la conviction que c’est son fils, actuel dirigeant du parti au pouvoir en France, qui a longuement évoqué le cheminement de son père, dans un livre paru récemment. En novembre 1959, j’ai été libéré et mis en résidence surveillée. Je me suis structuré par la suite à la cellule du fln d’El Harrach sous l’autorité de Taïr, dit Brahim El Ferd. »

    La France doit rendre des comptes

    Sid Ali se souvient que même mineur, il a été traité comme les adultes. L’avocat du fln, Me Hassen Benabdallah, auteur du rapport sur les personnes disparues, avait alerté l’onu, en 1958, sur les graves exactions commises par les militaires français qui considéraient le statut de prisonnier politique pour les Algériens comme une simple vue de l’esprit. En 1958, Sid Ali activait dans le groupe composé de Dossas, Khedache Slimane, dit Bob, Belgaïd Mohamed, El Hadj Banjo et Ben Khaled Omar dit Soustara. Après sa libération, fin 1959, il rejoindra Ami Saïd, Tair Brahim, Hocine Youcef, Wilem Ali et Zegaâ Mohamed. « J’ai de la haine et du mépris pour tous ceux qui m’ont torturé, mais aussi de la gratitude pour quelqu’un qui était de l’autre bord, mais qui s’est comporté d’une manière exemplaire en nous défendant. Je veux parler du gendarme Gladen. J’ai fait des recherches pour le retrouver, mais il était dans l’autre monde. »
    Sid Ali exercera à l’indépendance à l’hôpital Mustapha au laboratoire de chimie-biologie. Comme il était benbelliste, il vivra douloureusement le coup d’Etat de 1965. « J’étais moralement à plat. Je croyais profondément au socialisme et je voyais ainsi un de mes rêves s’évaporer. Je quitte l’hôpital et je reste en stand-by. La question palestinienne me taraudait l’esprit. Je ne vivais que pour aller là-bas surtout après la débâcle de 1967. » Aux moments les plus tragiques et les plus difficiles de l’épopée de la Résistance palestinienne, à l’époque des pires massacres en Jordanie et au Liban, quand les tueurs du Mossad assassinaient impunément partout dans le monde les dirigeants de la Résistance palestinienne, le Fath, décidèrent la création d’une organisation clandestine de combat, ultra secrète qui rendrait coup pour coup, Septembre Noir, en référence aux événements tragiques que vécurent les Palestiniens. Ceux-ci avaient conclu qu’ils ne pouvaient compter que sur eux-mêmes.
    Les régimes arabes qui s’étaient frottés à Israël, trois ans plus tôt, avaient essuyé une cuisante défaite. Les Palestiniens, livrés à eux-mêmes, perdaient confiance dans la capacité de ces régimes à résoudre leurs problèmes et se tournèrent vers les organisations, dont Septembre Noir qui s’est fait connaître suite à l’assassinat au Caire en novembre 1971 du Premier ministre jordanien Wasfi Tall, qui représentait la ligne dure du gouvernement jordanien vis-à-vis des Palestiniens. C’est lui qui avait ordonné l’écrasement de la Résistance palestinienne présente en Jordanie.
    Septembre Noir se rendit célèbre après la prise en otages aux Jeux olympiques de Munich en 1972 de 11 athlètes israéliens, qui se termina par l’exécution de ces derniers et la mort de cinq des huit militants palestiniens. En représailles, Israël engage une traque menée par le Mossad à travers le monde et qui visera de nombreux dirigeants, dont l’Algérien Mohamed Boudia, tué dans une voiture piégée à Paris le 28 juin 1973. Septembre Noir, pour l’Europe, c’était Boudia qui en était la cheville ouvrière. « Je voulais partir combattre en Palestine, c’est Boudia qui m’en a dissuadé. » Il faut dire qu’à cette époque, Sid Ali vivait clandestinement à Paris. Comment a-t-il connu Boudia ? Il exerçait à Alger chez un tailleur juif qui ne l’avait pas payé. Il lui a soutiré de l’argent et s’est retrouvé à la maison de rééducation de Birkhadem où Omar Soustara terminait sa peine. A sa sortie, Boudia a été orienté vers le théâtre. Il avait des dons. Ce n’est pas par hasard qu’il sera dès 1963 directeur au Théâtre national, puis administrateur du théâtre de l’Ouest parisien.

    Boudia, un exemple

    « Il était membre fondateur de l’orp. En 1970, on s’est rencontré avec des camarades français qu’on avait mis en contact avec les palestiniens. J’étais à l’université, je me suis inscrit en art dramatique et en sciences politiques à l’université de Vincennes. En 1971, on projetait des opérations avec les sœurs Bradley, Yveline Barge, on était désignés pour aller en Palestine, mais l’opération a été éventée et le groupe démantelé. on nous appelait le commando de pâques. C’était à l’occasion de cette fête qu’on a organisé cette opération découverte, hélas, à la descente d’avion à Tel-Aviv des membres du groupe. Boudia était un gars très intelligent, optimiste à mort. Il était poète défenseur des faibles, des droits de l’homme et un véritable démocrate. Boumediene l’avait invité à rentrer en Algérie. Boudia avait conditionné son retour par la libération de tous les prisonniers politiques. Il a créé les structures du théâtre national, l’école d’art dramatique, créé Alger ce soir et exercé à Révolution Africaine. Il a été à l’origine de l’envoi des premières promotions de comédiens en Allemagne de l’Est pour se perfectionner, sans oublier son riche passé révolutionnaire au sein de la Fédération de France ».
    Fin 1971, Sid Ali rentre à Alger. « J’étais longtemps en contact avec Odile Loizillon, à l’origine de la création de la librairie Palestine à la rue des Ecoles à Paris, et qui était le point d’attache de Boudia. C’est d’ailleurs près de cet endroit qu’il a été assassiné. Au cours d’une mission, j’ai été arrêté par les Italiens en avril 1971 à Rome. Ils m’ont emmené à Regina Colli, la plus vieille prison d’Europe et la plus surpeuplée. J’y suis resté 2 mois et demi. Comme je connaissais le droit des prisonniers politiques, je ne répondais pas aux questions du juge. Sur demande de son ami Boudia, M’hamed Yazid, alors ambassadeur à Rome, est intervenu et j’ai pu être récupéré.
    A mon arrivée à Alger, comme je n’avais pas de papiers, j’ai failli être incarcéré. » Pourquoi cet engagement pour la cause palestinienne ? « Septembre noir, c’était pour faire participer l’opinion publique occidentale qui n’était nullement sensibilisée sur le douloureux problème palestinien, ou déroutée par la propagande sioniste. » Sid Ali ne regrette pas son militantisme même s’il se dit déçu par la tournure des événements. « La cause palestinienne n’est pas défendue comme il se doit. Beaucoup de facteurs concourent à ce que le statu quo persiste. Avec le temps, la situation risque d’empirer avec une dilution des territoires et de la population. Hamas est une nouvelle création qui s’impose par la terreur.
    En 1962, je n’étais pas d’accord que l’on s’entretue. Comment voulez-vous que j’adhère à un mouvement autoritaire fasciste en Palestine qui conteste la légitimité de l’autorité officielle. Hamas ferait mieux de rentrer dans les rangs pour se concentrer sur le seul ennemi possible : le sionisme.




    Par Hamid Tahri

    eL Watan
    " Celui qui passe devant une glace sans se reconnaitre, est capable de se calomnier sans s'en apercevoir "
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