On en oublierait presque que des cinémas existent au Maghreb tant aujourd’hui, on ne leur accorde plus aucune importance. Dans les années d’enthousiasme, les années 1970, des films, cinéastes, des courants cinématographiques même émergeaient du Maghreb et se faisaient remarquer dans les festivals de cinéma les plus prestigieux de la planète.Puis, peut-être suivant la courbe des politiques culturelles de chaque pays, pour ne pas dire le politique tout court, tel pays fléchit, bon an mal an, et tel autre rebondit, ainsi de suite.
En tout cas, l’Algérie ne s’est jamais relevée de la privatisation de ses organismes de cinéma. Si l’étatisation des moyens de production engendrait une certaine nomenklatura du cinéma, la privatisation tue dans l’œuf les talents qui peuvent surgir avec l’aide de la puissance publique. Avec le déclin du cinéma, on a connu le déclin du regard et des études sur le cinéma. Plus grand-chose à voir, et presque autant à lire.C’est pourquoi, ce livre de Denise Brahimi est un réconfort. Le cinéma maghrébin existe, on l’y rencontre.
50 ans de cinéma maghrébin,Denise Brahimi,
Editions Minerve.
A quels besoins répond votre livre sur 50 Ans de cinéma maghrébin (Ed. Minerve) ?
Denise Brahimi : Ce besoin me semble évident car les cinémas du Maghreb sont encore trop peu connus. Le travail principal auquel il faut rendre hommage est celui de tous les organisateurs de festivals, rencontres, journées ou semaines qui sont consacrés à des films maghrébins, et il y en a un certain nombre en France, pas seulement à Paris ou en banlieue, sans parler de ce qui se fait au Maghreb, au prix d'un dévouement incroyable car les difficultés sont énormes. J'ai pensé compléter le travail de ces organisateurs, dans la mesure de mes moyens, en apportant au public l'appui d'un livre, dont le but, que j'espère évident, est de montrer le grand intérêt des films maghrébins.
Vous présentez les cinémas et les films maghrébins par pays. Quels sont les éléments communs et les différences entre les pays en matière de production et de contenu des films ?
Il y a, en effet, une première partie du livre où je présente les films par pays pour les mettre en rapport avec l'histoire de chacun d'eux, qui a des aspects différents. En particulier, des trois pays concernés, l'Algérie est le seul qui ait dû mener une longue guerre pour son indépendance, ce qui ne peut manquer d'avoir des conséquences sur le cinéma. Mais toutes les autres parties du livre abordent les problèmes autrement, par thème ou par genre cinématographique, et là, je prends des exemples dans les trois pays.
En réalité, s'agissant de création artistique, c'est chaque film qui est différent et qui donc doit être analysé pour lui-même avant toute autre considération. Mais si l'on compare le cinéma maghrébin avec le cinéma français ou américain ou tout autre, alors il est évident qu'il y a un certain nombre de caractéristiques communes à la filmographie des trois pays, et j'ai pris plusieurs occasions au cours de mon livre d'insister sur ce point.
S'agissant d'un cinéma qui a toujours eu une ambition sociologique voire politique, observez-vous une évolution des thématiques en cinquante ans.
Comment se décrit cette évolution ?
Oui, incontestablement, il y a une évolution, et même rapide, ce qui est bien la preuve que la création est vivante et qu'elle colle au plus près des préoccupations ou des angoisses que le public peut reconnaître à chaque moment. Cinquante ans, c'est long dans des pays où la natalité est forte, où le temps des indépendances ne correspond plus à l'expérience personnelle des nouvelles générations.
Pour ne prendre qu'un exemple des préoccupations contemporaines, on sait à que point le problème des harraga a pris une place prépondérante dans les sociétés du Maghreb, et il est évident que cette importance se retrouve dans beaucoup de films récents. Cependant, il faut peut-être y voir la forme la plus actuelle de ce qui a toujours été un thème fondamental dans ces cinémas, c'est-à-dire les problèmes de société et le dénuement total avec lequel les citoyens sont obligés de les aborder, ce qui évidemment peut donner aux films des tons très différents, tantôt tragiques, tantôt marqués par l'humour noir et la dérision.
Vous présentez aussi les films par thème. Quels sont les thèmes les plus marquants de votre recherche ?
J'espère ne pas céder à une tendance féministe en vous disant qu'à mon avis, au sein de ce que je viens d'appeler les problèmes sociaux, c'est tout ce qui touche à la condition féminine qui est la préoccupation majeure des cinéastes maghrébins, mais en fait, ce terme de «condition féminine » est un peu trop abstrait pour désigner ce qui prend, dans les films, la forme de femmes toujours riches de vie et de personnalité et souvent incarnées par des actrices si remarquables qu'on préfère n'en citer aucune dans cet article car il faudrait les citer toutes !
Le niveau de protestation est-il égal dans tous les pays ?
