Annonce

Réduire
Aucune annonce.

Ravitailleurs : comment le Pentagone a sauvé le soldat Boeing

Réduire
X
 
  • Filtre
  • Heure
  • Afficher
Tout nettoyer
nouveaux messages

  • Ravitailleurs : comment le Pentagone a sauvé le soldat Boeing

    AINSI donc, Boeing sera seul en piste pour le contrat des ravitailleurs américains. En décidant hier en fin de soirée de pas présenter d'offre pour ce contrat à 35 milliards de dollars, EADS et son partenaire Northrop n'ont fait que tirer les conclusions d'une situation qu'ils se sont longtemps refusé à voir: ce deal là était ingagnable. Louis Gallois, présentant ce matin les résultats 2009 d'EADS, préférait encore en plaisanter: "L'US Air Force va avoir un ravitailleur moins performant que ceux de l'Arabie saoudite ou de l'Australie", expliquait le président exécutif du groupe européen, sourire aux lèvres.

    Enième preuve du protectionnisme américain? Certainement. Mais pas seulement: il s'agissait surtout, pour le Pentagone, de préserver un soldat Boeing pas au mieux de sa forme. Qu'aurait signifié une victoire du tandem EADS-Northrop? D'abord, la fermeture de la ligne d'assemblage du vieux B767, qui sert de base au ravitailleur proposé par Boeing. La version civile, cannibalisée par les B777 et B787 bien plus récents, a déjà une roue dans la tombe: seulement 7 commandes l'année dernière, aucune depuis le début de l'année. Le contrat des ravitailleurs va permettre à Boeing de prolonger la vie de cette ligne d'assemblage à Everett (Washington).

    L'autre raison du choix -pas assumé- du Pentagone, c'est qu'une défaite de Boeing aurait littéralement bouté le géant américain hors de l'US Air Force. Le constructeur de Seattle a perdu presque tous les contrats récents: les nouveaux chasseurs F22 et F35 sont sous maîtrise d'œuvre du rival Lockheed Martin. L'appareil de transport militaire C17 est menacé, suite à la décision du secrétaire à la défense Robert Gates de ne plus en commander à Boeing. Quant au marché des drones, nouvelle priorité du Pentagone, Boeing y est à la peine face aux leaders du secteur, comme General Atomics (drones Predator, actuellement en Afghanistan), Northrop Grumman (Global Hawk) ou même les industriels israéliens comme IAI.

    En calibrant l'appel d'offres des ravitailleurs pour l'appareil de Boeing, le Pentagone a donc fait de la politique industrielle. Mais discrètement, à l'américaine, en inversant les critères de choix de l'appareil par rapport à l'ancien appel d'offres qui avait vu la victoire de l'A330. Gageons que, tout aussi discrètement, le Pentagone compensera le manque à gagner pour le concurrent américain Northrop en lui accordant d'autres contrats ces prochains mois.

    C'est une sacrée leçon de pragmatisme -et de protectionnisme- que viennent de donner les Etats-Unis à l'Europe. A l'heure où la Direction générale de l'armement (DGA) envisage sérieusement d'acheter des drones américains Predator B pour l'armée française, au détriment du programme de drones 100% européen Talarion défendu par EADS, cette leçon mérite certainement d'être retenue.

    Vincent Lamigeon, journaliste à Challenges, mardi 9 mars 2010.
    Si vous ne trouvez pas une prière qui vous convienne, inventez-la.” Saint Augustin
Chargement...
X