Par : Mustapha Hammouche
Dans les années 1980, Kindy, marque à l’époque emblématique du “made in France”, avait popularisé le slogan “Les chaussettes ne se cachent plus”. En matraquant le consommateur de cette devise, Kindy a beaucoup contribué à libérer les chaussettes de la honteuse discrétion qu’on leur imposait traditionnellement. Lentement mais sûrement. L’ère Sarkozy a fait de même en libérant le sentiment raciste qui, aujourd’hui, s’exprime ouvertement et au quotidien.
C’est laborieusement que Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, a tenté d’expliquer qu’il parlait de l’Auvergnat là où il parlait de “l’Arabe” quand il déclarait, en septembre 2009, qu’“il en faut toujours un” et que “quand il y en a un, ça va ; c’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes”.
Si la présence fortuite d’une caméra de téléphone mobile l’obligea à cette contorsion sémantique, le mal était fait.
Depuis, et jusqu’à la dernière déclaration télévisée du journaliste et écrivain Eric Zemmour pour qui “la plupart des trafiquants sont noirs et arabes, c'est comme ça, c'est un fait”, le racisme, en France, ne se cache plus.
Le propos antimaghrébin ou antimusulman n’est plus le monopole de racistes invétérés qui assument leur haine, comme les Le Pen ou comme les écrivains Houellebecq (“(…) Quand on lit le Coran, on est effondré... effondré. La Bible, au moins, c'est très beau, parce que les Juifs ont un sacré talent littéraire...”) ou Orsana Fallaci (“Les fils d'Allah se multiplient comme des rats”).
Ce sont des voix d’apparence responsables qui, jusqu’ici, ont su maîtriser leur ressentiment, qui ne se sentent plus en devoir de retenir leurs violents débordements. Qui s’attendait au dérapage de Gaudin sur les “quinze à vingt mille algériens qui déferlent dans les rues de Marseille” et que le débat sur l’identité française, qui n’a pas pu dépasser le point de fixation des “musulmans de France”, a rendu possible ?
Mais bien avant qu’il ne jette, sous prétexte de débat, les immigrés et les Français issus de l’immigration africaine, et maghrébine notamment, en pâture à qui veut bien déblatérer sur le péril noir, arabe ou musulman, Sarkozy leur avait montré la voie d’une “France décomplexée”.
Et pour l’exemple, il alla servir le modèle de discours qui accable l’Africain de sa “nature” d’homme intellectuellement paresseux et de raté de l’histoire. Voici un morceau choisi de cette allocution de Dakar de triste mémoire : “Le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas encore rentré dans l'histoire... a besoin de croire plutôt que de comprendre, de ressentir plutôt que de raisonner... Jamais il ne s'élance vers l'avenir... Jamais il ne lui vient à l'idée de sortir de la répétition pour s'inventer un destin... Dans cet univers où la nature commande tout, l’homme reste immobile au milieu d’un ordre immuable où tout est écrit d’avance... Il n’y a de place ni pour l’aventure humaine ni pour l’idée de progrès… La réalité de l’Afrique, c’est celle d’un grand continent qui a tout pour réussir et qui ne réussit pas parce qu’il n’arrive pas à se libérer de ses mythes.”
L’offense et le verbe racistes étant élevés au rang de marques de sincérité, les rancœurs s’engouffrèrent dans la brèche béante de l’espace public en France. Comme les chaussettes Kindy de toutes les couleurs.
M. H.
LIBERTE
Dans les années 1980, Kindy, marque à l’époque emblématique du “made in France”, avait popularisé le slogan “Les chaussettes ne se cachent plus”. En matraquant le consommateur de cette devise, Kindy a beaucoup contribué à libérer les chaussettes de la honteuse discrétion qu’on leur imposait traditionnellement. Lentement mais sûrement. L’ère Sarkozy a fait de même en libérant le sentiment raciste qui, aujourd’hui, s’exprime ouvertement et au quotidien.
C’est laborieusement que Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, a tenté d’expliquer qu’il parlait de l’Auvergnat là où il parlait de “l’Arabe” quand il déclarait, en septembre 2009, qu’“il en faut toujours un” et que “quand il y en a un, ça va ; c’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes”.
Si la présence fortuite d’une caméra de téléphone mobile l’obligea à cette contorsion sémantique, le mal était fait.
Depuis, et jusqu’à la dernière déclaration télévisée du journaliste et écrivain Eric Zemmour pour qui “la plupart des trafiquants sont noirs et arabes, c'est comme ça, c'est un fait”, le racisme, en France, ne se cache plus.
Le propos antimaghrébin ou antimusulman n’est plus le monopole de racistes invétérés qui assument leur haine, comme les Le Pen ou comme les écrivains Houellebecq (“(…) Quand on lit le Coran, on est effondré... effondré. La Bible, au moins, c'est très beau, parce que les Juifs ont un sacré talent littéraire...”) ou Orsana Fallaci (“Les fils d'Allah se multiplient comme des rats”).
Ce sont des voix d’apparence responsables qui, jusqu’ici, ont su maîtriser leur ressentiment, qui ne se sentent plus en devoir de retenir leurs violents débordements. Qui s’attendait au dérapage de Gaudin sur les “quinze à vingt mille algériens qui déferlent dans les rues de Marseille” et que le débat sur l’identité française, qui n’a pas pu dépasser le point de fixation des “musulmans de France”, a rendu possible ?
Mais bien avant qu’il ne jette, sous prétexte de débat, les immigrés et les Français issus de l’immigration africaine, et maghrébine notamment, en pâture à qui veut bien déblatérer sur le péril noir, arabe ou musulman, Sarkozy leur avait montré la voie d’une “France décomplexée”.
Et pour l’exemple, il alla servir le modèle de discours qui accable l’Africain de sa “nature” d’homme intellectuellement paresseux et de raté de l’histoire. Voici un morceau choisi de cette allocution de Dakar de triste mémoire : “Le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas encore rentré dans l'histoire... a besoin de croire plutôt que de comprendre, de ressentir plutôt que de raisonner... Jamais il ne s'élance vers l'avenir... Jamais il ne lui vient à l'idée de sortir de la répétition pour s'inventer un destin... Dans cet univers où la nature commande tout, l’homme reste immobile au milieu d’un ordre immuable où tout est écrit d’avance... Il n’y a de place ni pour l’aventure humaine ni pour l’idée de progrès… La réalité de l’Afrique, c’est celle d’un grand continent qui a tout pour réussir et qui ne réussit pas parce qu’il n’arrive pas à se libérer de ses mythes.”
L’offense et le verbe racistes étant élevés au rang de marques de sincérité, les rancœurs s’engouffrèrent dans la brèche béante de l’espace public en France. Comme les chaussettes Kindy de toutes les couleurs.
M. H.
LIBERTE
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