Il me semble que oui, ce qui est forcément une appréciation personnelle car il s'agit d'un niveau qui ne se mesure pas. Mais il faut ajouter que les manières sont variables selon les pays — étant entendu que de toute façon, les cinéastes sont obligés de tenir compte plus ou moins de la censure —, ce qui se traduit souvent par une autocensure préalable car le cinéma est un art fort coûteux où l'on ne peut risquer impunément beaucoup d'argent si le film n'a aucune chance d'être montré.
En tout cas, l’Algérie ne s’est jamais relevée de la privatisation de ses organismes de cinéma. Si l’étatisation des moyens de production engendrait une certaine nomenklatura du cinéma, la privatisation tue dans l’œuf les talents qui peuvent surgir avec l’aide de la puissance publique. Avec le déclin du cinéma, on a connu le déclin du regard et des études sur le cinéma. Plus grand-chose à voir, et presque autant à lire.C’est pourquoi, ce livre de Denise Brahimi est un réconfort. Le cinéma maghrébin existe, on l’y rencontre.
50 ans de cinéma maghrébin,Denise Brahimi,
Editions Minerve.
A quels besoins répond votre livre sur 50 Ans de cinéma maghrébin (Ed. Minerve) ?
Denise Brahimi : Ce besoin me semble évident car les cinémas du Maghreb sont encore trop peu connus. Le travail principal auquel il faut rendre hommage est celui de tous les organisateurs de festivals, rencontres, journées ou semaines qui sont consacrés à des films maghrébins, et il y en a un certain nombre en France, pas seulement à Paris ou en banlieue, sans parler de ce qui se fait au Maghreb, au prix d'un dévouement incroyable car les difficultés sont énormes. J'ai pensé compléter le travail de ces organisateurs, dans la mesure de mes moyens, en apportant au public l'appui d'un livre, dont le but, que j'espère évident, est de montrer le grand intérêt des films maghrébins.
Vous présentez les cinémas et les films maghrébins par pays. Quels sont les éléments communs et les différences entre les pays en matière de production et de contenu des films ?
Il y a, en effet, une première partie du livre où je présente les films par pays pour les mettre en rapport avec l'histoire de chacun d'eux, qui a des aspects différents. En particulier, des trois pays concernés, l'Algérie est le seul qui ait dû mener une longue guerre pour son indépendance, ce qui ne peut manquer d'avoir des conséquences sur le cinéma. Mais toutes les autres parties du livre abordent les problèmes autrement, par thème ou par genre cinématographique, et là, je prends des exemples dans les trois pays.
En réalité, s'agissant de création artistique, c'est chaque film qui est différent et qui donc doit être analysé pour lui-même avant toute autre considération. Mais si l'on compare le cinéma maghrébin avec le cinéma français ou américain ou tout autre, alors il est évident qu'il y a un certain nombre de caractéristiques communes à la filmographie des trois pays, et j'ai pris plusieurs occasions au cours de mon livre d'insister sur ce point.
S'agissant d'un cinéma qui a toujours eu une ambition sociologique voire politique, observez-vous une évolution des thématiques en cinquante ans.
Comment se décrit cette évolution ?
Oui, incontestablement, il y a une évolution, et même rapide, ce qui est bien la preuve que la création est vivante et qu'elle colle au plus près des préoccupations ou des angoisses que le public peut reconnaître à chaque moment. Cinquante ans, c'est long dans des pays où la natalité est forte, où le temps des indépendances ne correspond plus à l'expérience personnelle des nouvelles générations.
Pour ne prendre qu'un exemple des préoccupations contemporaines, on sait à que point le problème des harraga a pris une place prépondérante dans les sociétés du Maghreb, et il est évident que cette importance se retrouve dans beaucoup de films récents. Cependant, il faut peut-être y voir la forme la plus actuelle de ce qui a toujours été un thème fondamental dans ces cinémas, c'est-à-dire les problèmes de société et le dénuement total avec lequel les citoyens sont obligés de les aborder, ce qui évidemment peut donner aux films des tons très différents, tantôt tragiques, tantôt marqués par l'humour noir et la dérision.
Vous présentez aussi les films par thème. Quels sont les thèmes les plus marquants de votre recherche ?
J'espère ne pas céder à une tendance féministe en vous disant qu'à mon avis, au sein de ce que je viens d'appeler les problèmes sociaux, c'est tout ce qui touche à la condition féminine qui est la préoccupation majeure des cinéastes maghrébins, mais en fait, ce terme de «condition féminine » est un peu trop abstrait pour désigner ce qui prend, dans les films, la forme de femmes toujours riches de vie et de personnalité et souvent incarnées par des actrices si remarquables qu'on préfère n'en citer aucune dans cet article car il faudrait les citer toutes !
Le niveau de protestation est-il égal dans tous les pays ?
Il me semble que oui, ce qui est forcément une appréciation personnelle car il s'agit d'un niveau qui ne se mesure pas. Mais il faut ajouter que les manières sont variables selon les pays — étant entendu que de toute façon, les cinéastes sont obligés de tenir compte plus ou moins de la censure —, ce qui se traduit souvent par une autocensure préalable car le cinéma est un art fort coûteux où l'on ne peut risquer impunément beaucoup d'argent si le film n'a aucune chance d'être montré.
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