Des revues scientifiques prestigieuses, dont Science (2) et Nature (3), ont consacré à la Recherche-Developpement dans le Monde musulman et le Monde arabe une série d’articles qui montrent que ces pays, y compris le nôtre, sont tout simplement absents de ce champ de bataille. Dans son éditorial, la revue anglaise Nature note qu’elle s’est trouvée dans l’incapacité de produire une analyse documentée sur ce sujet, les données statistiques étant inexistantes, y compris dans la très riche base de données de l’OCI (Organisation de la Conférence Islamique). Elle note également que lorsque ces données sont disponibles, leur consistance est si faible qu’elles ne peuvent apparaître sur les graphiques des bilans comparatifs établis entre nations. Dans le Monde musulman, 1,3 milliards de personnes réparties sur 57 pays et 3 continents, les dépenses de recherche représentent globalement 0,34% du PIB, bien en deçà de la moyenne mondiale qui est de 2,36% (3-6). Seules la Turquie et la Malaisie s’élèvent à ce niveau, alors que contrairement aux apparences les pays du Golfe n’investissent pas, en moyenne et par ratio au PIB, plus que les pays musulmans dits pauvres, tels le Burkina Faso, le Soudan ou encore l’Ouzbékistan. Quant à l’Algérie, elle aurait investi 0,225% de son PIB durant la période 1996-2003, loin derrière l’Egypte (1,54%) et même le Maroc (0,469%) et la Tunisie (0,344%), aux efforts relativement insuffisants mais largement supérieurs aux nôtres. Les autres indicateurs significatifs pour évaluer la R-D sont les budgets alloués à la formation, le nombre de chercheurs et de techniciens disponibles, les publications scientifiques, les brevets et l’exportation de nouvelles technologies. A l’échelle mondiale, 15 des 20 dernières places en matière de dépenses de formation sont occupées par des pays musulmans. Dans l’ensemble de ces mêmes pays, les données de la Banque mondiale indiquent que le nombre moyen de chercheurs est de 500/million d’habitants, les chiffres algériens ne sont pas disponibles à ce niveau mais selon les déclarations publiques des responsables du secteur (14.000 chercheurs), notre pays est encore plus démuni et se situe à la fois en dessous de la moyenne des pays musulmans et loin derrière la moyenne de 5.000/million d’habitants des pays développés. Le nombre de publications dans les pays musulmans (13/million d’habitants) est également faible par rapport à la moyenne mondiale (137/million d’habitants) que seules atteignent la Turquie et l’Iran. En recherche biomédicale, par exemple, notre pays (370 publications comptabilisées entre 1995 et 2004) se classe derrière le Soudan (421), un pays en guerre depuis des décennies à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières, et loin derrière l’Egypte (5532), le Maroc (2281) et la Tunisie (1994) (7). Quant aux dépôts de brevets scientifiques, la Malaisie occupe une place honorable avec 58% d’exportation de nouvelles technologies, alors que le Maroc et l’Indonésie émergent à peine avec plus de 10%. Notre pays est là aussi absent. En amont, dans la formation supérieure, l’université de Shanghai établit régulièrement un classement, largement reconnu, des 500 meilleures universités du Monde dont certaines dépensent jusqu’à 80 0000 US$/étudiant et par an, soit environ 4 millions de nos centimes par étudiant et par jour ouvrable. Jusqu’à maintenant, aucune université arabe n’a figuré dans ce classement.
