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Rives en chamade, Danièle Maoudj

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  • Rives en chamade, Danièle Maoudj

    Presque chaque année, Danièle Maoudj est l’hôte du Festival du film amazigh qu’accueille l’Algérie, depuis dix ans. Pour l’édition 2010, elle ne faillira pas à sa mission puisqu’elle est invitée, entre autres, à intervenir lors du colloque portant sur la célébration de la vie et l’oeuvre de Mouloud Feraoun, disparu le 15 mars 1962.

    Un colloque qui débutera demain, à Tizi Ouzou sous le générique «Mouloud Feraoun l’instituteur-écrivain humaniste». La communication de Danièle Maoudj aura pour thème «Les chemins qui montent m’ont fait gravir les plus hautes cimes de la réconciliation».

    «Mon pays bat la chamade de l’origine et du retour», écrit cette attachante et sympathique femme. Si l’Algérie chez Kateb Yacine se confond avec l’image de la bien-aimée Nedjma, chez Danièle Maoudj, sa Corse natale porte étrangement les stigmates de la mère, alors que le sang kabyle coule immanquablement dans ses veines. Femme des deux rives, Danièle Maoudj de père kabyle et de mère corse, a trouvé dans la poésie sa sève d’expression. La vie et la mort, le granite mais aussi la force du caractère, la quête de l’identité et le soleil comme insigne d’espoir nourrissent les mots de cette poétesse. Métisse insoumise comme un si Mhand u M’hand, Danièle Maoudj se veut tournée vers l’autre résolument méditerranéenne. Rives en chamade est le premier recueil de poésie de cette femme universitaire, essayiste, enseignante à l’université de Corse qui fut également co-fondatrice du festival du film des cultures méditerranéennes de Bastia et organisatrice de rencontres littéraires à l’université de Corse.

    Elle écrit à la page 38 dans Emotion double: «Pleure tes deux continents, La Corse et l’Algérie. Ris de tes deux continents. L’Algérie et la Corse. Moque-toi de tes deux cibles. Exige tes deux amours. Je veux tout en double. Deux fois autant. Double. Trouble du double?»
    Aussi, dans Méditerranéenne je suis, Danièle écrit encore: «Par ma silhouette et ma peau matinée. Kabyle par les épices de mon regard. Corse par les sonorités de la langue. Kabyle-corse par la cuisine rouge. Unie par l’arba barona et le cumunu. Française par Villon et Louise Michel. Fardées par toutes les intempéries. Je suis femme.» A la solitude et le «bleu de l’exil», du sentiment de vacuité succèdent le soleil, le miel des châtaignes et l’huile d’olive, pour chanter le faste de la vie.

    Les souvenirs de Danièle sont souvent mêlés d’amertume, entre questionnement sur sa place au sein de la tribu et ses vagabondages d’un aéroport à un autre.

    Impénitence mise à nu crépusculaire, Danièle se dévoile aussi bien sensuelle que frondeuse, amoureuse que rêveuse, malgré l’absence du père Arezki dont elle demande de pardonner les fautes des autres, elle qui continue à croire, espérer et rêver de la paix, «pourvu qu’on est la pirogue de l ‘imaginaire», dit-elle.

    Riche de son métissage, Danièle écrit ici français et traduit quelques vers en corse, des mots d’amour et d’errements pour conjurer le chagrin et jouir de la liberté. Comme tout ces enfants qui grandissent dans une île, ils sont à la fois pétris de mélancolie et de silence, en perpétuel voyage en eux-mêmes vers les autres.

    Une brisure vagabonde qui se déchaîne, palpitante, par les mots et regagne le récif de la solitude et des maux pour renaître inlassablement et résolument vivant entre ciel et terre. Car comme dirait René Char «un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver».

    Edité dans la collection Poètes des cinq continents, chez l’Harmattan, ce recueil de poésie, Rives en chamade est préfacé par Nedim Gürsel, écrivain turc vivant à Paris et la postface est signée Ernest Pépin, écrivain guadeloupéen. Deux êtres qui savent ce que exil et métissage veulent dire.

    Par O. HIND, L'Expression
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