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Le pouvoir et l'opposition se disputent la révolution en Iran

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  • Le pouvoir et l'opposition se disputent la révolution en Iran

    L'Iran s'apprête à fêter, jeudi 11 février, le 31e anniversaire de la révolution islamique.

    Mais, cette année, ce qui est en général une démonstration de "solidarité nationale" dûment orchestrée, risque de tourner à l'épreuve de force entre le pouvoir fondamentaliste en place et le mouvement d'opposition civil, né à la suite de la réélection contestée du président Mahmoud Ahmadinejad en juin 2009. Une épreuve de force avant tout politique et symbolique.

    "Ce sera un test crucial pour les deux camps, chacun va tenter de se légitimer en récupérant le symbole "fondateur" de la révolution, nous a expliqué par téléphone un analyste iranien, ex-diplomate qui a pris ses distances avec le régime. Les partisans d'Ahmadinejad pour montrer qu'ils tiennent la situation en main après tant de mois de contestation et qu'ils sont les vrais fils de la révolution. Les manifestants pour affirmer que le sens de cette célébration de la révolution n'est pas de conforter le pouvoir en place mais, au contraire, d'en contester les dérives, en faisant de cette journée, une journée contre le despotisme : celui du chah en 1979, celui d'Ahmadinejad en 2010."

    A cet effet, les mots d'ordre du mouvement "vert" d'opposition ont été très clairs : manifester mais de façon pacifique pour affirmer la force et l'unité de la contestation mais éviter toute violence qui ne servirait que le régime. Ce sera d'ailleurs la première fois que tous les partis d'opposition réformateurs, les organisations d'étudiants, les féministes ou certains religieux, qui font partie de cette galaxie informelle qu'est encore aujourd'hui le mouvement vert, appellent à manifester en masse.

    Mir Hossein Moussavi, candidat malheureux à l'élection de juin et chef de file de la contestation, a lancé un appel sur son site Kaleme demandant de "ne pas céder à la provocation". "Les pasdarans et les bassidji ne sont pas nos ennemis, écrit-il, nous sommes non violents et célébrons la révolution qui est contre le despotisme."

    Avant la confrontation qui s'annonce, chacun a fourbi ses armes. Dans Téhéran quadrillée par les miliciens et les agents de sécurité venus pour 70 000 d'entre eux des provinces, des haut-parleurs ont été placés, selon des témoins, dans les grandes avenues de façon à couvrir les slogans hostiles. Des parcours balisés par les forces de l'ordre devraient aussi servir à canaliser la foule et la grande place Azadi, où doit s'exprimer M. Ahmadinejad, est devenue un bunker policier.

    Des portraits du guide suprême, Ali Khamenei, qui ornent généreusement de nombreux bâtiments publics en ville auraient été retirés pour éviter qu'ils ne soient détériorés. Enfin, la projection de vidéos et de films de la révolution est "déconseillée" pour éviter tout parallèle avec la réalité actuelle.

    Lors des manifestations du deuil chiite de l'Achoura, le 27 décembre 2009, des miliciens ont tiré sur la foule faisant au moins huit morts et des centaines de blessés. Des manifestants avaient en retour incendié des motos de voltigeurs bassidji. C'est cette double radicalisation qui a inquiété les manifestants, mais aussi les autorités, les incitant à accroître davantage la répression.

    65 journalistes arrêtés

    Depuis décembre, selon un décompte de Human Rights Watch (HRW), plus de 1 000 nouvelles arrestations ont eu lieu (il y en avait eu 4 000 après les événements de juin). Les journalistes ont été visés en particulier, plus de 65 sont sous les verrous, y compris ceux qui appartiennent à des agences officielles ou de simples blogeurs. Des professeurs ont été mis à pied dans certaines villes de province et des étudiants inquiétés.

    De lourdes peines ont enfin été infligées à une trentaine de dirigeants de l'opposition, dont Behzad Nabavi, un ex-ministre proche de M. Moussavi condamné à cinq ans de prison ; ou encore Mohsen Aminzadeh, qui fut secrétaire d'Etat aux affaires étrangères durant la présidence du réformateur Mohammad Khatami, condamné à six ans de réclusion.

    Par ailleurs, après l'exécution, le 28 janvier, de deux monarchistes présentés comme des manifestants, une condamnation à mort a été confirmée mardi en appel. En tout, douze manifestants seraient détenus dans le couloir de la mort. "C'est une intimidation de plus à la veille des célébrations de l'anniversaire ; ils veulent maintenir le pays sous une chape de silence et n'imposer que leur version : Internet a été si ralenti qu'il est difficile à utiliser, ils ont brouillé aussi des émissions venues de l'étranger", constatait Mahmoud Faranghi, un étudiant qui vient de quitter le pays.

    Manifestations devant des ambassades européennes

    Une centaine de miliciens bassidji ont participé à une manifestation "hostile" à l'Italie, mardi 9 février à Téhéran, et tenté de prendre d'assaut l'ambassade, en criant "Mort à l'Italie, mort à Berlusconi", a déclaré, mardi à Rome, le chef de la diplomatie italienne, Franco Frattini, lors d'une audition au Sénat. M. Frattini a annoncé qu'en conséquence l'ambassadeur d'Italie ne participerait pas aux cérémonies prévues à Téhéran pour l'anniversaire de la révolution islamique, le 11 février. Selon M. Frattini, des attaques similaires ont eu lieu contre les ambassades de France et des Pays-Bas. Il a indiqué que "des contacts sont en cours au niveau européen" pour parvenir "à une position commune" et "donner un signal de forte préoccupation".

    Par Marie-Claude Decamps, Le Monde
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