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Comme un chamane, Jean Désy

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  • Comme un chamane, Jean Désy

    Le plaisir de recopier un poème ou une prose, un texte bien écrit, je le ressens à l'instant même, et à chaque fois que je m'adonne à cet exercice. Quand on me dit qu'il n'y a plus de poésie québécoise -d'abord, je pose la question: qu'est ce que cette conception?- j'ai alors un point d'interrogation. Peut-être, veut-on signifier par là qu'au Québec, il n'y a plus de poésie digne de ce nom qui se fait ? Et alors j'ai des doutes. Peut-être est-ce vrai? Mais la poésie n'est pas une science si complexe pour que le poéte naturel en moi et l'esprit positif qui me possède se résignent à ce fatalisme.

    Il y a quelques années, pour la journée de la poésie, je me suis retrouvé par hasard sous un chapiteau, en pleine ville, dont j'ai vite fait le tour et à peine écouté les intervenants déclamant leurs vers. La raison de cette précipitation: toujours ce même problème –l'hermétisme qui enferme la poésie; mais ici on pousse l'audace jusqu'à la livrer ainsi au public, qu'on prend pour averti!

    Et là, sous la tente, ma femme me tendit un petit livre pour lequel je me suis emballé; ça s'appelle Ô Nord, mon Amour, de Jean Désy (Éd. Le loup de goutièrre). Je présente, ci-dessous, une pièce y figurant. Dans ce poème, la dernière ligne me touche particulièrement; elle évoque le pouvoir des mots sur l'esprit. J'écris cela suite à l'échange succinct et pour le moins brouillé que j'ai eu avec des intervenants sur le Web au sujet de l'importance des mots et des expressions qu'on choisit pour exprimer nos idées, comme "*****" "masturbation" ou "bouffer", surtout chez des gens soi-disant éduqués et supposés représenter la classe intelligente de nos sociétés. Ils prétendent à la liberté d'expression mais, se faisant, ils s'approprient l'espace publique par leurs insolences et la violence de leurs paroles.

    "Ce soir, je m'ennuie
    Je m'ennuie des enfants qui venaient m'embrasser dans le cou.
    Je m'ennuie des beaux tracas de l'enfance, des joies et des peines, du courage de vivre et de laisser pleurer.
    Rien n'est plus comme avant. Il y a quelque chose de tragique dans cette vie.
    Sans ton oreille, ce soir, je quitterais ce monde pour une Abyssinie où rien ne m'attache.
    Ô Nord, mon Amour, je dis ton nom et mon âme voit le ciel, le soleil et la mer."

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    Si aujourd'hui, je reparle de Jean Désy, c'est que j'ai en main un autre livre de lui, un roman: Le coureur de froid*. J'ai pour habitude de dire qu'un écrivain ou une personnalité, décidant de nous faire part de ses impressions sur la vie, devrait toujours nous exprimer ses rapports avec les animaux; ces rapports constituent un élément essentiel de sa vision sur l'homme et l'univers. On s'en doute, il n'est pas difficile de trouver un tel témoignage chez un auteur, mystique, pourrait-on dire, comme Jean Désy. Les lignes que je vais citer de lui ci-dessous me permettront de compléter un texte que j'ai écrit sur le sujet, notamment ma Lettre à un poète, Fillion, où je faisais allusion aux peuples du grand nord qui doit se nourrir de chair animal. Voici donc ce qu'écrit Jean Désy à ce propos:

    «Pour la première fois de ma vie, j'ai tué une bête plus grosse qu'un lièvre: d'une balle j'ai un jour fauché un caribou en pleine course. J'avais emprunté le véhicule tout-terrain de Tayara. Au Nord, la chasse prend une signification qu'elle ne possède pas au Sud. Les Inuits tuent des animaux pour partager leur vie. Malgré la surréelle beauté d'un tuktu** dans la toundra, j'ai voulu tuer pour me nourrir et nourrir les autres.»

    *Éd. XYZ
    ** Caribou
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