Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Mohammed Reza Heydari: consul d'Iran à Oslo et dissident

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Mohammed Reza Heydari: consul d'Iran à Oslo et dissident

    Mohammed Reza Heydari est le premier diplomate iranien à avoir fait défection depuis l'élection contestée du président Ahmadinejad en juin 2009. Début janvier il a abandonné son poste de consul en Norvège, et lance une campagne "Ambassades vertes", couleur de l'opposition, pour inciter les autres diplomates iraniens à faire de même.

    "J'ai déjà été contacté par vingt-sept collègues qui partagent mes vues, dans des ambassades iraniennes un peu partout en Europe, en Afrique ou en Asie", affirme Mohammed Reza Heydari lorsqu'il reçoit Le Monde dans son appartement de fonction d'Oslo. L'appartement, grand et cossu, juste en face de l'ambassade d'Argentine, toujours décoré d'un sapin de Noël synthétique, est encore payé par l'ambassade d'Iran. Il devra le quitter ces jours prochains, avec son épouse et ses fils âgés de 14 et 17 ans.

    Selon lui, beaucoup d'employés du ministère des affaires étrangères seraient des opposants silencieux au régime. Les diplomates qui l'ont discrètement contacté pourraient faire défection. "Ils ne l'ont pas fait jusqu'à présent car ils craignent les représailles, contre eux ou leur famille en Iran. Ils attendent tous de voir comment vont se dérouler les cérémonies de commémoration de la révolution islamique, le 11 février. Ils pourraient prendre position ce jour-là." Le 11 février, lui-même sera invité au Parlement norvégien pour s'adresser aux députés.

    La campagne "Ambassades vertes", relayée par le comité de soutien irano-norvégien, commence à s'activer sur les réseaux sociaux du Web, prépare un site Internet et tente de faire passer ses messages sur les chaînes audiovisuelles occidentales qui diffusent leurs programmes en farsi vers l'Iran. L'idée est d'apporter une aide logistique et judiciaire aux diplomates qui veulent faire défection.

    Pour Mohammed Reza Heydari, le point de non-retour a été passé lors de la répression sanglante des manifestations à Téhéran le jour de l'Achoura le 27 décembre 2009. "Ma conscience ne me permettait plus de faire mon travail et de servir ce régime." Il avoue également avoir été poussé par sa femme et son fils aîné. "Mon fils m'a dit : les gens avec qui tu travailles tuent les nôtres. Comment peux-tu travailler pour ce régime ?"

    Lui-même se posait des questions depuis longtemps. Partisan silencieux de Mir Hossein Moussavi, principal opposant au président Ahmadinejad lors de l'élection de juin 2009, le consul d'Iran évoquait régulièrement la situation politique avec ses collègues de l'ambassade.

    "Nous en parlions souvent ces derniers mois au moment du déjeuner, raconte-t-il. Et ils étaient d'accord avec moi, que le régime ne peut pas faire comme ça." Il avait assuré à ses proches que les manifestations de l'Achoura se dérouleraient dans le calme. Mais, en voyant les forces de sécurité tirer et les morts, il s'est décidé.

    Il avait 12 ans lors de la révolution de 1979, il en a 43 aujourd'hui. "Je me rappelle mon père et mon frère aîné descendant dans la rue, ils me disaient que la liberté arrivait." Après le lycée, il part faire son service militaire, en pleine guerre Iran-Irak (1980-1988). Pour préciser une date, il doit calculer : on est en 1388 selon le calendrier perse, et 1365 c'est l'année où il était soldat. "Donc il y a 23 ans." Il est blessé par des éclats d'obus au bras et à la cuisse et est réformé.

    Sur les conseils de son beau-frère, lui-même employé au ministère des affaires étrangères, Mohammed Reza Heydari présente le concours. "Tu pourras voyager", lui dit-il. Il lui faut trois ans de préparation tant ses blessures le font souffrir. Il finit par réussir le concours. L'ayatollah Khomeyni venait de mourir en 1989, Hachemi Rafsandjani avait été élu président et parlait de réformer le pays après les destructions causées par la guerre. "J'étais un employé modèle", souligne M. Heydari. Lorsqu'il était en poste à l'étranger, des gens l'accusaient de faire du zèle pour le régime. "Je travaille pour vous, leur répondait-il, pas pour le régime."

    Diplomate depuis vingt ans, il a servi en Géorgie puis en Allemagne avant d'arriver il y a trois ans en Norvège, où il vient de demander l'asile politique. Privé de passeport, il ne peut voyager en dépit des invitations qui s'accumulent.

    Son père, ses huit frères et soeurs, sont toujours en Iran, ainsi que la famille de sa femme. "Ils subissent des tracasseries administratives." Trois officiels iraniens sont venus de Téhéran début janvier pour tenter de le convaincre de faire amende honorable et de revenir au pays où il serait accueilli à bras ouverts s'il reconnaissait son erreur, lui a-t-on assuré.

    Mohammed Reza Heydari sourit en évoquant cette éventualité. En Norvège, où la police le surveille pour assurer sa sécurité, il ne se sent pas en danger. "Les gens de l'ambassade d'Iran sont mes amis, dit-il, serein. Ce que je crains, c'est qu'ils soient bientôt rapatriés à Téhéran.

    Par Le Monde
Chargement...
X