Un passé glorieux, un futur des plus incertains
Un récent travail de recherche, utilisant des images de résonance magnétique sur de jeunes volontaires, montre que la région du cerveau qui pense le futur est aussi celle de la mémoire, donc du passé. Ce qui explique de manière spectaculaire pourquoi, sans mémoire et donc sans passé, les amnésiques ne peuvent se projeter dans l’avenir. Le Monde musulman se réfère très souvent à son âge d’or mais dans l’amnésie ou sans analyse sérieuse à la fois des raisons objectives de sa splendeur passée et de la décadence qui l’a suivie, refusant ainsi de considérer son présent, tout en hypothéquant son avenir. Au delà la puissance de sa foi, l’apogée de la civilisation musulmane est directement liée à sa maîtrise des sciences, des arts et de la culture et à ses avancées décisives dans tous les domaines : mathématiques, philosophie, médecine, chimie, astronomie… Ce développement prodigieux a été rendu possible par une ouverture totale sur le Monde et par l’intégration systématique de tout ce qu’il pouvait lui fournir de positif, pour justement se projeter dans l’avenir. La tolérance, le raisonnement critique, la primauté de la science et la liberté de pensée étaient alors la règle des Califes abbassides : Al Mansur, Harun Al Rashid et Al Ma’mun qui, entre 754 et 833, ont posé les jalons du rayonnement qui a permis pendant des siècles à une pléthore de savants, écrivains, poètes et artistes musulmans de briller au firmament et sur tous les registres : Al Razi et El Khawarizmi en algèbre et en trigonométrie, Ibn Rochd en logique et dans la relation religion-science, Ibn Khaldun a qui on doit les bases de la sociologie moderne, Ibn Sina dont l’œuvre monumentale a fait autorité pendant près de 6 siècles en médecine et en philosophie de l’éthique (2,3,7)… Depuis, l’abandon irrémédiable de ses valeurs cardinales par le Monde musulman, et en particulier par les pays arabes, les a plongé dans un repli sur eux-mêmes et dans un immobilisme stupéfiant et suicidaire. Désormais relégués sur le bas côté de l’Histoire, ils regardent impuissants passer le train du progrès dont ils ont été pourtant une puissante locomotive. La gravité de la situation dans le Monde arabe a été clairement confirmée par un rapport signé par un collectif de chercheurs arabes sous l’égide du PNUD en 2003 et qui avait fait à sa sortie beaucoup de remous. Ses conclusions vraiment accablantes ont été abondamment commentées, et nous ne revenons que sur un de ses nombreux constats qui permet de comprendre la situation actuelle : moins d’un étudiant arabe sur 20 suit des études scientifiques contre 1 sur cinq en Corée du Sud qui a produit en 20 ans (1980-2000) 41 fois plus de brevets que les 22 pays arabes réunis.
El watan.
Un passé glorieux, un futur des plus incertains
Un récent travail de recherche, utilisant des images de résonance magnétique sur de jeunes volontaires, montre que la région du cerveau qui pense le futur est aussi celle de la mémoire, donc du passé. Ce qui explique de manière spectaculaire pourquoi, sans mémoire et donc sans passé, les amnésiques ne peuvent se projeter dans l’avenir. Le Monde musulman se réfère très souvent à son âge d’or mais dans l’amnésie ou sans analyse sérieuse à la fois des raisons objectives de sa splendeur passée et de la décadence qui l’a suivie, refusant ainsi de considérer son présent, tout en hypothéquant son avenir. Au delà la puissance de sa foi, l’apogée de la civilisation musulmane est directement liée à sa maîtrise des sciences, des arts et de la culture et à ses avancées décisives dans tous les domaines : mathématiques, philosophie, médecine, chimie, astronomie… Ce développement prodigieux a été rendu possible par une ouverture totale sur le Monde et par l’intégration systématique de tout ce qu’il pouvait lui fournir de positif, pour justement se projeter dans l’avenir. La tolérance, le raisonnement critique, la primauté de la science et la liberté de pensée étaient alors la règle des Califes abbassides : Al Mansur, Harun Al Rashid et Al Ma’mun qui, entre 754 et 833, ont posé les jalons du rayonnement qui a permis pendant des siècles à une pléthore de savants, écrivains, poètes et artistes musulmans de briller au firmament et sur tous les registres : Al Razi et El Khawarizmi en algèbre et en trigonométrie, Ibn Rochd en logique et dans la relation religion-science, Ibn Khaldun a qui on doit les bases de la sociologie moderne, Ibn Sina dont l’œuvre monumentale a fait autorité pendant près de 6 siècles en médecine et en philosophie de l’éthique (2,3,7)… Depuis, l’abandon irrémédiable de ses valeurs cardinales par le Monde musulman, et en particulier par les pays arabes, les a plongé dans un repli sur eux-mêmes et dans un immobilisme stupéfiant et suicidaire. Désormais relégués sur le bas côté de l’Histoire, ils regardent impuissants passer le train du progrès dont ils ont été pourtant une puissante locomotive. La gravité de la situation dans le Monde arabe a été clairement confirmée par un rapport signé par un collectif de chercheurs arabes sous l’égide du PNUD en 2003 et qui avait fait à sa sortie beaucoup de remous. Ses conclusions vraiment accablantes ont été abondamment commentées, et nous ne revenons que sur un de ses nombreux constats qui permet de comprendre la situation actuelle : moins d’un étudiant arabe sur 20 suit des études scientifiques contre 1 sur cinq en Corée du Sud qui a produit en 20 ans (1980-2000) 41 fois plus de brevets que les 22 pays arabes réunis.
El watan.
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